
Il eft inutile de dire ici , par quel méchanifme
un automate, une fois monté , peut jouer jufqu'à
trente airs différens, & les recommencer cinq à
iix fois. Dire que c'eft l'effet d'une pièce de cuivre,
prelque tournée comme les volutes dont l'architecture
orne les chapitaux de l'ordre ionique, &
à laquelle les horlogers ont donné le nom de limaçon
5 ce feroit donner aflurément une explication
très-obfçure : un premier coup-d'oeil jeté dans
Poccafion , fur une machine de cette efpèce , en
fera plus connoître dans un inftant 3 que je ne
pourroisen dire dans l'efpace d'un jour.
On nous fit voir enfuite des automates qui fe
remuoient au commandement, des lampes qui
s’éteignoient d'elles-mêmes à l'inftant d éfilé, &
d'autres objets femblables. On ne pouvoit pas,
dire ici qu'il y avoit dans la table des bafculesf!
des fils d’archal ou de l'aimant. Aucun de ces
objets ne pouvoit y être caché , puifque la table
étoit de verre , portée fur des pieds de criftal j on
ne pouvoit pas loupçonner non plus qu'il y eût un
oifeau de caché dans ces au tomates ., comme dans
le joueur de flûte dont nous avons parlé v la plupart
de ces machines étant de corne tranfparente ,
permettoient au fpe&ateur de s'affurer qu'il n'y
avoit aucun animal.
M. Van-Eftin nous apprit que fa table étoit
formée de deux glaces parallèles , éloignées d'environ
une ligne, mais fi unies par lés bords3 qu'elles
fembloient n'en faire qu'une, La glace fuperieure
avoit dans fon milieu un petit trou imperceptible ,
fur lequel on pofoitles automates. Le vent pouffé i
par le pied de la table , à l'aide d'un fouflïet 3 paf-
foit entre les deux glaces, & fortoit par ce petit
trou , ou il faifoit remuer les machines auflitot &
aufli long-temps qu'on le dèfîroit.
Automate danfant.
C e t automate eft attaché par la main à une barre
de fer A B , qui repréfente une corde bien tendue,
( V oyez fig. 9 3 pl. 3 , de magie blanche , tome F'III
des gravures.') fes bras font inflexibles au coude ;
mais ils peuvent fè mouvoir circulairement auprès
du tronc , étant attachés aux omoplates par une
efpèce d'articulation mobile, que les anatomiftes
appellent Diartkrôfe orhiculaire. On voit aux points
GH & aux points LM , des tuyaux de tôle couverts
de fleurs, qui enveloppent une grande partie
de la barre de fer.Quand le compère,caché au point
Ç , tourne la manivelle RB , pour lui faire-faire
un quart de tout à gauche, Pautomate, dont les
bj^s, en commençant., font parallèles à l'horifon,
5^élèvç, peu à.peu jufqu à; ce que les bras foient
pofés; verticalejpqnt & parallèles au refte du çorpsi.
S ï ep fuivant la meme diie&ion, le compère tait
faute a la manivelle un autre quart de tour, la
partie fuperieure des bras fe portant alors en avant
ypis Je fpeâateur, y entraîne néçeffairemenç le
] refte du corps avec d’autant plus de facilité Qll
j les pieds p e s'qppofent point à fon paflàg^ '
i caule de l'articulation mobile des jambes aveck
: eûmes, & des cuiffes avec le tronc. Le compère
regardant les mouyemens de la machine par n»
petit trou , peut faifir adroitement l'inftant où
une jambe paüè en avant, I autre reftant en arrière
Alors ii iaifte un inftant la machine à califourchon
,. enfuite il la balance par de petite^ fecouffes
& enfin il lui fait faire le. moulinet, en fuivant
le mouvement de l'orcheftre j ce qui fait croire
que la figure eft fenfible aux beautés de la nmfiquei
Quatre circonftances concourent ici à faire iliu-'
non : 1°. Le compère , à l'aide d'un fil d'archal,
finit par détacher delà barre l'automate qui, dans
ce moment, tombe par terre ; ce qui perfuade
que la figure n’étoit point clouée, mais qu'elle
; ferroit la corde en l'empoignant, 8 c qu'elle vient
; de 1? lâcher par un véritable méchanifme. 2*. Les
refforts qu'on fait voir dans le corps de l'automate
confirment le fpe&ateur dans l'idée qu'il ne faut
1 pas de compère. 30; Ceux qui ne cônnoiffent point
comment on a pu faire parler une poupée, s'imaginent
qu'il doit être beaucoup plus facile de
, faire un automate danfant par mécnanique. 4®.Les
tuyaux de tôle , qui enveloppent la barre dans
: tous fes points, excepté à l'endroit où eft attaché
i automate, paffent aux yeux du fpe&ateur pour
etré la barre ou la corde même 5 & comtne
• cçs tuyaux font fans mouvement , & qu'on
. en eft bien alluré par l'immobilité des guirlandes
qui les couvrent & les entourent, on ne s'imagine
point que la barre tourne en dedans , d'où l'on
conclut qu'il n'y a pas de compère, & que la
figure fe meut par fes propres refforts.
