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gi.de défefpoir, qui n’ont rien moins que de la gaitè.
( V o y e z Mouvement. )
Le diminutif allegretto indique une gaîté plus
modérée, un peu moins de vivacité dans la mefare.
( J. J. Roujfeau. ) , ,
A L LEMAN DE , ƒ f. Sorte d air ou de pièce de
mufique dont la mefure eft à quatre tems & fe
bat gravement. I l paroît par fon nom que ce caractère
d’air nous eft venu d’Allemagne , quoiqu’il n’y
foit point connu du tout. L allemande en fonate eft
par-tout vieillie, & à peine les muficiens s’en fer-
vent-ils aujourd’hui : ceux qui s’en fervent encore,
lui donnent un mouvement plus gai.
A llemande , ell aufli l’air dune danfe fort
commune en Suiffe & en Allemagne. Cetair.ainli
que la danfe, a beaucoup de gaîté. 11 fe bat a deux
tems. ( J. J. Rou!T:au- ) , , ,
ALLEMAGNE. ( Hijloire de la mufique en ) Un
ne peut pas douter que le climat n’ait une influence
feniible fur le goût & l’aptitude des peuples divers
pour les beaux-arts ; & la mufique eft peut-être celui
de tous qui eft le plus fournis à l ’energiede
cette influence. Les grecs, en faifant d’Apollon le
dieu de la lumière & celui de tous les beaux-arts,
ont voulu peindre , par une allégorie frappante ,
l ’empire du foleil fur l’organifation humaine. C eft
dans les pays chauds que l’organe de la voix montre
en général plus de foupleffe & d’éclat : c’eft là que
la mufique , infpirée par la nature , eft devenue un
ait , & a exercé le plus puiffant empire. C ’eft daps
les mêmes climats que les oifeaux ont le chant le
plus agréable & le plus varié ; ce n’eft que dans
le printemps & l*ete cjue les oifea/ux chanteurs font
entendre leur ramage. On n’en trouve aucun par-
delà une certaine latitude ; & les anglots ont remarqué
qu’on n’avoit jamais vu de roflignol au-
delà de la Tw e e d , rivière au nord de 1 Angleterre,
St qui la fépare de l’Ecoffe. .
En partant de ce principe , on feroit fonde a
croire que l'Allemagne eft une des parties de l’Europe
oh la mufique a dû faire le moins de progrès ;
mais l’expérience a démenti cette induéhon. Il faut
en conclure qu’à cet égard , comme à beaucoup
d’autres, les facultés humaines font encore plus
foumifes aux caufes morales qu’aux caufes phy-
fiqnes ; que l’homme eft le plus fouple & le plus
docile des animaux , & qu’il n’y a aucune influence
naturelle qui ait fur lui autant d’empire que l’inf-
truéiion, l’habitude, & cet inftinâ d’imitanon qui
lui eft propre.
Depuis le règnp de Charlemagne, il y a eu en
'Allemagne des maîtres-chanteurs formant une ef-
pêce de confrairie de ménétriers ambulants , qui
âiloient de ville en ville chanter des chanfons en
jouant de quelques inftruments.
La mufique d’églife y a é té , depuis la même
époque, cultivée avec foin ; & la réformanon ayant
amené l’ufage de chanter les pfeaumes en langue
vulgaire, introduifit dans les églifes proteftantes
d'Allemagne une ûxufitjue plus chantante & plus
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agréable que l’ancien plain-chant, lequel, au lieu de
fe perfeétionner, dégénéra fenfiblement pour 1 exécution
dans les églifes catholiques de l’Europe.
L’efprit de controverfe muficale qui fe développa
en Italie après les premières découvertes de Gui
d’Arezzo , gagna bientôt en A llem a g n e K y lit
naître beaucoup d’ouvrages favants fur la muiique
tant ancienne que nouvelle.
Mais l’objet de ce diftionnaire n’eft pas de donner
une hiftoire fuivie & détaillée de la mufique.
Nous ne nous fommes propofés dans ces articles
hiftoriques que de faire connoîtte le goût particu
lier de chaque peuple à l’égard de la mufique , &
la part qu’il â eue aux progrès de cet art.
Les euerres, les intérêts politiques & les dil-
putes de religion ont entretenu de tout tems une
correfpondance très - intime entre 1 Allemagne &
l’Italie. Les repréfentations mufico- dramatiques
pafsèrent promptement de l’une dans 1 autre.
