
M. Wallis envîfage la chofe un peu autrement,
& trouve dans Ton arithmétique , que la quantité
de bled néceflaire pour remplir la promefle faite
à Sefla , formeroit une pyramide de 9 milles an-
glois de longueur, de largeur & de hauteur 5 ce
ui revient à une pareille pyramide qui auroit 3
e nos lieues (d’environ 3000 toifes) en tout fens
de bafe , & trois lieues de hauteur , ou à une
mafle parallélipipède de 9 lieues quarrées de bafe,
fur une hauteur uniforme d’une lieue. Or 3000
toifes de hauteur font 18000 pieds 5 ainfi ce fo-
lide eft l’équivalent d’un autre de 162000 lieues
quarrées, fur un pied de hauteur : d’où il fuit que la
quantité de bled ci- deffus couvriroit 126000 lieues
quarrées , à-la hauteur d’un pied} ce qui fait au
moins trois fois la furface *de la France, qui ne
contient , je penfe, toute rédaction faite, guères
plus de 50000 lieues quarrées.
En fuppofant le fetier de bled à une piftole, la
quantité de Med ci-defliis vaudroit 59^0562^60
4.44220 livres » ce qui fait 5950562 milliards,
fomme qui efcede probablement toutes les ri-
chefles exiftantes fur la terre.
On propofe le même problème d’ une autre
manière que voici : « Un maquignon pofsède un
très-beau cheval dont un homme a envie ; mais
c it acheteur, peu difpofé à y mettre le prix convenable
, eft indécis. Le maquignon, pour le déterminer
par l’apparence d’un prix médiocre, lui
offre de fe contenter du prix au vingt-quatrième
clou des fers du cheval, payé à raifon d’un denier
pour le premier clou, de deux pour le.deuxième,
quatre pour le troifième , & c . iufqu’au vingt-
qaatrième. L’acheteur, croyant le .marché fort
a 'àntageux pour lui , l’accepte. On demande le
prix du cheval ».
Ce cheval couteroit fort cher ; car, éh faifant
le calcul’, on trouve que le vingt-quatrième
terme de cette progreflion 1 , 2 , 4 / 8 , &c.
eft 8388608. ; ainfi ce feroit ce nombre de deniers
que devroit donner l’ acheteur , ce qui
revient à trente-quatre mille neuf cent cinquante-
deux livres dix fous huit deniers. Aucun cheval
arabe de la plus noble race ne fe vendit jamais
ce prix.
Si le prix convenu du cheval eût été la valeur
de tous les clous, en payant le premier un denier,
le fécond deux, le troifième quatre, & c. il feroit
du double, moins le premier terme, c’eft-à-dire,
de 69908 liVi 1 f. 3 den.
, Nous allons terminer ce chapitre par quelques
remarques phyfico-mathématiques fur la prodi-
gieufe fécondité & la multiplication progréflive
des animaux & des végétaux , qui auroit lieu fi
les forcés de la naturé n’éprouvoient pas continuellement
des obftacles.
I. On ne .fera point étonné que la race d’À-
braham , après 200 ans de féjour en Egypte, ait
pu former une nation capable de donner de l’inquiétude
aux fouverains du pays. En effet, l’ écriture
raconte que Jacob s’établit dans cette contrée
avec foixante-dix perfonnes. Je fuppofe que
de ces foixante-dix perfonnes il y en eût vingt,
ou trop avancées en â g e , ou trop jeunes pour
être propres à la génération ; que des cinquante
autres reliantes il y en eût vingt-cinq mâles &
vingt - cinq femelles , formant vingt - cinq mariages
; que chaque couple enfin eût produit dans
la durée de vingt-cinq ans , huit enfans l’un portant
l’ autre , ce qui ne paroït pas difficile à croire
dans un pays renommé par la fécondité de fes
habitans ; on trouvera qu’ au bout de 25 ans ce
nombre de foixante-dix a pu s’accroître jufqu’à
deux cens foixante-dix , dont ôtant les morts, il
n’y a peut-être pas d’exagération à le porter à
deux cent dix : ainfi la race de Jacob a pu être
triplée après vingt-cinq ans de féjour en Egypte.
