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vobis, vir i mulier, & parvulus, de medio Judce.
( M* M armontel. )
( N . ) AP PL IC A T IO N , M ED IT A T IO N ,
CO NT ENTION. Syn.
Ce font différents degrés de Y Attention que donne
l ’ame aux objets dont elle s'occupe : de manière
qu'Attention eft le terme générique , & les trois
autres énoncent des idées Ipécifiques.
U Application eft une Attention fùivie & férieute;
elle eft néceflàire pour connoître le tout. L a Méditation
eft une Attention détaillée & réfléchie ; elle
eft indilpenlable pour connoître à fond. La Contention
eft une Attention forte 8c pénible; elle eft inévitable
pour démêler les objets compliqués, & pour écarter
ou vaincre les difficultés.
L'Application foppofo la volonté de fâvoîr ; elle
exige de l'alfiduïté à l'étude. La Méditation lùp-
pote le défîr d’approfondir ; elle exige de l’exa&i-
t.ude dans les détails , & de la juftefle dans les com-
paraifons. La Contention ftippofo de la difficulté
o u - même de l’importance dans la matière; elle
exige une réfolution ferme de ne rien ignorer, &
du courage pour n’être ni effrayé des difficultés
ni rebuté par la peine.
Le fiiccès dé' l’Application dépend d’une raifon
laine ; celui de la Méditation, d’une raifon pénétrante
& exercée ; celui de la Contention, d’une
raifon forte & étendue.
Les jeunes gens , comme les autres, font capables
d'Attention \ elle ne foppofo ni acquis, ni
fuite ; ni effort : mais la légèreté de leur âge &
leur inexpérience les empêchent fouvent d’avoir de
Y Application ; l'une, en mettant obftacle à l ’afli-
duité de leur Attention ; l'autre , en leur Iaifîànt
ignorer l'intérêt qu’ils auroient à lavoir. L’art
des inftituteurs confifte donc à mettre à profit les
accès momentanés d'Attention que montrent leurs
élèves ; à fixer, mais non à forcer, la légèreté qui
leur eft eflencielle ; à laifir, même^â faire naître,
les occafions de leur faire connoître ou^etir combien
il leur foroit avantageux de lavoir: n tête ne;
fùffit pas pour les déterminer à Y Application ; il
faut recourir à la rufe, & les y amener par des
motifs préfonts d’émulation. S'ils ne s'appliquent
pas comme on pourrait le faire dans un âge plus
avancé, il faut les traiter avec indulgence, mais
toutefois fans foibleïTe : il ne forait pas jufte de
vouloir exiger d’eux des Méditations profondes,
puisqu'elles ne peuvent convenir qu'à des hommes
faits j cultivés, & exercés. Ce foroirbien pis de les
mettre dans le cas de ne pouvoir fo tirer de leur
tâche qu’à force de Contention : 8c malheureufo-
ment les livres élémentaires qu'on leur met dans
les mains font fi mal digérés, fi peu lumineux, fi
éloignés des vrais principes; la plupart des maîtres
qui ofont fo charger dé les inftruire, ont fi
peu d’aptitude pour cettè importante fonéfion ; qu’il
n'eft guère pbflîble que les germes des talents ne fo
trouvent, ou étouffés des leur naiflance par un trop
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jufte dégoût, ou rendus ftériles par des efforts prématurés.
( M . B e a u z é e . )
(N.) APPOSER, APPLIQUER. Syn.
