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dreiïè au Corps, & veut être faVorïïe. Ou peut »
être l’un & l’autre fans aimer véritablement, &
uniquement par des vues d’intérêt. Une laide fille
qui eft riche , eft fujette à trouver de tels Amants ;
& une vieille femme qui paye, peut avoir de pareils
Galants. .
Un homme fo fait Amant d’une perfônne qui
lui plaît ; il devient le Galant de celle à qui il
plaît : dans le premier cas , il peut n’avoir aucun
retour ; dans le fécond, il en a toujours.
Les Amants font honneur aux dames, & flattent
leur amour propre^ elles ne les fouffrent fouvent que
par vanité, & demandent en eux de la confiance.
Les Galants leur font plaifîr, & fourniffent matière
à la chronique fcandaleufo ; elles fo les donnent
par choix , & veulent qu’ils fôientdifcrets.^
Une fille bien élevée ne doit jamais fôuffrir
auprès d’elle d’autres Am an ts que ceux que lès
parents agréent. Une femme adroite & prudente
fait mettre fôn Galant au rang des amis de fbn
mari. ( U a b b é G ir a r d . ) ?
(N.) AMASSER, ACCUMULER. Syn.
On commence par amajfer ; enfuite on accumule
: c’efi pourquoi on dit , AmaJJer du bien ,
Accumuler des richefîès.
Autant qu’il eft fage 8Y amajferpour jouir, autant
y a-t-il de fottife à fe priver de la jouïflance pour
accumuler. ( J J abbé G ir a r d . )
* AMATEUR , f. m. ( Be lle s -L e ttr e s .) Ce feroit
«ne cla{Te d’hommes précieufe aux Arts & aux
Lettres , que celle q u i, par un goût naturel, plus
ou moins éclairé , mais fîncère & jufte, jouiroit
de leurs produirions, s’intérefleroit à leur gloire,
& , félon fês divers moyens, encourageroit leurs
travaux. C’eft réellement ainfi qu’un petit nombre
d’ames fenfibles aiment les Lettres & les^ Arts ,
fans que la vanité s’en mêle. Heureux l’écrivain
qui peut avoir de pareils Amateurs pour^ confeils
& pour juges ï Non feulement ils l’éclairent fur
les fautes qui lui échappent : mais , comme .il
3es a fans ceflë préforits devant les yeux en écrivant,
il en devient plus difficile & plus févère envers
lui-même ; & le preffentiment de leur goût règle
& détermine le fien. Defpreaux avoit pour amis
le prince de Conti, le marquis de Trefmes1, Bofo
fù e t, Bourdaloue, Arnauld , l’abbé de . Chateau-
neuf, le préfîdent de Lamoignon , ; d’Agueffeau ,
depuis chancelier : ils écoient pour lui, cequ’étoient
pour Térence Lélius & Scipion, Auffi Térence &
Defpréaux font-ils les écrivains les moins négligés
de leurs fiècles. Le-goût de Defpréaux , formé à
cette é co le, put former celui de Racine; & en lui
apprenant à écrire pour le petit nombre , il lui
apprit à écrire pour la poftérité.
Mais la foule des Amateurs eft compofée d’une
efpèee d’hommes q u i, n’ayant par eux-mêmes ni
qualités ni talents qui les diftinguent, & voulant
être diftin-gués, s’attachent aux Arts & aux Let-
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tf«5 * Comme la gui au chêne, au le lierre à
l’ormeau.
Cette efpèee parafîte n’apporte dans ce com-<
merce que de la vanité, de fr'îfTes lumières, des
prétentions ridicules , & des manoeuvres fouvent ™
déshonorantes , toujours défolantes pour les Lettres
& pour les Arts. Juges fûperficiels & tranchants %
leur manie eft de protéger : & comme les grands
talents font communément accompagnés d’une certaine
élévation d’ame, qui. répugne aux prote&ions
vulgaires, qui les repouflè, ou du moins les né-i
gligé ; ces faux Amateurs ne trouvent, que d«ns
l’extrême médiocrité , la complaifànce , l’adulation ,
la bafleffe qui leur convient : ils protègent donc ce
qui fo préfonte , n’ayant pas à chôifîr ; & de là les
brigues, les cabales, pour élever leurs efclaves ai»
delïùs des hommes libres, qu’ils déteftent parce
qu’ils en font méprifés. Ils ne peuvent leur ôter
la gloire ; mais ils n’ont que trop fouvent aflez de
crédit, pour leur dérober tous les autres prix du
talent, * .
