
eft connus de tout le monde. Il fèroli à fôuhaitôr
que chacun fit la fî'enne de bonne heure; qu’il la
li t la plus flatteufè qu’il fèroit poffible , & qu’il employât
toute la vie à la mériter.
Lorfque, dans l ’article A l l é g o r ie , j’ai cité
Y Épitaphe qu’un imprimeur de Bofton avoit faite
pour lui-même , je ne .fàvois pas que je parlois de
l ’illuftre M. Franklin, de cet homme, qui, heureu-
fement pour fa patrie, a vécu afïèz pour être l ’infiniment
de la grande révolution qui vient de la
mettre en liberté. (M. M armortel. )
ÉPITASE , f.f. Belles-Lettres. Dans l’ancienne
Poéfîe, ce mot fîgnifioit la fécondé partie ou divi-
fion d'un poème dramatique, dans laquelle l’action
propofée dans la première partie ou protafê
étoit nouée , conduite, & poulTée par differents incidents
jufqu’à fa fin ou fon dénouement, qui for-
moit la troifième partie , appelée Catafiafe. Voye\
T r a g é d ie .
UÊpitafe c om m e n ç o it a u fé c o n d a f te , o u au
plus t a r d a v e c l e tro if ièm e . C e t t e d iv ifio n n ’a p lu s
l i e u d a n s le s p iè c e s d r am a tiq u e s m o d e r n e s , q u a n t
au n om , p a r c e q u ’o n le s d iv if ê e n a& e s ; m a is
YÉpitafe y fiib fîfte to u jo u r s quant a u f o n d , & c ’eft
c e q u e nous Appelons Noeud & Intrigue. V . N oe u d
& In t r ig u e .
Les anciens fôholiaftes de Térence ont défini
VÉpitafe, Incrementum procejfufque turharum, ac
totius nodus erroris y & Scaliger l’appelle Pars in
quâ titriez aut excitantur aut involvuntur y ce qui
revient parfaitement à ce que nous entendons par
Noeud ou Intrigue* (L 'a llé M a l l e t .)
É P ITH ALAM E , C m. Poefie. Poème à l ’occa-
fion d’un mariage ; chant de noces pour féliciter des
époux.
L e mot Épithalame vient du grec ;
St ce dernier , en ajoutant aTp.ee, , fignifie chant
■ nuptial: S-*Aapes en eft la véritable étymologie.
Or les grecs nommèrent ainfi leur chant nuptial,
parce qu’ils appeloient 3-«aapoç, l’appartement de
l ’époux ; & qu’après la fblennité du feftin , & lorsque
les nouveaux mariés s’étoient retirés , ils chan-
toient YÉpithalame à la porte de cet appartement.
11 eft inutile de rechercher ce qui les détermina à
choifir par préférence ce lieu particulier , moins
encore de longer à réfuter les écrivains qui en allèguent
une rai fôn peut-être aufïi frivole qu’elle eft
communément reçue. Quoi qu’il en fôit, cëtte cir-
conftance du lieu eft regardée par quelques modernes
comme fi néceffaire, que tout chant nuptial
qui ne l’exprime pas, ne doit point, félon eux, être
nommé Épithalame.
Mais fans nous arrêter à cette pédanterie, non
plus qu’à toutes les diftin&ions frivoles d'Êpitha-
lames, imaginées par Scaliger, Muret, & autres,
m même fa n s , confidérer ic i. férvi.lement l’étymologie
du mot : nous appellerons Épithalame tout
chant nuptial qui félicite de nouveaux époux fur
leur union ; qu’il fôit un fîmple récit, ou qu’il foïtf
mêle de récit & de chant ; que le poète y parle feul,
ou qu’il introduite des perfônnages ; & quel que fôit
enfin le lieu de la fcène, s’il eft permis d’ufér d’une
expreffion fi impropre.
L ’Épithalame eft en général une efpèce de Poéfîe
très-ancienne ; les hébreux en connurent l’ufage dès
le temps de David , du moins les critiques regardent
le pfèaume xljv. comme un véritable Épithalame.
Origène donne aufïi le nom à!Épithalame au Cantique
des Cantiques; mais en ce cas c’eft une forte
à'Épithalame d’une nature bien fîngulière.
Les grecs cbnnurent cette efpèce de chant nuptial
dans les temps héroïques , fi l’on s’en rapporte
à Dyétis , & la cérémonie de ce chant ne fut point
oubliée aux noces de Thétis & de Pélée ; mais dans
fà première origine VÉpithalame n’étoit qu’une
fîmple acclamation d’Hymen, ô Hymenee. Le motif
& l’objet de cette acclamation font évidents : chanter
Hymen, 6 Hymenee, c’étoit fans doute féliciter
les nouveaux époux fur leur union , & fou-
haiter qu’ils n’eufïént qu’un même coeur & qu’un
même efprit, comme ils n’alloient plus avoir qu’une
même habitation.
