
faut la décanter de deffus l'alun qui peut reflet
au fond du vafe. (cette ohfervation eft des plus
importantes > car fi on laiffoit cet alun non-dif-
fous dans la liqueur qu'on va préparer , le minér
a l , , en féchant, terniroit un peu le tableau,
& occafionneroit même quelques taches blanchâtres
aux endroits où la liqueur s’amafferoit en-
s'égouttant. ) Dans cette eau bien imprégnée d'alun
, on met pour quatre ou cinq fols de colle
de. poiffon bien claire & bien nette 5 lorfque cette
colle a trempé vingt-quatre ou trente heures, on
fait bouillir l'eau pour que la colle achevé d efe
fondie entièrement. On paffe enfuite cette li-
ueur à travers un linge blanc , pour ôter le peu
e réfidu qu'il peut y avoir : on verfe cette eau
ainfi imprégnée de fel alumineux & de colle, dans
une bouteille de verre , où l'on a mis auparavant
trois chopines d'eau-de-vie non colorée , à laquelle
on a ajouté un bon verre d'efprit-de-vin.
Voilà la manière de préparer la liqueur qui fervira
a fixer le pâftel, & l'on peut en faire une quantité
plus ou moins grande, en augmentant les
dofes en proportion, fuivant la grandeur des tableaux
qu'on voudra fixer. ‘Mais cette même liqueur
peut reffervir à fixer d'autres tableaux.,
tant qu'il en refte une affez grande quantité. C e pendant
, quand la liqueur fervant a fixer le paf-
tèl , eft un peu vieille , elle en affoiblit le brillant.
* Voici préfentement la manière de procéder.'
On prend un grand baffin (1) ', foit de plomb ;
foit d'une autre matière quelconque-, qui foit
affez long & affez large pour pouvoir y plonger le
tableau : on fait chauffer au bain-marie la liqueur
dont nous venons de parler , prenant bien garde
fi la colle de poiffon s'eft bien diffoùte. Car avant
de chauffer la liqueur , on la voit dépofée au
fond du vafe , fur-tout lorfqu'il fait froid. On
place à chaque coin de ce grand baffin un morceau
de plomb qui ne foit recouvert de la liqueur
que d’une ligne ou un peu plus : on prend le
tableau horifontalement, & on le plonge légèrement
dans cette liqueur. Ces plombs, qu'on a
eu foin de mettre fur les côtés , empêchent qu'ils
ne plongent trop avant. Plonger le tableau dans
la liqueur & l'en ôter , doit être l'opération d'un
clin d'oeil. On retire le tableau, toujours horifontalement
, & on le place , dans cette même pofi-
tion , dafts quelque ehdroit où il ne foit fou-
tenu que fur fes deux bords , comme fur le dos
de deux chaifes : on le laiffe ainfi fécher. Lorfque
Je tableau eft bien fe c , on juge de l'effet qu'a
produit la liqueur ; on reconnoît que toutes les '
(1) Nota. Le baffin de métal peut être fuppléé par
une toile cirée dont on relève les bords. Cette toile
eft également propre à contenir la liqueur, & plus
commode que le baffin , en ce qu’on peut- l’allonger
«u la raccourcir fuivant l'étendue de ce tableau.
couleurs fe font confervées dans leur fraîcheur
primitive : car il n'eft pas poffible de diftinguer à
la vue les endroits du tableau qui ont été fixés,
de ceux qui ne le feroient pas. : on ne le peut
qu’en y portant le doigt. Le paftel qui n'a point
été fixé s’efface fous le d o ig t, au lieu qu’on peut
toucher à celui qui a été fix é, fans en enlever
la moindre parcelle.' Loin que le tableau foit altéré
, on dit que les teintes en ont plus d'union,
fans être affaiblies. Notre amateur dit même que
l'eau n’y fait aucun to r t; &: il a éprouvé avec
fuccès que le paftel fixé pouvoit foutenir un vernis
qui lui furvît de glace. Voici fon procédé.-Après
que la peinture en paftel eft fixee & fèche, il
faut avec une brodé douce appliquer deffus une
ou deux couches de colle de poiffon fondue &
affez forte pour qu'elle forme comme une efpèce de
gelée : lorfqu'elle eft refroidie , on y mêle environ
un tiers d'efprit-de-vin ou de bonne eau de-
vie non colorée. Quand cette préparation eft fe*
che , on y applique du vernis dont on fe fert
pour les découpures : il y fait le même effet que
fur les tableaux en détrempe.
