
Analyfes didactiques , des Oraifons de Cicéron &
de nos rbons férmonaires. Le P. du Cygne, dans
fbn ouvrage intitulé UT. T. Ciceronis oraùonum
Analyfis rhetorica perpétua, a voulu faciliter,
aux etudiants en Rhétorique, la connoiflance de la
marche de l’orateur romain, des fondements de fbn
éloquence , des moyens qu’il emploie, & de toutes
les reflburces de l ’art dans les mains d’un grand
maître : le P. Bretonneau , ainfî que les autres qui,
à fbn imitation, ont donné les Analyfes des férmo-
naires qu’ils ont publiés, avoient intention de mettre
à la portée des jeunes prédicateurs les modèles qu’ils
leur offraient, &.de leur tracer en quelque forte
la voie d’une imitation également utile & sure.
z. L'Analyfe critique élève les,vues jufqu’à
juger de l’ouvrage ; elle en examine le but, le
plan, l’exécution, & le ftyle même. Elle demande
de la jufteflé dans l’efprit ; pour ne pas prendre
le change, en appuyant fur des accefïoires au préjudice
du principal qu’on négligeroit : elle fuppofé
beaucoup de jugement & de goût; pour bien déméier
les principes de l’ouvrage, & pour les expofér avec
précifîon & avec netteté : elle exige de l’étendue
dans l’efprit, un grand fonds d’érudition, & fur
tout une parfaite connoiflance des règles du genre
de l’ouvrage qu’on examine; pour pouvoir en fàifîr
d’un coup d’oeil & en raflémbler fous un même
point de vue toutes les parties, en marquer la dépendance
réciproque, & en diftinguer les liaifbns
& les effets. Mais il faut principalement que YAna-
lyfe foit impartiale ; & que le jugement du Critique
ne fé reflénte en aucune façon , ni des préjugés
de l’amitié ou de la haine , ni des bafîeflés
de l’intérêt, ni des chagrins de la jaloufie, ni
des forfanteries de l’amour propre.
Des Analyfes critiques de nos bons ouvrages,
elles étpient bien faites , feraient de la plus grande
utilité pour former le goût des jeunes gens à la
compofition : ils y puiferoient des idées faines du
beau & du vrai ; ils y reeonnoitroient la route qu’ils
doivent tenir, & les écueils qu’ils doivent éviter;
enfin ils y verraient des modèles excellents , dont
les beautés réunies-dans un même tableau les dif-
poféroient â une imitation avantageufé, & dont
les écarts appréciés avec jufteflé les préferveroient
des dangers d’une imitation maladroite & nuifible.
Les plaidoyers des avocats généraux , lorfqu’ils
donnent leurs conclufions; font de véritables Analyfes
critiques, dans lefquelles ils réfument &
apprécient les moyens dès deux parties , expofés
& débattus auparavant par leurs avocats refpedifs.
S’il eft particulièrement utile à ceux qui Ce destinent
au Barreau , de fiiivre aflïdûment ceux de
ces magiftrâts qui honorent leur profeflïon par leurs
fûccès ; les autres , à quelque genre qu’ils Ce def
tinent, ne peuvent manquer d’en tirer parti, pour
fo former dans le grand art de fàifîr avec préei-
fion , de raifbnner avec jufteflé , de s’énoncer avec
force , & de juger avec poids.
Les Analyfes critiques des Nouvelles de la République
des Lettres de Bayle , & celles du Journal
des Savants, font des modèles d’impartialité,
d’érudition, & de fàgefle : j’y renvoie les jeunes
littérateurs, pour s’y former le goût ; & les jour-
naliftes , pour y apprendre l’étendue des devoirs
que leur état leur impofé, & les bornes que leur
prefcrivent la juftice, l’honnêteté, & l’intérêt même
de leur gloire.
II. La féconde efpèce d'Analyfe relative à
l’art de la parole , que je crois devoir nommer
Analyfe grammaticale , confîfte à rendre toutes
les raifons grammaticales des mots qui entrent dans
la compofition des phrafés : ce qui le réduit à faire
la conftrudion de chaque phrafé ; à lùpléer les
vides de l’Ellipfè ; & à rendre compte du rang,
de la forme, & du féns particulier de chaque mot.
