
L ’infinitif ne marque ce qu’il fignifîe qu'ê dans ’
un fèns abftrait; il ne fait qu’indiquer un fens qu’il
n’affirme ni ne nie, qu’il n’applique à aucune per-
fbnne déterminée : hôminem ejje folum, ne dit pas
que l’homme fôit fèul, ou qu’il prenne une compagne
; ainfî , l’infinitif ne marquant point-par lui-
même un fèns déterminé, il faut qu’il fôit mis en
rapport avec un autre verbe qui foît à .un mode
fini, & que ces deux verbes deviennent ainfî. le
complément l’un de l’autre.
Telle eft fans doute la raifôn de la maxime IV
que la Méthode latine de P. R. établit au chapitre
de CEllipfe en ces termes : « Toutes les fois que
33 l’infinitif eft fèul dans l’oraifôn , on doit fous-
» entendre un verbe qui le gouverne, comme coe-
» p i t , folebat, ou autre: Ego illud fedulo negare
» faélum (Terent.), fùppléez ccepi : Facilé.omnes
» perferre acp'ati ( idem ) , fùppléez folebat. Ce
» qui eft plus ordinaire aux 'poètes & aux hifto-
» riens.. . . . où l’on doit toujours fous-entendre Un
» verbe, fans prétendre que l’infinitif fôit là pour
» un temps fini, par une figure qui ne peut avoir
» aucun fondement. » ( M . d u M ars a i s . )
EN C L IT IQ U E , adj. féminin pris fùbft. terme
d e Grammaire, & fur •tout de Grammaire grèque ,
par rapport à la leâure & à la prononciation. Ce mot
vient de i’adjeébif grec tyx.xthxj?, incliné. K.lyxXiva,
inclino. Ce mot eft une expreflion métaphorique.
Une Enclitique eft un petit mot_que l’on joint
au mot qui le précède , en appuyant fur la dernière
fyllabe de ce mot; c’eft pour cela que les grammairiens
difènt que Y Enclitique renvqie l’accent fur
cette dernière fyllabe, & s’y appuie: l’on baifîè la voix
fur ŸEnclitique : c’eft par cette raifôn qu’elle eft
appelée Enclitique , c’eft à dire , inclinée , appuyée.
Les monôfyllabes que , né , v e , font des
Enclitiques en latin : reclè, beatèque vjvendum ;
ter raque , pluit-ne ? alter-ve. C’eft ainfi qu’en
françois, au lieu de dire aime j e , en féparantje
de aime, & faifânt fentir les deux mots, nous
difôns aimé-je , en'joignant j e avec aime: je eft
alors une Enclitique. En un mot, être Enclitique;,
dit la Méthode de Port-Royal , à l’avertiflèment de
la règle x x i i n’ejl autre chofe que s'appuyer tellement
fur le mot précédent, qu’on ne jaffe plus
que comme un feul mot avec lui.
Les grammairiens aiment à perfônnifier les mots :
les uns gouvernent, régiflent, veulent; les autres,
comme les Enclitiques, s’inclinent, penchent vers
un certain côté. Ceux-ci, dit-on , renvoient leur
accent fur la dernière fyllabe du mot qui les précède;
iis s’y unifient & s’y appuient, & voilà pourquoi,
encore un coup, on lès appelle Enclitiques.
Il y a, fùrtout en grec, plufîeurs de ces petits^mots
qui étoient Enclitiques , lorfque danTla prononciation
ils paroiffoient ne faire qu’un feul & même
mot avec le précédent : mais fi dans une autre
phrafè la même Enclitique fùivoit un nom propre,
£l)e cefifoit d’être Enclitique & gardoit fôn accent;
car l’union de Y Enclitique avec le nom propre *
auroit rendu ce nom méconnoiiïàble : ainfi, r i, ali-
quid, eft Enclitique ; mais il n’eft pas Enclitique
dans cette phrafè, ou rt teç Kahrapu ri vjptoiplovfA&.iy.)
je n’ai rien fa it contre Céfar. Si r) étoit Enclitique,
on prononceroit tout de fuite Kutc-etpau , ce qui
défigüreroit le nom grec de Céfàr.
