
pour un mot dont on eft encore ma ître, & dont
l ’origine femble le rappeler à l’analogie : car il
paroit compofé des deux mots grecs ( autour )
& yt»pos- ( cercle ) ; parce que les mots fèmblent
tourner autour des penfées fans les énoncer nettement.
( Jhf. B eajjzée. )
* AMPHIMACRE. adj. m. pris fùbftantivement.
Terme delaPoéfîe grèque & latine, qui défigne un pied
fimple de troisfyilabes, une brève entre deux longues,
comme omniuin , cajiitas , prcevidcnt
y à k p u a T m , &C. - N
• Ce mot vient d ( autour ) 8c de
( l°ng ) > comme qui diroit, Pied long autour,
aux extrémités, & bref dans le milieu.
Quintilien ( Inftit. orat. X . jv. ) remarque que ,
de fbn temps , on lui donnoit plus communément
le nom de Crétique ; .& T.urnèbe prétend que c’eft
parce que les Cretois failbient grand ufàge de cette
melùre dans leurs danlès* ( M. B e a u z é e . )
(N.) AMPLIATIF, VE . adj. Quifert à étendre , à
augmenter. Qui ajoute. Je ne tiens compte ici de
cet adjeétif, que relativement à l’ulàge que j’ai cru
devoir en faire dans la Grammaire au fujet des
degrés de lignification.
Les grammairiens ont donné le nom de fuperlacifi
â. une certaine efpèee d’adje&ifs ou d’adverbes , formés
régulièrement dans -quelques langues d’autres
adje&ifs ou d’autres adverbes plus lîmples , qu’on
nomme pofitifs parce que l’idée y eft préfèntée dans
fon .premier état. Mais les grammairiens françois,
qui ont cru devoir admettre dans notre Grammaire
tout ce qu’ils trouvoient dans la latine, n’ont pourtant
lu s’y borner à un fèul luperlatif comme en
latin, parce qu’ils fe font mépris liir la véritable
valeur de celui-ci : ils ont donc diftingué un
fiiperlatif relatif & un abfolu. Le relatif eft celui
qui fuppofè en effet une comparailon, & qui exprime
un degré de fùpériorité univerlèlle; le plus
favant, le,plus courageufement : l’abfblu eft celui
qui ne lüppofe aucune comparailon, 8c qui exprime
fimpîement une augmentation indéfinie dans la qua-'
lité énoncée par le polîtif ; très-favant, très-cou-
rageufement.
L e mot Superlatif, par Ibn étymologie , indique
ïiéceffairement un rapport de lùpériorité; a in lî, un
fuperlatif abfolu eft celui qui énonce, fans rapport,
un rapport de lùpériorité : antilogie inlbutenable,
& qui n’eft point rare dans la bouche^ de ceux qui
répètent en aveugles ce qui a été dit avant eu x,
8c qui veulent y Coudre làns modification les idees
nouvelles que font appercevoir les progrès naturels
de l’elprit humain.
Sans entrer dans un plus grand détail lùr' les
degrés de lignification ( Voye\ D egrés ) je remarquerai
feulement ici que j’ai cru devoir appeler Amp
lia tif, celui que les Grammairiens nommënt Superla
t if abfolu , comme très-f avant, très-courageufement
: ce n’eft en effet qu’une exprefiion plus
énergique de la même idée ; & lî quelque choie y eft
ajouté, c’eft une addition indéterminée de quelque
degré de la même lignification. ( M . B e a u z é e . )
(N.) AMPLIATION, f. f. Addition laite à un mot
par la forme ampliative. Le furnom de Mercure
trifne'gifie a, par emphalê, une double Ampliation,
puilqu’il lignifie littéralement ter maximus ( très-
très-grand , trois fois très-grand ) ; rpW {ter ) \
ftéytsoç { maximus ) , luperlatif de pïyttç ( magnus. )
Le terme d’Ampliation tient à celui d’Ampliat
i f & j’ai du expliquer l’un & l’autre pour l’intelligence
de mes principes liir les degrés de lignification.
Foye\ S u p e r l a t if . {M . B e a u z é e . )
(N.) AMPLIFICATION. C. f. Belles-Lettres y
art orat. Manière de s’exprimer qui agrandit les
objets, ou qui les diminue. Cette définition d’Ilocrate
a été conteftée, & on la croit défavouée par Cicéron
; mais on le trompe : c’eft dans ce même
lèns que Cicéron nous dit que Y Amplification
eft le triomphe de l'Éloquence : Summa autem laus
Eloquentioe amplificare rem ornando : quod valet
non folum ad augendum aliquid & tollendum al- -
tiits dicemlo, fed etiam ad extenuandum atque
abjiciendum. de orat. L . 3.