(D ecremps.)
Le grand Sultan.
Cette pièce eft connue depuis long-temps à
Paris, fous le nom de petit Turc J,avant : c'en un
automate d'environ 15 à 18 pouces de hauteur,
tenant dans fa main un petit marteau qui frappe
. fur un timbre 5 d'abord , on l'ôte de defîus la
table où il eft , pour le préfenter à différentes
' perfonnes , 8 c pour faire voir qu'il eft parfaitement
ifolé ; enfuite, l'ayant remis à fa place, le
machinifte lui demande s'il veut faire un compli«
ment à fon maître : le petit turc fait ligne que
non, en tournant la tête. Un inftant après, on lui
demande s'il veut faire un compliment-à la compagnie
i il baiffe la tête pour dire qu’oui. Dans
çe moment on préfente un jeu de cartes à un des
fpeéfcateurs, pour en faire tirer une au hazard}'
& fans voir Cette carte, fans s’approcher de l'automate
, on lui ordonne de frapper lè nombre 4®
coups néceffaires pour en exprimer la valeur. L®
petit turc obéit auffi-tôt ; après quoi on lui 'demande
, fi la carte cboifîe. eft un coeur1, un car-:
reau* un pique ou un treffle ; §c à mefure qu'on
ponun®
I nomroe'les couleurs, il remue la tête pour dire oui
i ** ' o_non & _pou..r. dJo.nnnnaer. «unnoe rroénpnonnlffet toujours
conforme à la vérité. W indique aufli le point
ouon a apporté en jetant des des non piques;
S marque d’avance le point qu’ on apportera d un
fécond coup de dés. Une perfonne de la compagnie
ayant caché une petite poupée dans une boite,
ijvifée en plufieurs compartimens, il marque dans
quelle café, 8 c à quel numéro fe trouve la petite
figure; & pour terminer ce tour d’ une manière
■ comique, quand on lui demande enfin, quel eft
le plus amoureux de la compagnie, il indique
i ordinairement un vieillard à lunettes ; ce qui
donne lieu à diverfes plaifanteries.
Explication.
La table où l’on pofe le petit tu rc , eft couverte
d'un tapis verd , qui cache trois bafcules
ou leviers ; ces bafcules peuvent être mifes en
i mouvement, .à l'aide de trois fils d'archal, q u i,
païfant dans les pieds de la table, vont aboutir
i fous le-théâtre, ou. derrière la çloifon. La perfonne
[ cachée, qui fert de compère, tire ces fils d’ar-
çhal, félon le befoin i pour pouffer ces pièces
I jnobiles, cachées dans le piedeftal de l’automate,
qui fe terminent à fa bafe j c'eft par ce moyen
qu'il donne i cette machine divers mQuvemens
à l'inftant defiré, comme quand on fait fonner
une montre à répétition, en pouffait le bouton
de la boite.
Le faifeur de tours tient dans fes mains un jeu
4e cartes, arrangées dans un ordre qu’il fait par
coeur. Pour que les fpe&ateurs ne foupçonnent
point cet arrangement, il les mêle en apparence î
mais dans la réalité, il ne fait que couper, çe qui
| ne dçrange point la çombinaifpn du jeu. L,ççfqu'il
a fait tirer une carte, il coupe pour la denuè.re
[ fois , à l’ endroit de la carte choifie j par cq
moyen , ij fait paffer fous le je u , la carte' qui
étoit immédiatemeut fur celle qu'on vient de tirer.
