
A la nature eft un Chant qui reflsmble ;
N’en crois jamais que l’oreille & l’inftinft,'
Qui d’un Chant pur , analogue , Sc diftinâ ,
A préféré la rondeur Sc l’enfemble.
Le grand problème & l’écueil de mon Arc ,
C’eft leiçotif, c’eft ce coup de lumière,
Ce traie de feu, cette beauté première,
Que le génie obtient feul du hafard.
Un long travail peut donner tout le relie ;
Par des calculs on aura des accords,
Avec du bruit on remû ta . . . les corps $
Mais la penfée eft comme un don cclefte,
. Je la réferve à mes vrais favoris j
Je te la donne , à toi que je chéris.
Un mal-adroit quelquefois la rencontre;
Mais il la gâte ou la laiffe échaper.
L ’efprit, le goût, l’habileté, fa montre
j Dans le talent de la dèveloper.
D ’un deffein pur l’unité variée,
Un tour facile, élégant, arrondi,
Un efior libre Sc fagement hardi ,
Et la Nature avec l’Arc mariée ;
Voilà le Chant-ç&t les dieux applaudi
(AL. M a rm o n t e l . )
* CH A N T EU R , CHANTRE. Synon.
Chacun de ces deux termes énonce également
on homme qui eft chargé par état de chanter : mais
on ne dit Chanteur que pour le chant profane, &
l ’on dit Qkantre pour le chant d’églifè.
Un Chanteur eft donc un adeur de l’Opéra qui
récite, exécute, joue les rôles ,ou qui chante dans
les choeurs des tragédies & des balets mis en
Mufique.
Un Chantre eft un eccléfîaftique, ou un laïque
revêtu dans fès fondions de Thabit eccléfîaftique ,
appointé par un Chapitre pour chanter dans les offices
, les récits , les choeurs de Mufique , &.c,
Sc même pour chanter le plain - chant. ( M.
D i d e r o t . )
Chantre fè dit encore figurément & poétiquement
d’un poète : ainfi, on dit, le Chantre de la
Thrace , pour dire Orphée ; le Chantre thébain ,
pour dire Pindare. On appelle auffi figurément &
poétiquement les roffignols & autres oifèaux, les
Chantres des bois. (Diction. de T Acad. 17 6 1 ) .
<N.) CHA PE L L E , CHAPELLENIE. Syn.
Ces deux termes de Jurifprudence canonique font
(ÿnonymes dans deux fèns différents.
Dans le premier fèns , ils expriment l’un &
l’autre un édifice fâcré avec un autel où l’on dit la
meflè. Mais la Chapelle eft une églifè particulière,
qui n’eft ni cathédrale, ni collégiale ,* ni paroiffiale,
ni conventuelle ; édifice ifolé, entièrement détaché
& feparé de toute autre églifè : telle eft, à Paris,
rue S. Jaques, la Chapelle de S. Yves; telle eft,
dans un château ou dans une maifôn particulière,
la Chapelle domeftique, autorifee par l’CTrdinairei
pour la commodité du poffeftèur. La Chapellenie.
eft une partie d’une plus grande églifè, ayant fôn
autel propre où l’on dit la méfié : telle e ft, dana
l ’églifè paroiffiale de,S. Sulpice de Paris, derrière le
choeur, la Chapellenie de la Vierge, remarquable
par fà décoration en marbre & furtout par fa belle*
coupole.
Cette diftindion n’a guère lieu que dans le lan**'
gage des canônifles; car dans l’ufàge ordinaire on
défigne les deux efpèces par le nom de Chapelle ;
la Chapelle S. Y v e s , la Chapelle de la Vierge, &c.
Alors les canoniftes qui fè rapprochent du langage
commun , donnent à la première efpèce le nom de
Chapelle fub dio , parce que c’eft un édifice ifolé ;
& à la féconde, le nom de Chapelle fub tecto ,
parce qu’elle eft renfermée fous le toit d’une plut
grande églifè dont elle fait partie.
C ’eû de cet ufàge vulgaire, que naît entre les
deux mots Chapelle & Chapellenie une nouvelle
diftindion dans leur fÿnonymie, qui porte fur un
fèns tout différent.