Mais cet art-là fèroit, dit-on , celui d’un fb-
phifte ou d’un déclamateur. Colonia, dans fà Rhétorique
a fait cette oblèrvation , & on l’a répétée.
Pour y répondre , obfervons d’abord qu’Agrandir
n’eft pas tout à fait fynonyme d’Exagérer. L e
développement d’une idée, ou fon accrôilïèment,
par une agrégation d’idées analogues, une comparailbn
qui la- fortifie , un contrafte qui la rend
plus (aillante, une gradation qui l’élève ; tout cela,
dis-je , l’agrandit, 'làns en exagérer l’objet. Alors
Amplifier n’eft pas donner aux chofès une' grandeur
fiâive , mais toute leur grandeur réelle. On
peut de même, par la diminution , ne les réduire
qu’à leur valeur. L ’un & l’autre fera fènlîble dans
une fable de la Fontaine.
Un mal qui répand la terreur ,
Mal que le Ciel, en fa fureur,
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La pelle, &c.
C ’eft là ce qu’on appelle Amplifier pour Agrandir.
L'âne vint à fon tour, & dit : J’ai fouvenance
Qu’en un pré de moines paffant,
La faim, l’occafion, l’herbe tendre , & , je pcnfe,
Quelque diable suffi me pouffant, •
Je tondis de ce pré la largeur de ma langue.
C ’eft là ce qu’on appelle diminuer en amplifiant»
& par ces deux exemples on voit que Y Amplification
eft lî bien compatible avec la vérité , avec
la lîncérité même, qu’elle le trouvé dans le récit
le plus lîmple & le plus naif.
Oblèrvons de plus, que, lorfque c’eft l ’enthou-
1 lîalme ou la paillon qui exagère , comme fait l’indîmiation,
^admiration, la douleur, Y Amplification
eft encore lîncère, quoiqu’elle excède la vérité :
car l ’orateur s’exprime comme il lent ; & lî le lènti-
ment qui l’anime eft louable , Ibn éloquence eft làns
reproche. Il n’eft pas obligé d’être calme, impallible,
& modéré comme le juge; & c’eft à celui-ciji réduire
Y Amplification aux termes de la vérité.
Oblèrvons enfin que , lors même que de propos
délibéré, l’orateur grolfit ou atténue, relève ou rabaiffe
l ’objet de Y Amplification, comme fait Cicéron
pour aggraver le crime de Verrès : Fqçinus e(l
vincire civem romanum ; propè parricidium, necare ;
quid dicam , in crucem tôliere ? ou pour laver Mi-
lon & lès efclaves du meurtre de Clodius : Fecerunt
id fervi Milonis, neque imper ante, neque Jciente ,
neque praefente domino , quodfuos quifque fervos
in tali re voluijjèt ; obfervons , dis-je, qu’alors
même, lî l’on garde la vrailèmblance , on manquera
aux règles de la bonne foi, mais non à celles
de l ’Éloquence ; & fans parler des avocats modernes ,
il faut avouer que c’étoit là toute la religion des
anciens : le fuccès , le gain de leur caulè, & le làlut
de leur client. J^oye^ O r a t e u r & B a r r e a u .
Le grand vice de Y Amplification , du coté de
l ’art, c'eft d’en dire plus que l’orateur n’en peut
lui-même peu fer & croire. En perdant julqu’à l’apparence
de la lîncérité, il perd l’eftime de fès juges :
fouvent même, comme Longin l ’oblèrve , il les
bleflè & les indilpofè ; car ils prennent Ibn impudence
pour une marque de mépris.
Réduilbns-nous donc à diftinguer deux Ibrtes
d’Amplification : l’une déclamatoire & mauvailè,
qui outrepaffe vilîblement les bornes de la vérité ;
l ’autre qui lè renferme dans celles de la vrailèmblance,
& qui eft la lèule oratoire. Voye\ V é r i t é
R E LA TIV E , HYPERBOLE.
Ainlî, pour l’oEateur, amplifier, ce n’eft qu’ex-
pofer amplement la vérité ou ce qui lui reffemble ;
ibit pour frapper plus vivement l’elprit ou l’ame de
l ’auditeur d’une imprelïion qui nous eft favorable ;
foit pour y affoiblir, ou pour en effacer une imprelïion
qui nous eft contraire.
En divilànt une cholè, dit Ariftote, on l’agrandit,
par le lèul développement de lès parties : Nam multa-
rum exuperantia apparet (ArtisRhet. 1. i-c . 7 ,) .
