
404 C L A
les acceptions de ce mot renferment l'idée d’une,
convocation ou aflèmblée à part: ce mot lignifie
donc une diftindion de perfonnes ou de choies que
l ’on arrange par ordre félon leur nature, ou félon
le motif qui donne lieu à cet arrangement. Ain fi ,
on range les êtres phyfîques en plufieurs Clajfes,
les métaux , les minéraux , les végétaux , "Grc.
Voye\ C lasse. {Hiß. nat.) On fait auffi plufieurs
Clajfes d’animaux, d’arbres, de fimples, herbes, &c.
par la même analogie.
Claffe fè dit aufili des différentes faites des collèges
dans lefquelles on diftribue les écoliers félon
leur capacité. Il y a fix Clajfes pour les humanités,
& dans quelques collèges fèpt. La première en
dignité c’eft la Rhétorique : or en commençant à
compter par la Rhétorique, on defcend jufqu’à la
Sixième ou Septième ; & c’eft par l ’une de celles-ci
que l’on commence les études clajfiques. Il y a
deux autres Clajfes pour la Philofophie : l’une eft
appelée Logique ; & l’autre , Pkyfique. Il y a auffi
les écoles de Théologie , celles de Droit , & celles
de Médecine ; mais on ne leur donne pas communément
le. nom de Clajfe.
Il eff v ra i, comme on le dit , que Quintilien
•’eft férvi du mot de Clajfe en parlant des écoliers ;
•nais ce n’eft pas dans le même fèns que nous nous
fèrvons aujourdhui de ce mot. Il paroit, par le paf-
fage de Quintilien , que le maître d’une même école
divifoit fès écoliers en différentes bandes , félon leur
différente capacité , fecundum vires ingenii. Ce que
Quintilien en dit doit plus tôt fè rapporter à ce
qu on appelle parmi nous faire compoj'er & donner
des places : ita fuperiore loco quifque declamabat ;
ce qui nousdonnoit, dit-il, une grande émulation, ea
nabis ingenspaimez comentio : & c’étoit une grande
gloire d’être le premier de fà divifion , ducere
vero Claffèm multo pulcherrimum. Inft. orat. I. z.
xAu refte Quintilien préfère l’éducation publique,
faite compte il Ventend, à l’éducation domeftique
ordinaire. Il prétend que communément il y a autant
de danger pour les “moeurs dans l ’une que dans
l ’autre ; mais il ne veut pas que les Clajfes foier.t
trop nombreufès. Il faudroit qu’alors la Clajfe fût
divifee, & que chaque divifion eût un maître particulier
: Numerus objlat, nec eo mitti puerum volo
nbi negligatur ; fed neque proeceptor bonus majore,
f e turbâ quam ut juflinere eam poffit oneraverit.. . . . . . .
ita, numquam erimus in turbâ.Sedut fugiendæ fint
magnce fckolæ, non tarnen koc eo valet ut fugiendæ
fint omnino fcholæ ; aliud efl enim vit are eas,
aliud eligere. Ibid.
Ce chapitre de Quintilien eft rempli d’obfèrva-
tions judicieufos; il fait voir que l’éducation domestique
a des inconvénients , mais que l ’éducation
publique en a auffi. Seroit-il impoffible de transporter
dans l ’une ce qu’il y a d’avantageux dans
l ’autre ? L ’éducation domeftique eft-elle trop foli-
taire & trop languiflante ? faites fôuvent des aflèm-
blées des exercices , des déclamations, &c. Exci-
tap-da mens & auollenda femper ejl. Ibid, L ’édu**
c L A
cation publique éloigne-t-elle trop le s . enfants cftf
l’ufage du monde, de façon que , lorfqu’ils font hors
de leur collège , ils paroiffent auffi embarrafles que
s’ils étoient tranfportés dans un autre monde; exijti-
ment fe in alium terrarum orbem delatos (Pétrone) ?
