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ce ferait un A rchaifme louable, & quiferoîtbeaute.
Il y a une autre eipèce d Archdifme, qui confifte
principalement à imiter le tour de la jphrafe des
anciens, à luivre leur conftru&ion, à s’approprier
en quelque forte leur manière : c’eft ainfi que Sal-
lufte paroît avoir affeèté Y Archdifme ^ dans fes Hi(-
toires \ mais on l’en a blâme avec raifon, parce que
des mots anciens, placés (ans befoin dans un dii-
cours moderne, y mettent une bigarrure choquante.
L e grand Rouflèau, en imitant Marot, a donné
naiflance à ce que nous appelons aujourdhüi le
JlyU marotique. ( M. B eauzée. )
Les pièces de J. B. Rouifeau, en ftyle marotique ,
font pleines d'Archaifm.es. Naudé , parifîen , a écrit
plusieurs ouvrages dans le ftyle de Montaigne , quoiqu’il
foit venu long temps après ce philolophe ; on
ignore ce qui l’engagea à préférer ce vieux langage ,
qü’on ne permet guere que dans la poéfîe famiâère :
c’eft même un mauvais' genre qu’on ne doit point
employer , quand on veut Ce faire lire de tout l.e
monde. Si l’on préfentoit à un françois , qui prétend
pofîeder fa langue , la lettre du comte Hamilton à
J. B. Rouflèau, il lui faudrait un didionnaire archaïque
pour bien entendre toutes les expreflions
que le poete emploie. Voici le commencement, ou
ü l’on veu t, l ’adrefle de cette Épitre :
A gentil clerc qui fe clame RoülTel,
Ores chantant ès marches de Solure ,
Où , de canton» parpaillots n’ayant cure , -
- Prêtres de Dieu baifent encore Miflel,
De l'Évangile en parfïnant leéture ;
Illec qui va dans moult noble écriture
{ Digne trop plus de loz fempiterneL, )
Mettant planté & cet antique fel
Qu’en Virelais mettoit par fois Voiture;
A cil Rouffel ma rime , ainçoit obfcure,
Mande falut dans ce chétif charlet.
( A n o n ym e . )
(N.) ARCHI owARCH. Particule prépofitive ampliative
, qui entre dans la compofition de plufieurs
mots françois , où elle eft le ligne d’une idée accef-
foire ou de prééminence ou d’une ampliation excel-
fiye , folon les circonftanees. ^ ,
Au commencement d’un mot qui exprime un état
ou qui y eft relatif, e’eft un ligne de prééminence ;
comme dans Archichancelier, Archidiaconat, A r -
chidiaconé, Archidiacre, Archiduc, Archiduche ,
Archiduchejfe v Archiducal, Archimandrite , Ar-
chiprêtre , Archiprêiré, &c.
Au commencement d’un mot qui énoncé une
qualité, un goût particulier, Archi eft communément
le ligne d’une ampliation exceflïve ; comme
dans ArchimédaiUijle, Archigrammairien, Archi-
poète ; ce qui marque un excès ridicule. Dans Ar-
çhïcoquin, Archifou, Archifripon , Archipedant>
Archivilain, &c. la particule défigne une ampliation
qui s’étend ju (qu’au fontiment dont on eft affecté
par les' mots fiinples*
A R L
Par rapport aux mots où Archi marque la prééminence
, l’Ulàge de notre langue conferve rigou-
reufoment fos droits ; & l’on ne peut employer que
ceux qu’il a autorifés, & avec les réferves qu’il y
a miles. Nous ne pourrions traduire littéralement le
latin Archiater par Archimèdecin ; parce que le
mot de médecin marquant une occupation particulière
, le terme d*Archimèdecin fembleroit indiquer
un homme dont le goût pour la Médecine forait
exceflif : il ne s’agit dans Archiater que d’une idée
de prééminence, que nous conlervons par la péri—
phrafe de Premier médecin•
Quant aux mots où A r ch i eft Amplement une
particule ampliative qui défigne l’excès , comme on
ne s’en fort guères que dans le ftyle familier , auquel
le goût national iaifle beaucoup d’aifance , le
génie de notre langue Iaifle aufli la liberté de com-
polèr des mots de cette efpèce dans la converfàtion ,
& même dans les écrits d’un ftyle familier : Ar -
chimenteur, Archibavard; Sic. On peut même en
compofer qui auront l ’air plus noble, mais leule-
ment pour les employer avec ironie > comme A r -
chiprophête , Architaumaturge , &c. ^
Nous avons quelques mots compofés d’A rchi ,
où le ch a la prononciation gutturale j comme Archange
^ Archonte, Archiépifcopiü : cependant on
prononce ch en fiftlant dans Archevêque , Archi-
prêtre, Archidiacre, Archiduc, S c. Et 1 on ne peut
pas dire que ce foient les mots moins ufîtés qui le
prononcent durement : Archiépijcopal eft aufli ufite
qu’ Archevêque, & l’eft moins qu Archip esbitérai ;
Archange eft d’un ufage plus étendu & plus journalier
que le terme local d A rchiconfrêrie.