C’eft encore pis , lorfqu’ils s’attachent à un
homme de génie, pour fo donner une exiftence 8c
un reflet de considération : ils fo conftituent fos
valets les plus bafîèment dévoués ; ils fo paftionnent
pour lui d’un fanatifme de commande, & d’un en-
thoufîafme froidement outré ; ils couvrent de ce zèle
toutes leurs haines pour les autres talents ; ils fom-
blent les trainër aux pieds de leur idole ; 8c en
feignant d’èlever un grand homme, de qui leur
culte eft méprifo, ils croient mettre au deffous d’eux
tout ce qui eft au deffous de lui. Ils fo permettent
pour lu i , à fon infii & à fo honte, des manèges
dont il n’a pas befoin 8c dont il rougiroit ; ils
croient devoir étouffer des rivaux qu’il n’a pas
à craindre ; ils lui attribuent la baffeffè de leurs
penfées & de leurs fentiments; font pour lui envieux
, fourbes, méchants & lâches ; le rendent lui-
même fùfped d’être l’inftigateur & le complice de
leurs pratiques odieufos ; & le déshonorent, s’il efl
poffible, en affe&ant de le forvir.
A l’égard des Lettres, Y Amateur s’appelle plus
communément Connoijfeur ,• & malheur au fiècle
oh cette engeance abonde. Ce font les. fléaux des
talents & du goût ; ils veulent avoir tout prévu ,
tout dirigé , tout infpiré , tout v u , revu, & corrigé.
Ennemis irréconciliables de qui néglige leurs avis ,
& tyrans de qui 1 es confulte, leurs décifions font
des lois, qu’ils font un crime à l’écrivain de n’avoin
pas religieufoment obforvees. Tous les fiiccès font
dûs à leurs confoils, & tous les revers font la peine
de n’avoir pas voulu les croire : mais en les écoutant
, ôn n’en eft pas plus sûr de fo les rendre favorables
; & ce qu’ils ont approuvé la veille avec
le plus d’enthoufiafme , ils le condamnent le lendemain
, fi le Public ne le goûte pas. Le Public
a raifoii, ils ont penfé de même, ils ont prédit
que cela déplâiroit, on n3a pas voulu les entendre.
Les plus adroits, lorfqu’ils font confoltes ,
gardent fur les endroits critiqués un filence myfo
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térieux, ou prononcent comme les oracles , en
fe ménageant, par l ’ambiguïté de leurs réponfos,
les deux envers d’une opinion qu’ils lailfent flotter
jufqu’à l'évènement, afin de ne pas fo compromettre.
En fait de Mufique, de Peinture , 6v. Y Amateur
ne s’érige qu’en juge du talent, & ce n’eft la qu’un
demi-mal ; mais , en fait de Littérature , il croit
rivalifor avec le talent même, & en eft jaloux en
lècret. Il n’eft pas poffible de fo croire peintre,
mufîeien , ftatuaire, fi on ne l’eft pas : mais pourquoi
Y Amateur ne foroit-il pas bel-efprit autant
& plus que l ’écrivain \ S’il ne produit rien, oe
n’eft pas le talent, c’eft la volonté qui lui manque
; il auroit fait au moins ce qu’il a infpiré, s il
eût voulu s’en donner la peine.
De là ce fontiment d’envie contre les talents qui
s’élèvent, & cette haine des vivants, qui lui fait
exalter les morts. Q u i, plus que moi, vous dira-
t - i l , eft paffionné po.ur les Lettres ? Voyez avec
quelle chaleur je me tranfporte d’admiration pour
ces hommes de génie, qui, malheureufoment, ne
font plus ! Ils ne font plus : mais s’ils etoient encore
, ils auroient à fos yeux le tort de s’élever
fous lu i, de briller devant lu i, de l’offufquer , de
lui faire fontir une fiipériorité humiliante: autant
de crimes pour' la vanité.
Ainfi, les préténdus amis des Lettres ne font rien
moins, le plus fouvent, que les amis de ceux qui
les cultivent. Les vrais amis des talents font ceux,
qui les jugent par fontiment & fons prétendre les
juger ; qui ne demandent qu’à jouir, -qu’à être
amufos , éclairés, ou agréablement émus ; qui,
fons connoître l ’homme , s’en tiennent à l’ouvrage ,
en profitent s’ il eft utile, s’en amufont s’il eft
amufont., & n’ont point la cruelle & ridicule vanité
d’être jaloux du bien qu’il leur fa it, ou envieux
du plaifir qu’il leur caufo.