; Cette acclamation paffa depuis dans YÉpithalame
y St les poètes en firent un vers intercalaire ,
ou une efpèce de refrein ajufté à la mefîire qu’ils
avoient choifîe : ainfi, ce qui étoit le principal devint
comme l’acceffôire, & l’acclamation à’Hymen,
d Hymenee- amenée par intervalles égaux, ne fér-
vit plus que d’ornement à M Epithalame, ou plus
tôt elle férvit à marquer les voeux & les applaudif-
féments des choeurs, lorfque ce poème eût pris une
forme réglée.
Stéfichore , qui floriffôit dans la xlij. olympiade ,
paflé communément pour l’inventeur de YÉpithalame
: mais l’on fait qu’Héfîode s’étoit déjà exerce
fur ce même genre , & qu’il avoit compofé YEpi“
thalame de Thétis & de Pélée ; ouvrage que nous
avons perdu, mais dont un ancien feholiafte nous a
confèrvé un fragment. Peut-être que Stéfichore perfectionna
ce genre de Poéfîe, en y introduifant la
cithare & les choeurs. x
Quoi qu’il en fôit , Y Épithalame grec eft un
î véritable poème , fans cependant imiter aucune
aftion. Son but eft de faire connoître aux nouveaux
époux le bonheur de leur union, par les louanges
réciproques qu’on leur donne & par les avantages
qu’on leur annonce pour l’avenir. Le poète introduit,
des perfônnages,, qui font ou les compagnes de
l’époufè, comme dans Théocrite ; ou les amis de
l’époux, comme dans Apollonius.
U Épithalame latin eut à peu près la même origine
que YÉpithalame grec: comme celui-ci commença,
par l’acclamation d’Hymenee, Y Épithalame
latin commença par l’acclamation de Talajfus y on
en fait l’occaïion & l’origine.-
Parmi les fàbines qu’enlevèrent les romains , il
y en eut une qui fè faifôit remarquer par, fà jeuneüè
1 St par fa beauté ; fès ravifFeurs craignant avec raifôn,
L dans
ians un tel défordre, qu’on ne leur arrachât un butin
fi précieux, s’avisèrent de crier qu’ils la condut-
foient à Talaflïus, jeune homme beau , bien fait ,
vaillant , confidéré de tout le monde , & dont le
nom fèul imprima tant de refped, que, loin de
jfônger à la moindre violence , le peuple accompagna
par honneur les ravifïèurs , en faifent fans
ceffe retentir ce même nom de TalaJJius. Un
mariage que le hafard avoit fi bien afforti , ne
pouvoit manquer d’être heureux : il le fu t, & les
romains employèrent depuis dans leur acclamation
nuptiale le mot Talaffius, comme pour fôuhaiter
aux nouveaux époux une femblable deftmee.
A cette acclamation, qui étoit encore en ufôge
du temps de Pompée, &_dont on voit des vertiges
au fiècle même de Sidonius, fè joignirent dans la
fuite les vers fefôenniens, vers extrêmement greffiers
& pleins d’obfcénités. . .
Les latins n’eurent point d’autres Epithalames
avant Catulle , qui, prenant Sapho pour.modèle,
leur montra de véritables Poèmes en ce genre , &
fùbflitua l ’acclamation grèque d'Hymenee à 1 acclamation
latine de Talaffius. Il perfedionna auffi les
vers fefôenniens ; mais, comme il arrive d ordinaire
, s’il les rendit plus chartes par 1 expreffion,
ils ne furent peut-être que plus obfôènes par le fèns.
Nous en avons des exemples dans un Épithalame
de ce poète, (Épithaï. Jul.) dans une petite pièce
qui nous eft reftée de l’empereur Gallien, & dans
le Centon d’Aufône principalement. Stace , qui a
fleuri fous Domitién , ne s’eft permis, dans 1 Epi-
thalame de Violantille & de Stella, aucune expreC-
fîon peu mefùrée. Claudien n’a pas toujours été fi
retenu , il s’échape d’une manière indécente dans
celui d’Honorius St- de Marie.