Les perfôhnes qui voudroient avoir des connoif-
fânces pratiques les plus-détaillées fur les Enclitiques,
peuvent confùlter le neuvième livre^de la
Méthode grèque de Port-Royal, où l ’on traite de
la quantité des accents & des Enclitiques. Ces
connoiflànces ne regardent que la prononciation du
grec avec l’élévation & l’abaiflement de la v oix , &
les inflexions qui étoient en ufàge quand le grec
ancien étoit encore une langue vivante. Sur quoi il
eft échappé à la Méthode de Port-Royal de dire,
p , 548 , « qu’il eft bien difficile d’obfèrver tout
» cela exactement, n’y ayant rien de plus embar-
» raflâht que de voir un fi grànd nombre de règles
» accompagnées d’un nombre encore plus grand
» d’exceptions. » Et à l ’avertiffement de la règle
x x i i , l’auteur de cette Méthode dit « qu’une mar-
» que que ces règles ont. été fôuvent forgées par
» les nouveaux grammairiens , ou accommodées à
» leur ufàcre, c’eft que non feulement les anciens ,
» mais ceux du fiècle paflé même , ne s’accordent
« pas toujours avec ceux-ci, comme on voit dans
» Vergare, l’un des plus habiles, qui vivoit il y
» a environ cent cinquante ans. » Je me fèrs de
l’édition de la Méthode grèque de Port-Royal, à
Paris y 1696.
Il y avoit encore’’ à Paris à la fin du dernier
fiècle, des lavants qui pronon çoient le grec en ob-
fèrvant avec une extrême exactitude la différence
des accents ; mais âujourdhui il y a bien des gens
de Lettres qui prononcent le grec, & même qui
l’écrivent fans avoir égard aux accents , à l ’exemple
du P. Sanadon, qui, dans fa préface fur Horace
, dit : « J’écris le grec fans accents; le mal
» n’eft pas grand, je pourrois même prouver qu’il
» fèroit bon qu’on ne l’écrivît point autrement. »
Préfacé, p. 1 6. C’eft ainfi que quelques-uns de
nos beaux efprits entendent fort bien les livres
anglois.; mais ils les lifènt comme s’ils lifôient des
livres françois. Ils voient écrit people, ils prononcent
people au lieu de p iple; & difènt, avec le
P. Sanadon, que le mal n eft pas grand., pourvu-
qu’ils entendent bien le fèns. Il y a pourtant bien
de la différence , par rapport à la prononciation,
entre une langue vivante & une langue morte de-,
puis plufïeurs fiècles. ( M. d u M a r s a ï s . )
(. ) ENCORE, AUSSI. Syn. Encore a plus
-de rapport au nombre & à la quantité; fa propre
énergie eft d’ajouter & d’augmenter. Quand il n’y
en a pas àflèz, il en faut encore. L ’amour eft , non
fèulement libéral, mais encore prodigue.
1 Aufji tient davantage de la fîmilitude & de
• la comparafton ; fa valeur particulière eft de iparauer
de la conformité & de l ’inégalité datts les
chofès. Lorfque le corps eft malade, l’efprit l ’eft
aufji. Ce n’eft pas fèulement à Paris qu’il y a de
la politeffe, on en trouve aufji dans la Province.
( L ’abbé G ir a rd . )
( N.) ÉNERGIE, f. f. Ce mot eft grec , EVep.yttet,
acîio, efficacia ; il a , dans ce fens, pour racines ,
Jk.(iny dans, en) , & epyov ( opus, ouvrage , oeuvre).
J’aimerois mieux, pour le fèns dont il s’agit i c i ,
qu’on luiaffignât pour racines lv(in)^St le verbe ttpya,
( includo ) : parce qu’en effet l’Energie eft cette*
qualité qui , dans un fèul mot ou dans un petit
nombre de mots, fait appercevoir ou fèntir un grand
nombre d’idées; ou qui, au moyen du petit nombre
d’idées exprimées par les mots , excite dans
l’ame desfèntiments d’admiration, de refped, d’horreur
, d’amour, de haîne, &c. que les mots fèuls
ne défignent point.
Horace ( I. Od. xjx. termine une ftrophe par
un mot qui a bien de Y Énergie ;
Nec qutdquam tïbi prodefi
diïrias tentajfe domos animoque rotundum
Percurrijfe polum MORITVRO.
Que de motifs dans ce fèul mot morituro , pour
ne pas mettre tant d’importance dans l’étude du
ciel ou du globe terreftre !
Il emploie le même mot ailleurs ( II. Od. iij. )
avec la même Énergie :
Æquam memento rebus in arduis
Servare mentem , non Jecus ac bonis
j£b infolenti temperatam
Laetitia, M.ORITVRE Délit.
Sur les offres que faifoit Darius à Alexandre
pour la rançon de fà mère & de fès deux filles ,
Parménion Tut d’avis qu’Alexandre acceptât les ’
trois nÿlle talents d’or qui lui étoient offèrts : Et
moi aufji, répliqua Alexandre, jepréfèrerois Cargent
à la gloire , f i j ’étais Parménion : ( Q. Curt.