Par la même raifon, ces deux cens dix perfonnes
, après vingt-cinq autres années , ont pu
s’ augmenter jufqu à fix cent trente, & ainfi de
fuite en progreflion géométrique triple; ; d’ou
il fuit qu après deux cent vingt-cinq ans , la
population a pu monter à 1377810 perfonnes,
parmi lesquelles il a pu aifément y en avoir
5 à 600000 adultes, & en état de porter les
armes.
II. En fuppofant que. la race du premier homme,
toute déduction faite des morts, eût doublé
tous les vingt ans , ce qui n’ eft affurément pas
contraire aux forces de la nature, le nombre des
hommes , après cinq fiècles , a pu monter à 1048
576. Ainfi , Adam ayant vécu plus de 900 ans ,
il a pu voir au milieu de fa. vie , c’eft-à-dire, vers
l’an 500 de fon â g e , une poftérité de 1048576
perfonnes.
III. Quelle ne feroit pas la multiplication de
plufieurs animaux , fi la difficulté de la fubfiftance,
fi la guerre que les uns font aux autres, ou la
confommation qu’en font les hommes , ne met-
toient pas des bornes à leur propagation ? Il eft
aifé de démontrer que la race d’une truie qui au-
roit mis bas fix petits , dont deux mâles & quatre
femelles, en fuppofant enfuite chaque femelle
mettre bas pareillement chaque.année fix petits,
dont quatre femelles & deux mâles, monteroit,
après douze ans, à 33554230.
1 Plufieurs autres animaux, commè les lapins >
le,s chats, & c . qui ne portent que pendant quelques
femàines, multiplieroient^encore avec Lien
plus de rapidité ; la furface de la terre ne fuffiroit
pas , après un demi-fiècle feulement, polir
lëur donner la fubfiftance, ou même, pour les
i contenir.
Il ne faudroit qu’un bien petit nombre d’années,
pour qu’ un hareng remplit 1 Océan de fa
noftérité , fi tous fes oeufs etoient fécondés ; car
il n’eft guères de poiffon ovipare qui ne contienne
plufieurs-milliers d’oeufs qu il jette dans le temps
du frai. Suppofons que ce nombre monte feulement
à 2000, qui donnent naiflance a autant de
poiflons, moitié mâles , moitié femelles : dans la
fécondé année, il y en auroit plus de 200000 ;
( dans la troifième, plus de 200000000 ; & dans la
huitième afinée , ce nombre furpafleroit celui qui
I eft exprimé par 2 fuivi de 24 zéro. Or la folidite E de la terre contient à peine autant de pouces
[ cubes. Ainfi l’Océan-, quand même il occuperoit
toute la furface du globe terreftre &: toute fa. profondeur
, ne fuffiroit pas pour contenir tous ces
IV. Plufieurs végétaux couvriroient en tres-peu
d’années toute la furface du globe , fi toutes leùis
femences étoient mifes en terre ; il ne faudroit
pour cela que quatre ans à la jufquiame , qui eft
peut-être , de toutes les plantes connues, celle
qui donne la plus grande quantité de femencés.
D’après quelques expériences,on a trouvé qu’ une
tige de julquiàme donne quelquefois plus dg
50000 grains ; réduifons ce nombre à 100004 a la
quatrième génération , il monteroit à 1 fuivi dè
16 zéro. Or la furface de la terre ne contient pas
plus de 5359758336000000 pieds quarrés. Ainfi,
en allouant à chaque tige un pied quarré feulement
, l’on voit que la furface entière de la terre
ne fuffiroit pas pour toutes les plantes provenantes
d’une feule de cette efpèce à la fin *ie la quatrième
année.
