
les entreprîtes de l’amant & à faire échouer les
précautions du jaloux.
Qu’on nous pardonne de tirer tous nos exemples
de Molière ; fi Ménandre & Térence revendent au
monde , ils étudieroient ce grand maître , & n’étu-
dieroient que lui. (M . J$armontel,^
(N.) COMMANDEMENT, ORDR E, P R É C
E P T E , IN JO N C T IO N , JUSSION. Synon.
L*es deux premiers de ces mots font de l’ufage
ordinaire'; le troifième eft du flyle doétrinal ; & les
deux-derniers font des termes de Jurifprudence ou
de Chancellerie. Celui de Commandement exprime
avec plus de force l’exercice de l’autorité ; on commande
pour être obéi. Celui d'Ordre a plus de
rapport à l’inftruftion du fubalterne ; ori .donne des
Ordres, afin qu’ils loient executes. Celui de Précepte
indique plus précifément l’empire fur les confidences;
il dit quelque chofe de moral qu’on efl obligé de
lùivre. Celui i'Injonction. défigne plus proprement
le pouvoir dans le gouvernement;on s’en fert lorf-
au’il eft queftion de ftatuer, à l’égard de quelque
"objet particulier, une règle indilpenlàble de conduite.
Enfin celui de Jupon marque plus po.fitive-
ment l’arbitaire; il enferme une idée de defpotifme,
qui gêne la liberté & force le magiftrat à fe conformer
à la volonté du prince.
11 faut attendre le Commandement ; la bonne
difcipline défend de le prévenir. On demande quelquefois
l’Ordre-, il doit être précis. On donne feu-
vent au Précepte une interprétation contraire à
l’intention du lcgiflateur ; c’eft l’effet ordinaire du
commentaire. Il eft bon, quelque formelle que feit
VInjonSion de rte pas trop s’arrêter à .la lettre,
lorfque les circonftances particulières rendent abu-
five la règle générale. Il me fèmble que les Cours
de iuftice ne feuroient trop prévenir les lettres de
J u p o n , & que le Miniftère ne doit en ufer que
très-febrement, ( L'abbé Girard.')
(N.) COMMINATION. f.f. Figure de penfée par
mouvement, dont l’objet eft d’intimider ceux à qui
l’on parle , en leur dénonçant comme prochains ,
comme infaillibles, ou comme horribles, des maux
dont on leur préfente l’image ou le fouvenir.
Aman voulant encore conferver l’orgueil de fim
rang dans les offres qu’il fait à Efther afin de l’ap-
paifer j cette princeUè lui répond avec indignation :
-V a , Traître ; Iaifferinoi :
L es juifs n’ attendent rien d’un méchant tel que toi.
Miférable I le Dieu vengeur de l’innocence ?
Tout prêt à te juger, tient déjà fa balance j
B ie n tô t ton jufte arrêt te fera prononcé ;
Tremble j fon jour approche , & ton règne eft paflfé.
L e grand prêtre Joad jette le trouble dans l’ame
de Mafttan par cette Comminadon énergique :
- p c coûtes tes horreurs, v a , comble la mefure;
piçu s’apprête à te joindre à la race parjure,
Abiron 8c Dathan, Doëg , Achitophel *,
Les chiens à qui fon bras a livré Jézabel
Attendant que fur toi fa fureur fe déploie ,
Déjà font à ta porte & demandent leur proie.
Pyrrhus , voyant qu’Andromaque eft intenfîble à
fen àmeur , dit à cette princeflè ( Arulrom. I. 4 * ) *
Hé bien , Madatoe , hé bien , il faut vous obéir j
Il faut vous oublier , ou plus tôt vous haïr :
Oui /mes voeux ont trop loin pouffé leur violence
Pour ne plus s’arrêter que dans l’indifférence.
Songez-y bien ; il faut déformais que mon coeur i
S’il n’aime avec crapfporc, haïffe avec fureur :
Je n’épargnerai rien dans ma jufte colère ;
Le fils me répondra des mépris de la «nère.
