
convaincre de la vérité de ces deux prédictions 3
& nous lûmes le vers fuivant ;
Forts , vas , flos , Jefus , p a x , rex jp « , lu x ,
via j f o l , dux.
Pour faire ce tour , tel que vous venez de le
voir 3 me dit M. Van-Eftin, je réunis quatre
moyens. D’abord, je fais ufage des petits clous
dont vous avez parlé j mais truand je m’apperçois
que ce moyen eft foupçonné de ceux devant qui
) opère 3 je fais couvrir la boîte d’une ferviette ;
ou d’ un mouchoir 3 pour m’ ôter le moyen de voiries
petits clous. Je lorgne alors la boîte avec une
lunette qui contient une aiguille de bouffole ,
dont la direction m’annonce la combinaifon des
tablettes } auflî-tôt que je connois cinq à fix
mots3 je fubftitue adroitement une autre lunette
où il n’y a point d’aiguille. Je laiffe cette dernière
fur la table , comme.par oubli, & ceux q u i,
comme vous , foupçonnent que j ai employé^ le
magnétifme , ne manquant jamais de la prendre
pour la démonter , font toujours très-étonnés de
n’y rien voir. „
Pour compliquer cette opération, je m’adreffe ,
avant de faire le tour , à quelqu’un de la compagnie
à qui je fais , tout bas, une prédiction obf-
cure te lle , par exemple, que celle-ci :
« On va ôter le mot Rex de fa place , pour le
m mettre à la place voifîne : rappeliez-vous bien
oj le mot Rex ».
La perfonne à qui je m’adreffe , ne fachant
point où fe trouve ce mot, ignore par conféquent
quelle eft cette place voifîne dont je parte > & ;
s’ imaginant, dans cet inftant, que je fais réellement
quelque chofe d’avance , elle juge déjà de
la vérité de ma prédiction, par 1 air d affùrance •
-, avec lequel-je la fa is , & enfin crainte de faire
manquer le tour j elle ne s’ occupe qu a fe rap-
peller le mot Rex.
Quand je fais enfuite , à l ’aide des clous ou de
la lunette , à quelle place fe trouve ce mot ;
s’ il e ft, par exemple , le fixième , je me vante
aufli-tôt d’avoir prédit qu’il occuperoit ce rang.
Je demande à la perfonne à qui j ai parlé , quel
eft le ' mot qui fe trouve à la fixième place ?
Cette perfonne répond, en nommant tout Amplement
le mot Rex ; elle croit que cette place voi-
fine dont j’ai parlé eftla fixième, & ne fait pas
attention que fi ce meme mot fe trouvoit, par
exemple , à la neuvième place , je ne ferois
mention que de celle-ci dans la demande que je'
lui fais.
Le dernier moyen que j’ai employé , eft celui;
des encres fympathiques.
Dans le premier cacheté que j’ai remis àM. H ill,
j ’avois écrit d’avance les mots fuiyans , difpofés
en trois lignes de cette manière ;
Le vers formé dans la boite finira par le mot
R e x , lu x , pax , d u x , f o l ,
fp e s , fo n s , vas , flo s , Jefus.
Si tous ces mots avoient été bien l i f i b l e s , ils
auroient préfenté un fens abfurde,. & u n e faute
de grammaire} mais la première ligne fe u te 'é to i t
écrite avec de l’encre ordinaire, & les d ix mots
formant les deux autres lignes, étoient é c r i t s avec
de l’encre fympathique invifible, faite a v e c du
vinaigre diftillé , chauffé avec un peu de lith a rg e ;
de forte q ue , fi l’on avoit ouvert Je p a p ie r dans
l’inftant o ù - je l’ ai donné à garder, il n’ auroit
préfenté que ce qui fuit:
«« Le vers formé dans la boîte finira par le mot
Quand j’ ai fu que le mot Va* étoit le dernier,
j’ai rendu ce mot noir & vifible, en paffant fur
le quatrième point de reiifeignement, .que j’avois
mis fur le papier, mon pouce mouillé d’encre
fympathique, faite avec de l’eau, de la chaux
vive & de l’ orpiment.
Les neuf autres mots reftant invifibles, vous
n’avez pu li r e , fur tout ce qui étoit écrit,que
les mots fuivans , arrangés- de icette manière :
Le vers formé dans la boîte,finir a par le mot
, I 1 D u x I
Voilà par quel art je -vous ai fait croire que
j’ avois écrit d’avance le ffeul mot d u x , tandis
qu’ils étoient tous écrits, & qu’ il dépendoitde
moi de faire paroître, au lieu de celui-la, un
autre mot quelconque félon le befoin.
Après ce la , M. Van-Eftin me préfenta dans :
une corbeille, fix paquets de cartes, fur chacune
defquelles étoit écrit un des mots fuivans :
Carpe ( partie de la, main dans le. fquelette
carpe poiffon , parce ( mot la t in , ) Lia faur v
Racket, parc, c ie l, polacre.vaiffeau Levantin, cale
punition de matelot, roc , cape voile de navire» P0'
laire éto ile, l i e , Pop e, polipe Jnfetfe , Aire en
A r to is , Acre en R ale f i n e , poiré, pore, 1°DP_
oifeau, P ie pape, , iie.colere, p ô le ,a r c , or*
c le , palier , .col, pal terme de blafon, pair de tran f i
lac de Geneve.ou de Confiance, rple deux pnges ,
d’un alleur ; Pia auteur d’un excellent ouvrage/'
mort des noyés, airefurface, pile de boulets “a,is.
parc d’artillerie, lic e , police3 pilore, p ic ,
râle oifeau roi des caille s, raie poiffon, c?rl fi
■ réal, cor de chaffe, cor au p ied , pipe, f ol!
ocré, acre mefure de terrein, pape, cape manteau,
«wpier> râpe, pari, place, paroli, race, carie,
raie ligne, creil, craie, oe il, C lio , criLrope mot
angtois , qui fignifie corde , piole cabaret à voleurs ,
félon leur langage, re , la , notes de mufique, lo ir ,
poire, câpre, api, opéra, o r , rue de Lape, rue
ieC le r i, parole-, àçier, é p i, corail, S. Lô , S.
