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du mi au mi b qu'un demi-ton mineur , & un
demi-ton majeur au mi b au re ; mais le tempérament
& la conftitution de la plupart des inftru-
mens j en confondant le re .^.avec le mi b , partagent
également l'intervalle du re au mi 3 & l'o reille
en eft affeélée parfaitement de même, fur-
tout au moyen de l’accompagnement.
Il y a deux enharmoniques , l'un appelle diato- '■
nique enharmonique , l'autre chromatique enharmonique
, mais très-rarement employés par les mufi-
ciens. Ce n'eft pas qu’on y faffe ufage des quarts
de ton, comme dans l'enharmonique ancien} mais
ces genres ont reçu ces noms, parce que de la
marche de la baffe fondamentale réfnltent des fons
qui j quoique'pris les uns pour les autres , différent
réellement entr'eux du quart dê ton appelle;
par les anciens enharmonique, ou de 12y à 128.
Dans le diatonique enharmonique, la baffe fondai:
mentale, marche alternativement par quinte & par
tierce 3 & dans le chromatique enharmonique ,
- elle va alternativement par tierce majeure & mi-
heure. Cette marche introduit, tant dans la mélodie
que dans f harmonie, des fons q u i, n'étant
point du ton principal ni de fes relatifs, portent
l'étonnement à l ’oreille, & Laffeélent d'une manière
dure & extraordinaire, mais propre à dé
certaines expreflïons violentes & terribles. C'eft
pour cela que M. Rameau avoit employé le diato-
- nique enharmonique dans fon trio des Parques de
1 opéra dUippolite & Aride ; & quoiqu'il ne l'ait
pu faire' exécuter, il n'en a pas moins reffé persuadé
qu'il eût produit un- grand effet, s'il ayoit
trouvé des exécuteurs difpofés à fe prêter à fes
idées.} enforte qu'il l'a laiffé fubfifter dans la partition
imprimée. Il cite comme un morceau d'enharmonique,
une fçène de l'opéra italien de Corio-
ianos commençant par-ces mots: O iniquiMarmi!
qu'il dit admirable. On trouve enfin des échantillons
de ce genre dans-deux de fes pièces de
claveflin , la Triomphante' & Y Enharmonique , &
il ne défefpéroit pas de venir à bout d’employer
même le chromatique enharmonique, du moins
dans les fymphonies. Pourquoi effectivement ne
l'auroit-il pas fa it, puifqûe Locatelli, dans fes
premiers concerto, a.employé ce genre, en laift-
' fa nt fubfifter les dièfès & les bémols 3 [diftin-
guant, par exemple, le re p j du mi b ? ] C'eft un
morceau, dit un niftorien moderne de la mufique,
[ M. de Blainville] vraiment infernal, & qui met
famé dans une fituation violente d'àpprënenfion
& d'effroi.
Nous ne pouvons mieux faire ; pour terminer
cet article, que de donner quelques exemples de
la mufique. de différentes nations. Nous avons, fait
graver, dans cette;vue, divers airs grecs , chinois,
turcs, perfans, qui pourront fervir à donner
une idée de la modulation qui caraCtérife-la mufique
de ces peuples différens., [ Voyez ces airs
notés Pl . 2 amufemens d’gçouftique ou mufique].
a c o
Paradoxes Milficaux,
§. I.
On ne peut entonnerjtifte ces fons, fol, u t , la , re,
fol , Jf avoir, de fol a lit en montant / de ut a la
en redefcehdant de tierce mineure, puis montant de
quarte à' re , & defcendant de ré à fo l, de qùihte >
on ne peut 3 dis-je, entonner jufte ces intervalles,
6* faire le fécond fol h. l'uniffon du premier.
En effet, on trouve par le calcul que, le premier
fo l étant repréfenté par 1 , Yut en montant
de quarte fera ~ 3 confequemment le là , en defcendant
de tierce mineure , fera 3 donc le re
au deffus fera | | 3 enfin le fo l 3 en defcendant de
quinte , fera |*. Qr le fon repréfenté par I I , eft
plus bas que celui repréfenté par 1 , donc le
dernier fo l eft plus bas que le premier.
