
caufe du peu de largeur du tuyau i il devôit donc
en réfulter un exhauffement au fluide de ce côté.
Cela n’étoit pas bien fatisfaifant j car quelle
apparence que 1’air , dont les particules font fl
déliées , ne fut pas fort à fon aife dans un tuyau
d’une demi-ligne ou d’un quart de ligne de diamètre
?
Mais quelle que fût cette explication, fatis-
faifante ou non a cet égard , les deuxième & troi-
fième phénomènes des tuyaux capillaires la ren-
verferent entièrement. En e ffet,
II. Lorfqu’au lieu d’un fluide aqueux on emploie
du mercure, ce fluide , au lieu de s'élever
dans la branche capillaire jufqu’au niveau de
la ligne qu’il atteint dans l’autre, ce fluide 3 dis-je,
refle au-deffous de ce niveau.
III. Qu’on faffe l’expérience dans le vu id e ,
tout refte de même que dans l’air ouvert. Cë
n’eft donc pas dans l'air qu’il faut chercher la
caufe du phenomene.
IV. Si l’on frotte l’intérieur du tube avec un
matière graiffeufe, comme du fu if, l’eau , au lieu
de s’élever au-delfus du niveau, relie deffous. Il
en eft de même fl l’on fait l ’expérience avec un
tube de c ire , ou avec des plumes d’oifeaux ,
dont l’ intérieur eft toujours graiffeux,
V . Si l’on plonge le bout d’un tuyau capillaire
dans f è a u , ce fluide s’ y élève auffitôt au-
deffus du niveau de celui du vafe , à la -même
hauteur qu’ i l s ’éléveroit dans le cas d’un fyphon
à branches d’un côté capillaire & de l’autre de
diamètre ordinaire } enforte que , fi on touche
feulement la fupèrflcie de l’eau, elle eft auffitôt
comme attirée à la hauteur que nous venons de
d ire, & elle y refte fufpëndue lorfqu’on retire
le tube de l ’eau.
VI. Si un tube capillaire étant foutenu perpendiculairement
ou fort près de la verticale , on
fait couler fur fa fuperncie extérieure une goutte
d’eau , lorfqu’elle eft arrivée à l’orifice inférieur,
elle entre dans le tube * & fi elle' eft fuffifâm-
ment greffe , elle y occupe la hauteur à laquelle
çlle fe tiendroit au-defïus du niveau dans une
branche dë fyphon de ce calibre,
VII. Les hauteurs auxquelles l’eau fe fondent
dans un tube capillaire , font en raifon inverfe
des diamètres. Ainfî ^ ayant obfervé , par exem-'
p ie , que dans un tuyau d’un tiers de figne,l’eau
s’élève à la hauteur .de io lignes, elle devra s’élever
à l a . hauteur de i q lignes dans un tuyau
d’un fîxième de ligne i à la hauteur de ioo, dans
un tuyau d’ un trentième de ligne.
Pans de pareils tuyaux , l’abaiffement du mercure
au-deffous du niveau , fuit auffi la raifon
inverfe des diamétrès des tubes,
VIII. Si un tube capillaire eft formé de deux
parties ayant des calibres inégaux , comme l’on
voit dans la fig. 9 , pl. 2. Amufemens de Pkyfique 3
où AB eft d’ un calibre beaucoup moindre que BC$
que ab foit la hauteur où l’eau fe foutiendroit dans'
un tube tel que AB , 8c cd celle où il fe tiendroit
dans le plus large BC j qu’ on plonge ce tube en-
forte que l’ orifice du plus petit B , foit élevé au-
deïfus du niveau d’une hauteur plus grande que
cd , l’eau s’y foutiendra , comme on voit.dans la
même fig. 9 , à cette, hauteur c d au-delfus du
niveau : mais fi on plonge le tube enforte quej
l’eau arrive jufqu’ à B , elle s’élèvera tout de fuite
à la, même hauteur que fi le tube eût été du
même calibre que celui d’en haut.
Il en eft de même fi l’on plonge le tube capillaire
en commençant par Je plus étroit.
