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morceaux de chant, en partition avec les parties réparées,
ce qui contente tout le monde, & coûte moins
.cher qu’une'copie de l’une ou de l’autre efpèce.
La gravure a encore l’inconvénient, félon lui,
.et de n offrir guère aux curieux que de la mufique
as déjà vieille, qui eu un dans les mains de tout le
» monde. »
11 faut convenir qu’un graveur mer environ quinze
joins à faire l’ouvrage qu’un copifie peut.faire en un
feu! jour. Mais , après ces quinze jours ( qui.n’ont
pas dû. vieillir extrêmement la nufique ) , la gravure
rend autant d’exemplaires en un jour qu’un copifie
en pourroit exécuter en trois mois.
« Enfin, il eft fûr qu’en Italie, le pays de la terre
3) où l’on fait le plus de mufique . on a proferit de-
«j puis long-temps la note imprimée , fans que l’u-
33 îage de ia gravure ait pu s'y établir ; d’où je con-
33 dus qu’au jugement des experts celui de la jim-
3) pie copie eft le plus commode, »
On vvoit que Rouffeau plaidoit la caufe des copiées
contre les graveurs , mais il n’eft pas heureux
dans fes moyens de défenfe. C ’eft parce qu’on fait
beaucoup de mufique en Italie que la gravure ne s’y
établir pas. On y eft avide des'feules nouveautés ,
.8c peu d’amateurs font curieux de les conferver.
D ’ailleurs la copie de la mufique eft la feule ref-
fource d’un tas de malheureux Caftrati qui n’ont
pas été dédommagés par la beauté de leur voix
ide la perte qu’ils ont faite; les en priver, en
cultivant l’art de la gravure, ce feroit les ;réduire
-.,à la mendicité ; comme dans les villes de manufacture
, on rejette les machines qui pour-
roient fuppléer à un grand nombre de bras.^Ajou-
tez-y la modicité, du prix que coûte la copie, réftil-
tat néceffaire de cette extrême concurrence , 8c que
la gravure foutiendroit difficilement. Cependant,
malgré ce défavantage 8c ce qu’en dit Rouffeau , il
s’eft établi quelques graveurs à Venife , probablement
dans le deffein d’offrir aux amateurs jaloux
.de conferver desmorçeaux de choix,des exemplaires
plus corre&s 8c mieux difpofés que ne le font en
général ceux des copifies.
II. Paffom aux qualités que Rouffeau exige dans
un copifie. Elles lui paroiffent fi brillantes qu’il n’ofe
pas d’abord en tracer le tableau. Dans le fait, cependant,
elles fe réduifent à connoître paffable- ,
ment l ’harmonie.
Les confeils qu’il donne fur le choix du papier
font fort juftes , mais al exagère le démérite des régleurs
de papier. On en trouve facilement d’affez
bon pour que le copifie s’épargne la peine 8c le
temps de le régler lui-même. 11 faut pour'Cela des
outils , un appareil 8c une habitude qui donnera
toujours 1’gvamage à ceux qui ne font que ce métier.
Si l’on èxigëoit une perfeâion qui ne me fem-
ble pas-néceffaire, il fuffiroit de la recommander
au régleur 8c de payer un peu plus cher,
III. Ç ’eft bien inutilement auffi qu’il reçomr
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mande le choix d’in papier qui n’ait qu’un nombre
de portées égal à celui de la partition ; il fuffir qu’il
en ait afièz , 8c il eft très-indifférent q. on en pefde
.une ou deux par page , .cela ne fait aucune perte de
papier,
IV. Vo tei des obfervatîons plus importantes,
Rouffeau veut «« que les violons occupent le haut
de l’accolade où les yeux fe port nt plus aifément.
11 prétend que ceux qui les mettent au-deffus de . la
quinte ( c’eft-à-dire, très-rapprochés du ch a n t ) ,
pour la commodité de l’accompagnateur , fe trompent;
nous ne faurions être de fon avis. Nous
croyons qu’en effet, lorfqu’une partition contient
des cors , haut-bois , flûtes , ou autres parties obligées
, il vaut mieux les laifler dans le haut, 8c rapprocher'les
violofis qui contiennent l’accompagnement
principal du chant 8c de la baffe ■ pour que
l ’oeil embraffe plus facilement ces quatre parties à
la fois. Si l’on a dix ou douze portées 8c que le
violon occupe la première , à quelle diftànce ne
fera-t-il pas de la baffe 8c.du chant? Et cependant
! il faut que l’accompagnateur life d’un ' feu! coup»
d’oeil ces diverfes pas fies. ,
Quant au ridicule qu’il trouve à mettre au-deffus
des violons des partie« de cor, par exemple, qui
font beaucoup plus baffes, cette raifcn'eft puérile.
