
A quelque diftance de cet ax e , mais toujours
dans le meme plan horizontal, on trouve au haut
de la grande gaine , un fécond axe parallèle à
celui qui porte la vis fans fin , & qui eft' garni
d’une poulie comme lui. Sur chacune de ces deux
poulies pafie un corde fans fin , c’ eft-à-dire , une
corde attachée par les deux bouts ; cette corde
traverfe le marche-pied de la chaife en deux endroits
, & pafie enfuite fur deux poulies immobiles
fixées verticalement dans le fond de la grande
gaine.
Ces deux cordes doivent être bien parallèles &
perpendiculaires au fond de la gaine. Voilà eh
deux mots en quoi confifte cette mécanique fi
utile. Nous allons dire un mot de fes ufages.
Comme il y a prefque équilibre entre le contrepoids
& la peianteur du fauteuil rempli d’une
perfonne un peu groffe ( car il vaut mieux manquer
par excès que par défaut ) , un domeftique
tait defcendre le fauteuil en tirant une corde , &
l ’arrête enfuite vis-à-vis de la porte de la gaine :
la perfonne qui veut monter dans la chaife volante
3 s’affied & prend les deux cordes perpendiculaires
dans fes mains. On retire alors l’arrêt qui
fixoit la chaife , & le contrepoids l ’enlève. Pour
peu que cette perfonne veuille fe foulever fi elle
trouve cette allure trop prompte , elle la modère
en prefiar.t , tant foit p eu , les deux cordes qui
font alors les fondions d*un frein. En effet, cette
corde paffant fur une poulie enarbrée fur l’ axe
d’une vis fans fin,menee par le pignon qui eft fur
le même arbre que le cylindre du contrepoids ,
la defcente de ce dernier peut être facilement
retardée ; fi la preffion devient très-forte , la
chaife volante s’arrête.
Lorfque la perfonne eft arrivée à l’étage où elle
veut aller, elle pèfe un peu fur les deux cordes
qu’elle tenoit dans fes mains, & pouffe une efpèce
de loquet avec fon pied 5 ce loquet arrête la chaife
vis-à-vis du feuil de la porte par où elle doit
entrer. On a cru inutile ae recommander ici d’ avoir
d’ excellentes cordes de fil & d’en changer de
temps en temps,ainfi que de difpofer la chaife de
manière qu’elle foit en face de la porte d’entrée.
Je me rappelle d’ être defcendu dans la chaife volante
du château S. Ange à Rome 5 mais comme
nous nous y trouvâmes deux , & qu’il n’y avoit
point de corde pour fervit1 de modérateur ou de
frein à la defcente du contrepoids, nous entraînâmes
ce dernier avec tant de violence, que nous
crûmes être précipités. Dans ce cas, il eft facile
de retarder fa marche & même de l’arrêter fur
le champ , en faifant fonir deux pièces de bois
de chaoue côté du fauteuil 5 ces pièces .feront
logées dans des couliffes horizontales. Lorfqu’on
veut defcendre dans de pareilles chaifes , il faut !
y ajouter un petit contrepoids qui furmonte la j
différence qui fe trouve entre la pefanteur de la
chaife, plus celle de la perfonne & celle du gros ,
contrepoids : un domeftique les remonte enfuite
CHALCÉDOINE ( fauffe). La chalcédoine eft
une pierre précieufe filicée dont la couleur hi-
teufe & nébuleufe fait la beauté, tandis que c’eft
un défaut dans les autres pierres précieufes. On en
fait des cachets, des manches de couteaux, des
bagues & autres bijoux. On en trouve peu de gros
morceaux , & les va fes faits de cette pierre font
très-rares : voici le procédé qu’on trouve dans
Kunkel pour fe procurer des chalcédoines -faâices
& même en former des vafes. L’on met dans un
matras de verre à long col deux livres d’eau forte;
l’on y jette quatre onces d’argent mis en petits
morceaux ( ou en lames minces ). En. plaçant le
matras auprès du feu ou dans l’eau chaude, l’argent
fe difioudra bientôt ; lorfqu’ il fera entièrement
diffous , mettez dans un matras tout fem-
blable au premier,une livre demie d’eau forte;
vous y ferez dilfoudre fix onces de v if argent ;
vous mêlerez enfuite les deux folutions dans un
plus grand vafe, vous y ajouterez fix onces de fel
ammoniac que vous y ferez fondre à une chaleur
modérée : la diffolution faite, vous y ajouterez de
faffre broyé une once, de magnéfie, demi-once,
& autant de ferret d’Efpagne : mais vous ne mettrez
cette dernière matière que petit à petit, car
la magnéfie fait gonfler le mélange, elle y caufe
de l’ébullition, & la matière eft en danger de
fortir des vaiffeaux ou même de les rompre. Vous
continuerez l’opération, en mêlant un quart d’once
de faffran de mars calciné par le foufre , ainfi que
demi once d’écailles de cuivre calcinées par trois
fois : vous y joindrez autant de bleu d’email &
de minium ; vous pulveriferez bien toutes ces matières
féparémeftt, & les mettrez dans le matras
petit à petit & par degrés , en les remuant doucement
, afin queces poudres fe délaient exactement,
& vous méfiant toujours de l’effervefcenee.