IV. xj. 4 4 . ) E t ego, inquit, pecuniam quam glo-
riant mallem , j i Parmenio effem. Que ce mot
fait naître de réflexions fur le cara&ère d’Alexandre,
fur la nature de fôn ambition ! Quelle Énergie !
Lorfque l’écrivain fàcré a dit ( Gen. I. 3. ) Dixit-
que Deus : Fiat lu x , & facla eft lu x ; il s’eft
énoncé avec une grande Énergie , quoiqu’il ne
naiflè aucune autre idée de cette belle expreflion,
que celle de la toute-puiflance qui y eft caradé- ’
rifée ; mais elle excite les plus grands fèntiments
d’admiration, de crainte, d’adoration, &c. cè que:
la fîmpie énonciation de la toute- puiflànce ne feroit
pas. Ici elle n’eft point nommée ; mais on la voit
agir, elle étonne , elle fùbjugue." ( M . B rauzêe.)
Én e r g ie , FORCE. Synonymes.
î^ous ne confidérons ici ces mots , qu’en tant
qu’ils s’appliquent au difcours; car dans d’autres cas,
leur différence faute; aux yeux.
C ramm. e t L it t ê r a t . I . Partie. Tome I L
t II fèmble qu’Énergie dit encore plus que Force ;
I & qu’Énergie s’applique principalement aux difcours
qui peignent, & au caradère du ftyle. On peut dire
d’un orateur , qu’il joint la Force, du raifônnement
à Y Énergie des expreflions. On dit auflï, Une peinture
énergique & des images fortes. ( M , d’A LEÙÇr
b e r t . )
(N.) ENFANT , PUÉRIL ; Synonymes. .
On applique là qualification d’Enfant aux per-
fônnes, & celle de Puéril à leurs difcours ou à
leurs adions. Ainfî , l’on diroit d’un homme , qu’il
eft enfant, & que tout ce qu’il dit eft puéril. Le
premier de ces mots défîgne dans l’efprit un défaut
de maturité ; & le fécond, un défaut d’élévation. Un
difcours d’Enfant eft un, difcours qui n’a-point de
raifôn: un difcours puéril eft un difcours qui n’a
point de nobleflë. Une conduite d’Enfant eft une
conduite fans réflexion, qui fait qu’on s’amufè à des
bagatelles, faute de connoître le fôlide : une conduite
puérile eft une conduite fans goût, qui fait
qu’on donne dans le petit, faute d’avoir des lèn-
timents. ( L ’abbé Gi r a r d , )
ÉNIGME, f. m. & plus fôuvent f. L i t t é r . P o é f ie .
C étoit chez les anciens une fèntence myftérieufe ,
unepropofition qu’on donnoit à deviner, mais qu’on
eachoit fous des termes obfèurs, & le plus fôuvent
contradictoires en apparence. U Énigme^ parmi
les modernes , eft un petit ouvrage ordinairement
en vers , où , fans nommer une chofè, on la décrit
par fès caufès, fès effets , & fès propriétés , mais
fous des. termes & des idées équivoques pour exciter
l’efprit à la découvrir.
Souvent Y Énigme eft une fuite de comparai fôns
qui caradérifèm une chofè, par des noms tirés de
plufïeurs fùjets différents entre eux , qui reffèmblent
à celui de Y Énigme chacun à fà manière & par
des rapports particuliers. Quelquefois pour la rendre
plus difficile à deviner , on l’embarrafle , en
mêlant le ftyle fîmpie au ftyle figuré , en empruntant
des métaphores, ou en perfonnifiant exprès
lé fùjet de l’Énigme afin de donner le change.
. , En général , pour conftituer la bonté de nos
Enigmes modernes, il faut que les traits employés
né puiflènt s’appliquer tous enfèmble qu’à une feule
chofe, quoiqueféparémentilsconviennent-àplufïeurs.
Je ne m’arrêterai pas à rapporter les autres règles
qu’on preforit dans ce jeu littéraire , parce que mon
delfein eft bien moins d’engager les gens de Lettres
à.y donner leurs, veilles, qu’à les détourner de
femblablés puérilités. Qu’on ne difè point en faveur
des Énigmes y que leur invention eft des plus anciennes
, & que les rois d’Orient fè font fai: très-
long temps un honneur d’en compofèr & d’en ré-
foudre : je répondrois que cette ancienneté même
n’eft ni a la gloire des Énigmes, ni à celle des
rois orientaux.
Dans la première origine des langues, les hommes
furent obligés de joindre le langage d’adion à celui.
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