faites-leur voir fôuvent des perfonnes raifonnables ;
accoutumez-les de bonne heure à voir d’honnêtes
gens , qu’ils ne fbient pas décontenancés en leur
préfénce : Affuefcant jam à tenero non reformidare
homines. Quint. Ibid. Faites que votre jeune
homme ne fôit pas ébloui quand il voit le fôleil ;
& que ce qu’il verra un jour dans le monde , ne lui
paroiffe pas npuveau : Caligat in fo ie , omnia nova
offendit. Ibid. L ’éducation publique donne lieu -à
l’émulation: Firmiores in Litteris profeclus alit
emulatio . . . . & licet ipfa vitium fit ambitio, fréquenter
tamen caufa virtutum ejl. Ibid. Neceffe eJE
enim ut fibï niniïum tribuat, qui f e nemini com~
parut. Ibid.
" Ce que dit Quintilien , dans ce chapitre fécond i
fur la vertu St la probité que l’on doit rechercher
dans les maîtres, eft conforme à la Morale la plus,
pure; & ce qu’il ajoute , dans le chapitre fuivant,
fur les peines & les châtiments dont on punit les
écoliers, eft bien digne de remarque. Il dit que
ce châtiment abat l’efprit : Refringit animum &
abjicit, lacis fugam- & tædium. dictât. Jam f i
minor in diligendis præceptorum moribus f u i t .
cura , pudet dicere in quæ probra nefandi homines
ifto cæiendi jure abmantur ; non morabor in parte
hac , nimium ejl qixod intelligiiur» Hoc dixijfe
fa tis ejl j in ætatem infirmam & injurioe obno-
xiam nemini débet nimium licere . . . . . . unie
caufas turpium faclorum fx p e exjlitijfe usinant
fa lfo jaclaretur. Ibid, z, & 5*
Cette obférvation de Quintilien lie peut ctra
aiijourdhui d’aucun ufàge parmi nous.
On ne peut rien ajouter à l’attention que les
Principaux des collèges apportent dans le choix des
maîtres auxquels ils confient l’inftrudion des jeunes
gens ; & les châtiments dont parle Quintilien ne
font prefque plus en ufage. Foyé\ C ollège..
‘( M - b u M a r s a i s . )
* CLASSIQUE , adj. {Gramm.) Ce mot fè dit
des auteurs que l’on explique dans les collèges; les
mots & les façons de parler de ces auteurs fervent
de modèle aux jeunes gens. On donne particulièrement
ce nom aux auteurs qui ont vécu du temps de
la république, & ceux qui ont été contemporains ou
prefque contemporains d’Augufte : tels font Térence,
Céfàr, Cornélius-Népos, Cicéron , Sallufte, Virgile,
HoracePhèdre, Tite-Live , Ovide, Valère-
Maxime, Vélleius-Paterculiis, Quinte-Curce, Juve-
nal,'Martial,&Frontin; auxquels on ajcnite Corneille-
Tacite , qui vivoit. dans le fécond fiècle, auffi. bien
que Pline le jeune, Florus, Suétone* & Juftin. ( M*
d u M a r s A ï s . )
ClaJJique fe dit auffi des auteurs même modernes
qui peuvent être propofés pour modèle par la beauté
c L A
Su ftyle. Tout é’crivain qui penfé fondement & qui
fait s’exprimer d’une manière à plaire aux perfonnes
de goût, appartient à cette claiïè : on ne doit chercher
des auteurs clajjiques que chez les nations où
la raifon eft parvenue à un haut degré de culture,
où. la vie fociaie & le commerce des hommes ont
porté l’entendement & le bon goût fort au defîùs des
fèns groffiers : ce n’eft que là que les hommes
commencent à trouver du plaifîr dans des objets
intelleduels & dans des fontiments délicats ; alors
ceux qui font doués d’un jugement & d’un goût
plus exquis, fo trouvent encouragés à confidérer
avec plus d’attention des objets qui ne tiennent pas
immédiatement aux fèns ; ils découvrent des rapports
plus déliés , que le vulgaire n’apperçoit pas :
un nouveau champ de plaifîr pour la fociété fè préfente
à leurs regards, & l’infinie variété des objets
rend cette fource iriépujfàble : le monde intellectuel
, les penfêes, les fontiments, forment pour eux
une nouvelle nature, un autre univers fécond en
évènements intéreffants , en heureufos combinai-
