
*ï 4 A B L
n’eft pas là la ptemière dénomination de SèS mots $
qu’ainfi, ils ne (ont pas le fùjet de la propofîtion,
pui (qu’ils (ont dans un cas oblique : or la vue de
l ’eforit qui a fait mettre le mot dans ce cas oblique,
eft ou exprimée par une prépojîtion^ pu indiquée
fi clairement par le fôns des autres mots de la
phrafe , que l’efprit apperçoit aifément la préposition
qu’on doit fiippléer quand on veut rendre
raifôn de la conftrudion. Ainfi, obfôrvez :
1. Qu’il n’y a point d! ablatif c^ù. ne fiippofe une
prépofition exprimée ou foufentendue.
2. Que dans la conftrudion élégante on fîipprime
fôuvent la prépojition, lorfque les autres mots de
la phrafe font entendre aifément quelle eft la pré-
pofition s qui eft foufentendue ; comme imperante
Cafard Augufio, Chriftus natus eji : on voit ài-
fément le rapport de temps, & l’oniôufènfendfub.
Que lorlqu’il s’agit de donner raifôn de la
conftrudion, comme dans les verfions interlinéaires
, qui ne font faites que dans cette vu e , on doit
exprimer la prépojition qui eft foufentendue dans
le texte élégant de l’auteur dont on fait la conftrudion.
4. Que les meilleurs auteurs latins ,• tant poètes
qu’orateürs, ont fôuvent exprimé les prépofîtions
que les maîtres vulgaires. ne veulent pas qu’on
exprime , même lorlqu’il ne s’agit que de rendre
raifon de la conftrudion : en voici quelques exemples.
— — '
Sape ego cor rexi sub te cenfore libellos. Ov.
de Ponto,IV. ep. xij. v. 2$. J’ai fôuvent corrigé
mes ouvrages fiir votre critique. Marco sub judice
pâlies. Perfô , fat, v. Quos decet ejfe hominum ,
tali sub principe, mores. Mart. liv. I. Florent
$ub Cæfdre leges. Ov. II. Faft. v. 141, Vacareà
negotiis. Phæd. -lib. III. Prol. v, 2. Purgare à
fo ld s . Cato, de re rufticâ, 66, De injuria queri.
Cælâr. Super re quçri. Horat. Uti de aliquo. Cic.
U ti de viéïoriâ. Servius. Nolo me in tempore hoç
videat fenex. T er. And. ad* IV . v . ult. Artes exer-
çitationefque virtutum in omni atatè culta , miri-
fieos ajfemnt fruclus. Cic. de Sened. n. 9. Doctr
in e nulli tanta in illo tempore. Aufôn. Burd.
Prof. v. ~jr. 1 f . Omni de parte timendos• Ov. de
Ponto, Jib. IV. epift. xij. v. 2?. Frigida de to ta
fronte cadebat aqua. Prop. lib. II. eleg. xxij. Nec
jnihi foljlitium quulquam de noctïbus aufert. Ovid.
Trift. lib. V . eleg. x. 7. Templum de marmore.
Virg. & Oirid, Fivitur ex rapto. Ovid. Metam.
1. v. 144. Facere de indujlriâ. Ter. And. ad.. IV.
D e plèbe Deus ; un Dieu du cqjnmun, Ovid,
jWetam. lib. V . v. S9SLa
prépofition à fe trouve fôuvent exprimée dans
le s bons auteurs dans le même fôns que p o j l ,
après ; ainfi, lor(qu’elle eft fiipprimée devant les
ablatifs que les Grammairiens vulgaires appellent
abfolus, û faut la fiippléer , fi l’on veut rendre
«•aifôn de la conftrudion.
Cujus à morte hic tertius & tricefimus eji annus,
jCjc, Il v a trente-trois ans qu’il eft mort : à morte,
A B L
depuis ïâ moft. Surget, ab h is . folio. Ovid. IL
Met. où vous voyez que ab his veut dire, après
ces chofes, après quoi. Jam ab re divinâ., credo
apparebunt domi. Plaut. Phænul. Ab re divinâ :
après le fervice divin, après l’office, au fortir du
temple -, ils viendront à la maifôn. C ’eft ainfi
qu’on dit, ab urbe conditâ, depuis la fondation de
Home : à coenâ, après fôuper : fecundus à rege ,
le premier après le roi. Ainfi , quand on trouve urbe
captâ triumphavit i il faut dire, ab urbe capta ,
après la ville prifô. L e élis tuis litteris, venimus in
fenatum ; fuppléez à litteris tuis leélis ; après avoir
lu votre lettre.