L’harmonifte qui Ht une partition reflitîe aifément
cette légère irrégularité. D ’ailleurs, fi fon fuivoit
rigoureufement cette règle , il faudroit donc mettre
auffi la partie chantante au milieu quand elle tien-
droit une partie intermédiaire , ou entre le premier
8c le fécond violon, quand ce feroit un
deffus ?
Parmi les compofiteucs italiens, il y en a quelques
uns qui mettent les violons en-haut, comme
.le veut Rouffeau; mais le plus grand nombre commence,
par les cors, comme les parties les moins
confultées par l’accompagnateur , enfuite les hautbois
ou flûtes , puis les violons , la quinte , le
chant 8c la baffe ainfi rapprochés. Ils regardent ces
cinq dernières portées comme celles qui doivent
fixer la vue du clavecinifte , 8c les premières comme
ne devant contenir qu’un accompagnement de rem-
pliffage, pour ainfi dire acceffoire, 8c qui n’eft
confulté qu’au befoin.
V. «c Ce n’eft qu’à toute extrémité, dit Rouffeau j
» qu’on doit mettre deux parties fur une même por-
» tée j». Cela eft vrai pour les violons , auffi ne lé
pratique-t-on jamais. On le fa it, au contraire,
fort fouvent pour'les cors 8c les flûtes ou haut-bois,
quand ils ne font que de rempliffage, par la raifon
déjà dite que l’oeil de l’accompagnateur y a moins
fouvent recours , 8c que ne contenant que le complément
de l’harmonie , elle eft ainfi plus rapprochée
8c plus facile à faifir,
VI Sur la répétition des clefs, Rouffeau d it, à
ce qu’il nous femble, précifément le contraire de
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ce qui convient. Il ne veut pas que dans les partitions
on répète les clefs à chaque ligne A,8c il l’exige
dans-les parties féparées. Cela n’eft d’aucune utilité
pour les parties féparées , puifque chaque partie
étant feule , 8c la cle f ordinairement toujours la
même , il ne peut y avoir d’incertitude ni de con-
fufion. Dans les partitions , au contraire , où chaque
partie ayant une clef différente eft mêlée avec
les autres , il arrive fouvent que dans le cours d’un
morceau on a oublié quelle eft la partie qui occupe
la quatrième , la fixième portée d’une même ligne ;
la cle f répétée à chaque page éviteroit toute erreur,
& n’obligerait pas de recourir au commencement.
Cependant les copifie s italiens ne font pas dans l’u-
fage de répéter les clefs, mais il nous femble qu’ils
ont tort, 8c nous croyons , en dépit de Rouffeau ,
que cela feroit infiniment plus commode;
VIT. Le confeil de divifer également les mefures
exige quelque modification, Lorfqu’une des parties
ne contient qu’une ronde , c’eft au copifie à s’affu-
. ter fi quelque autre partie ne contient pas dans la
même mefure des croches , des doubles-croches,
& c . , pour leur donner un efpace fuffifant. Mais,
quand toutesles parties de la même mefure font très-
peu chargées, il feroit ridicule 8c défagréable à l’oeil
de leur laiffer- autant d’efpace que fl elles l’étoient
beau coup. En fuivant à la rigueur l’ufage indiqué
par Rouffeau, on a. une copie trop écartée , que l’on
fuit difficilement à.la leéiure, qui fatigue l’accompagnateur
, 8c qui n’eft profitable qu’au copifie.
u La même attention , dit Rouffeau, de ne pas
3j multiplier les fignes doit empêcher d’écrire pour
» la fymphonie les piano aux entrées _de chant, 8c
3) les forte quand il celle. 33
Pour que cette précaution fût en effet inutile , il
faudroit être sûr d’avance que celui qui copiera la
partition en parties féparées fera un homme très-
intelligent , ce qui n’arrive pas toujours. S’il eft peu
attentif, il ne copie que ce qu’il voit, & néglige les
fignes de rentrée du chant quand on n’a pas eu le
foin de les écrire.
