
plus dans les dépôts des derniers torrens,
c êfl dans la maffe même des terreins qu’ils
ont tranchés; ainfi ces fubftances étrangères
ne peuvent être que beaucoup plus anciennes
dans leur pofition. que le paffage des
torrens au travers des terreins où on les
découvre. Il eft donc néceffaire que
des eaux qui ont apporté & élevé les
matériaux des différëns lits où ils font
contenus, aient été des eaux tranquilles,
quoique courantes j tranquilles 9 parce
que la conftruétion générale des lits efl
régulière & parfaite ; courantes , parce
0I\ X trouve des corps étrangers qui
ont du être ttanlportcs des continens dans
les baffins des mers. 2°. Il eft néceffaire
que ces lieux aient été des endroits bas,
ôt que toutes les parties & les différëns
êtres dont cés dépôts font formés, foient
defeendus de lieux plus hauts 8c plus élevés,
o u , ce qui eff la meme chofe, on doit
penfer qu il y avoit dans ce même tems
des continens élevés au-deffus des eaux
qui prpduifpient les plantes dent neus
trouvons les elpèces, ôefur lefquels vivoient
les animaux terreftres dont nous trouvons
les dépouilles,
pour nous en convaincre, nous pouvons
aifément nous former l’idée de ce
qui s’opère préfentement au fond de
l ’Océan, par le tranfport des vafes & des
autres matières terreflres qu’y font perpétuellement
les fleuves & les rivières
fans nombre qui s’y déchargent, 8c nous
repréfenter enfuite ce qui doit réfulter
du mélange de toutes les matières animales
8c végétales qui s’uniffent & s’allient
avec les produirons de la mer qu’elles
rencontrent.
Toutes ces reliques terreftres trouvées
dans les depots des anciennes mers, nous
apprennent aulîï que les continens étoient
couverts des mêmes fubftances végétales
des mêmes arbres , des mêmes plantes'•
St que fur ces continens vivoient auffi
foute? les elpèces d’animaux que nous
çonnoiffons ; que les (tiers & les eaux
i douces noirrriffoient les mêmes poiffons,
les mêmes coquillages qu’elles contiennent
&nournffent encore aujourd’hui, foit dans
les baffins qui nous environnent , foit
dans dautres, & qu’enfîn la nature, toujours
la même, végétoit alors & fleurif-
lon comme elle végète. & fleurit aujour-
a mu , mais avec quelques circonftances differentes
en d’autres lieux & fous d’autres
afpeâs.
V I . L e torrent de la Marne, s’eft trouvé
grolfi au-deffous de Langres, de tous les
autres torrens qui defeendoient de Novdan ,
’^eomes > Molandon y & des
Urbigny. On peut juger de leur force
reume par les dégradations que l’on remarque
autour des revers de Luigres & fur
a cote de la Marne où monte le nouveau,
chemin de Lorraine. Cette côte étoit
expofee a leur ch oc , & c’eft de-là qu’elle
le montre aujourd’hui fi roide & fi efear-
pee. La force de ces eaux fe fait fur-tout
recormoitre en ce que, ne pouvant avoir
plus d une petite lieue de cours, cette
cote eicarpee a cependant plus de 60 toifes
de hauteur, & que le fond de la vallée
de la Marne au même endroit eft d’environ
io o toifes plus bas que ce long promontoire
fur lequel eft le rez-de-chauffée
de la ville de Langres. Toutes ces côtes
du plus haut au plus bas portent les im-
preffions les plus marquées de la chute
ue ces torrens.
L e terrein fur lequel la ville de Langres
elt utile , fe trouve au confluent de plu-
fleurs torrens. Ce ne font point ces tor-
rens qui 1 ont formé comme il eft arrivé
dans tous les pays inférieurs ; car, i°. les
pierres & les rochers détachés autrefois
par leurs efforts, & que l ’on voit aujour-
d hui fur ces cotes, étoient dès-lors par
lits de deux & trois pieds d’épaiffeur,
leur qualité déjà très-dure, puifqu’ils ont
conlerve leurs arrelles, leurs angles &
leurs formes ;- c e qui fait connoître que
1 âge de la conftrufllon de ces blocs de
pierres eft bien différent de celui de leur
démolition ; 2°. les eaux de la Bonelle
& de la Marne ne venoient point d’affez
loin pour être chargées de matières étrangères
, de fables & de vafes fuffifans pour
en eonftruire une montagne de cent toifes
de hauteur ; 3°. les dépôts dont les derniers
torrens ont fait de nouvelles conlîruc-
tions, font tous en pentes douces & ordinairement
de fables & de terres; au lieu
que toute la maffe de Langres eft efcai;pée
de tous «ôtés & ne forme qu’un rocher.
