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.chante. Nous croyons fuperflu de rapporter ici
c es preuves, qui doivent être connues de tous ceux
^ui -ont quelque teinture de phyfique & de ma-
hématiques.
Nous fuppoferons donc ici d'abord la terre parfaitementfphérique,
telle qu'elle eft fenfibîement,
& nous commencerons par raifonner d'après cette
fuppofîtion.
C e qu’on appelle un degré d’un méridien de la
terre , n’eft autre chofe* que la diftance qu’il y a
entre deux obfervateurs dont les zéniths font éloignés,
en tr’eux de la quantité d’un degré y ou la diftance
géométrique entre deux lieux fous un même
méridien y dont la latitude ou la hauteur du pôle
diffère d tin degré : c’eft pourquoi, fi quelqu’un
-parcourt un méridien de la *crre , en mefurant le.
; chemin qu’il fait,'il aura parcouru un degré, quand
il aura changé fa latitude d’ un degré , ou quand
une étoile voifine de Ton zénith , dans fa première
..ftation, s’en fera approchée ou éloignée d’un
degré.
Il n’eft donc queftion que de choifîr deux lieux
iîtués fous.lin même méridien, dont on connoît
exactement les diftances & les latitudes ; c a r ,
ôtant la plus petite de ces latitudes de la plus
grande, on aura l’arc du méridien compris entre
ces deux, lieux : ainfi l’on fçaura qu’à un certain
nombre de degrés & de minutes, répond une certaine
quantité de toifes. Il n’y a donc qu’ à faire
cette proportion : comme ce nombrë de degrés &
de minutes eft à ce nombre de toifes, ainfi un
degré à un quatrième nombre, qui fera celui des
toifes répondant à un degré. .
Mais comme on'commence par choiïïr fes fta-
tions, qui peuvent n’être pas précifément fous le
même méridien, mais feulement à - peu - près ,
comme Paris & Amiens, on mefure géométrique-
- ment la diftance méridienne entre leurs deux parallèles
; & connoiffant cette diftance , ainfi que
la différence, de latitude des deux endroits, il n’y
a qu’à faire une proportion femblable à la précédente
, & Ton a la quantité de toifes qui répond
à un degré.
C'eft ainfi que M. Picard opéra pour déterminer
la grandeur du degré.terreftre aux environs
de Paris. Il mefura, par une fuite d’opérations
-trigonométriques, la diftance du pavillon de Mal-
voîfine, au fud de Paris, jufqu’ au clocher de la
cathédrale d’Amiens, en la réduifant au méridien,
& la trouva de 78907 toifes. Il trouva d’ailleurs,
par les obfervations aftronomiques que la cathédrale
d’Amiens étoit plus nord que le pavillon
de Malvoifïne de i e 1 1 ' y8//. Faifant donc cette
règle de trois : comme i° 1 1 ' y 8" font à un deg
ré , ainfi 78907 toifes font à 3-7057, il en conclut
qtie ce degré étoit de 57057 toifes.
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On a depuis re&ifié en quelques points la me.
fure de M. Picard, & Ton a trouve ce degré de
57070 toifes.
Corollaires:
I. Ainfi, en fuppofant la terre fphérique, fa
circonférence fera de 20545200 toifes.
II. On trouvera aifément fon diamètre, en fai-
fant cette proportion : comme la circonférence
du cercle eft au diamètre, ou comme 314159 eft
à 100000 3 ainfi le nombre ci-deffus a un qua.
trième, qui eft 653 0196 toifes : ce fera la grandeur
du diamètre de la terre.
III. On auroit fa furface, en la fuppofant unie
comme celle de la mer dans un temps calme, on
l’aüroit, dis-je, de 154164182859200 toifes quar-
rées 5 favoir a en multipliant la circonférence pat
le moitié du rayon, & enfuite quadruplant le
produit, ou plus brièvement multipliant la circonférence
par deux fois le rayon.