IX. On fe tromperoit fi l’on imaginoit que les
liqueurs les plus légères s’élèvent davantage. L’ ef-
prit-de-vin eft des liqueurs aqueufes celle qui s’y
éleve le moins :dans un tube où l’eau s’elevoic
à 16 lignes , l’efprit-de-vin ne s’y élevoit qu’à 9
ou 10. En général l ’élévation de l’efprit^de-vin
n’eft que la moitié ou le tiers de celle de l’eau.
Cette élévation dépend auffi de la ' nature du
verre 5 dans certains tubes, l’eau fe tient beaucoup
plus haute que dans d’autres , quoique leurs calibres
foient les mêmer.
Il eft néceffaire de connoître ces phénomènes,
pour fe convaincre que ce n’eft rien d’extérieur
au tube & à la liqueur qui produit ces effets. En
e ffet, les phénomènes font abfolument les mêmes
dans le vùide ou dans l’air extrêmement atténué i
que dans celui que nous refpirons. Ils vârtent auffi
félon la nature du verre dont le tube eft formé !
ils font auffi différens , félon la nature du fluide.'
C ’eft donc dans quelque chofe d’inhérent à la matière’du
tube & a celle du fluide , qu’on doit'les
rechercher.
On donne communément pour caufe de ceç
phénomènes, l’attraélion qu’exercent mutuèfle-
ment le Verre fur l’eau 8c l’eau fur le verre, Çetté
explication a trouvé un grand^.contradicteur dans
le P. Gerdil , religieux Barnabîte 8c habile phyfî-
çien, qui a fait tout fon poffible pour la renver-
fer. M. de la Lande , au contraire , a pris fa dé-
fenfe , & eft un des écrivains modernes qui ont
mis cette explication dans le plus beau jour. Ôn
peut voir auffi à ce fujet, .parmi les mémoires dp
Pétersbourg , un écrit de*M. Weitbrecht , très-
profond 8c très-fàvarit.
D e quelques tentatives du mouvement perpétuel , au
moyen de fyphons capillaires.
• Dès qu’on a vu l’eau s’élever dans un tube capillaire
au-deffus du niveau de celle dans laquelle
il étoit plongé, ou au-deffus de celui où elle étoit
dans le tube non-capillaire , avec lequel il forme
un fyphon renverfé, , on n’a pas manqué d’en
conjecturer la poffibilité du mouvement perpétuel
j car,art-on.dit, fi l’eau s’élève à la hauteur
d’un pouce au-deffus de ce niveau , interrompons
fon afcenfion , en ne donnant au tube
que trois-quarts de pouce : l’eau s’élèvera donc ■
au-deffus de l’orifice, 8c retombant par les côtés
dans le vafe , il s’en élèvera d’autre , 8c ainfi farts ’
ceffe : ou bien-, que l’eau élevée dans la branche
capillaire du fyphon foit dérivée par un tube incliné
dans l’autre branche, il fe fera un mouve-
irient de circulation continue! : 8c voilà un mouvement
perpétuel donné par la nature.
' • Maiÿmàlheureufement l’expérience ne confirme
pas cette idée: - Si l’ on intercepte l’afcenfîon de
l ’eau dans un tube capillaire , en le coupant, par
exemple ÿ à. la-moitié' de la hauteur à laquelle elle
devroit's’élever, l’eà-u ne s’élève pas pour cela au
deffus de l’ orifice pour retomber fur les côtés. 11
en eft de même de l’autre tentative.
> Mais en voici une fort ingénîeufe, & telle, qu’ il
eft bien difficile de reconnoître la caufe de fon
peu de fuccès.
Soit îewtuyau capillaire ABC , (fig- io .p l . 2,
Amufemens de Pkyfique) mais dont la longue branche
foit d’un diamètre beaucoup plus petit que
l’autre,on fuppofe que l’orifice A étant plongé dans.
l ’eau du vafe DE , elle s’élève jufqu’en B , fom-
met de la courbure du tuyau j dans l’autre branche
BC , l’eau ne s’éleveroit que de la- hauteur
CM au-deffus du niveau.
