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pies à la totalité'des tiïàges reçus dans toute une nation
pour l’expreffion des penfées par la parole ; &
que l’on dit, langue, hébraïque , langue greqite ,
langue latine, langue françoije, langue allemande,
langue primitive , langue dérivée, langue ancienne,
langue moderne , langue morte, langue vivante,
& c . ' ■ H • g
II. Si on confidère les ^ niculations organiques
relativement à l ’iflue par où l’explofîon s’opère ou
fomble s’opérer, elles font ou nafales ou orales.
I. Les Articulations nafales font celles qui font
refluer par le nez , d’une manière fonfible, une partie
de l’air fonore dans l’inftant de l ’interception,
tellement que lors de l ’explofîon il n’en fort qu une
partie par l’ouverture de la bouche. Chacune^ des
deux parties mobiles de l’organe ne produit qu une
foule Articulation nafale, du moins dans notre
langue : ainfî, nous avons une labiale nafale , qui eft m ; & une linguale nafale, qui eft n.
L ’abbé de Dangeau ( Opufc. fur la lang.fr. , p.
54. )-, dit que m n’eft autre chofo qu’un b paffe par
le nez , & que n n’eft de même qu’un d pâlie par le
nez. L a preuve qu’il en donne eft remarquable.
« Quand vous prononcez m , dit-il, comme dans
» malice, vous frapez la lèvre d’en haut avec celle
» d’en bas ,- tout de même que lorlque vous pro-
» noncez un b dans« balance ; mais il fo fait outre
» cela un petit mouvement dans le nez. Je dis la
» même chofo de Yn : pour la prononcer dans le mot
» négoce , la langue fait le même mouvement que
» pour faire un d dans décrire j mais il fo fait auflï
os un petit mouvement dans le nez. Il n’y à pas long
» temps que j’entendis parler un homme qui etoit
» fort enrhumé ; le rhume lui avoit tellement em-
» barrafle le nez * il étoit fi fort enchifrené, qu’il
sj ne pouvoit prononcer les n. Je remarquai que,
» pour dire j e ne faurois, il difoit j e de faurois.
» Auffi tôt je dis en moi-même ,. que, fi j’avois bien
» rencontré , & que Ym fut un b pafle par le nez,
» la même difficulté que l’homme enrhumé trou-
» voit à prononcer Yn, il la trouveroit à prononcer
» Ym ; & que, comme il avoit changé Yn en d , il
» changeroit Ym en b : 8c effectivement un moment
» après, au lieu de dire je ne faurois manger de
» mouton, il dit je de faurois banger de bouton
Il eft donc évident que le mouvement qui fo fait
dans le nez à l’occafîon dé Ym & de l ’n, vient du
païïàge de l’air fonore qui y reflue fonfîblement par
une mite de l’interception ; & que, quand le canal
du nez eft obftrué, comme dans l’enchifrenement,
le reflux de l’air ne peut plus avoir lieu , & l’on ne
peut plus prononcer d'Articulation nafale. On dit
donc précifoment le contraire de ce qui eft, quand
on dit d’une perfonne enchifrenée qu 'elle parle du
ne\; car on ne l’entend guèrès que de ceux qui ont
le canal du nez bouché de manière que l’air fonore
n’y puifle plus pafTer : il eft pourtant vrai que l’on
s’apperçoit en ce cas de l’influence du^ nez for la parole,
qui fomblë a lo r s être répercutée intérieurement
par les cavités de cet organe ; & c’eft ce qui a. auto-
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rîfé d’abord & qui peut juftifier ou du moins excufor
l ’antiphrafo dont il s’agit.
Au refte, M. Thiéoault a très-bien obforvé ( loc.
cit. ) que « ce n’eft pas s’énoncer avec allez de pré-
» cifion ,‘ que de dire 1VI ejl un B pajjé par le ne\ ,
m 6 N m/i D pajfépar le ne\ : car fi cela étoit, on
3> pourroit prononcer ces deux Articulations fans
as ouvrir la bouche ; ce qui efttimpoffible. m. Gette
exprelïion de l’abbé Dangeau veut foulement dire ,
que la dilpofîtion de l’organe eft la-même pour m
& pour b , ainfi que pour n & pour d ; mais que l’air
fonore, dont l’émillion fo fait entièrement par la
bouche dans la production de b & de d y reflue en
partie par le nez dans la production de*m ou de n :
& c’eft la foule chofo qu’indique ma définition des
Articulations nafales. J’obforverai, dans la. raifon
alléguée par l ’académicien de PrulTe , une preuve
qui ne prouve rien : « On pourroit, dit-il, pronon-
03 cer ces deux Articulations fans ouvrir la bou-
3j ch e» . Quand, par impoffible, la chofo foroit
abfolument comme fomble le dire l’académicien
françois, on fie pourroit pas pour cela prononcer
les deux Articulations nafales fans ouvrir la bouche
; c’eft qu’elles font des explofions de voix, qu’on
ne peut confëquemment en prononcer aucune fans
une vo ix , que toute voix eft une émiffion de l’air
fonore par le canal de la bouche, & que cette émifo
fion foppofo la bouche ouverte.
