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exemple Géographie, Théologie: cependant rl me
fêmble que ces mots font de cinq' fÿllabês, Ge-o-gra-
yhi-e, Thé-o-lo-gi-e. Nos grammairiens & nos dictionnaires
me paroiiïent avoir manqué de jufteffe &
d’exaditude au fujet des Diphthongues. Mais (ans
me croire plus infaillible, voici celles'que j ai remarquées,
en fuivant l ’ordre des Voyeîles •; les unes (è
trouvent en plufieurs mots , & les autres feulement
en " quelques-uns. "
A i , tel qü’oh l ’entend dans l’interjeftion de douleur
ou d’exclamation a i, a i, a i , & quand l'a entre
en çompofition dans la même fyllabe avec le mouillé
fort, comme" dans m-ail, b -aû, de Vail, ati-r-a.il ;
evan-t-ail ; pôr-t-ail, &c. ou qu’il efl fuivi du
mouillé foînl'e \ là ville de' Rl-aye en Guyenne, les
îles LtirÇ-ayes en Amérique. .
Cette Diphthongue arteft fort en ufàge dans nos
prdvmcês d’au delà'de'la Loire. Tous les mots
qu’on écrit en françois par a i , comme fa ir e , necef-
J'aire , jamais , plaire \ palais , &c. y font prononcés
par a-i Diphthongue : on entend 1 a & 1 i.
Telle étoitla prononciation de nos pères, & c’eft
ainfî qu’on prononce cette Diphthongue en grec ,
f&ooccit } Tifécci j telle eft ‘auflï la prononciation
des italiens, des efpagnols ^ &c. Ce qui fait bien
voir avec combien peu de raifôn quelques perfônnes
s’obftinent à vouloir introduire cette Diphthongue
oculaire a la place de la Diphthongue oculaire oi
dans les mots françois , croire, &c. comme fi ai
étoit plus propre que oi à reprefènter le fôn de Yè.
Si vous avez* à réformer oi dans les mots où il fe
prononce ê , mettez è : autrement , c’eft réformer
un abus par un plus grand, & .c’eft pécher contre
l ’Analogie. Si l’on écrit français , j ’avojs , c’eft
que nos pères pronon çoient frdnçois-, f avais ; mais
on n’a jamais prononcé français en faifànt entendre
y a & 17. En un mot, fi l’on vouloit une réforme , il
falloit plus tôt la tirer de procès, fuccès , très ,
auprès y d è s , &c. que de Ce régler fur p a la is , &
fur un petit nombre de mots pareils qu on écrit par
ai y par la raifôn de Tétymologie palatium , & parce
que télle étoit la prononciation de nos pères;
prononciation qui fe con’fèrve encore , non feulement
dans les autres langues vulgaires,, mais même
dans quelques-unes de nos provinces.
11 n’y a pas long temps que l’on écrivoit lia i,
n a tu s , il efl nai ; mais enfin la prononciation a fournis
l’orthographe en ce mot, & l!on •écrit né.
Quand les grecs changeoient ai en dans la
prononciation, ils écrivoient tjcltpa»attollo , ««w,
flttollebam.
Obfêrvons en pafïant que les grecs ont fait ufàge
de cette Diphthongue a i , au commencement, au
milieu, & à la fin de plufieurs mots, tant dans lés
poms que dans les verbes: les latins au contraire ne
s’en font guère fêrvis que dans 1 interjection ai , ou
dans quelques.mots tirés du grec. Ovide, parlant
^’Hyacinthe, dit :
Jpfe fuos gemitus foliis inferibit : & ai ai
jfftfs hqbet injeriptum. Ovid# Met» lïv* X- v, 2.xy*
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Lorfque les latins changent Y te en a i , cet ai n’eft
point Diphthongue, il eft difîyllabe.' Servies fur ce
vers de Virgile :
Aulai in medio. Æneïd. liv. III. v. 354’
dit, aulaï pro, aulæ , & efl diærefîs de grèciï\aüone
veniens.; qiiotum ai Diphthongùs rejoluta, dpud
nos duos Jvlldbas façu. Voye\ Diérèse.^
Mais palfons aux^autres Diphthongues. J’obfèr-
verai d’abord que T/ ne doit être écrit par y , que
lorfqu’il eft le ligne du mouillé foible.
E au* Fléau y ce mot eft de deux fyllabes.
Etre l’effroi du monde & le fléau de Dieu.
Corneille.
A l ’égard de fe a u , eau, communément ces trois
lettres eau le prononcent comme un à fort long, &
alors leur enfèmble n’eft qu’une Diphthongue oculaire
ou une forte de demi-Diphthongue dont^ la
prononciation doit être remarquée : car il y a bien
de la différence dans ia prononciation entre un feau
à puifer de l’eau & un fo c , entre de Y eau & un
os y entre la peau & le Pô rivière ou Pau ville.