Nous ne poufferons pas cette énumération
plus loin , de crainte de tomber dans le défaut
qu’on peut juftement reprocher à l’ancien auteur
des Récréations mathématiques. Il n’ eft aucun
le&eur à qui ce que nous venons de dire ne
fuffife.
§ . I I I .
De quelques autres progrejjions 3 & entr autres de la
progrejfion harmonique.
J: monique, en multipliant ces deux nombres, &
; divifant leur produit par l’excès du double du pre-r
mier fur le fécond. Ainfi , étant donnés 6 & 3 ,
■ on a trouvé le troifième en multipliant 6 par 3, &c
divifant le produit 18, par 9, qui eft l’exces de 12,
double de 6 , fur 3 le fécond des nombres donnés.
Ainfi ce quotient eft 2.
Il eft aifé de voir par-là qu’ il n’eft pas toujours,
en un fens, poflible de trouver un troifième nombre
en proportion harmonique avec deux autres ;
car lorfque le premier eft le plus petit , fi fon
double eft égal ou moindre.que le fécond, on
rencontfera un nombre infini, ou négatif. Ainfi le
troifième harmonique à 2 & 4 , eft infini ; car on
trouve que le nombre cherché eft égal à 8 diyifé
par 4— 4 , où zéro. Ô r , pour peu qu’on foit arithméticien
, on. fçait que plus lë dénominateur d’une
fra&ion eft au deflous dé l’unité y plus la fraction,
•eft grande. Gonféquemment une fraétion dont le
dénominateur eft o , eft infinie.
Si . le double du premier nombre étoit moindre
que le fécond, ( comme il arriveroit, fi l’ on pro-
pofoit de trouver un troifièihe'harmonique à 2
& 6 ) alors le:divifeur cherché feroit uii nombre
négatif : c’eft, dans l’exemple propofé,— 2 : c’eft
pourquoi le troifième harmonique cherché feroit
ici 12 divifé par— 2 , c’eft-à-dire— 6.
Mais cet inconvénient , fi c’en eft un , n’eft pas à
craindre lorfque le plus grand nombre eft le premier
de la proportion ;I car le premier furpaffe
le fécond, à,phls forte raifon fon double le furpaf-
fen%$t-il. Ainfi le troifième harmonique fera toujours,
dans ce cas, un nombre fini & pofitif.
II. Lorfqu’ on a trois membres en proportion
harmonique déeroilfante, par exemple 6 , 3 , 2 ,
il eft aifé d’en trouver un quatrième; il n’y a qu’a
chercher un troifième harmonique aux deux derniers
, ce: fera le quatrième pareillement le troisième
le quatrième ferviront à trouver le cinquième,
& ainfi de fuite ; ce qui formera ce qu’on
appelle une progreflion 'harmonique , laquelle ,
par , les raifons ci-defliis, pourra toujours fe prolonger
en décroiflant. Dans l’ exemple préfent,
cette fuite fe trouvera6 , 3 ,2 , f , f , 1 , 7 , f , &c.
La proportion harmonique règne entre trois
nombres, lorfque le premier eft au dernier, comme
la différence au premier avec le fécond eft à celle
du fécond avec le troifième. Ainfi les nombres 6 ,
5 , 2 , font en proportion harmonique ; car 6 eft
a 2, comme 3 ,différence des deux premiers nombres
eft à 1 , différence des deùx derniers. Cette
efpèce de rapport eft-appelle harmonique , . par la
raifon qu’on verra plus bas.
I. Deux nombres étant donnés, on trouve le
troifième qui forme avee eux la proportion hàr-
Si les deux premiers nombres eufifent été 2 & 1 ,
on auroit eu la, progreflion harmonique.
, 2 , tI » 9a iH 3 jË * 3 1s 3 J6L i 7L>L * 3 19 /3 -1L0 3 & r .
Ainfi c’eft une propriété remarquable de la fuite
des fractions dont le numérateur eft l’unité, &
dont les dénominateurs font les-nombres de la
progreflion naturelle, d’ être en progreflio» harmonique.
En effet, indépendamment du rapport numé*
S 2