On trouve dans Tite -L iv e , lib. IV . ab re malè
ge flâ, après ce mauvais fiiccès ; & ab re benè geftâ ,
L. XXIII. après cet heureux fiiccès. Et dans
Lucain, L. I , pofitis ab armis, après avoir mis
les armes bas; & dans Ovid. II. Trift. redeatfu--
perato miles ab hojle ; que le fôldat revienne après
avoir vaincu l’ennemi. Ainfi-, dans ces occafions on
donne à la prépofition à , qui fô conftruit avec
Y ablatifs le même fens que l’on donne à la prépofition
p o jl, qui fô conftruit avec Y accufadf. C ’effi
ainfi que Lucain au liv. II. a dit pofi me ducem ;
& Horace, I. liv. Od. xïypoft ignem atheriâ domo
fubduclum; où vous Voyez qu’il auroit pu dire, ab
igné atheriâ domo fubduclo y ou Amplement, igné
atheriâ domo fubduclo,
La prépofition fub marque auffi fort fôuvent le
temps : elle marque ou le temps même dans lequel
la cfiofe s’eft pallé'e , ou par extenfion, un peu
avant ou un peu après l’évènement. Dans Corn.
Nepos , Att. xij. Quod jub ipfâ profcriptione per-
j illujlre fu it ; c’eft à dire, dans le temps même de
la proscription. Le même auteur à la même
vie d’Atticus, dit, fub oçcafu f o l i s , vers le
coucher du fôleil , un peu avant le coucher du
fôleil. C’eft dans le même fôns que Soétone a (dit*
Ner. 5. majejlatis quoque , fub excejfu Tiberii y
reus y où il eft évident que fub excejfu Tiberii *
veut dire vers le temps , ou peu de temps avant la
mort de Tibère. Au contraire, dans Florus, liv*
III. c. 5 • fub ipfo hojlis recejfu,, impatientes fo li ,
in aquas fuas refiluerunt : fub ipfo hofiis recejfu
veut dire, peu de temps après que Vennemi f e jù t
retiré; à peine l’enjiemi s’étèit-il retiré,
Servius, fiir ces paroles du V . liv. de l ’Enéid,
quo deinde fyb ip fo , obfôrye que fub veut dire
ik y pojl y après.
Claudien pou voit dire par Ydblatifabfoluygratus
feretur, te tejle, labor ; le travail fôra agréable
fôus vos yeux: cependant il a exprimé la prépo-
fîtion gratufque jèretur fub te tejle labor. Claud,
IV, Conft Honor.
A l’égard de ces façons de parler, Deo ducey
Deojuvante , Mufis Javentibus, &c. que l ’on prend
pour des ablatijs abfolus y on peut foufôntendre la
prépofition fub ou la prépofition eum , dont on
trouve plufieurs exemples : fequerehac,mea gnatay
cum dits volentibus, Plaut. Perfô, Tite-Live, an
ABL
Ü v . I. Dec. iij. dit : agite cum dits bene juvantibus.
Ennius, cité par Cicéron , dit : doque volen-
tibus cum magnis dus : &■ _Caton au chap. x iv .
de Ke ruft.'dit:circumagi cum divis. - . fi
. Je pourrois rapporter plufieurs autres exemples,
pour faire voir que les meilleurs auteurs ont exprimé
les prépofîtions , que nous difons qui-lont
toufentendues dans le cas de l’ablatif abfolu. S agit-
il de rinfîrument ? c’eft ordinairement cum , avec ,
qui-eft fôufôntendu, armis confligere ; Lucius a dit,
acribus inter fe cum armis confligere cernit.Sa.git-
Ü de la ,caufô , de,l’agent? Suppléez trajeclus
enfe , percé d’un coup depee. Ovid. V.
Faft. a d it, P eclora. trajeclus Lynceo Lajior ab
enfe : & au fôcond livre des Triftes, Aleve pere-
grinis tantum defnddr ab armis. c '
Je finirai cet article par un pafiage de Suetone ,
qui fômble être fait exprès pour appuyer le fônti-
ment que je viens d’expofôr. Suetone dit q^Au-
gufte, ‘pour donner plus de clarté à fôs expreffions
avoit coutume d’exprimer les prépofiions, dont la
fuppreffion, dit-il , jette quelque forte d’obfcurite
dans le difcours , quoiqu’elle en augmente la grâce
& la vivacité. Suéton. C. Aug. n. 86. Voici le
pafiage tout au long. Genus eloquendi fequutus e f
clegans & temperatum ; vitaiis fententiarum inep-
tü s , atque inconcinnitate, & reconditorum verbo-
rumy Ut ipfe dicit, fatoribus : præeipuamque çu-
ram duxit, fenfum animi quam npertiffime e x - J
primere : quod quo facilites ejfceret, aut necubi
lectorem vel auditorem obturbaret acmoraretury
ne que præp.ofitiones verbis addere, ne que conjunc-
tiones fapiüs iterare dubitavit, qua detrâcîa ajfe-
runt aliquid obfcuritatis , etfi gratiam augent.