Dans ce fécond fèns, Ta Chapelle eft l’édifice
fâcré où fè trouve un autel fur lequel on dit la
meffe, fôit fub d ïo , foit fub tecto : & la Chapellenie
eft le bénéfice attaché à la Chapelle, à la charge de
certaines obligations. La plupart des Chapelles do-
meftiques font fans Chapellenie• (M. B eauzée.^
( N. ; CHARADE, f. f. Efpèce de Logogryphe,-
ui confifte dans la fîmple divifîon d’un niot en
eux ou plufîeurs parties , fùivant l’ordre des fyl-
labes, de manière que chaque partie foit un mot
exprimant un fèns complet : & l’on propofè alors
de deviner le mot entier & fès parties, en défii
nifiànt fiicceffivement chacune des parties & le Tout.
Quelquefois ces définitions font laconiques &
myftérieufès, comme daais les exemples fuivants :
Ma première fe fert de ma fécondé pour,manger
mon tout. C ’eft chiendent, puifqu’un chien fà>
fert de fès dents pour manger du chiendent.
Quatre membres font tout mon bien;
Mon dernier vaut mon Tout, Sc mon Tout ne vaut rie».'
C ’eft %éro, compofe de quatre lettres, dont la
dernière o vaut \éro qui eft le Tout; & ce Toutou
\dro ne vaut rien.
D’autres fois les définitions fè font d’une manière
plus développée, mêlée, s’il fè peut, de traits hifc
toriques, de moralités, de plaifanterie, d’allufîons
ingénieufès, &c.
Les avares cachent mon premier ; les femmes
cachent mon fécond y les âmes faibles fe cachent
& tremblent à Vafpecl de mon Tout > qui répand
quelquefois la defalation dans les campagnes.
Les avares cachent leur or ; les femmes cachent
leur âge : le tout eft donc orage.
Chez nos aïeux prefque toujours
J’occupois le fommet des plus hautes montagnes ;
Et là j’étois d'un grand fesours î
Tîos
Plus fouvent aujourdhui j’habite les campagnes ",
, Où je figure noblement ;
Et j’en fais i coup fur le plus noble ornement»
Bxamine mon Tout & fais-en deux parties.; .. ,
JL’un eft un animal très-fubtil 5c gourmand,
Réjouïftànc par fes folies „ ;
De doux maintien, maître en minauderies » ..
Traître.furtout ; l’autre eft un. élément.
Le mot total eft château, qui fe divïfè en chat
fë eau.
On ne fait guère ufâge dans les Charades que
des mots de deux fyllabes mafeulines, comme
Chiendent, Charbon, Cordon^ Château , &c : ou
des mots, de trois fyllabes, dont la dernière eft féminine
, comme Orage, qui vaut pr-qge ; Préfacé,
qui vaut préface ; Potage , qui vaut Pot-age ou
Po-tage\ & c. Mais qu’eft-ce ' qui empêcheroit de
couper en deux parties un mot de plufîeurs fyllabes
,, comme D é lié en dé-lié, Avantage en avant-
âge. Secrétaire en fecret-aire, &c ? Pourquoi
même ne couperoit-on pas un mot en plus de deux
parties? Tripotage , par exemple, peut fè couper .
en deux ; (avoir , f r i '( jeu ) & Potagev, ou Tripot
Si. Âge ; & en trois, Tri ( je u ( , Po (riviè re ),,
& Page (r iviè re), ou bien Tri-pot-age. ( M.
B e a u z é e . )
( N. ) CHARGE , FARDE AU , FAIX (Syn.)
La Charge eft ce qu’on doit ou ce qu’on peut
porter ; de là l ’expreflion proverbiale qui d it, que
«Sa Charge d’un baudet n’eft pas celle d’un éléphant.
Le Fardeau eft ce qu’on porte ; ainfi, l’on
peut dire dans le fèns figuré , que c’eft rifquer fà
place que de fè décharger totalement du Fardeau
des affaires fur fôn fùbalterne. Le Faix joint à
l ’idée dé ce qu’on porte celle, d’une certaine im-
preffion fur ce qui porte; voilà pourquoi l ’on dit
plier fous le F a ix .
On dit de la Charge , qu’elle eft forte ; du Fardeau
, qu’il eft lourd; & du F a ix , qu’il accable.
( V a b b é G ir a r d .)
