des lignés tracées par Buffon , n’ont aucuns
des caraâères qui puiffent nous déterminer
à les ranger parmi les pays appartenans à
l’ancienne terre de Rouelle dans aucune
des parties du monde. Car ces mêmes
..obfervations prouvent en particulier que
dans le Tucuman y le Pérou & le Mexique,
il y a des contrées qui appartiennent à la
nouvelle terre , quoiqu’elles foient affez
élevées & voilines de la ligne qui partage
le contânent de l’Amérique en deux parties
.égales fuivant le cadre imaginé par Buffon.
Nous favons, par des récits exaâs , que
le pays des Amazones , la Guyane & le
Canada qu’il place parmi les terres nouvelles
, renferment des contrées dont les
unes appartiennent à l’ancienne terre, &
les autres à la nouvelle*
Les mêmes caraâères diflindifs erronés
£b trouvent auffi appliqués à l’Afrique ;
car le foi de l’Egypte , de la Barbarie &
des côtes occidentales de cette partie du
monde jufqu’au Sénégal , que Buffon regarde
comme des terres nouvelles, font
en très-grande partie de l’ancienne terre,
& furtout ce grand maflîf fitué à la droite
du Nil, entièrement compofé du plus beau
granit rofacé que l’on connoilïe , avec des
veines- de fchorl noir ou de gabbro. Au
contraire «les deux bords de la baffe vallée
du Nil qui approchent du canton des
Pyramides- & du Caire font certainement
partie de la nouvelle terre, parce qu’ils
offrent des couches horifontales d’une
pierre calcaire, farcie de coquilles & d’un
grain fort gros. Nous parlons à ceux qui
ont lu avec attention les voyageurs, &
aux naturaliftes qui ont vifité ces contrées.
Si nous paffons en A fie,,, dirigés- par
Buffon , Tl nous- dira que l’Arabie , la
Perfe & Ta Tartarie font dès terres anciennes
: cependant , bien éclairés par
Rouelle & inllruits par les, voyageisrs ,
nous y ' trouverons de grandes contrée*
appartenantes à la-nouvelle terre dans les
deux Arabie*. co mme dans la Perfe.
Paflas & beaucoup d'autres voyageurs
nous ont apprisfur cette partie du monde,
des détails fi précis fur lanature des terreins
& des fols, qu’ils démontrent la fauffeté
des aliénions de Buffon : & même d’après
les. réfultats de ces obfervations, nous
pourrons un jour , fuivant la méthode de
Rouelle, circonfcrire les limites de l’ancienne
& de la nouvelle terre en Alïe.
Car ces deux fortes de mallïfs s’y trouvent
l’un & l’autre & certainement dans
une pofition bien indépendante de la ligne
du cadre de Buffon. Il manque , il efl
vrai, aux obfervations de Pallas & de fes
collègues , des cartes qui fixent les limites
des maffifs qui peuvent nous intéreffer;
ce font ces omiffions qui ont Taillé tant
d’incertitude dans les travaux des voyageurs
Ruffes ; tant de vague dans les réfultats
qu’ils ont voulu nous en donner, tant de
difficulté de les affu jettir- à des chartes exades
& détaillées.
le trouve les mêmes incôrrvéïiiem dans
les obfervations d’un profeileur qui nous
auroit rendu de grands fervices & à l’hif-
toire naturelle de Ta terre , s’il eût fait
rédiger fous lès yeux une carte raifonnée
de la Suiffe ou de la partie des Alpes qui
avoifine l’Etat de Genève. Je le répète-,
ce double travail des obfervations & des
cartes auroit plus avancé la feiehce naturelle
que le fyllême fur la théorie, de la
terre dont ce profeileur nous menace..
Quoique Buffon foit plus réferyé dans
fes dédiions fur la confiitution phyfique
de l’Europe , il regarde cependant, en
général, cette partie du monde comme
une terre nouvelle : mais, nous trouvons
en Europe que nous connoiffons mieux
quelesautres parties du monde, de grands
maffifs qui appartiennent à l’ancienne terre ;
en mêmetems que nous pouvons parcourir
autour de cette vieille charpente, de vaftes
contrées-,qui font viliblement du département
de la nouvelle terre.