D'où vient, dira-t-on, l’expérience eft-elle cependant
contraire à ce calcul?.Je réponds que cela
vient uniquement de la réminifcence du premier
ton fol. Mais fi l'oreille n’étoit point affeélée de
ce ton, & que. lé chanteur fut uniquement : tt ntif
à entonner jrifte les intervalles ci-deffus, il eft
évident qu’il finiroit'par un fo l plus bas. Auflï
arrive-t-il bién fréquemment qu'une voix non-aç-
compagnée,! après^ avoir chanté un long air. dans
lequel on parcourtTplufieurs tons, réfte, en finif-
fant, plus haut ou plus bas que le ton par lequel
elle a commencé.
Cela vient de l'altération nécëffaire de quelques
intervalles dans l'échelle diatonique. Dans
1 exemplè précédent de la à u t , il n'y a qu'une
tierce mineure dans le rapport de 27 à 3 2 , oc non
de 5 à <•> : mais c'eft cette dernière que l’on entonne
, fi l 'on a la voix jufte & exercée : on bâiffe
confequemment d'un cqmma plus qu’il ne fau-
droit : il n'eft donc pas étonnant que le dernier
fo l foit auflï plus bas d'un comma que le premier.
§. . I J.
Dans un infiniment a-touches 3 comme dans ujifla-
vejfin , il eft impaffible que les tierces^ & les quittes
foient enfemble jufies.
On le démontré aifiément de .cette manière. Soit
cette fuite de tons à la quinte les uns,des autres
en montant,, üt, f o l , re, la , mi-, en defignant ut
par I ffô l ïe ta j , re ^f, la mi.\f : cé rfii qèvroit
faire la tierce majeure avec la do.ublé oèiav.e de
ut où A y c’eft-à-dire qu’ils de vroient être "dans fe
rapport de i à ~ , ou de 5 à 4 3 ou de 80: à ^4 »
ce qui n'eft pas, car ~ & ’font comme 81 à 64 :
ainfi ce mi ne fait pas la tierce majeure avec la
double o&ave à'ut; o u , les abaiffant l'un & Uau-
A‘ C O 1
tfe de la doublé "oébave 3 ut & mi ne fortt pas a la
tierce, fi mi ëft à la quinte jufte de la.
Aufli., dans un inftrument à touches, un cla-
veffin, par exemple , quelque bien accordé qu’il
fô it, tous les intervalles, aux oéla.ves près, font
faux ou altérés. Cela fuit néceffairement de la
manière dont on accorde cet inftrument } car,
ayant mis tous lésa* àl'oétaveles uns des autres^
comme il convient, on met fo l à la quinte d 3ut3-
re à la quinte de fo l, & on le rebâiffe d’oétave ,,
parce, qu'il l'excède} de-là on met la à la quinte
du re ainfi abaiffé, & mi à la quinte du la , & on
rabaiffe ce mi d’oélave : en continuant ainfi de
monter deux fois de quinte, enfuite de defçendre
d'oétave, on trouve la fuite des fons, f i , fa % 3
foi:%> re% , la ïjf,, mi.%, f i%,; Or ce dernier
f i% , qui devroit être tout au plus à l’uniflon
de Yut, oaave du premier , fe trouve plus haut 3
car le calcul montre qu'il,eft exprimé par ,
ce qui eft moindre que-^, valeur de l'oétave d’wr;
c'eft-là ce qui néceffite ce qu’on nomme le tempérament
, qui confifte à baiffer toutes les quintes
légèrement & également , enforte que ce dernier
fi $'(, fe trouve précifément à l'oélave du premier
ut. C'eft du moins la pratique enfeignée par Ra-
rîiéaü, & c'eft la plus fondée en raifon. Mais,
quelle que foit la méthode employée, elle confifte
toujours à rejeter plus ou moins également
Cet excès du f i % au deffus de Yut, fur les notes
de i ’oétave 3 ce qui ne peut fe faire fans altérer
plus ou moins les quintes^ les tierces, &c.