Vous tiendrez le vafe bien bouché, & remuerez
le mélange doucement plufieurs fois pendant dix
jours., Au bout de ce temps , vous mettrez le'
matras débouché au bain de fable , afin, de faire
évaporer l’eau - forte , ce qui peut s’exécuter en,
vingt-quatre heures. Il faudra obferver de donner
un feu bien doux , car cela eft d’une grande im-
ortance ; on pourra, fi l’ on v eut, adapter un.
allon pour recevoir l’eau forte ; & on trouvera
aii fond du vafe une poudre d’ un brun jaunâtre
que l’on confervera dans des vaiffeaux de verre.
Lorfque vous voudrez faire des chalcédoines,
ayez un verre de criftal bien pur , & qui foit
fait avec des morceaux de vafe de criftal caffés;
car le verre fait avec une fritte nouvelle h’ëft pas
bon à cet ufage ; les couleurs n’y paroi fient point,
parce qu’elles font abforbées par la* fritte. Sur
vingt livres de ce verre réduit en poudre, vous
mettrez deux onces & demie ou trois onces de la
poudre que l’on vient d’indiquer ; vous l ’y mettrez
en trois fo is , obfervant de bien remuer le.
«mes en M o n ; il s’élève alors une efrece de
S e ou vapeur bleue. Vous bifferez enfuite
ÎTofer le verre pendant une heure : au bout de ce
temps, vous mêlerez de la poudre pour la fécondé
fohV vous laifferez cuire le mélangé fans y toucher
pendant vingt-quatre heures, au bout def-
ouelles vous remuerez la matière ; & en faifant
i effai, vous trouverez que le verre eft d une couleur
qui tient le milieu entre le jaune & le bleu.
On fait plufieurs fois recuire cet effai au-feu, d ou
on le retiré enfuite pour le refroidir i & 1 on
trouve ce. verre d'une couleur d aigue marine, &
d’autres couleurs fort belles. , . ,
Il faut tenir prêtes huit onces de tartre calcine,
de la laie de cheminée vitrifiée deux once?, ot
une demi-once de faffran de mars. On réduit ces
matières en poudre & on les mele au verre en
foiate à cinq ou fix reprifes ; 1 °n verra par ces
additions le verre fe gonfler confiderablement,
& tout fera en danger de fe perdre, fi l ouvrier
nufe.de précaution. U faudra donc avoir foin dç
ne jetter cette poudre que petit a petit & par in-
tervalles, & avoir l'attention de bien remuer le
verre pour y incorporer la poudre. Lorfque 1 on
y aura tout mis, il faudra laiffer cuire fe verre
fans y toucher pendant vingt-quatre heures , au
bout de ce temps on en formera un vafe que 1 on
fera recuire à plufieurs reprifes dans le fourneau,
& l’on verra fi ce verre a pris une couleur telle
qu’on la defire. S i, quand il eft refroidi, il offre
à la vue toutes les couleurs du jafpe, de la cnal-
cédoine ou de l’agate orientale, & que le yale
que l’on aura fait pour effai, regarde du cote du
jour, paroiffe rouge comme du fe u , alors il fera
temps de fe mettre à travailler la matière pour en
faire des vafes tels que fon voudra ; mais en les'
travaillant, if faudra avoir foin de les rendre unis
& polis, & non pas en relief, car ceux de cette
efpèce ne font point un bon effet : 1 ouvrier aura
l’attention pendant qu’ il travaille, de prendre le
verre qu’il a travaillé avec des pincettes, & de le
faire fuffifamment recuire afin qu’ il s’y forme des
ondes & des effets de différentes nuances & couleurs.