Dans l’Encyclopédie (I I I . 197 ) , M. Diderot
a joint à"ces trois mots, celui de Poids. Mais la
manière même dont on en parle pour le diftinguer
des autres, efi une preuve qu’il n’en eft pas fyno-
nyme. Charge, Fardeau, & F a ix , défignent également
ce qui eft porté ; c’eft l’idée commune qui
les rend également concrets & fynonymes. Poids
^eft un nom abftrait , fynonvme à cet égard de
Gravité & de Pefanteur ; Si tous trois défignent
abftraitement la qualité qui donne aux corps une
tèndance adive vers le centre de la terre.i Foye\
L e s a u t e u r , P o id s , G r a v i t é . Syn. (M. B eauzée.)
{N.) CHARIENTISME, fi m. Ce mot vient
du grec, XafttvTio-/dbs3 v é n u fla t is a jfe c ïa tio : R.
X«p<çr, venujlas. Le Charientifhie eft. une efpèce
d’ironie ( V o y e \ Iron ie) agréable & délicate,
(dont le fiel ne laifie pas d’être piquant. Exemple ;
j C ramai* e t L i t t é r a t . Tome I .
L'empefeur Charles-Quint »voit voulu faire
croirè que le foleil s’étoit arrêté pour lui donner
le temps de rendre fà vidoire fur les Taxons plus
complette à la journée de Muhlberg, en ï 547 ; 8C
fès flatteurs avoient ofe l’écrire, comme en ayant
été témoins. Henri I I , roi de France, crut pouvoir,
quelques années après,' demander au duc
d’Albe ce qui en etoit : « J’étois, répondit-il, fi
» occupé ce jour-là de ce qui fè paiïoit fur la
». terre, que je ne pris pas garde à ce qui fè paf-,
» foit dans le ciel»;
Cette réponfè eft un Charhntifme très-délicat,
q ui, fous le voile d’une réponfè en partie vraie
& en partie vraifèmblable, laifie percer finement
la penfee du duc d’Alb e, fans que l ’on puiffe.toute-«
fois la lui imputer ni lui en faire un crime.
L ’auteur de F Encyclopédie littéraire dit que le
Charientifme eft une figure, par laquelle on répond
en termes modérés aux expreffions d’un homme
tranfporté d’une paffion violente.
Dans ce cas, on déguifè en effet fà véritable
façon de penfèr , puifiju’il eft dans la nature d’op-
pofèr la force à la force ; on prend un moyen plus
délicat pour amener fôn homme au point où on
le veut ; c’eft donc toujours une, ironie délicate,
un Charientifme.
Voffius ( Partit, orat. Lib. IV.Cap. X . §. 4».) réunit
à peu près ces deux points de vue. C h a r i e n t i s—
mus à lepore ac gratiâ nomen dccepit : ejlque
jocus cum amaenitate mordax ,* v e f ut alii ma-:
lunt, f i t s quum dura & afpera dicta gratiojzs &
mollibus verbis mitigantür -& molliuntur.' ( Aî*
Beauzée. )
(N.) CHARME, ENCHANTEMENT,SORT.-
Synonymes.
Le mot de Charme emporte dans fà lignification
, l’idée d’une force qui arrête les effets ordinaires
& naturels des e a u fès. Le mot ü Enchantement '
fè dit proprement pour ce qui regarde l’illufion des
fèns. Le mot de.Jorr enferme particulièrement l’idée
de quelque chofè qui nuit ou qui trouble la raifôn.
Ils marquent tous les trois dans le fèns littéral
l ’effet d’une opération magique , que la. Religion
condanne, que la Politique fuppofè, & dont la
Philofôphie Ce moque.
Les. vieux contes difent qu’il y a un Charme
pour empêcher l’effet des armes, & rendre invulnérable
: on lit dans les anciens romans , q u e
la puiiïànce des Enchantements faifôit fûbitement
changer de moeurs, de conduite & de fortune i
le peuple a cru & croit encore qu’on peut, par le
moyen d’un Sort , altérer le tempérament & la
fânté , rendre même extravagant & furieux. Mais
les gens de bon fèns ne voient point d’autre Charme
dans le monde, que le caprice des pâffions à l ’égard
de la raifôn , dont il fufpend fôuvent les réflexions ,
& arrête les effets qu’elle dèvroit naturellement &
néceffairement produire : ils ne connoiflènt pas non
plus d’autre Enchantement, que la féd.udton quf
C&ç