
demande ( Gramm. fr . ch. IV . art. jv . ) fi un eft
tpuiours Article-. » Non , répond-il; il efi nom
» dénombré, quand il.exprime une unité deter-
39 minée , comme quand on dit, i l ny a quuN
i> Dieu ; mais il eil A r ticle , quand i l n exprime
» qu’une unitq vague, comme Îî je dis, UN fujet
w doit obéir à fon prince. »
J’avoue que je ne conçois pas comment pn ne
marqué pas toujours u n , ni comment il peut lignifier
quelquefois une unité déterminée & quelquefois
une unicé^ague. Il me femble qu’un, étant
adjedif, exprime toujours une unité^ d’une nature
vague, & qui n’eft jamais déterminée^ que par le
nom appellaùf auquel on le joint ;& qu’étant Article
numéral, il exprime l’unité jufte avec exclusion
de toute autre quotité : & ces deux points font
également vrais dans les' deux exemples de M.
ïfefiaut. Je fais bien que Y Article numéral u n ,
ainfi que tous/les autres Articles de même efpèce,
ne détermine les individus qu avec la precifion numérique
, & les laiffe indéterminés à tout autre
égard: u n homme, par exemple, en "toute occasion
eftun- feul homme, & cette phrafe exclut l’idée
de toute autre qualité ; mais cet homme unique n’y
eft déterminé à être ni grand, m petit, ni foible,
ni vigoureux , ni Savant, ni ignorant, ni libre,
ni efclave , ni européen, ni asiatique , ni Pierre ,
ni Paul. Cependant on ne peut pas dire que les
Articles numéraux foient indéfinis: ils font definis
par l’indication précife de la quotité , qui eft l ’unique
objet 4e leur Signification.. ) ( M\ B eauzée. )
CN.) A R T ICU LA T IO N , f. f. Ce terme eft
propre à l’Anatomie , & il Signifie jointure ou connexion
de deux .os.”; littéralement c’eft connexion
des petits membres ; Articulas eft un diminutif
d ’Arcus ( membre). On emploie ce terme figurée
ment dans le langage grammatical; & il y Signifie,
comme on le verra par les détails où l’on va entrer
, jointure ou connexion des membres élémentaires
de la parole ou des voix. Voye\ V o ix .
On a coutume de dire que les Articulations
font des modifications de la voix, produites par
Je mouvement Subit & inftantané de quelqu’une des
parties mobiles de l’organe. Mais cette notion eft
fi vague qu’il eft indiSpenSable de la développer
davantage , afin d’y mettre, s’il eft poflible, plus
de précifion : on verra'd’ailleurs , par le développement
même, qu’elle n’eft pas allez générale pour
convenir à toutes les eSpèees,
Dans une thèfe Soutenue aux Ecoles de Mede-
cinedeParis, le 13 Janvier T7?7, ( A n , utcceteris
animantibus, ita & homini fua vox peculiaris ? )
M- Savary prétend que l’interruption momentanée
du fon eSt ce qui conftitue l’elfence des Confonnes
( c’eft à dire , des Articulations ) ; car il ne faut pas
confondre le Signe avec la chofe Signifiée, comme
Je fait l’auteur d’après le langage ordinaire. )
J’avoue que l’interception du fon caradériSè en
aqçlsjue -forte toutes les Articulations unanimement
reconnues ; parce qu’elles font toutes produite*
par des mouvements qui embarraSïènt en effet i’émifo
Sion de la voix. Si les parties mobiles de l’organe
reftoient dans l ’état où les met d’abord ce mouvement
; ou l’on n’entendroit rien, ou l’on n’entenaroit
qu’un Sifflement cauSé par i’échapement contraint de
l’air fonore hors de la bouche. Pour s’en aSïurer ,
on n’a qu’à réunir les lèvres comme pour prononcer,
un p , ou approcher la lèvre inférieure des dents
Supérieures comme pour prononcer un v, & tacher
de produire le fon a Sans changer cette position des
lèvres: dans le premier cas, on n’entendra rien jufqu’à
ce que les lèvres fe féparent ; & dans le Second,
on n’aura-qu’un Sifflement informe juSqu’à ce que
la lèvre inférieure lailie un cours libre à l'air fonore :
preuve certaine , que le mouvement de la partie
organique mobile s’oppoSè d’abord à l’émiflion libre
de la voix & en intercepte le fon.
