
felle n’avoît pas encore été allez occupée, du foin
de laifïèr à la poftérité une jufle idée de fà grandeur.
Les adions les plus brillantes , les évènements
les plus mémorables, étoient oubliés ou
couroient rifque de Fêtre, parce qu’on negligeoit
d’en confàcrer le fouvenir fur le marbre & fur le
bronze. Enfin on voyoit peu de monuments publics,
& ce petit nombre même avoit été jufques là comme
abandonné à l’ignorance ou à l’indiforétion de quelques
particuliers.
Le roi regarda donc comme un avantage pour
la nation Fetablifièment d’une académie qui tra-
vailleroit aux infcriptions , aux devifes, aux médailles
, & qui répandroit, for tous ces monuments,
le bon .goût & la noble fimplicité qui en font le
véritable’ prix. Il forma d’abord cette compagnie
d’un petit nombre d’hommes choifis dans Yaca-
. demie françoifo, qui commencèrent à s’alTernbkr
dans la bibliothèque de M. Colbert, par qui ils
recevoient les ordres de Sa Majefté.
Le jour des afîèmblées n’étoit pas déterminé ;
mais le plus ordinaire, au moins pendant l’hiver,
étoit le mercredi, parce que c’ étojt le plus commode
pour M. Colberi , qui s’y trouvoit prefque
toujours. Eri été ce minïftre menoit fouvent les
académiciens à Sceaux, pour donner plus d’agrément
à leurs, conférences , & pour en jouir lui-
même avec plus de tranquillité.
On compte entre les. premiers travaux de l a-
cadémie le fojet des deffins des tapifferies du roi,
tels qu’on les voit dans le Recueil d’eflampes & de
defcriptions qui en a été publié.
M. Perrault fut enfoite chargé en particulier de
la' defoription du Car r ou fol ; & après qu’elle eut
paffé par l’examen de la compagnie, elle fut pareillement
imprimée avec, les figures.
On commença à faire des devifos pour les jetons
du Tréfor royal ’ desParties cafoelles , des Bâtiments,
& de la Marins; & tous les ans on en donna de
nouvelles. , .
Enfin on eetreprit de faire par médailles unie
hifloire foivie des principaux évènements du règne
du roi. La matière étoit ample & magnifique,
mais il étoit difficile de la bien mettre en oeuvre*
Les anciens-, dont il nous relie tant de médailles ,
n’ont laiffé for cela d’autres règles que leurs médailles
mêmes, qui jufques là n’avoient guère été
recherchées que pour la beaute. du travail, & etu-.
diées que par rapport aux conrioiffances de FHifo
foire. Les modernes, qui en avoient frappé un
grand nombre depuis deux liècles , s’étoient peu
embarrafies des règles ; ils n’en avoient fo iv i, ils
n’en avoient prefcrit aucune ; & dans les recueils
de ce genre , à peine jtroùvoit-on trois.'ou quatre
•pièces où le génie eût heureufement fopplée à la
méthode.
L a difficulté de pouffer tout d’un coup à fà perfection
un art fi négligé, ne fut pas la foule raifon
qui empêcha l’académie de beaucoup avancer fous
i l . Colbert Fhifloire du roi par médailles ; if appliquoît
à mille autres ufàges les lumières de la
compagnie. Il y faifoit Continuellement inventer ou
examiner les différents deffins de peinture & de
fculpture dont on vouloit embellir Verfoilles : en
y régloit le choix & l ’ordre des fiatues ; on y con-
foltoit ce qu’on propofoit pour la décoration des
appartements & pour l’embellifïèmcnt des jardins.
On avoit encore chargé Vacadémie de faire graver
le plan & les principales vûes des maifons royales,
& d’y joindre dès deforiptions. Les gravures en
étoient fort avancées & les deforiptions étoient
prefque faites , quand M. Colbert mourut.
On devoit de même faire graver Je plan & les
vûes des places conquifos, & y joindre une histoire
de chaque ville & de chaque conquête ;
mais ce projet n’eut pas plus de foité .que le précédent.