Clair, Ste. Cla ir, S. C ir , cire, Icare, porc, répi,'
air élément, air a chanter, Priape, aï quadrupède, 1
copie,.........
Trente-fîx mots latins, dont voici les principaux,
clari , porci, cleri, opéra , ora , loca , ripa,
par, pari, caro, p ica , leo . .& c.
Deux articles : le , la.
Vingt adjeétifs ou participes, tels que ceux-
ci: pâle, âcre, âpre, râpé, lié , plié, p ilé, pair,
aîlé, &c.
J)eux pronoms : i l , ce.
Près de foixante verbes, dont voici les principaux
:
L ie , c rie, parle, p lie , râpe, p â lir , plaire,
placer, pioler, pila, opéra, cira, lire, piper, po-
Lcer.. .-.&c.
Deux adverbes, par-ci, là ,
Et plufîeurs autres fubftantifs, fa voir : pli,-pré,
île, lare, proie,, Caire en Egypte , Coire au pays
Grifon, Io, oie , Péra Faubourg de Confiantinople,
cap, P ô , L o ire , le roi.,
M. Hill, après m’avoir fait remarquer tous ces
mots fur autant de cartes, me pria d’en choifir
un fecrettement, de la marquer d’ un coup de
crayon, ou d’en déchirer un petit coin pour la
reconnoître, & d’aller l’attacher à la tapilferie
de la chambre voifîne. Je choifis en cachette la
carte fur laquelle étoit écrit le mot polipe ; &
quand je l’eus apporté dans l’autre chambre félon
fes defirs, il me préfenta à fon retour une petite
boîte d’optique, dans laquelle je v is , à l’aide
d’une. bonne lentille, un très - grand tableau,
repréfentant des mares, des ruiffeaux & des po-
lipes d’eau douce, avec ces mots en lettres de
feu : î
......................... La merveilleufe bête.
Qui peut impunément Iaiffer trancher fa tête.
^ ous v o y e z , me dit M. Van-Eftin , que je fa-
vois d’avance le-mot que vous choifiriez, puif-
que j’avois ainfi difpofé dans cette b o îte , le tableau
qui vous en donne l’explication.
Rien ne prouve, lui dis-je, que vous l’ayez fu
d avance ; il eft poffible que vous ayez profité
de l’inftant où j ’etois dans l’autre chambre, pour
arranger ce tableau dans la boîte , & pour allumer
, par derrière, les lampes qui le rendent fi
Amufemefls des Sciences.
éclatant. Il n’y a qu’une chofe , ajoutai-je , qui
m’étonne & qui m’embarraffe ici ; c ’eft de fa voir
comment vous avez pu connoître la carte que
j’ ai choifîe} cai-je ne crois pas que vous ayez
eu le temps de les compter, oc de les examiner
en fi grand nombre, pour favoir celle qui manque.
Vous méritez, me d it-il, M. Van-Eftin, que
je vous faffe connoître mes moyens. Alors il me
montra une lunette avec laquelle je v i s , à travers
la muraille, la carte choifîe. Je crus d’abord
que le mur étoit. percé ou diaphane} mais
la lunette produifit.le même e ffe t, lors même
qu’on eût mis deux gros in-folio du côté du verre
objeètif, pour intercepter les rayons.
Cette dernière circonftance devenoit pour moi
une nouvelle énigme, dont le mot me paroifloit
très-difficile à trouver ; il m’en donna ainfi l’explication.
( Voyei la fig. l , pl. l , de Magie blanche,
tome V I I I des gravures.
Le mur n’eft point percé au point A , ou répond
la lunette } mais il l ’eft au point B , où fe trouve
la boîte qui lui fert de piedeûal. Les rayons qui
portent l’image de la carte choifîe C , font réfléchis
au point D , par le miroir E F , enfuite f
par le point G , du miroir IH } par ce moyen
l’oeil K , croiç. voir directement au point L , la
carte qui eft au point C .
‘ D iB is majora taceoo.
Nota. M. Van-Eftin avoit autant de tableaux ,
qu’ il y a de mots dans le catalogue ci-deflùs } il
les mettoit dans fa boîte d’optique, félon le
befoin , ' auffi-tôt qu’il connoiffoit, à l’aide de fa
lunette, la carte qu’on venoit de prendre. Au bas
de chaque tableau, étoit un diftique ou un hé-
miftiche, qui donnoit la définition du mot choifî.
Toutes ces définitions formoient enfémble un
logogryphe feientifique, que nous allons donner
ici en faveur de ceux qui voudroient exécuter ce
tour de la même maniéré. Nous efpérons qu’on
le verra avec d’autant plus de plaifîr , que cette
efpèce de poème eft en littérature, ce que les
tours font en phyfique.
L O G O G R Y P H E-C H A R A D E.
Si l’on en croit Winflov/ , V erdier, la Peyronie ,
Et les autres do&eurs en Oftéologie ( i ) ,
Ma derniere moitié fait le tiers de ma main :
Le<fteur, je fus toujours catholique romain ;
Avec les vrais croyans je ne fis point de fehisme ,
Quoique à moitié plongé dans le polithéifmc ( i) .
Sur terre je vécus loin des champs de B »fton,
Ti) Partie de l’anatomie qui traite du fquelette.
U) Syttême qui admet l’cxiftcncc de plufeurs dieux.
Bb b