IV. On auroit enfin fa folidité , en multipliant
la furface trouvée ci-deffus par le tiers du rayon*
ce qui donneroit 146019735041736067200 toifes
cubes.
Remarque.
L ’opération faite par M. Picard entre Paris
&r Amiens, a depuis été continuée dans toute l’étendue
du royaume, foit au nord, foit au fud,
depuis Dunkerque, dont l’élévation du pôle eft
de 5101 ' 1 7 " jufqu’à Collioure, dont la latitude
eft de 42° 3 1' 16 " : ainfi la diftance de leurs
parallèles eft de 80 31' 1 1 " . Or on trouveit en
même temps, pour la diftance de ces parallèles
mefurés^ en toifes, 486038, ce qui donne pour
le degré moyen, dans letendue de la France,
57051 toifes; mais des corrections poftérieures
l’on réduit à 57038 toifes.
Dans .cette opération, on a eu l’attention de déterminer
la diftance de la méridienne, qui eft celle
de I’Obfervatoire de Paris, avec les lieux principaux
entre lefquels elle paffe. Il paroîtra peut-
être curieux à quelques-uns de nos lecteurs de les
connoître. En voici une table, dont la première
colonne contient les noms des lieux dont 6n vient
de parler. Dans la fécondé on voit le nombre des
toifes dont ils font éloignés de la méridienne, 8c
la troifième marque de quel côté ils font fitués,
à l’eft ou à l’oueft. On a marqué fur la méridienne,
par un pilier, l’endroit où elle eft rencontrée par
la perpendiculaire tirée fur elle du clocher de la
cathédrale de Bourges.
Table des lieux de la France les plus voifirts de U
méridienne de £ Observatoire de Paris.
Fort <le Revers. . . . , , . . i2o6T /Eft.
Dunkerque. . . . . . . . . . . 1414 Eft*
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[Saint-Omer...................... ... • > 3011 Eft.
[Dourlens. ■ . • •" * • • • ■ ■ Oueft.
[villers-Boccage. . . • ■ ■ 580 Oueft.
1 Amiens.' • • • • • • * • • * 1152 Oueft.
feourdon. . . .. -, • • • • • • • 2341 Eft.
■ Saint-Denis. . . . - - Eft.
■ Montmartre. 1 . • • • • 0
J Paris. 0 '
ËLay. ...................................* • • p
,Juvify.. . • • • *' • • Ï 350 Eft.
; Orléans.;. . . . . f-* » * - • 16396 Oueft.
■ Bourges. . . . . . . . . . . . 25j8. ‘ Eft.
■ Saint-Sauvier. . . . . • . • • . . H î Oueft.
■ Mauriac. . . . • • • • • • • • 582 ’Oueft.
■ Rhodéz. . . . . . . . . . . . ?p8 Eft.
■ Alby. . . . . . . . 8316 Oueft.
■ Caftres. . . . . 3 9 ” Oueft.
■ Carcaffbnfi............................. . . . 24 6 Eft.
»Perpignan. ................................... 23461 - Eft. .
■ Sommet de Canigou. . . . . . 4664 Eft.
I De-là la méridienne de Paris, prolongée au fud,
I entre dans TEfpagne, biffant Gironne à l’orient,
| à environ T de degré de diftance, paffe à 2 ou
■ 3000 toifes à l’ eft de Barcelonetraverfe Tille
■ de Majorque fort près &: à l’eft de cette v ille ,
■ entre en Afrique laiffant Alger à 7 minutes de
»degré à Teft. Nous ne la fuivrons pas davantage
l à travers des peuples & des pays inconnus. Elle
■ fort de l’Afrique dans le royaume d’Ardra.
P r o b l è m e X.
De la vraie figure de la terre.
