
que pour rexécution j demandoit une réfutation
d’un genre différent de celle qu’on trouve à
la fin d’une Hiftoire de la Mufique , imprimée en
1767. i
S e c onde e x p é r i e n c e .
Accordezplufieurs cordes à l’o&ave , à la douzième
, à la dix-feptième majeure partie d’une
corde donnée, tant au-deffus qu’ au-deffous 5 alors
fi vous faites fonner cette corde fortement &
avec continuité, vous verrez les autres fe mettre
auffi en vibration ; vous entendrez même fonner
celles qui font accordées au-deffus , fi vous avez
l’ attention d’ éteindre fubitement 'par un corps
mou le fon de la première.
Il n’eft perfonne qui n’ait quelquefois entendu
réfonner les verres d’une table au fon d une
voix vigoureufe & éclatante. C ’eft une manière
, de faire cette expérience.
On entend auffi quelquefois réfonner les cordes
d’un infiniment qu’on ne touche point, au fon
feul de la voix , fur-tout après des tenues un
peu longues & renflées.. Je me fuis plufieurs
fois procuré ce plaifir , par le moyen d’un ami
qui avoit une grande & belle voix de baffe.
La caufe de ce phénomène eft inconteftable-
ment la communication des vibrations de l’air
à la corde, ou au corps fonore monté aux tons
cbdeffusj car il eft aifé de concevoir que les
vibrations des cordes montées a 1 uniffon ou a
l ’o&ave , ou à la douzième , & c . de celle qu’ on
met en mouvement, font difpofées à recommen-
. cer régulièrement , & en meme tems que celles
de cette corde. , en fe répondant vibration pour
vibration , dans le cas de l’uniffon , ou deux
pour une , dans le cas de l’o&avei ou trois pour
u n e , dans celui de la douzième : ainfi , les petites
impulfions de l’ air vibrant , que produira
la corde mife en vibration, confpireront toujours
à augmenter .les mouvemens d’abord in-
fenfïbles quelles auront caufés dans ces autres
corde s, parce qu’elles fe feront dans le même
lèns , & parviendront enfin à les rendre fenfibles,
C ’eft* ainfi qu’un léger fouffle d’air , toujours
dans la même direction, parvient enfin à fou-
lever les eaux de l’ océan. Mais lorfque les cordes
en queftion feront tendues de manière que leurs
vibrations ne puiffent avoir aucune correfpondànce
avec celles de la corde frappée , alors elfes feront
tantôt aidées , tantôt contrariées, & le petit
mouvement qui pourra leur etre communique,
fera auffi-tôt anéanti qu’ engendré j conféquem-
jpent elles relieront en repos.
Les forts harmoniques qu'on entend avec le fon principal
, ontr ils leur fource immédiate dans le corps
fonore , ou réfident-ils feulement dans, l'air ou
P dans l'organe ?
Il èft très-probable que le fon principal eft le
feul qui tienne fon origine immédiate des vibrations
du corps fonore. D’habiles phyficiensont
cherché à demêler f i , indépendamment des vibrations
totales que fait un corps, il en faifoit
de partielles , & ils n’ont jamais pu y rien voir
que des vibrations fimples. Comment concevroit-
on d’ailleurs que la totalité d’une corde-dut en
vibration , & q u e , pendant ce moiivement ,
elle fe partageât en deux parties qui fiffent auffi
leurs vibrations à part, ou en trois qui fiffent auflï
leurs vibrations particulières, &c.