On appofe le foellé. On applique une emplâtre
for le mal , des feuilles d’or ou d’argent for l’ouvrage,
un foufflet for la joue. Ainfi, Appliquer fo
dit pour les chofos qu’on impofo for une autre par
conglutination ou par forte impreffion. Appofer
n'eft que du ftylë de pratique ; où s’il a quelqü’autre
ufâge, alors il regarde ce qu’on adapte à une chofo
comme partie intégrante du tout : en ce fons on
diroit Appofer une corniche au refte de la boiterie,
le couvercle au coffre , le chapiteau à la colonne*
( L'abbé G ir a r d . )
(N.) A P PO S ITIO N , £ f. Ce mot eft purement
latin, Appofiiio ; & il eft compote de la prépofîtio»
ad, dont le d fo change en p par attraction ( F . At traction),
& du nom fîmplepofitio : il lignifie donc ,
littéralement Pojition auprès de, Pofition ajôuteec
» L 'Appofition, dit l'aute.ur du Manuel des
» grammairiens, fo fait quand il y a plufieurs
» fobftantifs mis de foite lans conjonction & en
» même cas; comme urbs Athenæ ( la ville d’A -
f> thènes ) , Arifioteles philofophus (le philofophe
» Ariftote), Canisfidus(la Caniculeconftellatk>n)»i
Mais félon cette définition, répond M. du Mar foi s
: ( EncycL ) quand on dit A i f o i , Yefpérance, l(t
f charité, font trois vertus théologales ; S. Pierre y
j S. Mathieu , S* Jean, &c. étaient apôtres : ces-
façons de parler, qui ne.font que des dénombrements,
foraient donc des Appofitions. ' L
Cette critique eft jufte & bien, fondée ; mais il
n'en eft pas de même de ce qu'ajouté le grammairien
philofophe quand il dit : « L 'Appofition
; » confifte à mettre enfomble fans eonjenCtion deux
| so noms , dont l’un eft un nom propre & l’autre un
» nom appellatif, en forte que ce dernier eft pris
» adjectivement & le qualificatif de l’autre , comme
» on le voit par les exemples: ardebat A le x im ,
» delicias domini • urbs Rom a , c’eft à dire, R orna
» ( qua» eft ) : urbs ', Flandre, théâtre fanglant ,
&e. » ' "
M. du Mariais reftreint trop Y Appofition, en
la bornant au rapprochement de deux noms , l ’un
propre & l’autre appellatif. Tout le monde re-
; connoitra l’Appofition dans ces vers de la tragédie
d'Alfiire :
Achève ; de ee fer , tréfor de tes climats
Préviens mon bras vengeur , & préviens mon trépas.
Les deux noms fe r & tréfor font réunis par A p pofition
, & aucun des deux n’eft un nom propre.
Ce fer , me dira-t-on , eft équivalent à un
nom propre, parce que l’article démonftratif ce individualité
l’idée d'î fer. Mais il eft évident que
; c'eft le fe r en général qui eft jléfignê par l’addi-
! tîon tréfor de tes climats',."parce qu'il ferait aulfi
» ridicule de donner le nom de tréfor de nos climats
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à une épée qu'on en a tirée, que d'appeler tréfor
royal un louïs qu'on y auroit reçu. Voici d’ailleurs
un exemple de M. Racine fils (Poème de la Re-
ligion) , où Y Appofition eft aufli vilïblé & ne laiflè
pas lieu à une pareille difficulté,
C'eft dans un foible objet, imperceptible ouvrage ,
Que l’art de Pouvrier me frappe davantage.
Ces mots imperceptible ouvrage font mis par
Appofition à ces autres mots un foible objet, qui
certainement ne font pas pris dans un fons individuel.
, .
Avec l’idée que M. du Mariais avoit de Y Appofition
, il ne devoit reâifier celle de l’auteur du
Manuel, que par fos propres termes. Il avoit d’abord
donné en latin une définition qu’il a tronquée en
françois : Appofiiio fit, quando plura fubfiantiva
ad rem eandem pertinentia ponuntur in eodem cafu
fine conjunftione ; ces mots ad rem eandem pertinent
ia, s’ils étoient entrés dans la définition fran-
çoifo , auroient prévenu l’objeCtion de i’Encyçlo-
pédifte ; car la foi, Vefpérance , la charité font
trais noips qui n’appartiennent pas à une même
chofo, qui ne défîgnent pas un même objet, qui
ne fo rapportent pas à la même idée.
Mais il me fomble que dans cet .état même, où
Y Appofition- a, plus, d’étendüe que ne lui en donne
M. du Mariais , . la. définition eft encore relïèrrée
dans des bornes. trop étroites. C’eft , je crois, une
figure de lyntaxe, relative al la plénitude, qui confifte
à joindre à un nom, f o u s les l o i s de la c o n c
o r d a n c e ( Voye\ C o n c o r d a n c e ) , un autre nom ou
un adjeétif avec les dépendances convenables , de
manière que cette addition n’ajoûte ati premier nom
qu’un fons acceflbire purement explicatif, dont la
fuppreflion ne puitTe nuire au fons principal.
