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tail de ce qui fut dit en cette occafion ; cepen- !
dant, pour prouver qu’on peut juftifier en quelque
façon , l’épithète de favant donnée à cet animal «
je rapporterai ici une efpèce de converfation qu’ il
y eut entre l’ épagneul & trois ou quatre favans
de la compagnie.
Un marin commença par demander combien il
y avoit d’arches au pont de Weftminfter ? L’épagneul
répondit, en pofant le pied fur le nombre
15. On lui demanda enfuite combien il y avoit
d’arches au pont Euxin ? Ici le chien garda le
filence, comme s’il s’étoit cru ihfulté par une
pareille queftion, & comme s’il avoit voulu appliquer
le proverbe 3 a fotte demande point de re- :
ponfe. Cependant, ayant reçu ordre de fon maître .
de fatisfaire celui qui l’ interrogeoit, il répondit,
qu'il n’y a point d’arches au Pont-Euxin,& I’ex- ,
prima très-clairement en pofant le pied fur un
zéro ; là-deffus le marin raconta que l’annéè précédente
il avoit fa it, en fix femaines, un très-
hèureux voyage, depuis le Pont-Euxin jufqu’au
Pont de Londres. L’épagneul ne trouvant rien
d’extraordinaire dans un pareil voyage , pofa le
pied fur différentes lettres, formant une réponfe
laconique qui , étant interprétée & commentée
par fon maître , fignifioit que d’autres voyageurs
avoient fait des chofes plus étonnantes, puifqu’ils
avoient parcouru fix cents lieues en une demi-
journée. C ’eft impoffible , répliqua le marin ; il
n’y a pas encore eu de ballon aéroflatique qui
ait pu parcourir un fi grand efoace en fi peu de
temps : je ne dis pas, répondit l’ epagneul, a l’aide
de fon interprète , qu’ on ait employé un ballon
pour cet effet, puifque je parle d’ un voyage par !
mer.
Le marin dit alors que la chofe étoit encore
plus impolfible de cette manière, puifque le plus
fin voilier ne filant qu’environ quinze à feize
noeuds , c’ eft-à-dire , ne parcourant qu’ environ
cinq lieues par heure, n’avoit pas affez de rapidité
pour faire fix cents lieues en une demi-
journée.
L ’animal perfifta à foutenir fofl alfèrtion î & le
marin alloitjpropofer un pari confidérable, lorfque
l’épagneul oc fon maître ajoutèrent qu’ ils avoient
fait ce voyage dans un pays où ils avoient allumé
du feu avec de la glace.
Si vous voulez faire preuve d’ érudition, dit le
marin, je vous prie de ne pas entaffer un fi grand
nombre d’abfurdités. Le maître du chien,adreflùnt
alors la parole à cet animal, luffit cette queftion :
parlez, mon cher ami, n’eft-il pas vrai qu’on peut
allumer du feu avec un morceau de glace, ii on
le taille avec un couteau comme un verre de lunette
, pour lui faire réunir en un feu! foyer les
rayons du foleil fur un petit tas de poudre ? L’animal
aux yeux bandés baifia la tête pour dire
c H i
ou i, comme s’ il avoit parfaitement compris c*
qu’on lui demandait.
Le chien a raifon fur ce point, dit le marin
mais cela ne prouve pas qu’on puilfe taire 600
lieues dans une dfemi-journee. Pourquoi non, répondit
le chien, fi c’ eft dans un pays où l’on peut
le repofer 48 heures dans une feule après midi.
En quel climat, dit le marin furpris, qui commença
cependant d’entrevoit fon erreur^ L’épagneul
pour réponfe, indiqua la Zone glaciale j en
effet, dit fon maître , il y a dans cette Zone des
joues de différente longueur , depuis 24 heures
jufqu’ à fix mois j Si le capitaine C o o k , lorfquif
a navigué au-delà du cercle polaire, a fuivi ua
parallèle où le jour étoit feulement d'un mois, il
a pu en une demi-journée, c ’eft-à-dire, en 36$
heures, parcourir l'efpace de 600 lieues.