Quelques-uns de ces mots perdent Yi d Archi ,
quand le mot fimple commente par une voyelle;
Archange pour Archiange , Archevêque pour Ar-
chiévêque : mais ce n’eft pas une règle generale,
puilquon dit Archiéchanfon ^J8c qu’on dirait A r -
chieffronié, Archiimpojleur, &c. Nous ayons même
un exemple où Yi eft changé en é ; c’eft Archétype
( premier modèle ) , au lieu dArchitype. Toutes
ces exceptions viennent uniquement du caprice de
l’Ufege. g M v
Au refte la particule Archi vient du grec
i ('principe ) ^ ou âf%oç (premier ). M. B ù.auzée. )
(N.) ARCHILOQUIEN. adj. Terme de laRoéfie
grèque & latine. On app.elle ainfi quelques efpeces
de vers dont on attribue l’invention à Archiloque
poète grec, qui étoit de l’ile de Paros. Le P. Sa-
nadon, dans ce qu’il a écrit des vers d Horace,
reconnoit trois elpèces d Archiloquiens. g/
La première eipèce eft de deux pieds St demi,
& comprend deux daftyles & une ccliire longue ,
c’eft le petit Archiloquien :
— U U — U U -
P u l v i s & tim b ra f u - m u s .
Horaae
A R I
Horace l’a employé dans trois Odes ■ ( iV , 7 -V .
11,6* 13. ) ; &T*a combiné diverfoment dans chacune
de ces Odes.
La lèconde eipèce eft de quatre pieds , deux dactyles
8c deux chorées ou trochées ; c’eft Y Archiloquien
te'tramètre :
1 — 0 0 — U U — 0 — U
| V e r t e r e f u n e r i - b u s t r i - um p h o s .
Horace l’a employé dans un grand nombre de
fes Odes , comme dernier vers de la ftrophe ; alors
les deux premiers font grands alçaiques, & le troi-
ficme eft un ïambique'de quatre pieds & demi. Il
eft bon d’oblèrver que Y Archiloquien te'tramètre eft
nommé par plufieurs petit Alcdique, & qu’ils en
attribuent l’invention à Alcée ; & que d’autres le
nomment Alcmanién , à caufo du frequent ulàge
qu’en faifoit Alcman : l’eflenciel eft d’en bien con-
noitre la melùre.
La troifîème elpèçe eft le grand. Archiloquien,
compofë de lèpt pieds 5 les trois premiers font dactyles
, ou fpondées, & donnent en conféquence huit
arrangements pollîbles ; le quatrième eft un daâyle ;
8c les trois derniers des chorées ou trochées.
On n’en trouve que dans la 4. Ode du I. livre
d’Horace, qui a combiné alternativement le grand
Archiloquien avec le vers ïambique de fîx pieds
moins une fyllabe.
Pallida |.mors a- | quopul- \ fat pede \paupe-\rum ta- \ bernas.
Vita | fumma bre- \ vis fpem | nos vetat | incho-1 are | longam.