M. Colbert mourut en 1683 , & M. de Louvois
lui foccéda dans la charge de for-intendant dés
bâtiments. Ce miniflre ayant fo que M. l ’abbé Tal-
lemant étoit chargé des inforiptions qu’on devoit
mettre au deffous des tableaux de la galerie de
Ver failles , & qu’on vouloit faire paroître au retour
du -roi , le manda auffitôt à Fontainebleau où la
cour étoit alors , pour être exadement informé de
l ’état des chofos. M. l’abbé Tailemant lui en rendit
compte, & lui montra les infcriptions qui étoient
toutes prêtes. M. de Louvois le préfonta enfoite
au ro i, qui lui donna, lui-même l’ordre d’aller in-
ceffamment faire placer ces inforiptions à Verfàilles.
Elles ont depuis éprouvé divers changements.
M. de Louvois tint d’abord quelques affemblées
de la petite académie chez lui , à Paris & à Meu-
don. Nous l’appelons petite académie, parce qu’elle
n’étoit compolée que de quatre perforines, M. Charpentier
, M. Quinault, M. l’abbé Tailemant, &
M. Félibien le pere. Il les fixa enfifite au Louvre,
dans le même lieu où fo tiennent celles de l ’académie
françoifè; & il régla qu’on s’affemblerqit
deux fois la fomaine , le lundi & le fàmedi, depuis
cinq heures du foir jufqu’à fept.
M. de la Chapelle , devenu contrôleur des bâtiments
après M. Perrault, fut chargé de fo trouver
aux affemblées pour eri écrire les déKbératfons, &
devint parTà le cinquième académicien. Bientôt
M. de Louvois y en ajouta deux autres , dont il
jugea le focours très-néceffaire à Vacadémie |>our
Fhifloire du roi ; è’étoit M. Racine & M. Defpréaux.
Il en vint eijfin un huitième , M. Rainffant, homme
verfé dans la connoiffance des médailles, & qui
étoit directeur du cabinet des antiques de Sa JVLajefté.
Sous ce nouveau mïniflère, on reprit' avec ardeur
le travail des médailles de Fhifloire du ro i,
qui avoit été interrompe dans-lès dernières années
de M. Colbert. On en frappa plufieurs de différentes
grandeurs , mais prefque toutes plus grandes
que celles qu’on a frappées depuis ; ce qui^fait
qu’on les appelle encore aujourd’hui* au; balaneier ,
médailles de U grande hifloire» La compagnie commença
auffi à faire des devifos pour les jetons de
l’ordinaire & de l ’extraordinaire des guerres , for
lefquelles elle n’avoit pas encore été confoltée.
Le roi donna en 1691 le département des académies
à M. de Pontchartrain , alors contrôleur général
& foerétaire d’État ayant le departement de
la maifon du ro i , & depuis chancelier de France.
M. de Pontchartrain , né avec beaucoup d’efprit,
& avec un goût pour les Lettres qu’aucun emploi
n’avoit pu ralentir , donna une attention particulière
à la petite académie, qui devint plus connue fous
le nom ü Académie Royale des Infcriptions &
Médailles. Il voulut que M. le comte de Pontchartrain
fon fils fo rendît fouvent aux affemblées,
qu’il fixa exprès au mardi & au fàmedi. Enfin il
donna l’infpedioii de cette compagnie à M. l’abbé
Bignon, fon neveu, dont le génie & les talents
étoient déjà fort célébrés.'
Les places vacantes par la mort de M. Rainffant
& de M. Quinault , furent remplies par M. de
Tourreil & par M. l’abbé Renaudot.
Toutes les médailles dont on avoit arrêté les
deffins du temps de M. de Louvois, celles.mêmes
qui étoient déjà faites & gravées , furent revues
avec foin : on en réforma plufieurs ; on en ajouta
un grand nombre ; on les réduifit toutes à une
même'grahdeur ; & Fhifloire du roi fut ain-fi pouffée
jufqu’à l’avènement de monfoigneur le duc d’Anjou ,
fon petit-fils, à la.couronne d’Efpagne.
Au mois de foptembre 1699 , M. de Pontchartrain
fut nommé chancelier. M. le comte de Pontchartrain
fon fils entra en plein exercice de fà
charge de foerétaire d’État , dont il avoit depuis
long temps la forvivance ; & les académiciens demeurèrent
dans fon département. Mais M. le chancelier
, qui avoit extrêmement à coeur Fhifloire du
roi par médailles, qui l ’avoit conduite & avancée
par fos propres lumières , retint l’infpedion de cet
ouvrage, & eut l ’honneur de préfonter à Sa Ma-
jefté les.premières foires que l’on en frappa, & les
premiers exemplaires du livre qui en contenoît les
deffins & les explications.