Cette attention , au furplus ,-de ne pas multiplier
les fignes -, ne fert encore qu’à épargner de la peine
au copifie ; car il peut être commode , 8c il eft au
moins indifférent au leéteur de yoH écrite tout du
long une partie qui pourroit être renvoyée à une
partie femblable.
Rouffeau veut que le copifie puiffe corriger une
fàuffe note échappée à l’attention d’un compoûteur,
mais qu tl la laiffe fi elle vient d’ignorance. Cette
diftjnéljon eft affez délicate, 8c ne nous paroît pas
d’une fort grande utilité. Il eft certain qu’on eft
heureux de rencontrer des copifies qui connoiffent
l’harmonie , mais ils font rares. Quant à cette forte
de critique, qui confifte à remettre lin doux ou un -
fo n où il a éré oublié, il faut être bien sûr de ce'
qu’on fait car fouvent le compofiteur a uneimnn. -
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tion fecrette, quand il fait faire doux ce qui paroîtroif
devoir être fo r t, & vice ver fa.
Nous ajouterons peu de confeils à ceux que*
Rouffeau a multipliés. Nous remarquerons feulement
que la tête des notes doit être en général fort
groffe pour être diftinguée plus facilement. Leur'
dimenfion doit être déterminée en générai par là-
réglure du papier. Les notes qui font entre les e s paces
doivent le remplir en entier fans toucher aux
lignes au-deffus ni au-deffous. Celles qui font ftir'
les lignes , ayant la même proportion , occuperont
en deffus 8c en deffous la moitié de l’efpace. Il faut
auffi que les liaifons des queues foient groffes,,
diftinâes, tirées droit 8c hardiment, 8c qu’au contraire
les queues foient trés-déliées. On parvient
très-facilement à ce double but au moyen d’une-
plume taillée en gros, 8c dont la pointe éft coupée:
en fens contraire des plumes qui fervent à l’écriture.
Il eft bon que les paroles foient écrites en groffes
lettres, 8c c’eft une attention que Rouffeau n’avoit
pas. La petiteffe de fon caraâère fatiguoit les yeux.
Ce font lès paroles qui doivent, autant qu’il eft'
poffible, fervir de guide pour l’écartement des me-
fiiresi Plufieurs copifies commencent même par
écrire les paroles ; mais cette méthode a des incoii-
véniens qu’on apperçoit bientôt. Elles ne doivent'
être ni trop ferrées pour être diftin&es , ni trop"
écartées pour que l’oeil ne foit pas obligé de courir'
après.
Comme un des mérites d’une copie eft d’être bien /
noire, il faut que le copifie évite de fécher fes notes/
avec des poudres de couleur jaune, rouge , 8cc. O n 7
emploie en Italie un fable fin qu’on noircit en le
faifant chauffer dans une poêle à frire. Il eft mie/ix-
ençore , quand on le peut, de n’en pas mettre»'du*
tout*
Il eft temps auffi de nous arrêter. Ajoutons feule-'
ment que les copifies qui voudront fe former trouveront
de bons modèles dans ïès belles copies d’Ita-r
l ie , 8c fur-tout d’Allemagne.
(. ,/vf. Frutneryl ),
C o p is t e . Rouffeau, dans fon article, fe donne-
trop févèremerit oii trop modeftement le titre dec
mauvais copifl-s.Sà note éto:.t un peu maigre, 8c vers •
la fin de fa vi^j lès queues étoient quelquefois trem-
blottantes,-maïs tous les morceaux notés par lui font ■'
remarquables par une extrême netteté , une clarté-'
parfaite 8c/jfur-toHt par^une corrfefponda-nce' exaâe -
eiïtre les paroles 8c le chant - comme entre celui-'
ci 8c les diftérefntes parties,
Le métier tle eopifie feroit illuftré, quand il neuf-.
été exercé par l’auteur du Deiin du village 8c du'
Diflïo*maire/de rnujîfde ; il l ’eft encore bien davan-
tay^ Jorfqijte cet auteur eit en même-temps celui-
'u’ d’Héloife & Contrat (ociaL On s’eft,'.
f demandé long-temps par quelle bizarrerie cêz
\ me célèAbre s’étoit-ainfr dévoué-à une'occupatioïî*