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pofîtion a précède l’article féminin; à la raifoii, à
l ’autorité.
II. Hors de ces trois cas , la prépofîtion à devient
un mot compofé par là jon&ion avec l’article le ou
avec l’article pluriel les. L ’article 3 | à caufo du
Ion lourd de Ve muet, a amené a u , de forte qu’au
lieu de dire à Le nous difôns au.y fi le nom ne commence
pas par une voyelle; s’adonner au bien : &
au pluriel au lieu de dire à les, nous changeons
i en u , ce qui arrive fôuvent dans notre langue, &
nous difôns a u x , fôit que le nom commence par une
voyelle ou par une confônne ; aux hommes, aux femmes
, &c. Ainfî, au eft autant que à l e & aux que
à les *
A eft auffi une prépofîtion infeparable qui entre
dans la çompofïtion des mots : donner , s'adonner,
porter, apporter y mener, amener y &c. ce qui fort
ou à l ’énergie, ou a.marquer d’autres points de vue
ajoutés à la première lignification du mot.
Il faut encore obfèrver qu’en grec a marque.
1. Privation y & alors on l’appelle alpha privatif,
çe que les latins, ont quelquefois imité, comme dans
amens qui eft compofë de mens, entendement,
intelligence, & de l ’alpha privatif. Nous avons con-
lêrvé plufieurs mots où fè trouve l’alpha privatif,
comme amazone y abyfmey afyley &c. L ’alpha privat
if vient de la prépofîtion ètrep , fine , fans.
2. A en composition marque augmentation , &
alors il vient de èéyxv, beaucoup.
3. A avec un accent circonflexe & un efprit doux
Z marque admiration, défir yfurprife, comme notre
ah ! ou ha ! v.ox quïritantisy. optantis, admirantis,
dit Robertforu Ces divers ufâges de Va en grec ont
donné lieu à ce vers des. Racines grèques :
A fa it un y prive, àugmente , admire•
En terme de Grammaire, & fiir tout de Grammaire
grèque, on appelle a pur, un a qui foui fait
une fyllabe comme en QiAx, amicitia, {M . du
M ars aïs . )
( ^ A Langue Trançoife. Cette lettre placée au
commencement d’un mot, indique.différents rapports
ou vues de l ’efprit, qu’il eft important de faifîr pour
bien entendre la véritable acception des termes.
Dans certains mots elle tient à la racine primitive du
mot; comme dans âpre, ame, art y angle y &c. &
alors elle n’a aucune énergie particulière. Dans un
très-grand nombre de termes dérivés des langues
anciennes , Va repréfente les particules grèques ou
latines , à , ab , a d , anay &c. .& n’ajoûte aux mots
que les rapports exprimés par ces particules. Ainfî,
amovible eft évidemment copié du latin, comme
les mots abjurer y abnégation, &c. compofes des''
mots movere , jurare, negdre, avec les particules-
a ou ab.
I l eft également facile de reconnoître la compofî-
tion des mots admettre, adapter, & même des
mots attirer, applaudir, arriver , afpirer, où la
particule ad. n’eft pas moins recQïinoiflàhîe, quoique
A B A
la prononciation en ait été altérée par une forte
d’euphonie commune dans toutes les langues.
Les mots qui commencent par ana, font prefque
tous tirés du grec.
Mais»il y a dans notre langue un grand nombre.de
mots où la lettre a , ajoutée à la tête du primitif,
donne une énergie particulière, & femble exprimer
dans tous ces compofes un rapport commun allez
facile à fàifîr ; comme dans ceux-ci, accourcir,
allonger y abêtir , accroire y adoucir y affaiblir %
appaifer, applaudir, atténuer , &c.
Il y avoit auffi dans notre ancien langage d’autres
mots formes d’après les mêmes principes & que nous
avons perdus; comme affagir , affauvagir, advenir
, pour devenir, &c.
Nous avons plufieurs expreffiorts, compofées primitivement
de deux mots & qui ne préfèntent pliis
qu’une idée fimple ; comme affaire, afin , &c. par
une çompofïtion analogue, on a fait aboutir, de.
a bout ; anéantir de à néant, &c.
