Voici, fous un coup d’oeil analytique, Je tableau
de tout ce fyftême des Adjectifs qui défîgnent l’application
actuelle du nom appellatif aux individus,
quejje comprends tous fous la dénomination générale
d'Articles :
I N D I C A T I F . . . . . . . ........... .....................................*............. * ................. ï ...............f f l j ü
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CONNO- j
TATIFS \
POSITIFS {COLLECTIF.....................tout, toute, tous, toutes.
DISTR IBUT IF ..............................................chaque.
.NÉÇATIF.............................................................................. nul, nulle-
( INDÉFINIS. .................. ..plujïeuTS-, aucun, quelque, certain.
’'NUMÉRAUX........................... .., deux , trois, &c.
fîng.. . mon, ma, mes.
plur...........notre , nos,
. . . ton, ta , tes.
. . . .votre y vos•
f l
lîng---- , fo n ,f a , fes.
leur y leurs.
( t- Perf. <
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pur . . . ce ou cet, cette, ces.
qui, qae.
V DÉFINIS
POSSESSIFS ) „ r ( '
de là ^ ‘ f i j
I (fing..
l plur.,
V DÉMONSTRATIFS I CONJONCTIF.
L e Supplément à la Grammaire générale préfente
néanmoins une objection contre la notion générale que
je viens de donner des Articles. « L ’A r tic le , dit
» M. Fromant (I I . v it.) ne détermine point l’éten-
» due de la lignification des mots, & je lë prouve.
» L ’Article n’annonce que d’une manière vague
• ce que le nom fpécifie bien précifément ; VAr-
33 ticle ne détermine donc point la lignification du
» nom, c’eft le nom au contraire qui détermine la
» lignification de M Article. . . En effet quand vous
ï> dites, L'homme fage prend garde à ce q u il dit
» & à ce qu’i l fa it y Cet homme efi bien prudent ;
» l e , cet, font des expreffions qui indiquent d’une
» façon incertaine & générale ce que le mot homme
x> préfonte d’une façon fixe & particulière. «
Ce n’ eft point à caufo de fon importance que je
relève cette objeftion ; ce n’eft qu’un paralogifine,
dont le faux Ce manifefte dans tous les fons : mais
G le lavant Principal de Vernon s’y eft mépris : mes
obforvations empêcheront peut-être que d’autres ne
tombent dans la même erreur.
Il eft vrai que VArticle, étant adjeftif, n’exprime
par loi-même qu’un être indéterminé, & que c’eft
le nom appellatif auquel il eft joint qui détermine
l ’idée de la nature dont il s’agit. Mais en accordant
ceci à M. Fromant, je ne lui accorderai pourtant
pas que XArticle annonce d’une manière vague ce
qjie le nom fignifie bien précifément ; XArticle
annonce des individus d’une nature quelconque , ou
avec abftradion de toute nature ; le nom exprime
l ’idée d’une nature commune avec abftraétion des
individus : ce Ibnt évidemment deux lignifications
très-différentes, indépendantes l’une de l’autre, mais
relpeftivement modificatives l’une de l’autre quand
elles font réunies. La lignification du nom détermine
la nature des individus annoncés vaguement par
XArticle ; & la lignification de X Article détermine ,
à être envifàgée dans les individus, l’idée abftraite
de la nature exprimée par le nom : mais comme les
individus déterminés par XArticle ne font delîgnes
en aucune manière par le nom , de mpme la nature
générale exprimée parle nom n’eft annoncée dans •_
XArticle ni d’une manière vague ni d’aucune autre.
Ajoutons que l ’auteur ne va point à ce qu’il
fomble le propofor. Il entreprend de prouver, que
XArticle ne détermine point l’étendue de la lignification
des noms ; & il prouve feulement, que l’A r ticle
ne détermine pas la nature énoncée par le
nom : ce qui eft bien différent, & fait de tout fon
raifonnement un vrai paralogifine. Levons donc l ’e-
quivoque des termes.
S i , par déterminer la fignifie athon des mots ,
on entend que c’eft les deftiner à être lignes de
telle ou telle idée; c’eft l ’Ufage dans chaque langue
qui détermine ainlî leur lignification. Si on entend
que e’eft expliquer les idées dont ils font les lignes ;
A R T
ee ffont des définitions bien faites qui, d’après les
dédiions de l’Ufage , déterminent la lignification des
mots. On ne peut donc dire dans aucun de ces deux
fens , ni que le nom détermine la lignification de
XArticle ni que l ’Article détermine la lignification
du nom : & ce n’eft pas en effet de quoi il s agiflbit,
quoique M. Fromant n’ait dit autre choie, apres
avoir promis de prouver que XArticle ne détermine
point l’étendpe de la lignification dés noms.
Déterminer l’étendue de la fignifieadon^ d’un
nom appellatif , c’eft tourner l ’attention de 1 efpnt
fur les individus en qui Ce trouve la nature commune
énoncée par le nom appellatif, & en fixer la totalité
ou feulement une partie, foit vague & indéfinie,
foit précife & définie. Or il eft évident que c eft
en effet l ’office des Articles y tels que je les montre
ici ; & que ,1e Principal de Vernon , malgré le ton
affirmatif de là promeffe , n’a pas prouvé & ne
fauroit prouver - le contraire.