Il faut donc dire que ces fons harmoniques
d’oétave , de douzième, de dix-feptième, font
dans l’air ou dans l’ organe. L’un & l’autre ont
de la probabilité 5 car , puifqu’un fon déterminé
a la propriété de mettre en vibration les corps
difpofés à rendre fon oêtave, fa douzième , & c .
on doit reconnoître que ce fon peut mettre en
mouvement les particules de l’air fufceptibles de
vibrations, doubles, triples , quadruples , quintuples
en vîteffe. Néanmoins, ce qui me paroît
à cet égard de plus vraifemblable , c’eft que ces
vibrations n’exiftent que dans l’ oreille. L’anatomie
de cet organe paroît en effet démontrer que le
fon ne fe tranfmet à l’ame que par les vibrations
des filets nerveux qui tapiffent la conque de
l’oreille > & , comme elles font d’inégales Ion-
gueurs , il y en a toujours quelques-unes d’en-
tr’elles qui font des vibrations ifocnrones à celles
d’ un fon donné 5 mais en même-tems, & par
la propriété ci-deffus, ce fon doit mettre en
mouvement les fibres fufceptibles de vibrations
ifochrones , & même celles qui peuvent faire des
vibrations doubles , triples, quadruples , -8rci
en vîteffe. Tel e ft, à mon avis, ce qu’on peut
dire de plus probable fur ce phénomène fingu-
lier. J’ adopterai de tout mon coeur une explication
plus vraifemblable, quand je la connoîtrai.
T r o i s i ème e x^p é r i e n c e.
On doit cette expérience au célèbre Tartini
de Padoue. Faites tirer à la fo is , de deux inftru-
mens , deux fons quelconques j vous en entendrez
dans l’ air un troifième, qui fera d’ autant
plus perceptible , que vous aurez l’oreille olus
voifine du milieu de la diftance entre les inftru-
mens. Que ce foient, par exemple deux forts
qui fe fuccèdent dans l’ordre des confonnances ,
comme l ’o&ave & la douzième, la double octave
&: la dix-feptième majeure, & c .; le fou
réfultant, dit M. Tartini-, fera l’o&ave du fon
principal.
Cette expérience, répétée en France, a réuffi^
C'oirJne l’ attefte M. Serres, dans fes Principes
de l'harmonie, imprimés en 1753 5 à cela près
que M. Serres a trouvé ce dernier fon plus
bas d’une o&ave > ce qu’on trouve par la théorie
devoir être. Il eft fi aifé de confondre les octaves
entr’elles , que cela ne doitpas furprendre.
Au furplus , nous devons remarquer ici que le
célèbre muficien de Padoue a établi fur ce, phénomène
un fyftême d’harmonie & de compofitionj
mais il ne paroît pas avoir fait encore, la fortune
de celui de Rameau.
Des différens fyfiêmes de mufique, ' grec -, moderne ,
h de leurs particularités.
$ I .
De la Mufique grecque. .
Dans-la naiffance de la jnufîque chez le§ grecs.,
il y avoit à la lyre quatre cordes , dont les fons
auroient répondu à f i , u t, re , mi : dans la fuite
on y . ajouta trois autres cordes, f a , f o l , la :
ainfi. la première échelle diatonique grecque,
traduite en notre langue muficale , étoit f i , ut,
re, mi, fa , f o l , la , & étoit compofée de deux
tétracordes , ou fyftême de quatre fons , f i , ut,
re , mi $ m i , fa , f o l , la , dont le dernier de
l ’ un & le premier de l’autre étoient communs >
ce qui les fit appeller tétracordes conjoints.
Remarquons q u e , quelque bifarre que pa-
roiffe cette difpofition de fons à ceux qui ne
connoiffent que l’ordre diatonique moderne,.
elle n’en eft pas moins naturelle , & conforme
aux règles de l’harmonie $ car M . Rameau a montré
qu’ elle n’eft autre chofe qu’un chant dont
la bâfe fondamentale feroit f o l , u t , f o l , ut, fa ,
u t , fa . Elle, a auffi l’avantage de n’avoir qu’un
feul intervalle altéré, fa voir, la tierce mineure
du re au fa , qui, au lieu d’être dans le rapport
de j■ à . 0 , eft dans celui de 27 à 31 , qui eft
un peu moindre, & conféquemment trop baffe
d'uncomma de 80 à 81.
