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Joueurs y mêlèrent quelques farces tîrees de fejets
burlefques, qui amufoient beaucoup le peuple, &
qu’on nomma les Jeux des pois piles r . apparemment
par allufîon à quelque mène d une des- pièces.
Ce mélange de religion 8c de bouffonnerie déplut
aux gens fages.. En 1545 la maifön de la Trinité
fot de nouveau convertie en: hôpital, fuivant la
fondation ; ce qui fut ordonné par un arrêt du Parlement.
Alors les confrères de la paffion , obligés
de quitter leur falle, choifirent un autre lieu pour
leur théâtre ; & comme ils avoient fait des gains ;
confîdérables, ils achetèrent en 1 54S la place & les .
mafures de l’itotel de Bourgogne, où ils bâtirent
un nouveau théâtre. Le Parlement leur permit de
s’y établir, par arrêt du 19 Novembre 1548 , à condition
de n’y jouer que des fejets profanes, licites, &
•honnêtes, & leur fit très-expreffes défenfes d’y re-
préfenter aucun myftère de la paffion ni autre myl-
tère fàcré: il les confirma néanmoins dans tous leurs
privilèges, & fit défenfes à tous autres , qu’aux confrères
de la paffion , de jouer ni repréfenter aucuns
jeux, tant dans la ville , fauxbourgs , que banlieue
de Paris , linon fous le nom & au profit de la confrérie
: ce qui fut confirmé par lettres patentes
d’Heari I I , du mois de Mars 15 55?-
Les confrères de la paffion, qui avoient fèuls le
privilège, Gefsèrent de monter eux-mêmes fur le
théâtre ; ils trouvèrent que les pièces profanes ne
convenoient plus au titre religieux qui caraderilolt
leur compagnie'. Une troupe d’autres comédiens le
forma pour la première fois , & prit deux à loyer
le privilège & L’hôtel de Bourgogne. Les bailleurs
s’y réfèrvèrent feulement deux loges pour eux &
pour leurs amis : c’étoient les plus proches du
théâtre, diftinguées par des barreaux; & on lesnom-
moit les Loges des maîtres. La farce àe Patelin
y fut jouée : mais le premier plan de Comédie profane
eft dû à Étienne Jodelle , qui compofa la piece
intitulée la Rencontre , qui plut fort à Henri I I ,
devant lequel elle fut repréfentée. Cléopâtre &
Didon font deux tragédies du même auteur , qui
parurent des premières fur le théâtre au lieu & place
des tragédies feintes. . .
• Dès qu’Henri III fut monté fur le trône , il m-
fefta le royaume de farceurs-, il fit venir de Vemle
les comédiens italiens furnommés li Gelofi, lefquels,
au rapport de M. de l’Étoile ( que je vais copier ici ),
« commencèrent le Dimanche 2.9 Mai 1 57 7 , leurs
» Comédies en l’hoûel de Bourbon à Paris ; ils pre-
» noient quatre fouis de fakire par teûe de tous les
» françois, & il y avoit tel concours, que les quatre
»meilleurs prédicateurs de Paris n ’ e n ^ avaient pas
» tous enfemble autant quand ils prefcboient. . . . Le
» Mercredi z6 Juin, la Cour, affemblée auxMercu-
a» riales , fit défenfes aux Gelofi de plus jouer leurs
» Comédies, pour ce qu’elles n’enfeignoient que pail-
„ lardifes. . . . Le Samedi 17 Juillet, li Gelofi, apres
» avoir préfehté à la Cour les lettres patentes , par
» eux obtenues du ro i, afin qu’il, leur fut permis de
» jouer leurs Comédies, nonabftant les defenfes de la
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» Cour , furent renvoyés par fin de non-recevoir, &
» défenfes à eux faites de plus obtenir & préfenter à
» la Cour de telles lettres, feus peine de dix-mille
» livres parifis d’amende , applicables à la boîte des
» pauvres ; nonobiiant lesquelles défenfes , au com-
»mencement de Septembre feivant, ils recommen-
» cèrent à jouer leurs Comédies en l’hoilel de Bour-
» boncomme auparavant, par la juffion expreffe du
» roi : la corruption de ce temps étant telle , que les
>5 farceurs, bouffons, put. . . & mignons, avoient tout
» crédit auprès du roi. » Journal d'Henri I I I , par
Pierre de l’Étoile, à la Haye, 1744 > in- 8°. toM. I ,
pag. zo6 , , & i l 1.