C e fut à Hambourg qu’on vit reprelenter
premier opéra, c’étoit en 1678. Le poème avoit
pour titre Orontes, &. fut mis en mufique par e
maître de chapelle nommé Theil. Les opéra qu on
donna fur ce théâtre depuis cette epoque juiquau
commencement de ce fiècle , furent tous en a e
mand. On y introduifit fucceflivement des airs en
italien, en confervant le récitatif en langue vu
eaire : cette bigarrure plut beaucoup dans un tems
où le goût n etoit pas encore forme , tx ou a
fupériorité & la réputation de la mufique italienne
commençoient à la répandre dans toute 1 Europe. f
. Ce qui donna particulièrement de la vogue, a
l’opéra de Hambourg, ce furent les talents rares
des: premiers compofiteurs qui travailloient p°ur ce
théatre. Les plus célèbres font Keijcr , Mat..e fo n ,
Handel, Confier & Telemann. Le premier a com-
pofé 10 7opéra, & eft mort en 1739- . °.Vs- n
connoiffons aucun de fes ouvrages ; nu«
s’en rapporter au jugement du fameux Halte. 11
difoit à M. Burney que c’étoit « un des plus grands
1, muficiens que le monde eût jamais vus 11. (. i «
prêtent flate o f mufic in Gcrmany ,& c . t.^ 1 ,
Mathefon eft plus renommé comme écrivain que
comme compofiteur. Il eft mort en 17«4 » c
8 i ans. 11 aimoit à fe vanter , en mourant, d avoir
publié autant d’ouvrages fur la mufique qu d avoit
vécu d’années, & il prétendoit qud en laifferoit
autant en manuferit à fes héritiers pour 1 înitruc-
tion de la poftérité. - ,
Handel, né à Halle en 1684, alla a Hambourg
à là fin du dernier fiècle , & commença par jouer
du violon à l’orcheftre de l’opéra , oh il tint enlutte
le clavecin : ce fut en 1705 qu’il donna fon premier
opéra fur un poème italien intitulé Elmira. Nous
parlerons plus en détail de la vie'&fdes ouvrages
de cet immortel muficien , à l’article Angleterre[
parce que c’eft fur-tout dans ce pays qu’il a compote
les ouvrages qui ont fait fa réputation & fa gloire.
C o u f f e r . n é e n 1659 à P r e sb o u rg e n H o n g r ie : ,
f a t a p p e llé v e r s 16 9 3 a H am b o u r g , p o u r y prendre
A L L t „ '
k direffion de l’opéra.. Il avoit voyagé , & <*. fut
lui qui introduifit en Allemagne la manière de chanter
des italiens. On a de lui beaucoup d ouvrages
imÇelemânn, né à Magdebourg en
un des compofiteurs les plus féconds. Handel m
foit de lui qu’il écrivoit une pièce de mufique a
huit parties avec, autant de facilité qu un autre ecn-
roit une lettre. C ’eft fur-tout dans la mufique d eglile
nu’il a montré un talent extraordinaire. 11 avoit plus
de fcience que de goût, & fes ouvrages de théâtre
font oubliés. „ „ , „ ,
L’opéra s’eft établi prefqua la meme epoque
fur les théâtres de Hambourg, de Vienne-, de I>er-
lin & de Drefde. , .
Léopold qui occupoit le trône impérial aimoit
les fciençes & les arts, & çultivoit particiilière-
ment la mufique. Il attira à fa cour les talents les
plus célèbres , tant. nationaux qu’étrangers. Il fit
faire , par tes plus grands compofiteurs de la mufique
dféglife pour fa chapelle, & des opéra pour
fon théâtre ; & il les faifoit exécuter par les plus
habiles virtuofes de l’Allemagne & de 1 Italie.
Je trouve , dans des mémoires hiftoriques fur ce
prince , un trait qui me paroît mériter d’être con-
fervé. Léopold aimoit les arts & les fpeéïacles ;
mais fes revenus ne lui permettoient pas d être
magnifique. Il careffoit les talents , mais ne les en-
richifloit pas. Quelques chanteurs italiens qui ne fe
trouvoient pas affez bien payés refusèrent un jour
opiniâtrement de chanter à un fpe&acle où l’empereur
& fa foeur étoient rafiemblés pour les entendre.
Un des miniftres de Léopold lui demanda
quel châtiment il vouloit qu’on infligeât à ces in-
folents : Que voulez-vous faire, repondit-il, a■ ces
êtres qui ne font pas des hommes ? ils font difpenfcs
d avoir de la raifon.