Mais cette perfeélion étoit balancée par deux
grandes imperfections > favoir, 1<? de ne pas com-
.pletter l’oCtave j 2Q. de' ne pas fe terminer par
un repos, ce qui laiffe à l ’oreille l’efpèce d’inquiétude
qui réfulte d’un chant commencé &
non fini. Elle ne pourroit néanmoins ni monter
au f i , ni defcendre au la. Auffi les muficiens
q u i, pour completter P oétave , avoient ajouté
Cette dernière note au-deffous, la regardoient-
ils comme étrangère, pour ainfi d ire, & lui
donnoient-ils le nom de proslanbanoméne.
On chercha, par cette raifon y un autre remède
à ce défaut, & l’onpropofa ( ce fut, dit-on,
Pythagore ) la fucceffion qe fons, mi3fa , f c l * la , ■
| f i , u t , re, m i, compofée, comme l’on v o it ,
de deux tétracordes disjoints. Cette échelle diatonique
eft prefque. la , même que la -nôtre , à
cela près que la nôtre commence & finit par
la torique', & celle-là commence & finit par
la médiants ou la tierce majeure. Cette définence',
aujourd'hui prefque réprouvée , étoit affez ordinaire
aux Grecs, & l ’eft encore dans nos chants
d’églife.
Mais i c i , par une fuite de la génération harmonique
, les valeurs des fons & des intervalles
ne font pas les mêmes que dans la première
échelle. Dans celle-ci, l’intervalle du Jol au la
étoit un ton mineur 5 il eft , dans la fécondé , un
ton majeur. Il y a enfin , dans cette fécondé
difpofition, trois intervalles altérés ou fau x ,
favoir , la tierce majeure du fa au la , trop haute ;
la tierce mineure de la à u t , trop baffe 5 enfin
la quinte du la au m i, trop haute. Ce font les
mêmes défauts que ceux de notre échelle diatonique
j mais le tempérament les corrige.
Dans la fuite, les grecs ajoutèrent à ces fons un
tétracorde conjoint au-deffous, f i , ut, re , mi ,
& un autre en montant, mi, fa , f o l , la : au
moyen de quoi ils remplirent à-peu-près tous
les befoins de la. mélodie, tant qu’elle fe bor-
noit au même ton. Ptolémée. parle d’une corn-
binaifon, au moyen de laquelle on joignait le
fécond tétracorde primitif au premier , en baiffant
le f i d’un demi-ton î ce qui faifoit f i bémol, u t ,
re, mi. Sans doute cela fervoit, logique du ton
d'ut on paffoit à celui de fa quinte inférieure
f a , tranfition familière à la mufique grecque,
ainfi qu’ à notre mufique d’ëgKfe j car il faut
alors en effet un f i bémol. Plutarque enfin parle
d une combinaifon où l’on disjoignoit les deux
derniers tétracordes , en élevant le/à d’un demi-
ton , & fans doute celui de fon oélave au-deffous.
Qui ne reconnaîtra là notre fa , qui eft
néceffaire lorfque du ton dlut on pafle à celui
de fa quinte fupérieure fo l ? Sans doute les cordes
du f i bémol &: du fa diéfe étoient Amplement
ajoutées & non fubftituées à celle dé f i & de
fa. Di fons maintenant quelque chofe des mode«
Sc des genres de la mufique ancienne.
Tout le monde fait qu’ il y avoit dans la mur
fique grecque trois genres ; favoir, le diatonique,
le chromatique & 1 enharmonique. Tout ce qu’oa
vient de dire ne concerne que le diatonique.
C e qui caraétérife le chromatique, eft d’employer
, foit en montant, foit en defcendant,
plufieurs demi-tons de fuite. La gamme chromatique
grecque étoit f i , ut , ut diéfe , m l, f a , fa
diéfe , la. Cette' difpofition , dans laquelle de Put
diéfe on paffe immédiatement au mi, en omettant
le re, paroîtjra fans doute très-étrange j mais Ü