On amplifie de même une aétion par les circonftances
quî la diftinguent : Quod difficilius & rarius , idem
majus : occafiones, oetates , lo c i, tempora, vires
efficiunt res magnas.. . . Si quis fupra vires ,fupra
cetatem , fupra fimiles , folus , aut primus , aut
cum paucis, preefertim quod maximèfactum effe opportun
, f i fizpe idem fecerit. Voilà des formules
d’Amplification que la vérité même avoue (Ib. c.C).) \
C’étoit là le grand art des anciens orateurs; &
ils en convenoient eux-mêmes : Summa laus E lo quentioe.
amplificare rem ornando. De or. L . 3.
C ’étoit là qu’ils lè permettoient les expreftions les.
plus hardies , & prelque celles des poètes : Ftrba
prope poètarum, ibid. L. i . G’étoit à ce grand ca-
raétère que l’homme éloquent fè diftinguoit del’homme
lîmplement difèrt : Difertum; qui pojfet fa tis
acutè ac dilucidè , apud médiocres homines , ex
communi quâdani hominum opinione dicere ; eloquen-
tem veto, qui mirabiliùs & magnificentiüs augere
pojfet atque ornare quoe vellet, omnesque omnium
rerum quoe ad dicendum pertinerent fontes anima
ac memoriâ contineret. Ibid. L . 1.
C ’étoit par cette plénitude , par cette abondance
de pensées & d’exprelïions, que le ftyle de l'orateur
s’èlevoitau deffus du üyYefubtil ^ aigu ^ mais tfiiléy
mince, concis, aride,exténuédes philolophes. C ’etoit
enfin par là que l ’Éloquence différoit de cette p lai doirie
aigre & litigieujè dont le langage etoit trivial,
fe c , & pauvre, tandis que celui ae l’Éloquence
étoit enrichi d’une foule de connoiffances , & d’une
affluence de cholès , pareille à l’abondance qu’on
failbit arriver des extrémités de l ’Empire, pour
nourrir le peuple romain. Infirumentum hoc fo -
renfe litigiofum, acre, traclum ex vulgi opinio-
nibus, exiguumfanè atque mendicum e f t . . . . A p -
paratu nobis opus e fi, & rebus exquifitis undique
& colleclis, accerfetis, comparatis , ut tibiy
Coefar, faciendum efi ad annum. Ibid . L. 3.
Telles étoient, pour l’Éloquence grèque & romaine
, les Iburces de Y Amplification. C ’étoit à
des hommes à qui les monuments de l’antiquité ,
fès exemples, fès moeurs, fès loix, fès ufàges étoient
connus ; à qui l’hiftoire de leurs ancêtres étoit pre^
fènte à la pensée ; qui fortoient des écoles de la
Philofbphie , pleins des idées les plus profondes
de Morale & de Politique, analysées, dilcutées ,
agitées dans tous les fèns ; qui s’étoient nourris de
la le âure, non feulement dés orateurs célèbres,
mais des poètes éloquents ; qui avoient traduit,
commenté de mémoire ou par écrit , dajis leur
jeuneffe, les plus beaux modèles de l’Élocution ou
oratoire ou poétique ; c’étoit à de tell» hommes ,
dis - je , que l’art d’étendre, d’agrandir , d’elèver
les idées ,• devenoit comme naturel. Us l’employoient
dans l’exorde, pour fè concilier les efprits ; dans
l’expolîtion & la preuve , pour fortifier leurs
moyens & affoiblir ceux de l ’adverfàire ; dans la
narration , pour la rendre.intéreffante &. perfuafive
à leur avantage; dans la définition, pour la graver
plus avant dans l’elprit des juges, & la fbuftraire
à la dilcuffion d’une Logique rigoureufè : Etenim
definitio, primùm reprehenfo verbo uno , aut ad-
dito, aut dempto , foepe extorquetur è manibus :
ibid. L. 2. Ils l’employoient fur tout quand il
s’agifloit d’émouVoir : Eoeque caufoe funt ad au-
gendum & ad ornandum graviffimoe atque-pLenif-
(imoe , quoe plurimos exitus dont.. . u t . . . ani-
morum impetus. . . aut impeUantur aut refleclan-
tur. Ibid. IL. 2. Et pour la louange & le blâme, Hs
la regârdoiént comme le don fuprême , le talent
propre de l’orateur i-Nihil efi enim ad exageran-
dam & amp D fie a ndam ôrationem accommodatius ,
quam utriimque horum f Idudandi & vituperandi)
cumulâtijjimè facere pojfe. Ibid. L. 2.
Or qu’on me difè comment cet a r t, le triomphe