Le marin voulant à fon tour embarraller l’épagneul
& fon maître,leur demanda s’ils connoiffoienr
un endroit où le foleil & la lune peuvent fe lever
à la même heure 8 c ail même initant, lors même1
que ces deux aftres font en oppofition, c’eft-à-
d ire , quand la lune eft pleine. L’ animal &c fon
maître répondirent que c’eft au p ô le , & ajoutèrent
que dans ce même endroit le foleil fe trouve
toujours au point de mid i, parce que tous les
points de l’horifon font au midi pour les habitans
du pôle,.
On jurifconfulte de la compagnie dïfputa longtemps
contre l’épagneul,parce que celui-ci préten-
doit qu’ un homme mort à midi peut être quelquefois
l’héritier d’unautre homme mort le même jour'
à midi 8 c demi. Ce fut en vain qu’on cita contre
lui les loix du digefte & du code qui veulent que
l’héritier furvive au teftateur j l’épagneül prouva
que fa prétention étoit très-conforme à ces loix,
parce que l’homme mort à midi peut dans certaines
circonftanees furvivre à celui qui eft mort
à midi & demi * il n’y a qu’ à fuppofer pour cela
que le premier eft mort ji Paris & le fécond à
Vienne en Autriche j car comme il eft une heure
à Vienne, quand il eft midi à Paris, celui qui
meurt à midi dans cette dernière ville , lurvit
néçeffairement à celui qui meurt le même jour à
Vienne, à midi & demi.
Un troifième argumentateur propofa le problème
fuivant :
« Un payfan étant allé au marché vendre des
poulets,-a trouvé un cuifinier qui lui a acheté
la moitié de fes poulets , plus la moitié d’un
poulet fans en tuer aucun : il a vendu & livré
a un fécond cuifinier la moitié de fon refte, plus,
la moitié d’un poulet pareillement fans en tuer
aucun j enfin un 5 e cuifinier a acheté la moitié du
refte, 8 c plus la moitié d’un poulet, toujours fan*
en tuer aucun } par ce moyen le payfan a tout
vendu : on demande combien il avoitde poulets « ?
L ’épagneul répondit qu’il en avoit fept 3 flue
le crémier acheteur en avoit,pris quatre, c eft-a-
trois & demi : plus, un demi fans en tuer
aucun que le fécond en avoit pris _ deux. c eft
à-dire, un & demi, plus un 8c demi. 8ec.
' L'animal ne fe contenta point d’ indiquer tout
(implement le nombre demande, ; il refoluf algébriquement
la queftion, en pofant fucceflivemei t
fon pied'fur les lettres 8c fut les chiffres ijuifor-
moient l'équation du problème._ Le maître de
l'épagneul eorivoit avec de la craie fur une planche
noire, tout ce qu'indiquoit l'animal ; 8c comme
ce problème eft un des plus jolis qu on pume pro-
oofer, nous en donnons ici la fôlution, en faveur
de ceux qui connoiffent les premiers élemens
d’Algèbre.
; Soit x le nombre cherché , la portion du premier
acheteur fera , félon la première condition
du problème , | -H k > ce qui refte , quand le
premier acheteur a pris fa p a r t, fera donc, j —
*_i : la moitié de ce refte Sc la moitié d un
poulet devant être la portion du fécond acheteur,
on aura, pour exprimer cette portion, | — J—
*4_I. Ge qui refte quand lès deux premiers acheteurs
pnt pris leur p a r t, eft donc x — § -
£_p.£4li — A j la moitié de ce refte 8 c la moitié
d’un*poulet devant faire la portion du troifième,
on aura pour exprimer cette portion : £— j
£4_£4-j._ri-j-A 5 êc comme les trois portions
jointes enfemble doivent faire la Comme totale ,
► qui vaut x , on aura l’equation fnivants .