La licence s’étant également gliflee dans toutes
les autres troupes de comédiens, le Parlement refufà
pendant long-temps d’enregiffrer leurs lettres patentes
, & il permit feulement en 1596 aux comédiens
de province, de jouer à la foire Saint-Germain,
à la charge de payer, par chaque année qu’ils joue-
roient, deux écus aux adminiftrateurs de la confrérie
de la paffion. En 1609 , une ordonnance de
police défendit à tous comédiens de repréfenter
aucunes Comédies ou farces, qu’ils ne les euffent
communiquées au procureur du roi. Enfin on réunit
le revenu de la confrérie de la paffion à l’hôpital
général. Foye\fur tout ceci Pafquier, Rech. l.V I I^
ck. v. De la Mare, Traité dé Pol. liv. I I I , tom. III»
(Euvres de Defpréaux, Pa r is, 1747 , in-%\ Sic.
Les accroifîèments de Paris ayant oblige les
comédiens à fê féparer. en deux bandes ; les uns^
reftèreut à l’hotel de Bourgogne , & les autres
allèrent à l’hotel d’Argent au Marais. On y jouoit
encore les pièces de Jodelle ,'de Garnier, & de leurs
femhlables, quand Corneille vint à donner fa Meïite,
qui fut fuivie du Menteur, pièce de caraâère &
d’intrigue. Alors parut Molière, le plus parfait des
poètes comiques , & qui a remporté le prix de fen
art malgré fes jaloux & fes contemporains.
Le comique , né d’une dévotion ignorante , paffa
dans une bouffonnerie ridicule ; enfeite tomba dans
une licence groffière , & demeura t e l , ou barbouillé
de lie , jufqu’au commencement du fiècle
de Louis XIV. Le cardinal de Richelieu, par^ fes
libéralités, l’habilla d’un mafque plus honnête ;
Molière, en le chauffant de brodequins jufqu’aloïs
inconnus , l ’èleva au plus haut point de gloire; &
à fa mort, la nature l’enfevelit avec lui. ( Le chevalier
DE J AU COURT. )
COMÉDIE - BALLET. Au théâtre françois, en
donne ce nom aux Comédies qui ont^ des intermèdes,
comme Pfyché , la P rince fie à’E lidé, &c.
Foye\ I n t e r m è d e . Autrefois , & dans fa nouveauté
Georges-U andin & le Malade imaginaire,
étoient appelés de ce nom , parce qu’ils avoient des
intermèdes. ,.. , 7f .
Au théâtre lyrique, la Comédie-ballet eft une
efpèce de Comédie en trois ou quatre aéles, précédés
d’un prologue.
Le Carnaval de Venife de Renard , nus eu
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mnGque par Campra, eft la première Comédie-
ballet , qu’on ait repréfentée fur le theatre de
l’Opéra: elle le fut en 1699. Nous navons dans
ce genre que le Carnaval & la F o lie , ouvrage de
la Mothe , fort ingénieux 8c très-bien écrit, donne
en 1704 , qui foit refié au Théâtre. La mufique eft
de DeftoucheSw
Cet ouvrage n’eft point copie d un genre trouve.
L a Mothe a manié fen fujet d’une manière originale.
L ’allégorie eft le fond de fa pièce, & c’eft prefque
un genre neuf qu’il a créé. C ’eft dans ces fortes
d’ouvrages qu’il a imaginés , qu il a été excellent.
Il étoit foible, quand il marchoit furies pas d’autrui;
& prefque toujours parfait, quelquefois meme fû-
blime, lorfqu’il feivoit le feu de fes propres idées.
F o y e i P a sto r al e & B a l l e t . ( M . d e Cahusac.)
COMÉDIEN, f. m. ( Belles-Lettres.) Perfenne
qui fait profefïion de reprefenter des pièces de
Théâtre , compofées pour l’inftruétion & 1 amufe-
ment du Publie.
On donne ce nom, en général, aux aâeurs &
a&rices qui montent fur le théâtre, & jouent des
rôles, tant dans le comique que dans le tragique,
dans les fpeétacles où Fon déclamé : car a 1 Opéra •
on ne leur donne que le nom d'Acteurs ou d A c trices
, Danfeurs, Filles des Choeurs, &c.
Nos premiers Comédiens ont été les Troubadours
, connus auffi feus le nom de Trouveurs &
Jongleurs ; ils étoient tout à la fois auteurs &
acteurs , comme on a vu Molière , Dancourt,
Montfleury , le Grand , &c. Aux Jongleurs fuccé-
dèrent les confrères de la paffion qui reprefen-
toient les pièces appelées Myftères, dont il a été
parlé plus haut. Foyer^ C oméd ie s a in t e .