Voilà donc deux choies à distinguer dans VArticulation
; le mouvement inftantané de quelque
partie mobile de l’organe , & l’interception momentanée
de la voix : laquelle de ces deux choies co-n-P
titue VArticulation que l’on fait entendre en prononçant
une Confonne l Ce n’eft aisurément ni l’une
ni l’autre : le mouvement en foi n’eft point du reliort
‘ de fouie ; & f interception de la voix, qui eft un
1 véritable Silence, en eft .encore moins.. Cependant
l’oreille distingue tr.ès-fonfiblement les modifications
de la voix représentées par les ConSpnnes ; autrement,
quelle différence trouveroit elle entre les
mots vanité, badiné , fatigué, ranimé, avifé,
qui fe réduisent également aux trois voix Simples
a i - é , quand on en fupprlme les Confonnes?
La vérité eft que le mouvement des parties mobiles
de l’organe eft, dans le cas dont il s’agit, la
çaufo phyfîque de ce qui fait l’eSTence de y Articulation
; que l’interception de la voix eft l’effet immédiat
de cette caufe phySîque ; mais que cet effet n’eft
encore qu’un moyen pour amener y Articulation
mçme : & voici en quoi elle conlifte. L ’air eft un
fluide, qui, dans la produétion de la voix%s’échape
par le canal de la bouche : il lui arrive alors, comme
à tous les fluides en pareille circonstance, que, fous
l’impreffion de la même force, fes efforts pour s’é-
chaper & Sa viteSie en s’échapant croiffent en raifon
des obstacles qû’on lui oppofè. Or il eft très-naturel
que l’oreille distingue les différents degrés de la vi-
teffe & de faétion d’un fluide qui agit Sur elle immédiatement
; & que, par la nature des diverSès im-
preffions qu elle en reçoit, elle démêle les diverfes parties
organiques dont le mouvement les produit, ainfi
que la proportion de la force que ces parties organiques
ôppofènt à l’émiSïion de la voix. Ces diverSès
aétions instantanées, & variées comme les caufes qui
les produisent, font de véritables explofions , des
émiffions faites avec force & avec éclat.
On peut donc dire que les Articulations dont il
s’agit, font les différentes fortes d’explofions que reçoivent
les voix par le mouvement Subit & inftantané
des différentes parties mobiles de l ’organe,
Or
Or Texplofîon, étant principalement l ’effet d’une
augmentation extraordinaire de viteffe , peut venir
-d’une autre caufo que de l’effort du fluide contre un
-obftacle qui tendroit à en empêcher l’émiffion ; elle
:peut être l’effet de l’augmentation même du fluide ,
•ou de la force expulfive qui le met en mouvement.
De là vient la néeeffité de reconnoître une autre
forte d’explofion , qui ré Suite d’une plus grande af-
.fluence de l’air à la Sortie de la trachée-artère ; explosion
à laquelle on donne communément le nom
d'Afpiration , & qui eft , comme les autres explo-
•fions, une véritable Articulation.
Voilà donc deux eSpèees d’'Articulations^ différenciées
par les caufos phyfîques qui les produifont ;
l ’une comprend des Articulations que l’on peut
nommer organiques, l’autre renferme l ’Articulation ■.
-afpirée. " : >v -'K1 ‘ ,j
Section I. Les Articulations organiques Sont
-celles qui naiiîènt de l ’interception du fon , occasionnée
par le mouvement Subit & .inftantané de quelque
partie mobile de l’organe : & on peut les confidérer
-fous quatre-aSpeéfs différents , que nous parcourrons
•an quatre paragraphes.
ÿ .I . Si-on confîdère les Articulations relative- |
ment à la .partie organique dont le mouvement leur
' donne naifïànce , elles Sont labiales ou linguales. ^
I. Les Articulations labiales font celles qui naiP
lent du mouvement des lèvres ; telles font celles
que nous représentons par m, b, p , v , ƒ , & qu on
entend devant a dans les Syllabes ma, ba ,p a , va x
fa . Ces Articulations labiales font les premières
dans l’ordre naturel ; elles dépendent de là partie organique
la plus extérieure, la plus variée dans Ses
mouvements , & la première en confequence dont
les enfants peuvent le plus aifement faire un uSàge
fixe & diftinét.
M. Thiébault, dans le Second des Mémoires qu’il
a lus à l’Académie royale des Sciences & Belles-Lettres
de PruSTe, pour rendre compte à cette Savante
Compagnie de ma Grammaire générale ( Vol. de
in \ ,im p r .à Berlin en 1773 ) ,obCerve(pag. 466.)
que les lèvres ne font point une partie organique libre
dans .tous- les climats , puisqu’il eft des peuples qui
ne peuvent point abfolument prononcer \es Articulations
labiales., tels que les hotentots.