A la place des étymologies fi gratuites & fi inutiles
qu’on va chercher dans les langues hébraïque ,
celtique , &c. & ce qui eft plus ridicule encore dans
une langue primitive imaginaire, dont il ne refte
aucun élément pofitif, ne fèroit-il pas plus intéref-
font de^ rechercher & de foivre la çompofïtion &
l’altération fucceffive des mots de notre langue dans
les monuments autentiques qui nous en relient l C ’eft
en grande partie le plan du Diétionnaire qu’avoit
entrepris M. de Sainté-Palaye , & dont le premier
volume eft, dit-on, prêt à paroître). ( Add. de
VEditeur ]«.
A , lettre fymbolique, étoit un hiéroglyphe chez
les anciens égyptiens, qui, pour premiers caradères ,
employoient ou des figures d’animaux ou des lignes
qui en niarquoient quelque propriété. On croit que
celle-ci repréfentoit PIbis par l’analogie de la, forme
triangulaire de l’A avec la marche triangulaire de
cet oifeau. Ainfî quand les caractères phéniciens
qu’on attribue à Cadmus furent adoptés en Égypte
la lettre A y fut tout à la fois un caraétère de l’écriture
fymbo lique confàerée à la religion, & de l ’écriture
commune ufîtée dans le commerce de la vie»
( U abbé M allet. )
A , lapidaire-, dans les anciennes înfcriptions ïùr
des marbres , &c. fignîfioit Augufius , Ager ,
aiunty &c. félon le féns qu’exige le refte de l’intcrip-
ti°n. Quand cette lettre eft double , elle lignifie A u -
gufti ; triple, elle veut dire auto y argenta , aere.
Ifidore ajoute que, lorfque cette, lettre fè trouve après le
mot miles, elle lignifie que le loldat étoit un jeune
homme. On trouve, dans des inscriptions expliquées
par d’habiles Antiquaires, A rendu par ante\ & félon
eux, ces deux lettres A D équivalent à ces mots ante
diem. ( L'abbé M alle t, )
(N .) ABAISSEMENT. ËASSESSE. Syn.
Une idée de dégradation, commune à ces deux
AB A
termes, en fonde la fÿnonymie , mais ils ont des
différences bien marquées. . ' ; .
Si on les applique à l’ame , Vabaiffement volontaire
où. elle -fe tient, eft un a&e de vertu ; l'abaifi
fement où on la tient, efl une humiliation pafo
légère, qu’on, oppofe à fà fierte afin de la reprimer :
mais la baffeffe eft une. difpofitior. ou une aélion incompatible
avec l’honneur, ik qui entraîne le mépris.
Si l ’on applique ces termes à la fortune, à la condition
des hommes ; Vabaiffement eft leffét d un
évènement qui a dégradé le premier état; la baffeffe
eft le degré de plus bas & le plus éloigné de toute
confidération. \Sabaiffement de la fortune n ote pas
pour cela la confidération qui peut etre due à la
perfonne; mais la baffeffe l’exclut entièrement
ainfî, les mendiants font au deffous des efclaves;
car ceux-ci ne font que dans 1 abaiffement, ôc
ceux-là font dans la baffeffe.
On peut encore appliquer ces deux termes à
la manière de s’exprimer, & la même nuance les
différencie toujours» L 'abaiffement du ton le rend
moins élevé, moins v i f , plus fournis : la baffej)ç
du ftyle le rend populaire , -trivial , ignoble,
f M. B eauzée ). .
. (N . } ABANDON , C. m. Qualité du ftyle, plus
clairement défignée par ce mot qu’elle ne pourroit
l ’être par une définition ou une périphraiè.
Elle exprime cette négligence, prefque toujours
agréable , qu’on font dans le difcours, lorfque 1 orateur
ou l’écrivain, vivement pénétré de ce qu’il veut
dire , fo laiffè aller au mouvement naturel de^ fon
fentiment & de fà penfée^, fans rechercher ni fes
tours & fés expreftions, ni la liaifon & 1 ordre rigoureux
des idées.
Quelquefois Vabandon n’eft que le fruit de la
pareflé dans ces écrivains d’une imagination mobile
& d’un efprit facile, qui répandent ^ pour ainfî
dire,leurs fentimems,& produifèitt fans euide leurs
idées, avec les couleurs & dans l’ordre qu elles prennent
en naiffant. ^ .