Alors, regardant le deffous du jeu , fort adroitement
, & d'un clin d 'oe il, il çonneît, fans la voir ^
la carte que le fpe&ateur vient de tirer au hazard.
Il interroge le' petit turc par une queftion, dont
Jes mots, les premières fyllabes, ou les dernières
voyelles, indiquent au compère Jia couleur & la
valeur de la carte,. C ’eft par un ftratagême fetn-'
blablè qu'il fait favoir au compère , le premier
j point porté par un coup de dés non pipes : l'automate
peut indiquer facilement & d'avance, le
I point qu'on apportera d’un fécond coup \ P^r0e
I qu'aux premiers dés non pipés, on en fubftitue
I d'autres qui ont le même point fur toutes les faces.
F Comme la perfonne à qui on les donne, pour-
roit, en les regardant, s’appercevoir de la fuper-
cherie^ pour éviter cet inconvénient, on a foin,
non-feulemen,t de lui recommander 4e tenir
bien cachés dans fes mains, jufqu’à ce qu elle les
Amufemens des Sciences«
je t te , mais encore de les biffer très-peu de temps
fous fes yeux : au lieu de dés qui préfentent la
même face, on en emploie aufli de plombés j c’eft-
à-dire, difpofés de manière, que le centre de gravité
néceflite une chance invariable : & comme
i l pourroit prendre envie à la perfonne qui a jeté
les dés, de les jeter une fécondé fo is , foit par
hazard ou par foupçon, & que le retour du même
point feroit fufpeéter la loyauté des d é s , on évite
ces inconvéniens, en les. retirant promptement.
La boîte où l’on a caché la petite poupée, doit
avoir un fond de cuir affez mou, pour qu’en pafc
Tant la main par-deffous, on puiffe trouver au taét,
la café où eft la petite figure î & cette poupée
doit avoir les dimenfionsnéceffaires pour preffer
un peu le fond de la boîte, quand elle eft fermée.
(D ecremps.)
Le petit Ckajfeur.
Cette petite figure tient un arc dans Ces mains
avec une fléché qui part à l ’inftant choifi par la
compagnie, pour fe porter fur un carton placé vis-
à-vis, au haut d’une colonne. C e carton eft divifé
en plufieurs cercles numérotés, & la fléché fe
fixe toujours au numéro qu’un des fpe&ateurs
à choifi.
Explication.
L’a&ion du reflort qui pouffe la fléché, eft retenue
pour un moment par une cheville que le
compère éloigne à volonté en remuant les bafcules
cachées dans la table. Lorfqu’on preffe cette chev
ille , la fteche fe porte rapidement vers le carton
, comme le chien d’un piftolet fe porte vers
la batterie , lorfqu avec Tindex on poüfle la détente.
En po.fant l’automate fur la tab le, il faut le
placer de manière que la fléché foit dirigée vers,
un des cercles numérotés du carton , ce qui
fera d’autant plus facile que ce carton fera
moins éloigné. Pour faire ehoiftr le numéro vers
lequel on a pointé la fléché, il faut préfenter à
un des, fpedateurs des cartes numérotées, & lui
faire ehoiftr adroitement le nombre en queftion ;
ce qui dépend d’une adrefle particulière , qu'il
n’eft guère pofîible de peindre par des mots. Cependant
on peut dire en général , qu’elle copfifte,
i Q. à mettre par deffous le jeu , la carte qu'on veuç
faire ehoiftr} 29. à la tenir toujours a la même
place, quoiqu'on mêle, ou qu'on faffé feniblant
de mêler, pour faire croire qu'on n’a aucune carte
en v u e } 3°. à faire fauter la coupe , pour faire
pafler cette carte dans le milieu, à l'inftant où
l'on.préfente le jeu ; 40. à faire paffer plufieurs
cartes devant^es mains du fpe&ateur , pour lui
faire croire qu'il peut choiiïr indifféremment ;
50. à faire paffer ces mêmes cartes avec affez de
rapidité, pour qu’il n'en puiffe faifir aucune 5