L ’établiflèment de F académie des infcriptions ne
pouvoit manquer de trouver place dans ce livre
fameux, où aucune des autres académies n’a été
oubliée. La médaille qu’on y trouve fur ce fojet
repréfonte Mercure, affis & écrivant avec un fiyîe
à l’antique for une table d’airain : il s’appuie du
bras gauche for une urne pleine de médailles ; il y
en a d’autres qui font rangées dans un carton à fos
pieds. La légende Rerumgejlarumfides, & l’exergue
Academia Régla Infcriptionum & JS/umifmatum,
M. D C . L X 11I. lignifient que Y Académie Royale
des Infcriptions & Médailles, établie en 1663 ,
doit rendre aux fiecles à venir,un témoignage fidèle
des grandes, adions.
Prefque toute l’occupation de Y académie fo.mbloit
devoir finir avec le livre des médailles; car les
nouveaux 'évènements & les devifos des:, jetons de
chaque année n’étoient pas un objet capable d’oçcuper
huit ou neuf perfonnes qui s’affembloient
deux fois la fomaine. M. l’abbé Bignon prévit le?
inconvénients de cette inadion, & crut pouvoir en
tirer avantage. Mais pour ne trouver aucun obflaele
dans la compagnie, il cacha une partie de fos vûes
aux académiciens, que la moindre idée de changement
auroit peut-être aliarmés : il fo contenta de
leur repréfonter que Fhifloire par médailles étant
achevée , déjà même fous preffe, & que le roi
ayant été fort content de ce qu’i l en avoit vu , on ne
pouvoit choifir un temps _ plus convenable pour demander
à Sa Mai eflé-qu’il lui plût d’afsûrer l’état de
Yacadémie par quelque ade public émané de l’autorité
royale. Il leur cita l ’exemple' de Y académie
des Sciences -, qui, fondée peu de temps après celle
des Inforiptions par-ordre du ro i, & n’ayant de
même aucun titre authentique pour fon établiffe-
ment, venoit d’obtenir de Sa Majeflé un règlement
fîgné de fà main , qui fixoit le temps & le lieu de fos
affemblées, qui déterminoit fos occupations , qui
affûroit la continuation des penfions, &c.
La propofition de M. l ’abbé Bignon fut extrêmement
goûtée : on dreffa auffi tôt un Mémoire.
M. le chancelier & M. le comte de Pontchartrain
furent foppliés de l ’appuyer auprès du roi; & ils
le firent d’autant plus volontiers , que , parfaitement
inflruits du plan de M. l’abbé Bignon , ils n’avoient
pas moins de zèle pour l’avancement des
Lettres. Le roi accorda la demande de Facadémie,
& peu de jours après elle reçut un règlement nouveau,
daté du t6 juillet 1701,
En vertu de ce règlement , Y académie reçoit
des ordres du roi par un des foerétaires d’É tat,
le même qui les donne à Y académie des Sciences.
U académie efl compofoe de dix honoraires ,
dix penfionnaires , dix affociés, ayant tous voix
délibérative, & outre cela de dix élèves, attachés
chacun à des académiciens penfionnaires. Elle
s’aflemble le mardi & le vendredi de chaque fomaine
dans une des fàlles du Louvre , tient par
an deux afîèmblées publiques, î’une après la fàint
Martin, l’autre après la quinzaine de Pâques. Ses
vacances font les mêmes que celles de Y academie
des Sciences. Elle a quelques affociés eorrefpondànts,
foit régnicoles, foit étrangers. Elle a auffi, comme
Y académie des Sciences, un préfidem, un
vice-préfident, pris parmi les honoraires, un dire-
deur & un fous-diredeur, pris parmi les penfîon-
naires.
La claiîè des élèves a ét;é füpprimée depuis ,;££
réunie à. celle des affociés, Le foerétaire & le tré-
fo rie r font perpétuels , & Y académie, depuis fon renouvellement
en 170 t , a donné au Public plufieurs
volumes qui font le fruit de fos travaux. Ces
volumes-'contiennent, outre les Mémoires qu’on a
jugé à propos d’imprimer en entier, plufieurs autres
dont l ’entrait efl donné par lé foerétaire , & les
éloges’ des académiciens morts. M. le préfident
Durey de Noinville a fondé depuis quelques années
un prix littérairë, que Y académie diflribue tous