« Je fuis fort porté à croire, dit encore M. Thié-
» bault ( ibid. ) , que pour toutes les Articulations
» que M. Beauzée nomme orales, l’air, avant i’ex-
» plofion, ne trouve de pafïàge libre ni par la bou-
» che ni par le nez ; & que' ces deux paflàges lui
» font ouverts au moment de l’explofîon, félon la
» nature de la voix fimple qui fuit : au lieu que
» pour les deux Articulations M , N , que M.
» Beauzée appelle nafales, l’air, avant l’explofion,
» ne trouve bouché que l’un des deux paflàges ;
» celui de la bouche. En ce cas M. Beauzee a tort
» de leur donner le nom de nafales ; ce font pre-
» citêment les deux foules Articulations auxquelles
» ce nom convient le moins , files Articulations
» doivent tirer leur dénomination de l’organe qui
» intercepte l’air avant l’explofion ».
Je crois bien fincèrement , & mon fÿftéme des
Articulations en eft la preuve, que les lèvres & la
langue font les foules parties de l’organe qui foient
mobiles à notre gré, du moins d’une manière apprêt
ciable ; que ce font les feules qui puifTent à notre gré
intercepter l’air fonore à fon pafïàge, & lui procurer
ainfi différentes efpèces d’explofîon ; & qu’en
conféquence Us Articulations doivent tirer leur
de'nominàtion de Vorgane qui intercepte Vcvir avant
Vexplofion. on doit aiftinguer , comme j’ai fait, les
Articulations d’après l’une ou l’autre de ces deux
parties mobiles., & les nommer labiales ou linguales
, folon que l’air fonore eft intercepté par les lèvres
ou par la langue. Mais ce premier point de vue
empêche-1-il qu’on n’envifàge auffi les Articulations
i relativement à l’iflùe par ou l’explofion s’opère ou
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fêmhXe s’opérer ? Dans ce cas, n’etl- il pas raisonnable r
aùlli de leur donner une dénomination diftindtve pnfe
de celle de l’iffue ! Or M. Thiébault vient d avouer
que, peur m & n, l’air, avant l’explofion, trouvelibre le
pafliee du nez ; & l’expérience de 1 abbe de Dangeau
démontre que l’explofion même fe fait du moins en
partie par ce canal, puifquequand il eft obftruc ,
,il eft impoffible de prononcer m m ni n. Je n. ai donc
pas fi grand tort d’appeler nafales ces deux A r ticu la
t io n s , puique l’explofion s’en opéré par le nez.
M. Thiébault fetoit plus volontiers 1 échangé des
dénominations, & donneroit celle de
Articu la,ion s dont l’explofion fe fait en entter par
l'ouverture de la bouche ; parce qu il lîppofe qu |
lors le canal du nez eft bouche pour intercepte.: 1 a r
fonore. Il me permettra de n en rien croire. Hors le
cas de i'enchifrenement, le canal du nez eft tou
jours ouvert ; mais le méchanifine de_ la parole, que
je ne me flatte pas de pouvoir expliquer dans tous
fes points , ne répercute pas toujours 1 atr fonore par
Ce conduit : cela n’arrive que dans ta produ&on de
m & de n; & c’eft une raifon mftante de les appeler
n a fa les , d’autant que, c’eft une dénomination um-
verfellement reçue. L ’application que fyi. le preii-
dent de BrofTes en a faite à XArticulation. , ne
paroit pas avoir fait fortune ; & j’avoue que je n ai
jamais pu concevoir que ce foit, comme il le dit,
un coulé rude le long des narines. ■ M
II. Les Articu lations orales font celles dont 1 ex-
- plofion fe fait en entier par l’ouverture de la bouche
fans que le méchanifine de la prononciation
renvoyé par le nez aucune partie fenfible de 1 air lo-
nore. Si l’on excepte les deux Articulations nafales
m 8t n toutes les autres Articulations organiques
font orales, parce qu’il n’y a point une trotfieme
§. III. Les Articulations orales fè foudivifènt en
trois claffes, relativement à la maniéré dont le pre-
lente l’obftacle de la partie mobile de l’organe ; & en
conféquence elles font, ou muettes , ou Jtfflantes,
ou liquides. !. . ,, „
I. Les Articulations miles miteriez lpnt celles
qui naiffent d’une interception totale de 1 air fonore ;
de manière que , fi la partie organique qui eft mi.e
en mouvement reftoit dans l’état ou ce mouvement
la met d’abord, il ne pourroit s’echaper aucune
partie de l’air fonore , & l’on ne pourroit nen taire
entendre de diftinâ:. .