Auffi a-t-on dit de eet empereur , que (à manière
de parler étoit facile & fimple , & qu’il evitoit^ tout
ce qui poüvoit ne pas fe préfenter aifement a 1 e f
prit de ceux à qui il parloit. Augufbi promta ac
profluens, qua decebatprih cipem , eloquentia fu it .
Tacit. '
Indivi Augujli epijlolisy elegantia orationis, :
neque morofa ne que anxia ; fed facilis hercle &
Jzmplex. A . Gell.
Ainfi , quand il s’agit de rendre raifôn de la conf-
truftion grammaticale y on ne doit pas faire difficulté
d’exprimer les prépofitions , puilqu Augufte
même les exprimoit fôuvent dans le difôours ordinaire
, & qu’on les trouve fôuvent exprimées dans
les meilleurs auteurs.
A Tégard du françois , nous Savons point
d'ablatif abfolu-y pui(que nous n’avons point de
cas: mais nous avons des façons de parler abfôlues ,
c’eft à dire , des phrafes où les mots, (ans avoir
aucun rapport grammatical avec les autres mots
de la proposition dans laquelle ils fô trouvent, y
forment un fôns détaché qui eft un incife équivalent
à une propofîtion incidente ou liée à une autre,
& 'ces mots. énoncent quelque circonftance ou de
temps ou de man ière, &c. la valeur des termes
& leur pofition nous font; entendre ce fôns dçtaçhé.
À B O i f
'Ën la t in , la vite de l’efprit qui dans les phrafes
de la conftrudion fimple eft énoncée par une pré-i
pofition, eft la caufô de Y ablatif, re confeclâ; ces
■ fieux mots ne font à Y ablatif qu’à caufô de la vu e
de l’eiprit qui confîdère la chofô dont il s’agit comme
faite & paliée : or cette vue fô marque en latin
par la prépofition à : cette prépofition eft donc
fôufentendue, & peut être exprimée en latin.
En françois, quand nous difôns cela fa i t y ce,
confidéréy vu par la Cour , Vopéra f in i , &c. nous-
avons la même vue du pafié dans l ’elprit : mai»
quoique fôuvent nous puiffions-,exprimer cette vu e
par la prépofition après, &c. cependant la valeur
des mots ifôlés du refte de la phrafe eft équivalente
au fôns de la prépofition latine..
O n peut encore ajouter que la langue françoifô
s’étant formée de la la tin e, & les latins retranchant
la prépofition dans le difôours- o rdinaire ces -phra fe s
nous (ont venues (ans prépofîtions , & nous n’avons
faifi que la valeur des mots qui marquent ou l e
pafié ou le préfent,' & qui ne font point fujets à la
variété des terminaifôns, comme les noms latins ;
& voyant que ces mots n’ont aucun rapport grammatical
ou de (ÿntaxe avec les autres mots de la
phrafe , avec ,le(quels ils n’ont qu’un rapport de
fôns ou de raifôn , nous concevons-aifément c e
qu’on veut nous faire entendre. [M . d u M a rs a ïs ) ,
(. H.) ABOLIR , ABROGER. Syn.
' A bo l ir fô dit plus tôt à l ’égard des coutumes ;
& Abroger , à l ’égard des lois. L e non-u(àge fuffit
pour Vabolition ; mais il faut un a â e pofitif pouc
Y abrogation.
L e changement de g o û t , aidé de la politique,
a aboli en France les. joutes, les tournois, & les
autres divertifiements brillants. De grandes raifôn s
d’intérêt, & peut-être même de bonne difeipline ,
.ont été' caufô que la pragmatique (andion a été
abrogée par le concordat.
Les nouvelles pratiques font que les anciennes
s'aboüjfent. L a puifîance delpotique abroge fôuvent
ce que l’équité avoit établi.
On voit l ’intérêt particulier travailler avec ardeur
à abolir la mémoire de certains faits honteux ;
mais le temps feul vient à bout de tout abolir y &
la. g loire & le déshonneur. L e peuple romain a
quelquefois abrogé, par pure haine perfônnelle , ce
que fes magiftrats avoient ordonné de bon & d’avantageux
à la république.
V a bo lition d’une religion coûte toujours du fàng;
& la v idoire peutn’être pas attachée, en cette oc-
cafion,' à celui qui le répand, le'perfôcuté triomphant
quelquefois du perfôcuteur : le!eft ainfi que.
le Chriftiamfine a triomphé du ^paganifine par le
martyre des premiers fidèles. L ’abrogation d’une
loi fondamentale eft fôuvent la caufe de la ruine
du prince ou du p eu ple, & quelquefois de tous les
deux. ( U abbé Gir a rd , ) V oye\ D é r ç g a t io n ^
ABROGATIOIfi