K Nous avons dit que divers phénomènes aftro-
I nomiques & phyfiqiies prouvent la rondeur de la
■ terre; mais ils né’ prouvent 1 pas qu’elle foit un S^he parfait. On n’a pas plutôt fait ufage de
i méthodes bien précifes pour la mefurer, qu’on a
| commencé à douter de fa fphéricitê parfaite. Enfin
1 il eft aujourd’hui démontré que notre habitation
■ eft applatie par les pôles, & relevée fous l’é-
â quateur, c’elTà-dire que fa coupe, par fon axe ,
1 au lieu d’être un cercle, eft une figure approchante
i de 1 ellipfe, dont le moindre axe eft celui de la
p ie r re , ou la diftance d’un pôle à l’autre; & le plus
B l ! anc^ 3 k ^^am®tre de l’equateur. C ’eft Newton
| \ Huygens qui les premiers ont établi cette vé-
» rite fat des raifonnemens phyfiques, tirés de la
I j°toe 1centrifuge & de la rotation de la terre ; &
■ les obfervations aftronomiques, faites il n’y a pas
I .©»cor© 40 ans, y ont mis le dernier fceau.
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Le raifonnement de Huygens & Newton étoit
celui-ci. En fuppofant la terre primitivement fphérique
& immobile, ce feroit un globe couvert
d’eau dans une grande partie de fa furface. Or il
eft démontré aujourd’hui que la terre a un mouvement
de révolution autour de fon axe. Tout le
monde fçait d’ailleurs que l’effet du mouvement
circulaire eft d’écarter les corps circulans du centre
du mouvement : ainfi les eaux qui feront fous '
l’équateur perdront une partie de leur pefanteur ,
& il faudra qu’elles s’élèvent à une plus'grande
hauteur, pour regagner par cette hauteur la force
néceffaire pour contre-balancer les colonnes latérales
étendues jufqu’aux autres points de la terre,
où la force centrifuge qui contre-balance la pefanteur,
eft moindre, & agit moins directement. Les
eaux de l’océan s’élèveront donc fous l’équateur,
aufli-tôt que la terre, fuppofée d’abord immobile.,
prendra un mouvement de rotation autour de foa
axe : les parties voilines de l’équateur, s’élèveront
un j>eu moips, & celles du voifinage du
pôle s’afraifferont ; car la colonne polaire, n’é prouvant
aucun effet de la force centrifuge, fe
trouvera la.plus pefanté de toutes.
On ne pourroit guère infirmer ce raifonnement*'
qu’ ën fuppofant que le noyau de la terre fût d’pne
forme allorigée, ou en fuppofant dans fon intérieur
une contexture fînguliere, & adaptée exprès
à produire cet effet ; ce qui n’ a aucune proba*
bilité.
On s’eft cependant obftiné pendant quelque
temps dans le Continent à ne pas admettre cette
vérité. On fe fondoit principalement fur la mefure
des degrés du méridien exécutée en France,
par laquelle il paroifloit que ce degré étoit moindre
dans la partie feptentrionale de la France ,
que dans la partie méridionale : il en réfulteroit
! en effet pour la terre une figure fphéroïde allongé«'
par les pôles, & voici comment.
Si la terre étoit parfaitement fphérique, il fau-
droit s’avancer également fous un méridien, pour
que la hauteur du pôle parût varier également. Si
s’avançant de Paris vers le nord, par exemple,
de 57070 toifes, la hauteur du pôle varie d’ui»
degré ,• il faudroit s’avancer encore de 5707®
toifes au nord, pour que la hauteur du pôle augmentât
4e nouveau a’un degré ; & ainfi- dans
tout® la circonférence d’un méridien. Donc , s’ il
arrive qu’ à mefure qu’on avance vers le nord, il
faille faire plus de chemin pour un changement
de latitude d’un degré, il en faudra conclure que
la terre n’ eft pas fphérique, mais qu'elle eft plus
applatie, moins courbe vers le nord ; que cette
courbure enfin va en diminuant à mefure qu’oa
approche du pôle ; ce qui eft le propre a ’un«
ellipfe dont les pôles de rotation feroient aux extrémités
du petit axe. Daas le cas contraire , ce
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