Les tableaux fixés au paftel , ont l'avantage de
pouvoir être retouchés : cardes crayons y mordent
comme auparavant. On peut même encore y
donner quelques coups de force au pinceau avec
des couleurs en détrempe. Cette méthode, qui
fert à fixer le paftel, réuffit de même pour fixer les
deffeins au crayon.
Autres procédés K
On indique auffi le procédé fuivant pour fixer
le paftel. Il fau t, dit-on , pulvérifer de la gomme
arabique en poudre impalpable, & en la faifant
paffer à travers un tamis très fin , en couvrir toute
la furface du tableau d'une manière fi légère,
qu'elle y produife l ’effet d'une gaze tendue fur
le tableau. On prend une cucurbite avec fon cha-
iteauf on la remplit d'eau bien claire, on la fait
jouillir j les-vapeurs fartent par le"bec du chapiteau
5 on les dirige fur le tableau, ayant foin d attacher
une éponge à l ’extrémité du b e c , de peur
que des vapeurs condenfées & réduites en eau ,
ne tombent fur le tableau , c e qui le gâteroit.
La vapeur de l'eau dif|but la gomjne, qui forme un
vernis fur la peinture & fixe le paftel.
N'y a-t-il point lieu de craindre qu'en faifant
ufage de ces procédés -, on n'altéré îa couleur des
paftels ? Ceux où l'on n'emploieroit que de fim-
pies vapeurs, paroiffent devoir être d’une réuffite
plus heureüfe. Il faut mettre' diffouùre du fucre
.candi dans l'eau-de-vie ou dans de l'efprit-dè-
Vin, faire bouillir ces liqueurs jufqu'à évaporation
, expofer le tableau fur ces v aleurs , par le
côté oppofé à la peinture : elles pénétreront à
travers le papier & fixeront le paftel, fans en altérer
les couleurs. On peut mettre un gros de fucre
candi fur une once d'efprit-de-vin ou d'eau-de-
vie : fi le papier eft épais 3 comme celui dont
fervent les ingénieurs pour leurs plans, il faut
faire ufage d'efprit-de-vin. Néanmoins un crayon
quelconque mouillé a une nuance beaucoup plus
foncée que lorfqu’il eft , fec 5 & cette nuance eft-
d’autant plus fo r te , que la matière qui la compofe
a moins de corps. C'eft par cette raifon que les
couleurs préparées à l'huile ou au vernis, font
beaucoup plus vives que celles en détrempe ,
parcequ’elles relient telles quelles ont été préparées.
Le paftel employé n'eft autre chofe qu une
pouffière de crayon fec , qui prend un ton différent
il on la mouille : ainfi il eft confiant-que la
gomme arabique dont il faut imbiber le tableau ,
peint au p a fte lfa it l'office d'un vernis à l'eau ,
qui doit néceffairement le brunir, für-tout fi on
y ajoute par deffus un vernis gras, ainfi que le
confeille l'auteur. 11 eft même à craindre que le
tout ne foit di(cordant, puifque les teintes fines,
tirées des végétaux & des craies ÿ produiront un
ton plus brun que la teinte voifine, qui fera faite
avec des crayons formés de terres & de minéraux.
Il faudroit, pour parer à cet inconvénient, que
le tableau ne fût peint qu'avec des crayons d'une
compofition analogue > encore en réfulteroit-il une
nuance plus brune.
Mais on tenteroit inutilement d'expofer le tableau
fur la vapeur d'une liqueur échauffée ,_
pour fixer le paftel par la chaleur & l ’humidité :
car les parties glutineufes n’étant pas les plus volatiles
, ne s'élèvent point affez dans ces vapeurs
pour produire la fixation.