Maffiilon , dans fon fermon %r l’Impénitence
finale ^ Lundi de La Jeconde femaine de Carême , )
cherche , par une Comminadon pathétique , à tiret
de leur dangereufe léthargie les pécheurs qui diftèr
rent leur converfion : « Vous nous en avertiffez,
33 Seigneur , dans les livres teints ; leur fin fera
a femblable à leurs oeuvres. Vous avez vécu impu-
» dique ; vous mourrez tel : vous avez été ambi-
» deux ; yous mourrez, fans que l’amour du Monde
» & de tes vains honneurs meure dans^ votre coeur :
» vous avez vécu mollement, fans vice ni vertu 5
» vous mourrez lâchement , & tens componction :
» vous avez vécu irréfolu , faitent tens celte des
» projets de pénitence & ne les exécutant jamais ;
» vous mourrez plein de déjîrs & vide de bonnes
» oeuvres : vous avez vécu ineonftant , tantôt au
: » Monde tantôt à Dieu, tantôt voluptueux tantôt
j » pénitent, & vous biffant décider par votre goût
! » & par Fateendant d’un earaCtère changeant & lé-
» ger j vous mourrez dans ces trilles alternatives ,
» & vos larmes au lit de la mort ne feront que ce
» qu’elles avoient été pendant votre vie-, c’eft à dire ,
» un repentir pafîager & fiipérficiel , des fôupirs
» d’un coeur-tendre & tenfible mais non pas d un
» coeur pénitent: en un mot vous mourrez dans votre
» péché ; dans ce péché , où vous croupiffez depuis
» fi long-temps; dans ce péché , qui eft à vous plus
„ que-tous les autres, parce qu’il domine dans vos
» moeurs & dans votre tempérament ; dans ce péché,
» qui eft comme né avec vous & dont une vie en-
» tière n’a pu vous corriger. Achab meurt impie,
» Jézabel, voluptuçute; Saul, vindicatif ; les en-
» fants d’Héli , tecrilèges ; Abfalom, rebelle ; BaF-
« tazar, efféminé ; Hérode , inceftueux : toute FE-
» criture eft remplie de pareils exemples, tous les
» prophètes retendirent de ces menaces , Jetus-
» Chrift s’en explique de manière à faire trembler
» les plus infenfibles.» ( M . B eauzée. )
COMMUN, adj. Gram. Il fe dit du genre par
rapport aux noms, & te dit de la lignification à
l’egard des verbes. , .
Pour bien entendre Ce que les grammairiens appellent
Genre commun, il fautobferver que les indkî
C O M
VÎdus de chaque efpèce d’animal font dlvifés en
deux ordres ; l’ordre des mâles, & l’ordre des femelles.
Un nom eft dit être du genre mateulin dans
les animaux , quand il eft dit de Findividu de l ’ordre
des mâles ; au contraire, il eft du genre féminin,
quand il eft dit de l’ordre des femelles ainfî, Coq eft
du genre mateul in& Poule eft du féminin.
A l’égard des noms-d’êtres inanimés, tels que Soleil^
Lune, Terre, &c. ces fortes de noms n ont point
de genre proprement dit. Cependant on dit que Soleil
eft du genre mateulin, & que Lune eft du féminin ;
ce qui ne veut dire autre chote , finon que lorfqu. on
voudra joindre un adjeCtif a Soleil, 1 utege veut en
France, que des deux terminaifons deFadjeCtif, on
choififfe celle qui eft déjà confacrée aux nqmsfeb-
ftantifs des mâles dans l’ordre des animaux : ainfi ,
on dira beau fo le i l, comme on dit beau coq ,* &
l’on dira belle lune, comme on dit belle poule. J’ai
dit en France ; car en Allemagne , par exemple ,
Soleil eft du genre féminin ; ce qui fait voir que
cette forte de genre eft purement arbitraire^, & dépend
uniquement du choix aveugle que 1 Utege a
fait de la terminai fen mateuline de l’adjeCtif ou de
la féminine, en adaptant l’une plus tôt que I autre à
tel ou tel nom. >
A l ’égard du genre commun, on dit qu un nom
eft de ce genre , c’eft à dire, de cette clafle ou forte,
lorfqu’il y a une terminaifen qui convient également
au mâle & à la femelle : ainfî, Auteur eft du genre
commun ; on dit d’une damé qu’elle eft auteurd’un
tel ouvrage : notre Qui eft du genre 'commun ,* on
dit un homme q u i, &c. une femme qui , &c. Fideie,
S a g e , font des adjeCtifc du genre commun ; un
amant fidèle , une femme fideie.
En latin, Civis fe dit également d’un citoyen &
d’une citoyenne. Conjux fe dit du mari & auffi de
la femme. Parens fe dit du père & auffi de la mère.
B o s , te dit également du boeuf & de la vache.
Canis , du chien ou de la chienne. Feles te dit d’un
chat ou d’une chate.