(M . B eauzée. )
(N.) ARIETTE. C f. Poêfie lyrique. J à t de
Mufîquevocale , dont le caraftère eft la légèreté. Ce
mot eft nouveau dans notre langue ; & quoiqu’il y
eût dans la Mufique de L u lli, de Mouret, de Cam-
pra , quelques morceaux de chant mefuré , d’un
mouvement vif & d’un tour agréable, on ne difoit
point les Ariettes, mais les airs de L u lli, de Mouret,
de Campra. Ce fut lorlqu’on eut quelque idée
de la Mufique italienne & qu’on eTaya d’en imiter
les paflages brillants , que du mot Aria , on fit le
mot Ariette; & on donna ce nom diftindifaux airs
françols que l’on croyoit compofés à l’italienne:
ainfi , l’on dit les Ariettes de Rameau, les Ariettes
de Mondonville., Y Ariette des Talents lyriques,
C ramm. e t L ittérAt , Tqme I.
A R I *2;
Y Ariette de Pigmalion, Y Ariette de Titon & 1 Au-
rore.
Ce chant léger, qui étoit la partie de la Mufique
italienne la moins eftimable & la plus facile a imiter ,
fut introduit à l’Opéra comique, & il y . eut beaucoup
de fuccès. Le nom à!Ariette lui' copvenoit
alors plus que jamais ; il le retint, & l ’on diftingun
Y Ariette & le-vaudeville. Mais l’Opéra comique
ayant pris dans la fuite un caraétere plus eleve, &
les fèntiments qui l’animoient l’ayant rendu fufoep»
tible d’une Mufique plus variée, plus expreflive,
on fontit qu’on pouvoit faire mieux que d’y donner
à des voix légères des modulations brillantes à exécuter
: on fit des chants qui avoient eux-mêmes du
caradère & de l’expreffion ; & ce fiit alors qu on
s’agperçut, quoi qu’en eût dit Rouflèau , que notre
langue étoit (ùfoeptible des beautés véritables de
la Mufique italienne. Il eût donc fallu diftinguer de-s
ce moment Y Ariette qui n’étoit que brillante de 1 air
expreflif & paflionné ; mais l’ufage étoit établi d’ap-
peller Ariette tous les airs de l’Opéra comique ; &
quoique le goût eût décidé que les chants du Devin de
Village étoient des airs, & non des Ariettes, parce
que le ftyle en étoit fimple & naturel, l’ufoge prévalut
& confèrva le nom d Ariette pour tous lesairç
chantés for lé théâtre où Y Ariette avoit brille. Ainfi ,
l’ air de Tom-Jone,
Amour , quelle eft donc ta puiflfance è
l’air du Déforteur ,
Mourir n’eft rien, c’eft notre dernière heure;
l ’air de Silvain,
Je puis braver les coups du fort,
Mais non pas les regards d’un père;
s’appelèrent des Ariettes•
Ce n’eft pas tout: lorfque la Mufique italienne, la
plus fimple , la plus noble, la plus pathétique, s’eft
établie fiir le théâtre de l’Opéra , ceux qui, par goût,
par opinion , par lÿfiême , ont tache de la dépriièr y
ont donné adfii le nom S Ariettes, non feulement
aux airs d’un caraaère. brillant & léger, mais in-
diftinâement à tous les chants , même aux plus fu-
biimes, aux plus paffionnés de ce houveau genre
d’Opéra; &-de l’idée de légèreté, de frivolité, de
comique, originairement attachée au mot d Ariette ,
ils ont tiré cette induétion que la Mufique italienne ,
la Mufique des Ariettes, n étoit pas digne de la Tra-
gédie. On aura cependant quelque peine à croira
que l ’air de Roland,
Que me veux eu , Monftre effroyable î
que l’air d’Atys,
Quel trouble agite mon Coeur î
que l’air de Cybèle,
Tr-emblcz, Ingrats , de me trahir J
que l’air d’Orefte,
Cruel î & tu dis que tu m’aimes !