Une façon , pour les gens de Lettres , dé ménager
l’amour propre de Y Amateur à prétentions,
foroit de fo mettre pour lui au rang des morts ,
je veux dire , de vivre obfours & retirés, en forte
que, dans le monde, il ne rencontrât que leurs livres
, & qu’il n’eut jamais avec leur perfônne ni
débats d’opinions , ni affàut de raifôn , de goût » &
de lumières, ni aucune efpèee de rivalité à fou-
tenir : alors fo vanité n’ayant rien à démêler avec
eux face à face , il leur pardonneroit peut-être
une exiftence idéale qui ne lui feroit plus | d’ombrage.
Mais s’il les trouve dans le monde ; s’il les y
Voit eftimés , applaudis ; s’ils lui enlèvent l ’attention
; fi leur efprit a quelquefois le malheur d é-
clipfor le fien ; s’ils ont fur tout un caraôère qui
ne fo plie pas aflez aux complaifonces, aux déférences
, aux adulations qu’il exige : ils font
perdus dans fon opinion ; ils peuvent compter fur
fo haine ; il les dénonce comme des hommes d’une
préfomption, d’un orgueil, d’une arrogance in-,
fopportable , comme des hommes qu’on ne peut
trop rabaifTer & humilier. I l les a foupçonnés de
croire valoir mieux que lui : c’eft allez ; il affir-
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-niera qu’ils n’eftiment rien tant qu’eux-mêmes ;
que, du coté des rangs & des conditions , ils n’ad-,
mettent à leur égard nulle efpèee d’inégalité , 8c
que, du côté des talents, ils penlent avoir fur-
paffé tout ce qu’il y a de plus illuftre. Sur ces
deux points, il leur attribue toutes les.fotti es qu’il
imagine, & il a bien de quoi en être libéral.
Je ne feroîs donc pas fiirpris que, dans un fiècle
où les gens de Lettres fo foroient trop répandus ,
& où cette efpèee d’envieux focrets, & honteux de
l’être, fo foroit trop multipliée , ce fût la principale
caufo de l’animofité qu’un certain monde auroit
conçue contre les talents littéraires, & de la
protedion clandeftine & lourde que l’on accorde-
roit à leurs plus infolents & plus vilf détradeurs.}
' ( M . M a rm q n te l . )
* AMBAGES; f. f. pl. Amas confus de paroles
obfoures & entortillées, dont on a peine a demeler
le fons ; long circuit, verbiage ennuyeux, qui,
loin d’éclaircir ce dont il s’agît, fomble au contraire-
redouter la clarté & ne vouloir au plus être en-s
! tendu qu’à demi.
Il y a des gens aflez fôts pour fo faire même
i un mérite de ne parier jamais fons .de longues
: Ambages. Eh î fi vous craignez d’être entendu ,
; taifez-vous ; rien de plus fur pour vous, rien de
plus agréable pour nous, que le parti que vous
propofo Scévole de Sainte Marthe :
Quid juvat obfeuris tnvolvereJcriptcj. latebris ?
J>lepâteant animi fenfa, tacere potes.
Si ce que vous avez à dire eft /rai , jufte , raï-
fonnable ; expliquez-vous nettement & fons détour:
fi vous ne fovez pas mieux dire, je vous plains ,
mais tâchez de vous inftruire. ( M . B eauzée.)
(N.) AMBASSADEUR, ENVOY É , DÉPUTÉ.
Synonymes. .
Les Ambaffhdèurs & les Envoyés parlent &
ariflent au nom de leurs Souverains : avec cette
différence, que les premiers ont une qualité repré-
fontative attachée à leur titre; & que les féconds
ne paroifTent que comme fimples miniftres autorifës,
& non repréfontants. Les Députés peuvent être
adreffés à des Souverains; mais il s : n’ont de pouvoirs
& ne parlent qu’au n;om de quelque fociété,
fubalterne ou; corps particulier. ,
Les fondions d’Ambafadeur, & d’Envoyé ,
tiennent au miniflère : & celles de Député font
dans l ’ordre d’agent. ., . .
L a magnificence, convient a _ 1 Amba^adeur.
L ’habileté dans la négociation fait le nterite de
l’Envoyé. Le talent de la parole ftmble être le
partage du Député. ( Vabbé Gir a rd . )
AMBIGU, adj. Gramnt. Ce mot vient de ambo .
deux , & de ago, pouflèr , mener. Un terme
ambigu , préfente à l ’efptit deux feus, différents.
l.Ées réponfes des anciens oracles, étoient toujours