On peut figurer avec cette matière de
grands plats ovales, triangulaires ou quarrés à volonté,
& les polir à la roue comme les pierres
CHAMBRE OBSCURE. Jean-Baptifte Portai
phyficien du 16e fiecle , remarqua que les objets
de dehors fe deffinoient comme des ombres fur la
muraille & au plancher de fa chambre. Aux yeux
d’un obfervateur, rien ne lui échappe, tout eft
digne d’attention jufqu’aux chofes les plus indifférentes
précieufes ; car cette compofition prend fort bien
le poli ; on peut aufli s’en fervir pour faire de diffé-
rens ornemens de cabinets, tablettes , & c . S il
arrivoit que le verre , au lieu d’ être opaque, der
VÎn| tranfparent, ce qui gâteroit l’ouvrage ,. il
faudroit fufpendre le travail. & remettre dans la
compofition du tartre calciné, de la iuie & du
faffran de mars, comme on l a déjà dit; car par
ce moyen il reprend du corps, & en redevenant
S ue, fes couleurs reparoiffent. Au refte, pour
es couleurs foient bien fortantes, il faut que
le verre ait été bien purifié pendant.plufieurs
.heures ; après, quoi l’on continuera le travail *
comme il a été dit auparavant.
en /apparence, & c’eft de cette curieufe
fagacité, que naiffent fouvent les plus belles découvertes.
Porta fut agréablement furpris de cet
effet fingulier ; pour le perfectionner, il s’avifa de
mettre au trou de fa.fenêtre un verre lenticulaire;
telle a été l’ origine de la chambre obfcure. Depuis
ce temps on a cherché à rendre cette expérience
portative. Pour y parvenir on a conftruit
des caiffes, des boîtes, des tables, des pavillons i
& l’on a varié de différentes manières fa forme *
la grandeur & la difpofition. Nous ne donnerons
pas ici la defetiption des différentes chambres ob-
feures qui ont été imaginées, leur effet eft conf-
tamment produit par la meme caufe ; c eft un
verre lenticulaire qui fert d’objeétif, & dont le
foyer porte les rayons de lumière fur un rond
blanc dans un lieu obfcur ; on y emploie fouvent
&: prefque toujours le miroir de réflexion ; mais
rien de plus fimple dans la mécanique, & tout
homme un peu induftrieux & qui a quelque con-
noiffance de la dioptrique & de la catoptrique ,
peut s’en procurer de telle forme que bon lui fem-
blera. Nous ne nous difpenferons pas néanmoins
d’entrer dans quelques détails, pour mettre fur la
voie ceux qui defireroient avoir une chambre obfcure
: commençons par l’ expérience de Porta.
L’on pratique une ouverture circulaire au volet
d’une chambre qui donne fur la campagne, ou fur
tout autre objet un peu éloigne ; cette chambre
doit être fermée de manière qu il ne puiffe y
entrer de jour que par l’ ouverture faite au v o le t, a
laquelle on applique ün verre convexe de trois a
quatre pieds de foyer. L’on place à cette meme
aiftance & en face de ce v erre, un carton couvert
d’ un papier très blanc, lequel ait environ
deux pieds & £ de longueur, fur 18 ou 20pouces
de hauteur. On le courbe fur fa longueur,
de maniéré qu’ il faffe partie de 1 intérieur, de la
furface d’un cylindre , qui auroit pour diamètre
le double du foyer de ce verre; on l’ ajufte à cet
e ffe t, fur un chafiîs également courbé ; & pu
l’élève fur un pied mobile., afin de pouvoir facilement
l’avancer ou reculer au devant du verre ,
& le placer exactement à la diftance ou les objets
paroîtront fe peindre avec toutes leuis couleurs,
% le plus de régularité fur ce carton. Mais ces
objets fe préfentent dans unefituation renverféea,
il eft effentiel que le carton ait une forme circulaire
, afin que tous les objets y foient diftinéte-
ment peints , fans q u o i, lorfque le milieu du
.carton fe trouve placé au foyer du verre, les deux
extrémités fe. trouvant au de-là, du fo y e r , les
ima<ypç nui s’v oeienent deviennent confufes, 8c