Pour Sidonius , aufïi bien que tous les modernes,
dont les Poéfîes font lues des honnêtes gens, comme
Buchanan parmi les écoffois, Malherbe & quelques
autres parmi nous, excepte Scarron j ils font
irréprochables à cet égard ; fi pourtant 1 on excepte
encore parmi les italiens le cavalier Marini, qui
mêle, fans refped pour fes_ héros, à des louanges
quelquefois délicates, des traits tout à fait licencieux.
Il fèmble que YEpithalame admettant toute la
liberté de la Poéfîe, il ne peut être alïiqetti à des
préceptes ; mais comment arriver à la perrechon de
l ’Art, fans le fecours de l’Art'même ? Auffi Denys
d’Halicarnafïè , donnant aux orateurs les règles de
YÉpithalame , ne dit pas qu’elles foient inutiles ;
il les renvoie même aux écrits de Sapho. Rien n eft
fi avantageux, en général, que a etudier les modèles
, parce qu’ils renferment toujours les préceptes
& qu’ils en montrent encore la pratique. ■
Il eft vrai qu’il n’y a pas de règles particulières
preferites pour le genre , pour le nombre , ni pour
la difpofîtion des vers propres à cet ouvragé : mais
comme le fîijet en tout genre de Poéfîe eft ce qu il y a de principal, il femble que le poète doit chercher
une fidion qui fôit tout en femble jufte , ingemeulè ,
propre, & convenable aux perfonnes qui en feront
l’objet ; & c’eft en choifîfïant les circonftances particulières,
qui rié fônt jamais abfôlument les mêmes ,
que YÉpithalame eft fufceptîble de toutes fortes de
diverfités. n ,
Claudien & Buchanan, fans etre en tout St a
tous égards de vrais modèles , ont rendu propres
à leurs héros les Épithalames qu’ils nous ont laines.
Pour le cavalier Marini, loin qu’il fôit heureux dans
le choix des circonftances- ou dans les fidions qu il
ne doit qu’à lui-mêpie , on n’y trouve prefque jamais
ni convenance ni juftefïè. L ’Épithalame qui
a pour titre Les Travaux d'Hercule, & pour objet
un feigneur de ce nom , n’eft qu’une indecente &
froide allufion aux travaux de ce dieu de la Fable* .
Dans l’Hyménée où il s’agit des noces de Vincent
Caraffe*, c’eft Silène qui chante tout Amplement
YÉpithalame du berger Aminte. Telles font ordi-*
nairement les fidions de cet auteur : s il en a d une
autre nature, il les emprunte de Claudien , de
Sidonius même ; ou il les gâte par des defôriptïons
fi longues & fi fréquentes , qu’elles rebutent 1 efprit
& font difparoître le fùjet principal.
Fuyez de cet auteur l’abondance fterile,
Ec ne vous chargez point d ’un detail inutile,
dit un de nos meilleurs poètes dans une occafîon
femblable.
Parlons à préfent des images ou des peintures
qui conviennent à ce genre de poème. L Epitha-
lame étant par lui meme deftiné à exprimer la joie,
à en faire éclater les tranfports , on lent qu il ne doit
employer que des images riantes &: ne peindre que
des objets agréables. Il peut repréfenter l’Hyménée
avec fon voile & ■ fbn flambeau ; Venus avec les
grâces mêlant à leurs danfes ingénues de tendres
concerts ; & les Amours cueillant des guirlandes
pour les nouveaux époux.,
Mais ramener*1 dans un Épithalame le combat des
géants & la fin tragique des héroïnes fàbuleufes,
comme fait Sidonius , ou le repas de Thyefte &
la mort de Céfar , comme fait le cavalier Marini ;
c’eft ( pour le dire, avec un ancien J. être en fureur
en chantant l’Hyniénée. .
Pour les images indécentes ou qui choquent la
modeftie, quiconque en emploie de ce caractère, ne
pèche pas moins contre les règles de l ’Art en général
que contre lès vrais interets.,. En effet fi un
difeours n’a de véritable beauté qu’autant qu’ii exprime
une choie qui fait plaifir à voir ou a entendre ,
ou bienqu’il préfente un fens honnête, commeTheo-
phrafte le fhutient & comme la raifon même le
perfiiade ; que doit-on penlfer de ces fortes d’images i
& le les permettre dans une matière chafte par elle-
même , n’eft-ce pas en quelque manière imiter
Auionne, qui, pour avoir travelli en poete fans
pudeur le plus fage de tous les poètes , n’a pu trou-
ver encore depuis tant de fieclesun feul apolog^ifte*
Bien différent de cet écrivain , Théocrite n’offre
.à l’efprit que des images agréables; il ne repre-
fente que des objets gracieux, & avec des idées 8ç
Bb.b bb