On trouvera les principes les plus généraux
de cette Analyfe , principalemènt aux articles
C onstru ct ion , E ll ip se , Inversion , Méthode ;
& dans plufîeurs articles moins généraux, comme
G é n it if , In f in i t i f , S u b jo n c t if , S u pe r la t
i f , &c. Il y a , dans l ’article Méthode , \Analyfe
grammaticale d’une phrafe latine de Cicéron ;
& dans l’article C o nstruct ion , celle del’idyle
de Mad. des Houlières, intitulée Les moutons.
Dans l’ouvrage de Prifcien für la Grammaire,
I les livres XVII & X V I II , intitulés D e conjlruc-
tione partium orationis , pofént en détail les principes
de Y Analyfe grammaticale , telle que ce
grammairien la concevoit. Outre ces deux livres
dogmatiques, l’auteur a mis à la fuite un ouvrage
particulier , qui eft comme la pratique de ce qu’il
a enféigné auparavant ; Prifciani grammatici
partitiones verfuum X I I Æneidos principalium :
c’eft ce qu’on appellerait aujourdhui dans les écoles,
Les parties & la conflruclion de chaque premier
vers des X I Ï livres de L’Ênéide.
La Grammaire angloifé écrite en latin par Wallis
( IV. Edit. 1674. d Oxford ) efl aufli terminée
par un ouvrage pareil, intitulé Praxis grammatica
; & c’eft en effet Y Analyfe grammaticale de
l’Oraifôn dominicale & du Symbole des apôtres écrits
en anglois.
Le P. Giraudeau a mis de même des Analyfes
grammaticales à la fin de chacune de (es trois
Grammaires grèques, pour les cinquièmes, pour
les quatrièmes , & pour les troifîèmes.
Tous ces exemples font autant de témoignages
rendus à l’utilité de cette Analyfe pour l’intelligence
des langues. Malgré ce concours de témoignages, qui
ne peuvent être que le réiultat de l’expérience des
grammairiens anciens & modernes qui les ont rendus
, quelques fpéculateurs ont voulu récemment
fupprimer la méthode d'analyfer les phrafés dans
l’enféignement des langues. C ’eft vouloir dérober à
la Jeunefle un des fécours les plus utiles, non feulement
pour l ’intelligence des langues , mais encore
pour tout le refte ae leurs études. J’ai difcuté ailleurs
& apprécié cette opinion nouvelle. Voye\ Inv
e r s io n . (A L B e a u z é e .)
ANAPESTE,
* ANAPESTE, f. mi Terme de la Poéfie grèque
& latine , qui défîgne un pied Ample $de trois
fÿllabes, deux brèves & une longue ; comme
Sapiens j legerënt, domînï, qnQtrcu, &<?,
Ce mot vient du grec Amvatçoç ( Rétro per-
euffus ) , dérivé de Avu-n-ctia ( Rétropercutio ) : RR.
àiu ( rétro ) , & ( percutio ). Ce pied eft ainfî
nommé , parce que ceux qui danfoient félon la
cadence qu’il marque , frappoient la terre d’une
façon toute contraire à celle qui fé gardoit dans
le dadyle: aufli les grecs l’appelcient-ils Avnê%x.Tu-
Aos , Antidaclyle. ( M. E e a u z é 'e . )
* Les g recs, dont l’oreille avoit une fènfîbilité
fi délicate pour le nombre , avoient réfèrvé Y Anapefle
aux poéfîes légères, comme le Dadyle aux
poèmes héroïques : & en effet, quoique ces deux
mefùres foient égales, le D a d y le , frappé fur la
première fyllabe , a plus de gravité dans fà marche
que l’Anapefle, frappé fur la dernière.
On a obfèrvé que la langue françoifé a peu de
Da&yles & beaucoup üAnapeJles. Lully femble
être un des premiers qui s’en foit apperçu, & fôn
récitatif a le plus fouvent la marche de ce Dadyle
renverfe.