Ain fi Fon dit de tous ces noms-là , qu’ils font du
genre commun. ■
Obtervez que Homo eft un nom commun quant à
la fignification , c’eft à dire qu’il fignifie également
Y homme ou la femme ; mais on ne dira pas en
latin mala homo, pour dire une méchante femme ;
ainfi, Homo eft du genre mateulin par rapport'?, la
conftruéKon grammaticale. C’eft ainfi qu’en françois
Perfonne eft du genre féminin en conftruétion, quoique
. par rapport à la fignification ce mot défigne
egalement un homme ou une femme^FÎoye\ G enre.
A l’égard des verbes, pn appelle Verbes-communs
ceux qui, feus une même terminaifon , ont la fignification
active & la paffive , ce qui te connoît par les
adjoints. V(yye\ la quatrième lifte de la Méthode de
P. R. p. 461 : des déponents qui te prennent paffive-
ment. Il y a apparence que ces verbes ont eu autre1
fois la terminaifon a&ive & paffive : en effet, on
trouve criminare, crimino, Ôccriniinari, criminor,
blâmer.
C O M 4 3 1
En g re c , les verbes qui feus une même termi-
naifen ont la fignification a&ive & la paffive , font
appelés F"erb es moyens ou Herbes delà voix moyennes
Foye\ Mo yen . (M . d u M a r s a ï s . )
C ommun (TeJ , dans la Littérature & les beaux-
arts , eft ce qui ne fe diftingue, par aucun degré fen-
fible de beauté ou de perfection , des autres objets du
même genre , ou ce qui n’a que le degré médiocre
de perfection qui eft commun à la plupart des chofes
de la même efpèce. Le Commun eft par contequent,
en toutes choîès, ce qu’on voit le plus ordinairement
; par cette raifôn il nous touche peu, & n’a
point d’énergie efthétique. Des penfées communes,
des peintures ordinaires de la nature ou des moeurs ,
des évènements de tous les jours, ne font pas des
fujets propres aux ouvrages de Fart. Auffi les Critiques
recommandent-ils à Fartifte de choifîr un fujec
noble, grand , &, s’il te peut, neuf, & d’éviter le trivial
& le Commun.
Mais une chote peut être commune en deux manières
: ou par te nature ; ou par fes dehors, c’eft à
dire, en faits d’arts, par la façon dont elle eft repré-
fentée. Une penfee relevée peut être exprimée d’une
manière commune, & une penfée commune peur être
relevée par la nobleffe de l’exprefïion.
On ne doit pas exclure des arts tout fujet commun^
il eft fbuvent néceffairepour compléterl’enfem-
ble. Dans un tableau hiftorique, dans une tragédie ,
dans une épopée, tous les objets ne peuvent pas
être également nobles. Il fùfxit que le Commun n’y
entre qu’autant qu’il eft néceffaire, qu’il n’y domine
jamais, & qu’on l’évite le plus qu’on pourra, puif-
qu’il ne contribue point au plaifîr.
Il y a des ouvrages qui, par le choiS: du fujet, font
communs, mais qui deviennent grands & excellents
par la manière de le traiter. Tels font les tableaux
hiftoriques d’un Rembrant , d’un Tértières , d’un
Gérard Dou, & de plufîeurs peintres hollandois ,
dont on fait néanmoins un grand cas. Tel eft encore
le Therfite d’Homère, fujet bas & commun, mais
qu’on tolère entre tant de héros , parce que le poète
a fii le peindre de main de maître.
Dans tous ces cas , ce n’eft pas l’objet qui plaît,
c’eft l’habileté de Fartifte qui donne du plaifîr ; mais
comme cette habileté n’eft pas précilément le but
direCt des beaux-arts, le plaifir qu’on trouve à de
pareils ouvrages n’empêche pas que le Commun ne
feit blâmable. On regrette avec raifon , à la vue de
ces productions, que l’artiftp n’ ait pas conîacré tes
précieux talents à des objets plus dignes d’être perpétués.
Le défaut oppo'fé , c’eft d’être trop ferupideux à
admettre le Commun, lorfqu’il fert à laliaifon de
l’enfemble. S’imaginer qu’il n’eft jamais permis de
baiffèr le ton dans ce qui n’eft qu’acceffoire, c’eft le
moyen d’être feuvent guindé, géné, & enflé,. Lorsqu’il
faut employer des chofes communes, fe plus
sûr eft de les repréfenter dans leur air naturel. Il eft
plus ridicule d’étaler avec pompe un objet commuiz,