C'elt ainfi que d’après des obfervations
dont la marche peut être dirigée fur les
principes de Rouelle, les échafaudages &
les faulles fuppofitions de Buffon difpa-
rqiffent entièrement. Je conclus encore
de cette difcuffion, que c’efl en s’attachant
à.Ta. double bâfe que j’ai tâché d’établir
ci-dev.ant,qu’on pourraéviter de pareilles
méprifes, & qu’on écartera toutes les hypo
thèfes hafardées & répandues avec profu-
fion. dans les ouvrages qui traitent de
l’hilloire naturelle de la terre , & qui ont
groffi le volume de la fciencc fans en
avancer les progrès.
• Pour établir -la nécelfité de s’attacher
aux deux bâfes , d’après iefquelles on doit
traiter toutes les quefiionsquepeutéclaircir
1* géographie - phyfique , je puis encore
citer les faulles prédidions de Buffon &
de Philippe Buache fur le prétendu continent
aullra!, Iefquelles ont été démenties
dans toutes leurs parties par les obfervations
de Cook. Tout cet échafau dage géographique
a difparu entièrement à côté des
relations de cet habile navigateur. Les
hypothèfes de Philippe Buache& de Buffon
n’étoient ni allez bien raifqnnées ni affez
fcilidement établies, pour qu’ils fe hafar-
daffent, ainfi qu’ils l’ont fait, à deviner la
nature.
Buffon, par exemple , foutenoit que ce
qui reftoit de terres fermes à connoître
du côté du pôle aultral étoit fi confidé-
rable ,' qu’pn pouvoit, fans fe tromper ,
l’évaluer à plus du quart de la fuperficie
du globe ; en forte qu’il y avoit dans ces
climats un continent aulîî grand que
l’Europe, l’Alie & l’Afrique prifes toutes
trois enfetnble . il ajoutoit enfin que ce
continent auftral, étoit ;néceffaire pour
maintenir l’équilibre entre les deux hé-
mifphères. Quelque plaufible que lui ait
paru cette conjecture , l’obfervation a
démontré qu’elle étoit fauffe. Depuis le
fécond voyage du, capitaine Cook , on
connoît parfaitemept rhémifphère auflral,
&. l’on peut, prononcer avec certitude que
l’équilibre' «éceffaire dans les différentes
parties du globe efl très-bien établi, quoique
les mers parcourues par ce navigateur,
auffi courageux qu’éclairé, ne laiffent pas
à découvert tout l’efpace terreflre que
Buffon avoit imaginé , pour qu’aux environs
du pôle-fud la male correfpondante
de ces terres pût faire équilibre avec celles
de l’hémifphère feptentrionai.
Depuis que ces fuppofitions hafardées
ont été détruites par l’obfervation, voici,
ce me femble , ce qu’on étoit fondé à
mettre à la place. J’avoue qu’après' le calcul
des différentes parties des terres à découvert
, on ne peut fe diffimuler .qu’il n’y ait
de plus grandes portions de continens fecs
(nuées dans l’hémifphère feptentrionai
que dans l’hémifphère auflral. C’efl donc
mal-à-propos qu’pn a décidé que cette
répartition inégale ne pouvoit exifler, fous
prétexte que le globe perdroit fon équilibre
, faute d’un contre-poids fuffifant au
pôle méridional : il efl vrai qu’un pied
cube d’eau Talée ne pefe pas autant qu’un
pied cube de terre ou de pierre. Mais fou-
tiendra-t-on qu’il ne puiffe pas fe trouver
fous l’eau des couches de, matières affez
variées pour former toutes les compenfa-
tions néçeffaires. D’ailleurs , n’efl-il pas
évident qu’une mer verfée fur une grande
furface & qui a peu de profondeur, contrebalancera
les continens élevés au-deffus
des eaux & entourés de mers d’une
moindre étendue, mais proportionnellement
plus profondes. Enfin les grands
maffifs de glaces doivent ils être comptés
pour rien dans l’étendue qu’ils occupent
autour du pôle auflral.
Autres fuppofitions bizarres. Philippe
Buache, d’après la feulé confédération des
glaces qu’on avoit vues dans le voifinage
du pôle antarctique, avoit imaginé d’abord
qu’il’.exifloit dans le prétendu continent
auflral une fuite de hautes montagnes &
de grands fleuves qui y avoient leurs
fources, & qui, répandus dans des plaines
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