M. l’abbé Regnier, Gramm. pag,'7°> dit que IV
qui eft joint à- au dans cette Diphthongue , fê prononce
comme un é féminin , & d’une manière pr-ei-
que imperceptible.
F i y comme en grec nhcà , tendo : nous ne prononçons
guère cetie Diphthongue que dans des
mots étrangers , bei ou bey , dei ou dey j le dey dp
Tunis j ou avec le n nafàl, comme dans teindre ,
Rheimsy ville.
Selon quelques grammairiens on entend en ces
mots un i très-foible , où unvfbn particulier qui
tient de Ye & de Yi. Il en eft de même devant le
fon mouillé dans les mots fo - l- e il, co n -f e il, fo-<
m-eily &c. 1
Mais félon d'autres il n’y a en ces derniers que
Ye fuivi du fon mouillé ; le v ie-il-homme,
f - e - il y fôm-e-ïly &c. & de même avec les voyelles a?
ou y èui Aihûy félon ees grammairiens', dans oeil
qu’on prononce euïly il n’y a que eu fuivi. du fon
mouillé, ce qui me paroît plus exaél. Comme dans
la prononciation du Ion mouillé , les organes commencent
d’abord par etre difpofes comme fi 1 on
al.loit prononcer i , il femble qu’il y ait un i j mais
on n’entend que le fôn mouillé, qui dans le mouillé
fort eft une confonne : mais à l’égard du mouille
foible, c’eft un fon mitoyen qui me paroît tenir de
la voyelle & de la confonne: moi-yen y payen ; en
cçs mots., yen eft un fôn bien différent de celui
qu’on entend dans bien, mien, tien.
I a , d-ia-cre , d-ia-mant, furtput dans le discours
ordinaire \ fiacre } les P l éia-des , de la
v-ian-de, négo-c-iati-t, inconvé- n-ien-t.
IÉ. P-ie oup-iéd, 1 cép-ié-dsy ami-t-ié, p i-t-ie ,
pre-m ier, der-n-ier y mé-t-ie-r.
IÈ ouvert. Une v-iè-le inftrument , vol-iè-re,
Çu-U-ne province de France, P-U-ne. v ille , °p
verbe,
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verbe, vefâat, n-iai-s , b-iai-s ; on prononce
nièsybi'ès y f iè-ry un t-iè-rs, le c-ie-ly-Ga-br-ie-l ,
ef-fen-c-ie-L y àn m-ie-ly f-ie -l. _ • ,v
I e n , où Vi n’eft point un mouillé foible, b-ien^
m-ien , t-ien , f-ien , en-tre-t-ien , ch ien , j:omé-
d-ien y In-d-ien , gar-d-ien, pra-ti-ç-ien ; 1 i & *a
voyelle nafale en font la Diphthongue. ^
Ibu ; D-ieu y l-ieu-X y les c -ieu-x, m-ieu-x.
Io ; f-io-le , capr-io-le , car-io-le, v-io-le , fur-
touIto nen profe. _. - ; p-ion, que nous ai-m-ion-s , di-J-ion-s 9 «c..
ac-t-ion ,occa-f-ion: ion efl fouvem de deux fyllabes
Io u ; cette Diphthongue neft d ufàge que dans
nos provinces méridioliales, ou bien en des mots
qui viennent de là ; Mon-tef-qu-iou, Ch-iou-r-me ,
O-l-iou-les ville de Provence ; la d o ta i , en Provence,
on dit la C-iou-tat. »• - r
F a y y an y y e e müet, y é , &c. l’i ou l y a fou-
vent devant les voyelles un ion mouille foible , c eft
à dire, un fôn exprimé par un mouvement moins
fort que celui qui fait entendre le fôn mouille dans
Verf ailles y paille ,• mais le peuple de Paris qui
prononce Verfa-ye, pa-yey fait entendre un mouille
foible ; on l’écrit par y. Ce fon eft l’effet du mouvement
affôibli qui produit le mouille fort; ce qui
fait une prononciation particulière differente de celle
qu’on entend dans.m/e/z, tien y où il n’y a point de
fon mouillé, comme nous l’avons déjà obfêrvé.
Ainfi , je crois pouvoir mettre au rang des Diphthongues
les fons composés qui réfultent d’une
voyelle, jointe au mouillé foible ; a-yan-t, vo-yan-t,
pa-yen, pai-yan z, je pai-yey em-plo-ye-r, do-yen,
afin que veus fo-ye-\ , dé-lai-ye-r, bro-ye-r.