Les deux Articulations labiales b , /?, qui exigent
que les deux lèvres fo rapprochent 1 une e
Vautre, font muettes par cette même raifon; comme
on peut s’en, convaincre par l’eïïai que j ai propote
dès le commencement en recherchant 1 origine des
Articulations. Il en eft de même des Articulations
linguales «Z, t , g , q- ..
II. Les Articulations orales fifflantes font celles
qui naiffent d’une interception imparfaite -, de manière
que , quand la partie organique qui eft mite en
1 1 m J „ „ „ l ’ oM t irm ilVPm Pn t
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fonore pour faire entendre Y Articulation même dont
il s’a g it, & même pour la faite durer long temps
comme une forte de nfïlementé g ,,
Les deux Articulations labiales v , ƒ , qui ne de^
pendent que du mouvement de la lèvre inférieure
contre les dents fupérieures , font fixantes par cela
même, à caufe du païfage qui refte a 1 air fonore
dans les coins de la bouche , ou la levre inferieure
ne peut pas toucher les dents fuperieures. Il en eu
de meme des Articulations linguales i , s ,/ j chy
à caufe des fituations particulières que prend la langue
par le mouvement qui les produit, & qui seront
expliquées dans un moment. _ / .
Au refte, on avoit jufqu’ici affigne , aux Articulations
muettes & aux fifflantes, ainfi qu’aux çon-
fonnes qui les repréfentent, une notion tout autre
que celle que j’en donne ici. La plupart des grammairiens
appellent muettes , toutes celles dont le ,
nom alphabétique commence par une conforme ,
comme h , c , 4 , g , k ,p , ? , t , I , qu’on nomme
t é ce, dé, g é , ka ,p é , quu, t é , \ède ; & ils appel-
lent demi-voyelles , toutes les, autres dont le nom.
commence par une voyelle, comme / , / ,m , n , r ,
j x , qu’on nomme , elle , émm.e, enne , ene ,
efje, ixe. Je dirai ailleurs ce qu’il faut penfèr de
cette diftinflion.
III. Les Articulations orales liquides font celles
qui naiffent d’un mouvement de la langue tout différent
de ceux qui produifènt les Articulations
muettes & les fifflantes ; c’eft un mouvemem libre ,
indépendant de tout point d’appui dans 1 inteneur d«
la bouche , où la langue alors fomble èn quelque
' forte nager. C’eft peut-être de là que vient a ces
Articulations le nom de liquides : ou peut etre
vient-il de ce quelles s’allient fi bien avec d autres
Articulations, qu’elles ne paroiffent faire enfemble
qu’une feule explofion momentanée de la même
voix ; de même que deux liqueurs s’incorporent allez
bien pour n’en plus faire qu’une feule, qui n eft plus
ni l’une ni l’autre, mais qui eft le réfultat du mélange
des deux. I _ .
Les deux Articulations linguales/, r , font les
deux feules qui , conformément au langage reçu
parmi nous & à l’idée que j’en viens de donner,
lôîent véritablement liquides. La première , 1 , de
pend d’un feul coup de la langue vers la pâme du
palais qui avoiline les dette : la _fécondé r , eft
l'effet d’un frémouffement v if & réitéré de la langue
dans toute là longueur. Je dis ddns toute fa longueur,
& cela fe vérifie par la manière dont prononcent
certaines gens qui ont le filet de la langue
beaucoup trop court ; ils font entendre une explofion
gutturale , qui s'opère vers la racine de la langue ,
parce que le mouvement n’en devient fenfible que
vers cette région : les enfants au contraire , pour
■ qui, faute d’habitude, il eft très-difficile doperet
allez promptement ces vibrations longitudinales de U
I langue , en élèvent d'abord la pointe vers les dents
■ ... o. Tv1„c I n in : ainfi . ils lublh