L e fèntiment qui a conduit la plume - de 1 écrivain
imprime au ftyle un caraélère des impreffions
analogues dans le ledeur fonfible : par tout ou il
font l’effort, il femble partager la peine de l ’écrivain;
il eft choqué de l’affedation; un artifice trop
marqué le refroidit ; mais la rapidité 1 entraîne;
la facilité, la négligence même lui plaît : c’eft l’effet de
la grâce, de la beauté naive qui fo montre fans fonger
qu on la regarde , & qui plaît fans chercher à plaire.
T e l eft auffi l’effet de Vabandon dans le ftyle, qui
eft prefque toujours accompagné de rapidité , de
chaleur, dè précifîon, & fouvent de grâce. L ’imagination
échauffée fubftitue l’expremon figurée
au terme propre, mpprime les liaitons grammaticales
qui ralentiftént (a marche , & n enchaîne
les idées que par ces nuances imperceptibles qui les
lient dans l’efprit même où elles naiffent.
L ’incorredion du ftyle & l’incohérence des idées
font les deux défauts qui tiennent d’ordinaire à Va-
ABA ;
bandon du ftyle ; mais quand on eft bien pénétré
d’une idée , dit Voltaire, «quand un efprit jufte &
M plein de chaleur poffède bien fà penfée , elle fort
» de fon cerveau toute ornée, des expreftions conve-
» nables, comme Minerve fortit tout armée du cer-
» veau de Jupiter».
Voltaire fait fontir dans tous fos ouvragés de vers.
& de profe, la juftefië de : cette compàraifon ; Ut
font pleins de cet abandon d’entrainement __ & de
rapidité,. qui donne à fon ftyle un ton fi anime &
fi naturel, & des couleurs fi brillantes, fans défordre
& fans incorredion. ■
On trouve le même abandon dans les lettres de
Madame de Sivigné, & il faut convenir que le
genre épiftolaire eft celui auquel cette manière fomble
convenir davantage. C ’eft fur tout dans ce fèntiment
inépuifàble de tendrefle , que fes lettres offrent
mille traits de cet abandon zimzble & piquant.
Nous n’en citerons qu’un exemple : «c Ma chère fille,
» ce que je ferai beaucoup mieux que tout cela, c’eft
» de penfèr à vous : je n’ai pas encore ceffé depuis
» que je fuis arrivée ; & ne pouvant contenir tous
» mes fèntiments , je me fois mifè à vous écrire au
» bout de cette petite allée fombre que vous aimez ,
» affiie for ce fiégè de mouflè ou je vous ai vue quel-
v que fois couchée. Mais , mon Dieu ! où' ne vous
» ai-je point vue ici f & de quelle façon toutes ces
» penfées me traverfent-elles le coeur f II n’y a poin£
» d’endroit, point de lieu , ni dans la .matfbn, ri.
» dans l’églifo, ni dans le pays, ni dans le jardin, où
j » je ne vous aie vue. Il n’y en a point qui ne me
» faffe fouvenir de quelque chofé. De quelque ma-
# niere que ce fôit, je vous vois , vous ni’étes pré-
» fonte, je penfe & repenfe à tout, ma tête & mon
» efprit fo creufent : mais j’ai beau tourner , j’ai
» beau chercher , cette chère enfant que j’aime avec
»tant de paflion, eft à deux-cens lieues de moi;
n je ne l’ai plus : for cela je pleure fans pouvoir m’en
» empêcher ».
Parmi nos Poètes, la Fontaine & Chaulieu font
ceux qui offrent le plus de traits de cet abandon, qui
n’eft que l’épanchement naturel d’un fèntiment qui
déborde.
L ’Épître de Chanlieu au Chevalier de Bouillon
en offre un exemple charmant. Après avoir décrit
l’Élifée où il fe tranfporte en idée , il ajoute :
A IN S I ,libre du joug des paniques terreurs »
Parmi l’émail des prairies ,
3e promène les erreurs
De mes douces rêveries 5
Et ne pouvant former que d’impuifiants dcfîrs j 1!
. Je fais meure, en dépit de l’âge qui me glace- j
Mes fouvenirs à la place
De l’ardeur de mes piaifîrs.
Avec quel contentement
Ces fontaines , ces bois où j’adorai Silvie ,
Rappellent à mon coeur fon amoureux tourment.