fôns , en vues riantes , & incomparablement plus
riche en plaifîrs que la nature groffière qui n’agit
que for les fèns extérieurs : celui qui a trouvé les
avenues de ce monde invifîble, porte avec foi tout
ce qu’il faut pour une converfàtion agréable & des
récréations honnêtes ; il développe dans le commerce
de la vie plufieurs* (cènes de ce monde-là:
il s’attire l ’attention, & un goût plus délicat commence
à fo répandre de tous côtés; on apprend à
eftimer des chofos que jufju’alors on n’avoit pas
même apperçues. On regarde ceux qui ont découvert
ces nouvelles fources de plaifîrs honnêtes,
comme les bienfaiteurs refpeétables de la fociété ;
l ’honneur qu’on leur rend redouble leurs efforts ;
ils font de nouvelles obférvation s for le monde
moral, & apportent tous leurs foins à communiquer
leurs recherches aux autres de la manière la plus
parfaite : le bon ton , la raifon, le goût s’intro-
duifont dans les fôciétés choifîes : les auteurs commencent
à paroître, & leurs ouvrages deviennent
clajjiques pour la poftérité , parce qu’ils font pui-
lés dans la nature même, dans la fource inaltérable
du beau & du bon.
On eft tenté de croire, que l ’homme n’a reçu
qu'un degré déterminé de fâgacité, pour pénétrer
dans la nature des objets moraux ; qu’il ne fâuroit
aller plus loin ; & que , dans-chaque nation , les
meilleures têtes ont atteint ce degré-là. Nous
voyons du moins que les écrits des hommes de
génie de tous les fîècîes & de toutes les nations,
plaîfènt partout où la raifon eft déjà parvenue à
peu près à ce dernier degré de culture : ce font la
les vrais auteurs clajjiques pour toutes les nattons
de la terre.
Mais chez un peuple dont la raifon rr’eft pas
encore cultivée au plus haut point , le meilleur
auteur qui s’y formera, fora applaudi , plaira,
deviendra célèbre parmi fès contemporains , &
çependant ne fera jamais auteur clajfique : ce droit
G L A 40?
n 'a p p a r t ie n t q u 'a u x m e i l l e u r s é c r i v a in s d e l a n a t io n
l a p lu s é c l a i r é e & l a p lu s p o l ie .
L a f îm p l e c u l tu r e d e l ’e n te n d em e n t , q u i n t
s ’ a t t a c h e q u ’a u x a b f t r a d io n s & à l ’ a n a ly f è d e s i d é e s ,
n e fo rm e p o in t d ’ a u t e u r clajfique ; i l n ’y e n a p*®
u n f è u l p a rm i l e s fo h o la f t iq u e s . U n e n a t io n q u i n *
s ’ a t t a c h e r o i t q u ’ a u x fo ie n c e s e x a d e s , n ’ e n p r o d u i s
r o i t a ù c ü n , & n ’ e n f e r o i t p a s m o in s d e p r o g r è »
d a n s c e s f o ie n c e s - l à . L ’e n t e n d em e n t clafjique, s’ i l
e ft p e rm is d e s’ e x p r im e r a in fi , n e s’ o c c u p e p a s
d ’ a b f t r a d io n s ; i l n ’ a n a l y f è p o in t l e s d iv e r f è s p a r t
ie s d e l ’ o b je t ; i l fa i t l ’ é n o n c e r d a n s to u t e fo n
é te n d u e a v e c é n e r g ie & f im p l i c i t é ; c ’ e f t u n t a b l e a u
b ie n f a i t q u ’ i l p r e f è n t e à l ’ im a g in a t io n : c e fo n t
p lu s tô t d e s o b fo r v a t io n s fin e s , q u i fo p p o f è n t u n
c o u p d ’oe i l p e r ç a n t , q u e d e s r a t io n n em e n t s e x a d s
fo n d é s f o r l e d é v e lo p p em e n t d e s id é e s : l e p e n f è u r
a b f t r a i t d i t p e u . e n b e a u c o u p d e p a r o l e s , p a r c e q u ’ i l
n ’ a e n v u e q u e l e p lu s h a u t d e g r é d e c e r t i tu d e : l e
p e n f è u r clajfq ue d i t b e a u c o u p d e c h o fo s e n p e u d e
m o ts ; i l e x p r im e p a r u n e f îm p l e r é f le x io n o u p a r
u n e c o u r t e f è n t e n c e , l e r é f o l t a t d ’ u n e lo n g u e &
p r o fo n d e m é d i t a t io n .