Sa figure provient de ce que les terreins
contigus ont été détruits de part 8c d’autre
par l'éruption des fources 8c emportés
par l e , torrent , au moins fur toute la
hauteur qui en fait aujourd’hui la profondeur.
Sans doute qu’à la longue ce
promontoire eût été détruit auffi ; il à dû
même être beaucoup plus allongé vers
le village d’Humes., car il paroît que la
montagne des Fourches qui eft fous la
ville , en a fait autrefois une partie continue.
Cette petite montagne eft fort capable
d’attirer l’attention d’un phyfîcien curieux
à caufe de fa pofition & de fa nature ;
tout le plateau de Langres eft compofé
de pierres plus ou moins dures, pofées
lit par lit de différentés épaiffeurs , 8c cette
montagne qui eft ronde par fa bafe eft entièrement
ifblée du plateau. Son fommet
qui n’ a qu’une plate-forme de quelques
toifes eft à environ vingt-cinq toifes plus
bas que le niveau de la ville. Ce qu’il y a
de fingulier , c’eft que fur la pointe on
découvre plufîeurs blocs de roches cul-
bultées qui portent huit à dix pieds de
longueur, cinq à fix de largeur & deux à
trois pieds d’épaiffeur. Ces roches font
de la même nature que celles du terrein
de Langres. L e -relie de là montagne eft un
fond de vafe très-épais, ce que l’on re-
connoît par l’excavation de la ravine
qui côtoie le grand chemin de Langres à
/Chaumont.
T l eft naturel de penfer qu’ ainfi qu’il
y a eu des fources qui ont miné les faces
latérales du plateau de Langres ; il y en
a eu auffi dans cette partie une grande
quantité qui attaquant par deffous tous les
terreins par lefquels cette butte étoit auparavant
unie à ce plateau , les ont détruits
& entraînés peu à peu. La vallée profonde
par laquelle elle en efl aujourd’hui féparée
eft le vuide 8c la plaçe de ees terreins qui
ne font plus ; mais ce qui devoit former
le noyau de cette montagne font ces
relies. -
Les vafes dont enfuite tout le noyau a
été recouvert font auffi vifiblement un
produit des grandes eaux. On peut remarquer
que le revers qui regarde la ville eft
pierreux 8c roid e , & que celui qui lui eft
oppofé ne l’eft pas parce qu’il étoit à l’abri
du torrent.
La forme régulière 8c ronde de cette
montagne, & fa pofition précife à l’abri
du promontoire, placée plus vers le couchant
que vers le levant, s’explique auffi
par une autre opération des grandes eaux.
Le plateau de Langres fitué entre les deux
vallées de la Marne & de la Bonelle devoit
produire dans ces deux torrens le même
effet que produit dans le courant d’une,
rivière la pile d’un pont. Ces torrens venant
à fe réunir au-deffous du promontoire,
dévoient y former des tournoiemens &
des tourbillons confidérables, & les eaux
auparavant refferrées trouvant fubitement
un emplacement plus grand dévoient auffi
fe réunir , mais avec une chûte 8c avec des
viteffes inégales, parce que le torrent de
la Marne étant plus confidérable que celui
de la Bonelle, le plus fort devoit repouffer
le plus faible. Par-là il eft arrivé que le
tourbillon fe formoit , non au milieu
jufte des deux vallées réuniesl, mais plus
près du cours de la Bonelle que du cours
de la Marne , fans doute dans la proportion
dô leurs forces. Les vafes & les matières
légères que les eaux des torrens
entraînoient dans ce tourbillon, après avoir
pirouetté avec les lames & les colonnes
d’eau qui les pouffoient , gagnoient à