Ils neffes prononcent point, je veux le croire. Un
hotentot adulte ne viendroit peut-être pas a bout de
les prononcer, je veux bien le croire encore ; parce
que fhabitude qu’il a contraêfée de laiSIer Ses lèvres
dans une forte d’inertie à cet égard, eSl devenue
pour lui un obftacle véritablement invincible c’eft
ainfi qu’un françols adulte ne parvient-que difficilement,
ou ne parvient même jamais, à bien prononcer
le ch des allemands. Mais un enfant né en France
prononcera ce ch àuSïi aifément qu’un allemand, &
un enfant hotentot prononcera les Articulations labiales
au (fi aifément que nous , fi leurs oreilles font
frappées Souvent & de bonne heure de ces mêmes
fons. La raifon en eft que nous ne parlons que par
imitation ; e’eft par imitation que l’on parle Japon
Gramm. e t L ittèrat. tome I.
en Laponie, françois en France, péruvien au Pérou »
chinois en Chine, &c.
•Ce principe d’imitation une fois pofé , partout ou
les. Articulations labiales font ufitées, il eft confiant
qu’elles paroiffent les plus aifées à imiter, puifqu’elles
font en effet les premières que les enfants balbutient«
De là vient peut-être , par Onomatopée ( voyei ce
mot ) , le mot même de Balbutier, compofédedeux
bb qui font deux labiales, d’un l qui refulte affez
naturellement d’un mouvemeut vague de la langue
dans Ses premiers eSïâis, & d’un Sifflement qui fe
préfènte Sans peine dans ces premières tentatives.
Mais de là vient à coup sûr , que les idées de me/e
& de père font rendues dans la plupart des langues
.par des mots ou domine quelqu’une des Articulations
labiales : dans la langue égyptienne ■ ap ou
1 apci ( père ) , am ou ama ( mère .), ou meme tous
j .deux Synonymes entre eux & du latin parens, qui
Signifie indillinêfement père & mère ; ammis en langue
Syrienne eft dans le meme cas : pater en grec &
en latin ( père ) ; pappos- en grec ( aïeul ) ; mecer^ en
grec, mater en latin , madré en italien & en eipa-
gn o l, mère en françois, mut ter en allemand, ère.
« L ’Égypte, dit M. de BroSIès dans là JÂécha-
» nique des langues ( eh. v i . §■ 73. ) •> donnoit à
» Dieu le nom de Pèle ; & fon Dieu étoit le foleil
33 qu’elle nommoit Apis ou Ammon : cet aftre eft
» adoré de prefque tous les peuples orientaux fous
>■> ce nom de A m , -comme père de la nature & de
» toute produâion, qu’ils ont prononce, Suivant les
>5 différents dialectes , Ammon, Oman , O min ,
» Iman , &e. De là en général Iman, chez les
» orientaux, fignifie Dieu , ÊtreJacre. Ar-iman ,
» chez les anciens perSès-, c’eft Deus forcis. Ce mot
d Iman fe retrouve encore dans le dialeéfe turc pour
33 Sacerdos, comme chez nous on trouve dans le
33 même Sens le mot Abbé : tous deux, dans leuE
„ fons primordial, font Synonymes de Père w.
M. de la Condamine a retrouvé les mots papa ,
marna , dans les langues barbares de l’Amérique, Se
avec les mêmes Significations que parmi_ nous : ce
qui ne peut venir que de ce que les premiers objets
à nommer pour les enfants , font leurs parents, qui
font pour eux les reprefontants & les ministres de la
Providence, & de qui ils attendent & obtiennent
tout ce qui leur eft néceffaire dans l’état de foiblefte
& d/impuiSTance où -ils font dans leurs premières
années.
II. Les Articulations linguales font celles qui
naiffent du mouvement de la langue : telles font celles
que nous représentons par n , d , t , g yq , / , r , $ *
j- , y , ch , 8t qu’on entend devant a dans les Syllabes
na, k i , \ a ,g a , qua, la , ra, \a , f a , f a , cha.
Partout, & Spécialement dans notre idiome , les
Articulations linguales font les plus nombreuses ,
parce que la langue , extrêmement variée & fouple
dans Ses mouvements , eft en confequence la principale
des parties organiques néceSTaires à la production
de la parole. De là vient meme que le nom de
cette partie organique a été donné par bien des peun