I ' - 4+ T+ f ( g ï “ i + ï Hr i l É
— Si dans cette équation on multiplie
chaque terme par 8 pour faire évanouir toutes
les ïrattions, il en réfultera : 4 *
8 c qu’ il réparoit adroitement fa faute, quand il lui
arrivoit de fé tromper.
C ’eft par de pareils ftratagêmes qu’ il pouvoit
répondre aux queftions les plus difficiles, & qu a-
pres avoir foutenu en latin’ une thèfe fur la communication
du mouvement dans le choc des corps,
i l s’àttka de k part d’un phyficien Irlandois, un
des jolis complimens qu’on puiffe faire fur cette
matière : Nunc concèdo motum communicari in ra-
tione velocitatis corporis percutientis| nam refponjio-
num taarumfacilis veto citas cordi meo communie avit
magnum admirationis motum & lititiA.
C e même Irlandais ayant dit enfuite que l’Angleterre
étoit une des plus grandes ifles de 1 O-
céari, le chien rie fut pas de fon avis, & aflura
très-pofitiyement que l’Angleterre n eft point une
ifle : tout le-mondé crut que l’animal fe trom-
poit ; mais il donna pour raifon qu’ on pouvoir
fortir d’Angleterre fans pafier la mer, & quon
en fortoit effectivement tous les jours de cette
manière, quand on alloit à pied ou a cheval d Angleterre
en Ecoffe. Le diélionnaire encyclopédique'confulté
fur ce point, fit voir que le chien
avoit raifon. En effet, l’Angleterre forme:avec
l’Ecoffe , fous le nom de Grande-Bretagne , une.
ifle , dont l ’Angleterre n’eft à-peu-près que les
deux tiers : par conféquertç.dire que I Angleterre
eft une ifle , c’eft comme fi on prétendoit que 40
fols font un é cu , ou que quatre pieds font une
toife.
Je favois depuis long-temps, ajouta 1 Irlandois ,
que les animaux nous furpaffent par la finelie des
fens > mais je vois à préfent pour la première rois
qu’ils ont la même fupériorité. par la juftefle des
idées, 8 c qu’il faut ajouter quelque chofe au diiU-
que fi connu, qu’on a fait a leur louange.
A/mv* mrlit î Hmia. PUitU •
Donc 7 x -J-7= 8 x.
Par conféquent x = 7 . C . Q. F. D.
Il nous refte à expliquer comment 1 animal pou-
voit indiquer, fans qu’on lui fit aucun ligne vifible,
la réponfe aux queftions propofees j le lecteur
faura que les lettres & les chiffres étoient fur
autant de cartes arrangées en cercle autour de 1 a-
nimal, qu’ il faifoit le tour du cercle auffi-tôt qu on
luipropofoit la queftion, 8 c que des bafcules, cachées
lous le tapis fur lequel il marchoit, Sc qu on
faifoit remuer fous fes pieds par des cordons^ de
renvoi, lui indiqüoient l’inftant où il devoit s’arrêter
pour mettre fon pied fur la carte voifine. m
étoit fi bien habitué à faifir la carte qui étoit
auprès de lu i, quand il fentoit le mouvement des
bafcules, &: à répondre oui ou non, félon les diffé-
rens tons de voix de fon maître ou de quelque
conapere, qu’il ne fe trompoit prefque jamais ,
Amufcmens des Sciences.
CHIFFRES ( é c r i t u r e e n ) . Voyei É c r i t u r e ,
CHIFFRES (b o îte a u x ) . Voyei C a t o p -
trique.
CHIMIE. Voici diverfes expériences amufante«
de chimie.
Il faut renfermer dans une boite de fer un
charbon qui en rempliffe toute la capacité, &
fouder le couvercle de la boite. Si vous là jettez
enfuite dans le fe u , elle y rougira j vous pourrez
même l’y laiffer plufieurs heures, plufieurs jours :
lorfqu’après l’avoir laiffé refroidir vous 1 ouvrirez,
vous trouverez le charbon dans fon entier, quei-
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