On n’en doit pas conclure que nos vers héroïques,
où Y Anapefle domine , ne foient pas fùfceptibles
d’un caradère grave & majeftueux : il fuffit, pour
le ralentir, d’y entremêler le Spondée; & Y Anapefle
, alors aliûjetti par la gravité du Spondée,
n’eft plus que „coulant & rapide, & ceflë d’être ,
fàutillant.
J’obfèrverai même à ce propos que, dans notre
déclamation ainfi que dans notre Mufique, rien j
n’eft moins invariable que le caradère que les anciens
attribuoient aux différents pieds ; que Y ïambe,
par exemple , le pied tragique, e ft, dans nos
vaudevilles & dans nos airs de dan^è , aufli fàutillant
que la Chorée j que le Dactyle, le pied favori de
l ’Épopée, imite , quand on v eu t, tout auffi bien
que Y Anapefle, un galop rapide, & d’autant plus
léger que les derniers temps font en l’air ; & qu’au
contraire Y Anapefle exprime, quand on veut, la
langueur & l’abattement, en gliftànt mollement
fur les deux premières fÿllabes, & eij appuyant
fur la dernière ; comme dans ce yers :
N’allons point plus avant : demeurons, chère (Enone.
Lè rhy thme eft donc un moyen d’expreflion, changeant
félon le mouvement & l’inflexion de la voix •
& lorfqu’on lui attibue un caradère inaltérable
on eft preocupé de quelque exemple particulier ,
que mille autres exemples démentent.) ( M. M a r -
m o n t e l . )
(N .) ANAPESTIQUE. adj. On nomme ainfî une
efpèce de vers qui tient de VAnapefle ; c ’eft le féns
du mot.
Il y a des vers Anapefliques de quatre pieds,
dont les trois premiers font Anapeftes , ou Dadyles
C ramm. e t L it t é r a t , Tome I.
ôü Spondées, comme on veut ou ccfrnme on peut :
le quatrième eft ordinairement Ahapefte ; ou s’il
eft quelquefois Spondée, il faut que l’Anapefte fé
trouve au moins dans l’un des trois premiers , fans
quoi le vers ne fèroit plus Anapeflique. Voilà
probablement la règle primitive ; & D. Lancelot
( Méth. lat. ) obfèrve qu’originairement cette forte
de vers n’étoit compofée que d’Anapeftes : » mais,
» dit-il, comme on s’eftdonhé la liberté de mettre,
» au. lieu de l’Anapefte, le Spondée ou le D a c -
» ty le , qui ont la même quantité, fàvoir quatre
» temps ; il arrive que ce vers, quoique nommé
» Anapeflique, n’a quelquefois aucun Anapefle.. . .
» Il ne demande point de • céfûre.j «
Il y a aufli des vers Anapéftiques de deux pieds,
qui quelquefois, comme les autres , n’ont point
d’Anapeftes.
G r a n d a n a p e s ti q u ê .
U U —
— u> U
O U —
— u 0
O U —
— U O O O —
Q u a n t i
M in u s ïn
L ë v iü s
c â fu s
p â r v ïs
que f ë r ï t
hü inâ - '
f ô r t ü -
Lëviâna
ro tâ n t !
n a .fu .n t ,
ra D e ü s .
Senec. Hipp. ad. IV.
P e t i t a n a p e s t i q u e .
O U —
— U U O U —
D c f l ë -
Q u ô non
P o t î i i t
D i f ië r è
û n â
P a r te âu-
Soepe et
te v i r ü m ,
a l m s
c ït ïü s
câ ufâs
tâ n tüm
dzta
n ëu trâ
Senec.( De morte Claud. M. JBeauzèe. )
ANAPKORE. f. f. Efpèce particulière de
Répétition ( P'oyei R é p é t it io n ) , par laquelle oti
recommence de la même manière divers membres
de l’Oraifén.
Je citerai en exemple un morceau de Mafliiîon,
où deüx Anciphores, réunies & marchant parallèlement,
font immédiatement füivies d’une troifième,
qui fait la clôture. » J^ous ave\vécu impudique;
» vous mourre\ tel : vous ave% vécu ambitieux ;
« vous mourre\ fans que l’amour du monde 5 c de
» fés vains honneurs meure dans votre.coeur: vous
a ave\ vécu mollement, fans vice ni vertu ; vous