Le prince San Severo a effayé de fixer le paftel
en humeêlant le papier par derrière feulement ;
mais il a rencontré beaucoup de difficultés. Une
eau gommeufe, propre à fixer le paftel, étendue
avec un pinceau derrière le tableau, humeêle
fort bien certaines couleurs > mais la laque , le
jaune de* Naples & quelques autres relient toujours
fèches & ne fe fixent jamais. Une matière hui-
îeufe -, quelque tranfparente & quelque fpiritueufe
qu'elle foit^ ternit les couleurs & leur ôte leur
plus bel agrément : l'huile de térébenthine, quoiqu'elle
foit claire comme de l'eau, a le même inconvénient
; d'ailleurs , elle s'évapore dans l'efface
de deux ou trois jours. Les couleurs alors
ne refient pas bien fixées & s'enlèvent avec le
doigt.. La gomme copal , la gomme élémi , le
fandaraque , le maflic , le karabé & généralement
tous les vernis à l'efprit-de-vin & les réfines
©bfcurciffent les couleurs & rendent le papier
tranfparent, nébuleux & comme femé de taches.
La colle 4 e poiffon eft la feule matière que
le prince de San Severo ait trouvée propre à cet
ufage : voici fon procédé. Il prend trois onces de
belle colle de poiffon $ il la coupe en écailles
minces & les met infùfer pendant 24 heures dans
djx onces de vinaigre diftillé : il met là-deffus
.48 onces d’eau chaude bien claire * & il remue ce
mélange avec une fpatule de bois, jufqu'à ce que
la colle foit prefqu'entierement diffoure. Le mélange
étant verfé dans un vafe de verre , que l'on
enfonce dans le fablé à deux on trois doigts de.
profondeur , on met la poëlle qui renferme le
fable fur ufi fourneau à feu de charbon ,\ mais
on le ménage de manière que Iav liqueur ne bouille
jamais, & qu'on puiffe même toujours y tenir le -
doigt : on la remue fouvent avec la fpatule , jufqu'à
ce que la diffolution foit entière; après quoi
on laiffe refroidir la matière , & on la paffe par
le filtre de papier gris fur un entonnoir de verre ,
en obfervant de changer le papier quand la liqueur
a trop de peine à paffer.
S’ il arrive qu'on n'ait pas mis affez d'eau , que
la colle foit d'une qualité plus glutineufe , qu'elle
ait de la peine à paffer , & qu'elle fe coagule fur
le papier , on y ajoute un peu d'eau chaude ; on
fait diffoudre delà matière en la remuant avec la
fpatule de- b o is , & on la filtre. L'expérience fait
juger de la quantité d’eau néceffaire pour cette
opération. Quand la liqueur eft filtrée, on la verte
dans une grande bouteille, en mettant alternativement
un verre de la diffolution & un verre
d’ efprit-de-vin bien reétifié , pourqu'il v ait un
égal volume , ,plutôt qu'un poids égal des deux
liqueurs. La bouteille étant bouchée , on la fe-
coue pendant un demi-quart d'heure , pour que
| les liqueurs foient mêlees ; & l'on a tout ce qui
eft néceffaire pour la fixation du paftel.
Le tableau qu'on veut fixer étant placé horifontalement,
la peinture en deffous ,bien tendu par
deux perfonnes , on trempe-un pinceau doux
& large dans la compofition décrite ci-deffus
( i l faut q ue 'le pinceau foit de l’efpè ce de ceux
qu'on emploie pour la miniature , mais qu'il ait
au moins un pouce de diamètre ) : 011 le paffe fur
le revers du papier , jufqu'à ce que la liqueur
pénètre bien du côté de la peinture , & que
l'on voie toutes les couleurs humeêlées & lui-
fantes , comme fi on y ayoit paffé le vernis. La
première couche pénètre promptement, à caufe
de la féchereffe au papier & des couleurs abfor-
bantes : on donne une fécondé couche plus légère ;
il faut avoir foin de donner ces couches bien également
, & de manière qu’il ne s'y faffe aucune
tache : après q u o i, l’on étend le papier fur une
table bien unie , la peinture en dehors & le revers
fur la tab le, pour les laiffer fécher à l'ombre
& peu-à-peu : il fuffit de quatre heures en
été , l'on a 'un tableau fixé , fec , fans aucune
altération & fans aucun pli. Quelquefois il y
a des couleurs qui ne fe fixent pas allez par cette
première opération , & l'on eft obligé de donner
une nouvelle couche de la même manière que les
précédentes.
Il eft utile que le peintre repaffe enfuite les
couleurs avec le doigt l'une apres l ’autre 3 cha-
1