Qu’on effay.é de fupprimer Y Appofition dans
les exemples cités de Voltaire & de Racine , &
l’on verra que le fons principal demeure intaéh
Il en fora de même de celui-ci de Boileau ( An.
voit;, II. y , 6..) *
Telle , aimable en (on air , mais humble dans fou ftjde »
Doic éclater fans pompe un.e élégante Idylle.
N'eft-ce pas évidemment par Appofition, qu'à l'idée
d’une élégante Idylle, on ajoute ces deux autres ,
aimable en fon air, mais humble dans fon Jlyle ?
8c le fofis principal ne foroit-il pas encore le même,
quand, on diroit fimplement, telle doit éclater fans
pompe' une élégante Idylle ?
Cette figure fort quelquefois à reftreindre l'étendue
de la lignification d'un nom appellatif j u f q u ’ a u fons
individuel, f i n s employer le nom propre ; & alors
l ’individu eft caraétérite par l’union diftinffive des
idées rapprochées & rendues plus fonfîbles par le
nom propre : le prophète roi dît la même chofo
que David ; mais la phrafo développe des idées
que le nom propre réveille moins néceffaireinent &
moin^ clairement*
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Quand Y Appofition fo fait avec U!l nom propre
, c’eft pour énoncer quelque qualité de l’individu
: Cicéron , le prince des orateurs romains ;
le philofophe Defcartes ; Y élégant Racine ; le fu-.
Mime Mojfml.
Au refte, je ne vois point de néceftité à imaginer
une Ellipfo dans Y Appofition, comme il plaît
a plufieurs grammairiens de le penfor. L’obligation.
de n’y reunir les mots que foüs les lois de la
concordance , annonce l’identité des idées ; & l’identité
n’exige point d'autre lien entre les termes r
que celui du rapprochement & de la concordance
même. ( M. B e a u z é e )
(N.) APPRÉCIER, ESTIMER, PRISER. Syn.
Apprécier, c’eft juger du prix courant des chofos
dans le commerce de la vente & de l'achat. Fflimery
c’eft juger de la valeur réelle & intrinféque de la
chofo. Prifer, c’eft piettre un prix à ce qui n’en a
pas encore, du moins de connu.
Ces trois mots font également d'ufâge dans le
fons moral ou figuré, & ils conforvent à peu près
les mêmes caradères de diftindion que dans le
littéral. On apprécie les perfonnes & les chofos,
par la conféquence ou l’Inutilité dont elles font
dans le commerce de la fociété civile. On les efiime
par leur propre mérite, foit du coeur foit de Pefo
prit. On les prife par le cas qu’on têtnoigne en»
faire , quel qu’en foit le fondement , talent ou
forvice»
Les -perfonnes vertueutes ne font pas ordinairement
appréciées à un haut prix , quoiqu'elles
loient beaucoup ejlimées. Celui qui rend le plus
de fervice doit être le plus prifé. (L'abbé Girard^
(N.) APPRENDRE, S’INSTRUIRE* Syn.
Il fomble qu'on apprenne d’un maître, en écoutant
tes leçons ; & qu’on s'infiruife par foi-même,
en faîfant des recherches.
' Il faut plus de docilité pour apprendre> & il y
a beaucoup plus de peine à s'infiruire.
Quelquefois on apprend ce qu’on" ne voudrait
pas lavoir: mais on veut toujours fâvoir les chotes
: dont on s'infiruit.
On''apprend les nouvelles publiques, pa rla v o ix
’ de la renommée. On s’infiruit. de ce qui fo paffe
dans le cabinet, par fos foins & par fon. attention
: à obterver & à s’informer.
Qui lait écouter, fait apprendre. Qui foit faire
• parler, lait s’ infiruire.
Il arrive fouvent qu’on oublie ce qu’on avoit
appris : mais il eft rare d'oublier les chotes dont
on s eft donné la peine de s'ïnfÊruire*
Celui qui apprend un art ou une fcienee, eft
. dans l’ordre des écoliers. Celui qui / e n bifiruit, æ
; le mérite de maître.
Pour devenir habile , il faut commencer par
[ apprendre de ceux qui lavent ; & travailler en fuite
ï à srinftruire foi-même , comme II on navoit rie®
; appris• ( L'abbé Gièard* }