O i. La prononciation naturelle de cette Diphthongue
eft celle que l’on fuit en g rec, Xayoi ; on
entend Yo & Pi. C ’eft ainfî qu’on prononce communément
voi-ye-le , voi-ye-r, moi-yen , loi-yal,
roi-yaume on écrit communément voyelle, voyer,
moyen , loyal , royaume. On prononce, encore
ainfi plufieurs mots dans les provinces d’au delà de
la Loire ; on dit Sa-v-oi-e , en faifant entendre l’o
& VL On dit à Paris Sa-v-o-ya-rd ; y a eft la
Diphthongue.
Les autres manières de prononcer'la Diphthongue
oi ne peuvent pas fê faire entendre exactement par
écrit : cependant ce que nous allons obfèrver ne
fera pas inutile à ceux qui ont les organes allez délicats
& affez fouples, pour ccouter & pour imiter les
perfônnes qui ont eu l’avantage d’avoir ete èlevees
dans la capitale, & d’y avoir reçu une éducation.
perfectionnée par le commerce des perfônnes qui
ont l’efprit cultivé.
Il y a des mots où oi eft aujourdhui prelque toujours
changé en oe, d’autres où oi fè change en ou,
& d’autres enfin en oua : mais il ne faut pas perdre
de vue que, hors les mots où l’on entend l’o & 1 i ,
comme en grec A«yo<, il n eft pas poffible de représenter
bien exactement par écrit les différentes prononciations
de cette Diphthongue. <
Gramm. et L it t t rat*-Tome I. Part• JL
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Or prononcé par oe où IV a un fôn ouvert qui
approche de V a f o i , l-oi, fr -o i-d, t-oi-t, m-oi ,
i- fo i- fo n , qu-oiy Cjoi-ffe, oi-feau, j-o i-e , d-oi-gt
(digitus), d-oi-t ( debet ) , db-oi-s , e-oi-le, &c.
O i prononcé par ça ; m-oi-s, p-oi-s , n-oi-x%
tr-oi-s, la ville de Tr-oi-e, &c. prononcez , m-oat
p-oa y &c.
O i prononcé par oua ; b-oi-s ( lignum ) , prononi
cez b-où-a.
OiN : f o i n , l-oin, be'-f-oin , f o in , j-oin-dre %
m-oin-s, on doit plus tôt prononcer en ces mots
une forte d’e nafàl après l’o , que de prononcer
ouin { ainfi, prononcez foein plus tôt que fouin.
- Il faut toujours Ce reffouvenir que nous n’avons
pas de fignes pour repréfènter exa&ement ces fortes -
de fôns.
O ua écrit par ua ; éq-ua-teur , éq-ua-tion %
aq-ua tique, quin-q-ua-géjime ; prononcez é-q-oua-
teur , é-q-oua-tion , a-q-oua-tique , quin-q-ua<
géfime,
O e : p-oè-te , p-oè-me ; ces mots font plus ordinairement
de trois fyllabes en vers ; mais dans la
liberté de la convcrfation on prononce poè ‘comme
Diphthongue.
Ou an : Ec-ouan, R-ouan, villes, Diphthongues
en prpfê. Oue : oue-fl, fud-oue f l.
O u i : b-oui-s, l-oui-s ; en profô ; ce dernier mot
eft de deux fyllabes en vers; oui, ita.
Oui , ce font ces plaifirs & ces pleurs que j’envie.
Oui , je t’achèterai le praticien François.
Racine,'
Ouin : b a ra -g -o u in , b a -b -o u in .
U e : ftatue éq-ue-flre, ca-f-ue-l, an-ue-l, ec-ue le ,
r-ue-le, tr-ue-le, furtout en proie.
U i : l - u i é t - u i , n - u i t , b r - u i t , f r - u i t , h -u ït %
l-ui-re , je f u i s , un f-u i - J - fe . ~ Uin A l- c-uin théologien célèbre du temps de
Charlemagne. Q-uin-quagéfime, prononcez quin.
comme en latin; & de même Q-uin-ti-l-ien , le
mois de J-uin. On entend Yu & i i natal.
Je ne parle point de Caen , Laon , Pa(f f l »
Jean, &c. parce qu’on n’entend plus auiourdhuî
qu’une voyelle nafàle en ces niots-la, Can , pan ,
J an , &c. v ; -1 '
Enfin il faut obferver qu’il y a des combmaifons
de voyelles quilônt Diphthongues en profô & dans
la converfàtion, & que nos poètes font de deux
fyllabes., .
Un de nos tradufteurs a dit en vers,
Voudrois-tu bien chanter pour moi , cher Licidas ;
Q u e l q u e air fi-ci-lb en? Tongepierre.
On dit f i ci-lien en trois fyllabes dans le difeours
ordinaire. Voici d’autres exemples.
La foi, ce noeud facré , .ce lï-tn pré-ci-eux. Srébeuf.
|1,eft jufte, grand Roi, qu’un meurtri-er périfle.
Corneille.
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