A ces confrères ont fuccédé les troupes de Comédiens
, qui fentou fedentaires comme les Comédiens
françoisles Comédiens italiens établis à^Paris , &
plufîeurs autres troupes qui ont des théâtres fixes
dans plufîeurs grandes villes du royaume, comme
Strasbourg, Lille , &c. ou les Comédiens qui courent
les provinces & vont de v ille’ en ville , &
qu’on nomme Comédiens de campagne.
La profefïion de Comédien eft honorée en Angleterre
; on n’y a point fait- difficulté d’accorder "a
rnademoifelîe Olfiids un tombeau à Weftminfter a
pôté de Newton & des rois. En France , elle eft
moins honorée. L ’Églifè romaine les excommunie,
& leur, refufe la fépulture chrétienne s’ils n’ont pas
renoncé au théâtre avant leur mort. (L ’ab.M a l l e t .)
Si l’on confidère le but de nos fpeétacle-s , &
les talents nécefïàires dans celui qui fait y faire un
rôle avec fùccès, l’état de Comédien prendra nécef-
fairement dans tout bon efprit le degré de confîdé-
racion qui lui eft dû. Il s’agit maintenant, fer notre
théâtre françois particulièrement , d’exciter à la
Vertu , d’infpirer l’horreur du vice , & d’expofer
les ridicules : ceux qui l’occupent fent les organes
des premiers génies & des hommes les plus célèbres
de la nation, Corneille , Racine , Molière ,
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Renard , M. de Voltaire , &c. leur fonéhon exige,
pour y exceller, de la figure, de la dignité, de la
voix, de la mémoire, au gefte, de la fenfibilite,
de l’intelligence , de la connoiffance même des
moeurs & des caradères , en un mot un grand
nombre de qualités, que la nature réunit fi rarement
dans une même perfenne qu’on compte plus de
grands auteurs que de grands Comédiens. Malgrc
tout cela, ils ont été traites très-durement par les lois
de la plupart des peuples policés. (M . jD j d e r o t . )
Chez les romains, les Comédiens etoient dans
une efpèce d’incapacité de s’obliger, tellement que,
quoiqu’ils Ce fuffent engagés feus caution & même
par ferment, ils pouvoient fè retirer. Novell. 51.
Cette loi ne s’obferve point pa^mi nous.
Il a. toujours été défendu aux Comédiens de
repréfenter fer le théâtre les ecclefîaftiques & les
religieux. Novell. 113 , ch. x liv. E t l. minus cod,«
deepifeop. aud. §. omnibus auth. defanctiJJ'. epifeop»
Les Comédiens étoient autrefois regardés comme
infâmes (/. f i. fratres cod. ex* tjiiibus caufis infd-
mia irrogat. C. lib. II. cap. x i j . ) , & par cette
raifbn on les a regardés comme incapables de rendre
témoignage. Voye£ Perchambaut, fu r l art. 15 r»
delà Coutume de Bretagne. Le canon definimus, 4,
qiïéft. j . dit qu’un Comédien n’eft pas recevable à
intenter une accufation : & le §. eau f as auth. ut
cian de appéll. cognof. porte qu’un fils qui, contre
la volonté de fen père , s’eft fait Comédien, encourt
fen indignation. • ’ . K
Charlemagne, par une ordonnance de 1 an 789 g
mit auffi les hiftrions au nombre des perfennes infâmes
, & auxquelles il n’étoit pas permis de former
aucune accufation en juftice.
Les conciles de Mayence , de Tours, de Rheims,
de Châlons-fur-Saône , tenus en 813 , défendirent
aux évêqûes, aux prêtres, & autres ecclefîaftiques,
d’afïifter à aucun fpeélacle, à peine de fefpenfîon
& d’être mis en pénitence ; & Charlemagne aumrifa
cette difpofition par une ordonnance de la meme
année. Foye^ les capitul. tom. I , col. 119 > 1165
& n y o . .
Mais il faut avouer que la plupart de ces peines
ont moins été prononcées contre des Comédiens
proprement dits , que contre des hiftrions ou farceurs
publics, qui méloient dans leurs jeux toutes fertes
d’obfcénités ; & que le Théâtre étant devenu plus
épuré , on a conçu une idée moins défavantageufe
des Comédiens. ^ .
On tient néanmoins toujours pour certain que les
Comédiens dérogent ; mais il en faut excepter ceux
du roi qui ne dérogent point , comme il réfulte
d’une déclaration de Louis XIII, du 16 Avril > 64.T,
regiftrée en Parlement le 14 du meme mois, & d’un
arrêt du Confeil du to Septembre 1668 , rendu en
faveur de Floridor, Comédien du roi , qui etoit
gentilhomme, par lequel il lui fut accorde un an
pour rapporter fes titres de riobleffe^, & cependant
défenfes furent faites au traitant de l’inquiéter pous
la qualité d’écuyer,
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