Au refte , il eft important d’obforver, que nos
grammairiens avoient imaginé mille propriétés chimériques
, qu’ils accumuloient fur le y la y lé s , pour
faire à cet Article un cara&ère propre & incommunicable
: on le chargeoit de faire ^ connoitre le
genre & le nombre des noms, quoiqu’il faille con-
noître le genre & le nombre d’un nom pour choifïr ,
entre le , la y le s , le mot qui convient le mieux ;
on vouloit -même qu’il marquât les cas , quoique
nos noms 'm’en ayent point.
Tout cela étoit imaginé , pour le diftinguer des
autres adjedifs que je lui ai affociés, & qu on ne
voüloit pas reconnoître pour Articles y quoiquon
les jugeât propres à déterminer l’étendue comme
le y la y les. Mais au milieu des efforts que l ’on
faifbit contre la vérité, elle perçoit neanmoins &
réclamoit fes droits : il Ce trouvoit de fréquentes
occafions où l’on réunifient tous ces mots fous le
point de vue commun qui en fait le caractère fpe-
difique. On a déjà vu ce qu’en penfoit M. du Marfais ;
il ne foroit pas difficile de recueillir les fù fixages
de tous jios grammairiens qui l ’ont précédé , & de
montrer qu’il n’y en a pas un foui qui n’ait vu
que tous ces mots font propres à déterminer avec
plus ou moins de précifion l’étendue des noms appel-
latifs. Je me contenterai de citer la Grammaire
générale de P . R. \ à caufo du poids de fon autorité
; & la Grammaire françoifo d’Antoine Caucie ,
à caufo de fon ancienneté.
Dans le premier de ces deux ouvrages on lit
( I I . x . ) : « Ce y quelque , plufieurs , les noms de
oa nombre , comme deux y trois y &c. tout, nul y
oo aucun y &c. déterminent aufïi bien que les A r -
M ticles. Cela eft trop clair pour s’y arrêter. »■
Après avoir donné la prétendue declinaifôn des
deux noms Prince & Princejfe fans le y la y les ;
Caucie ajoute ( Grammatica gall. Paris, i $70. pag.
82 ) : Hoc pafto flechintu/ etiam omnia ea quee
proe fe voculam un h a b e n tv e l aliam quampiam
qua> appellativi latèpatentem fignifieadonem refi-
uingat, cujits modi fiant omnia pronornina fiigni-
A R T y p
ficationïs demonflrativoe, & hoec pofifefijîva mon ,
ton, fon , ma, ta , fa , atque non raro notre ,
votre, leur , cum fubfiantivis exprefifis. C ’eft dire
nettement que tous ces mots renferment dans leur
valeur celle de le ,' la , les , non feulement en ce
qu’ils ont le même effet dans la prétendue décli-
naifon , mais en ce qu’il leur attribue la même propriété
fondamentale, quæ appellativi latèpaten-
tum fignifieaiionem refiringat. Il ajoute un peu
plus bas : Jam vero tenenda efi energia rectorum
Articulorum : nam reftringuni fuorum nominum
amplitudinem ÿ & efijiciunt, quodammodo ut ap—
pellativa latèque patens diclio angufiiùs capiamr.
On voit que cet auteur fait confifter la principale
force des Articles direds •(_(avoir 7e , la , les) a
modifier l ’étendue de la lignification des noms ; ce
. qui eft le point de vue commun fous-lequel il a
réuni, avec le, la y le s , les autres mots dont il a
parlé plus haut. Il Ce trompe, quand il ne J^arle
que de reftreindre l’étendue : XArticle indicatif ne
tait en quelque forte que la montrer ; les Articles
univerfols l’affignent toute entière & fans _ reftric-
tion ; il n’y a que les Articles partitifs qui la reC~
treignent : tous la déterminent ( c’eft le mot propre )*
parce que tous y font faire une attention expreffe.
Quoi qu’il en (bit des erreurs des uns & des
autres, il eft confiant par les faits , que, fi la vérité
que j’établis ici n’a pas. été entièrement connue ,
elle a du moins été fonde & aperçue depuis long
temps.
Faute de l’avoir nettement envifàgée , les grammairiens
font tombés dans la confùfion. Ils ont dit ,
par exemple , qu’il y a un Article défini dans cette
phrafo , un château du roi , & un Article indéfini
dans celle-ci, un château d e roi; folon eux , d u
roi défîgne un roi déterminé , & d e roi ne marque
aucun roi déterminé t & c’eft pour cela , difont-
ils, que du eft un Article défini ; 8c de y un A r ticle
indéfini.
Le fait qui leur fort de principe eft vrai ; mais
la conclusion qu’ils en tirent n’y tient aucunement*
D u roi veut dire de le roi y & il n’y a à. A r tic
le dans cette phrafo que le ; de eft une fimple
prépofition : quand on dit donc un château d e roi ,
c’eft Amplement la même prépofition de , & le nom
tvi fàns Article. Il eft vrai qu’un nom appellatif
peut être pris dans un fons defini ou dans un fons
indéfini, c’eft à dire , avec une application déterminée
aux individus ou avec abftraction des individus.
Dans le premier cas, il eft^ jufte que le
nom foit modifié par un A r tic le , qui défîgne l’application
a&uelle du nom aux individus ; dans le
fécond cas , le nom foffit, puifque par lui-même
il fait àbftraâion des individus: un Article feroit
donc inutile pour marquer cet état du nom ; il n’y
en a point en effet dans la phrafo dont il s’agit ^
& il eft ridicule d’y en imaginer un.
D’autres grammairiens ont regarde un , une
comme Article indéfini, & comme t res-different
en cela de celui que j’appelle numéral. M* Reftv>u