Retournons à préfent ce fyphon , rempliffons-
le d’eau, & plongeons-le à la profondeur fuflifante
pour que l’eaü pût s’élever, comme il a été ditci-
deffus , jufqu’à la courbure B : il paroît évident
& inconteftable que l’eau qui remplira la partie BH, '
forcera en en bas l’eau contenue en CN. O r ,
cela ne peut fe faire fans que l’eau contenue en
AB la fuive 5 ainfî l’eau montera continuellement
de A en B , 8c retombera par la branche BC dans
le vafe. Ainfi voilà un mouvement perpétuel.
Rien de plus fpécieux 5 mais malheureufement
encore l’expérience détruit cette illufion : l ’eau ne
tombe point par la branche BC > au contraire ,
elle remonte jufqu’à ce que la branche, AB foit
fe,ule remplie. ,
Nous croyons devoir joindre ici une autre idée
de mouvement perpétuèl au moyen de deux fy-
phons, quoique cè ne foient pas précifément des
fyphons capillaires qui y foient employés. Elle
mérite d’autant plus d’attention , que ce n’eft
pas un homme fans nom qui l’ a propofée , mais
un homme des plus célébrés avec raifon dans les
mathématiques >7 pour le dire enfin en un mot,
l’illuftre Jean Bernoulli.
Soient, dit M. Bernoulli, deux liqueurs miscibles
entr’elles , 8c dont les pefanteurs fpécifi-
ques foient comme les lignes A B , CD : on fait
que fi deux tuyaux , communiquant l’un à l’autre,
ont leurs hauteurs au deffus de la branche, de communication
dans ce même rapport, on pourra rem-
plirla branche la moins haute du fluide le plus
pefânt , & la plus haute du plus léger , 8c aue
ces deux fluides fe tiendront en équilibre ; d’ou il
fuit que fi la branche la plus haute étoit recoupée
quelque-peu au-defToiis de la longueur qu’elle
doit avoir , le fluide contenu dans cette branche
pourroit- couler dans la plus baffe.
Suppofons maintenant que la branche la moins
élevee EF , (fig. 11.pl . 2) foit remplie d’ un fluide
compofé de deux liqueurs de différentes pefanteurs
fpécifiques , & qu’au point F foit établi un filtre
qui ne laiffe pafïer que la plus légère j que le tube
FG foit rempli de celle-ci j & qu’il foit un peu
moins haut, pour établir l ’équilibre entre la liqueur
de la branche EF , & celle de la dernier®
F G . .
Lès chofes étant ainfi, 8c le filtre né Iaiffanè
paffer que la liqueur la plus légère, celle-ci , en
vertu de l’équilibre rompu , fera pouflee dehors
par l’orifice G , 8c conféquemment pourra, par un
petit tuyau de dérivation, être ramenée dans
i’ orifice E , où elle fe mêlera de nouveau à la liqueur
contenue dans EF ; 8c cela continuera toujours
, car la'colonne de liqueur GF fera toujours
trop légère pour contre-balancer la colonne de
liqueur compofée EF. Ainfi voilà un mouvement
perpétuel) & c’eft celui , dit M. Bernoulli , par
lequel la nature entretient les fleuves au moyen
de l'eau de la mer. C a r , tenant encore aux idées
anciennes fur l’origine des fontaines , il imaginoit
ue c’étoitpar un mécanifme femblable que l’eau
e la mer, dépouillée de fon fel , parvenoit au
fommet des montagnes. Il rejetoit feulement l’idée
de ceux qui prétendoient qu’elle s’élevoit au-
; deffus de fon niveau par une fuite de la propriété
des tuyaux capillaires j car il remarquoit qu’elle
n’auroit pu couler au bas.
Nous n’ofons dire ce qui arriveroit, fi l’on poti-
voit parvenir à remplir lêsTuppofitions de M. Bernoulli
: cependant nous fommes très-portés à
croire que cela ne réuffiroit pas ; & de même que
le raifonnement précédent fur les tubes, capillaires
, quoiqu’en apparence convaincant, eft néanmoins
démenti par l’expérience 5 nous croyons
que celui de M. Bernoulli le feroit pareillement.