Nous venons de voir le f i %, donné par la pro-
greffion des quintes, plus haut.que Yut; mais fi
on emploie la progreflion fuivante des tierces, ut,
mi , fol-M , f i % , ce fi}$ fera fort différent du
premier 3 car on trouve qu'il eft exprimé par ,
tandis que l'oétave d'ut eft -l*. Or - eft moindre
que fês > c e f i^ eft au deffous de Yut exprimé
par \ 3 & l'intervaHe de ces deux fons eft
exprimé par le rapport: de 128 à I2J , ce qui
eft le quart de ton enharmonique,
§. I I I .
Une note inférieure, par exemple re , affcélèe du diefe ,
n efi pas la meme chofe que la note fupérieure mi,
affeSlée du bémol ; & ainfi des autres notes difiantes
d‘un ton entier.
Les dièfes font ordinairement donnés par le
mode majeur, & même,par le mineur, pour que
la fous-tonique ne foit. éloignée de la tonique que
d un demi-ton majeur, comme dans le ton d u t ,
le f i i'eft de 1' ut : donc , du re au mi y ayant un
ton mineur, qui eft eompofé d’ un demi-ton majeur
& d'un mineur , fi l'on ôte un demi-ton ma-
îe^r dont le ré % doit être au deffous du m i, le
reftant fera un demi-ton minetfr dont ce même
rt ^ fera au deffus du «ii -
À’ C O • rÿ
•S'il étoit q'ùéftion de deux notes dont la distance
fût-d'un ton majeur , le dièfe éleveroit la
note inférieure d'un intervalle égal à un demi-ton
mineur,,,.plus un coipma-de 8g à Br , qui ëft un
demi-ton moyen entre le majeur & le mineur.
Le dièfe n'éleve donc la note que d’ un demi-
ton mineur ou moyen.'
Les bémols font ordinairement introduits dans
la modulation par le mode mineur, lorfqu’ on eft
obligé d'abaiffer la note de la tierce , de manière j
qu'elle faffe avec la tonique une tierce mineure
ainfi le- mi bémol doit faire- avec ut une tierce
mineure : donc , de la tierce majeure ut m i, qui
eft f , . ôtant la tierce mineure qui eft | , le reftant
f | eft ce dont le bémol abaiffe le mi au deffous du
ton naturel 5 confequemment le mi bémol eft plus
haut que le re dièfe.
Dans la pratiqué 'néanmoins on prend l’un pour
l’autre, fur-tout dans les inftrumens à touches:
le bémol y eft abaiffé, & le dièfe:infenfiblement
hauffé-, de manière qu'ils coïncident l'un avec
l’autre } & je në crois pas que la pratique gagnat
; grand’chofe à en faire la diftinélion, qûand elle
n'entraîneroit pas beaucoup d’ inconvéniens.
Quelle eft la caüfe du plaifir muficaP. Des effets de la
mufique fur les hommes & fur les animaux: ,
On demande communément pourquoi l’on
goûte du plaifir à entendre deux fons qui forment
enfemble la quinte, la tierce } & pourquoi
au contraire l’oreille éprouve un fentiment defa-
gréablè.en entendant deux fons qui ne font qu'à
un ton ou un demi-ton l'un de l'autre ? Cette
queftïon n’eft pas aifée à: réfoudre. Voici néanmoins
ce qu'on a dit ou ce qu’on peut dire de plus
probable.
Le plaifir, dira-t-on, confifte dans la perception
: des rapports : c’eft ce qu'on prouve par divers
exemples tirés des arts. Amfi le plaifir dëla mufique
, confifte dans la perception des rapports des fons.
Ces rapports font-ils affez fimples pour que l'ame
puiffe les faifir & en appercevoir l'ordre ? Les fons
plairont étant entendus enfemble j ils déplairont au
contraire, fi leurs rapports font trop compofés^
ou n'ont'abfolument aucun ordre.
L'énumération des confonnances & des dif-
fonnànces connues, confirme affez bien ce rai-
fonnement. Dans l'üniffon, les vibrations de dèux
fons coïncidant fans céffe enfemble dans leur durée
, voilà le rapport le plus fimple : auflï l'uniffon
eft-il la première des confonnances. Dans l'octa
v e , les deux fons qui la forment font leurs vibrations
de manière que deux de l'un s'achèvent
en même temps qu'une de l’autre : ainfi l’oélave
fuccède à l'uniffon. Elle eft fi naturelle à l'homme ,
que celui qui* ne peutj> par- le défaut de fa voix^