L ’ e fp r i t d ’ o b f è r v a t io n , c e t t e p r em iè r e q u a l i t é
d ’ u n a u t e u r clajfique n e s ’ a c q u i e r t p o in t p a r d e s
é tu d e s a b f t r a i t e s , & n e f è fo rm e p a s a u fo n d d ’u n
c a b in e t ; c ’ e f t d a n s f e g r a n d m o n d e , a u m i l i e u d e s
a f f a i r e s , & p a r l e c om m e r c e d e s h om m e s q u i f o n t
e u x -m êm e s d o u é s d e c e t a l e n t , q u ’ i l f è p e r f e c t
io n n e : l a f o c i é t é , c e l l e f o r t o u t q u i s ’ o c c u p e d&
g r a n d s o b j e t s , o ù to u te s le s fa c u l t é s d e l ’ e n t e n d e m
e n t fo n t m i fe s e n a é t io n & fo d é p lo ie n t a v e c r a p i -
I. d i t é , o ù i l f a u t d ’ u n c o u p d ’oe i l em b r a f lè r u n e m u l t
i t u d e d e c o n f îd é r a t io n s , & p e n fo r f o l id em e n t fa n s
a v o i r l e tem p s d e r é f lé c h i r a v e c m é th o d e ; c e t t e
fo c ié t é e f t l a v é r i t a b l e é c o l e o ù T e fp r i t a c q u i e r t l a
f o r c e , l e c o u r a g e m â le , & l ’ a f tû r a n c e q u i fo rm e n t
u n a u t e u r claffrque ; i l n ’ y a q u ’ u n h e u r e u x g é n i e
q u i p u i f f è r é u f f i r fa n s c e f e c o u r s , & à q u i l a l e â u r e
d e s b o n s a u t e u r s p u i f f è te n i r l i e u d e to u t l e r e f t e .
O n r em a r q u e q u ’ e n to u t p a y s l e n o m b r e d e s
p o è t e s claffiques l’ a em p o r t é fu r c e lu i d e s b o n s p r e -
fo r e u r s ; l a r a i fo n e n e f t a i f é e à t r o u v e r r l e f e n t i -
m e n t & l ’im a g in a t io n fè d é v e lo p p e n t lo n g t em p s
avant l ’ e n t e n d em e n t & l ’ e fp r i t d ’ o b f è r v a t io m A in f i *
c e s p r em iè r e s fa c u l t é s f è p e r f e & io n n e n t p lu s tô t c h e z ,
u n e n a t io n , q u e l e s ta le n t s q u i f o p p o f è n t l a p e r f e c -
t io n d u ju g em e n t . D e l à v i e n t , c o m m e C i c é r o n l ’ a
d é jà o b f o r v é , q u ’ i l e ft p lu s a i f é d e t r o u v e r u n g r a n d
p o è t e q u ’ u n g r a n d o r a t e u r . M u lto tamen pauciores
oratores quam poetæ boni reperientur. D e O r a t ,
L ( Cet article efl tir é de la Théorie générale d e s
B ea u x -a r ts de M . S u l ze r
E n la t in l ’ a d j e d i f Clajficus n’ a p a s l a m êm e v a l e u r
o u a c c e p t io n q u ’ i l a e n f r a n ç o is .
1®. Clajficus fè dit de ce qui concerne les flottes
ou armées navales, Comme dans ce vers de Properce3
(I I . =-8->
Aut canerem fi cuise claffica bella fng«*