On connoît, par cent exemples , l’impertinente
& rifible fatuité de ces virtuofes quand ils ont quelque
talent. Ün d’eux voulant un jour entrer dans la
chapelle , où il y avoit beaucoup de foule, déran- 1
geoit fans façon un étranger de diftinftion pour fe I
faire faire place. L ’étranger un peu étonné lui de- |
manda qui il étoit pour avoir de pareilles manières.
Je fu is , répôndit le chanteur, il fgnor Ajitonio ,fo -
prano de fa facrée majeflé impériale.
Les principaux muficiens que Léopold employa
font Fux, Caldara, Ziani & Conti. Le premier, né
en Styrie, dans le cercle d’Autriche , compofa non-
feulement de la mufique pour l’églife & pour le
théâtre, il a publié aufli différents ouvrages fur la
théorie de l’a r t , dont le plus célèbre eft un traité
élémentaire des principes de la compofition, qui a
été traduit en italien , 8( qui a été jufqu’à préfent
le guide des maîtres & des écoles d’Italie.
Caldara, Ziani & C onti, italiens tous trois , fb
font fait, dans Je tems , quelque réputation par des
compofitions oubliées aujourd’hui. Il s’eft confervé
fur le dernier une anecdote que nous rapporterons
i ci. En Ï730, ce muficien ayant été infulté à Vienne I
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par un prêtre féculier, s’en vengea far le champ
par des coups. La querelle ayant eu des témoins,
il y eut un procès criminel, & en vertu d une fen-
tence eçcléfiaftique, Conti fat condamné à être ex-
pofé trois jours, pendant une heure, à la porte de
l’églife cathédrale de Saint-Etienne. L ’empereur
avoit adouci la fentence, en réduifarit les trois
ftations humiliantes à une feule. Mais comme il ne
fe comporta pas à la première avec aflez d’humilité
& de réfignation , on le condamna à fabir la même
pénitence deux autres jours, revêtu d’une efpèce
de fac groflier, & tenant une torche à la main.
Après quoi la juftice ordinaire le condamna à une
amende de mille francs au profit du prêtre qu’il
avoit frappé, à tous les dépens , à être emprifonné
quatre ans , & enfuite banni à perpétuité des domaines
d’Autriche. On f it , à ce fa je t, l’épigramme
fuivante , qui n’ayant de fel que des jeux de mots
latins , ne peut fe traduire en françois :
1. Non ea mnfa bona eft mufica -, compofuifti
>. Quam Conti, tachis nam fuit ille gravis.
» Et baffus nimïum craffus , neque confonaclavis p,
« Perpetuo nigras hic geris ergo notas »*.
L’exemple de Léopold ne pouvoit manquer de
contribuer à répandre , dans les autres cours , le
goût de la mufique & des fpeéiacles mufico-drama-
tiques. Il s’établit des opéra prefque en même tems
à Vienne , à Hambourg, à Berlin , à Drefde. Ils
furent d’abord , comme nous l’avons dit, compofés
de récitatifs & de choeurs en allemand , & d’airs ea
italien ; mais cet ufage barbare tomba bientôt, &
l’opéra , purement italien, fut adopté prefque uniquement
fur tous les théâtres. Les cours de Man-
heim, de Munich , de Stutgard , &c. fuivirent
l’exemple des cours'plus confidérables : toute Y A l lemagne
fut bientôt peuplée de muficiens de tous les
genres. On y appella d’ Italie les compofiteurs les
plus renommés & les plus grands virtuofes; Sc.c’eft
depuis 80 ans le pays du monde où il s’eft compofé
& exécuté le plus de mufique.
C e qui a le plus contribué à étendre le goût de
la mufique dans toute Y Allemagne , c’eft un ufage
qui s’y pratique de tems immémorial, & qui ne
fubfifte dans aucun autre P'.iys. Dans prefque toutes
les écoles publiques, des villages comme des villes ,
on enfeigne la mufique aux enfants en même tems
qu’on leur apprend à lire & à écrire ; & , ce qu’il y
a de remarquable , c’eft que par-tout où les jefuites
ont eu des collèges & des écoles , ils ont donné la
plus grande aâivité à cette partie de l’enfeignement
public. Par-tout ailleurs cet ordre religieux s’eft
montré peu favorable à la culture des beaux arts.
Le favant L ami, qui a compofé pendant un grand
nombre d’années à Florence, une feuille périodique
pleine d’érudition, faifoit voir un jour à un
étranger les curiofités de cette ville. En voyant le
palais Pitti , voilà , dit l ’étranger , le berceau des
arts — 6* voilà leur tombeau, lui répondit Lami, en