
\& A B H
vapeurs, dît Amplement : le malheureux e jl facr é.
Nous terminerons cet article par. la citation de
Ces vers agréables de Claudien, dans fon poëme
en l’honneur de Séréna , femme de Stilicon. « O !
» ma Mufè, d it- il, c’eft différer trop long temps
» à la couronner de ces fleurs, que ne terniront
» jamais ni-le fou fie glacé de Borée, ni l’haleine
» brûlante de la canicule , mais qui, toujours arro-
» fées des belles eaux du Permeflè, confèrvefcont
» éternellement tout leur parfum & leur éclat.
» Autour d’elles voltigent fans celle les A be ille s fà-
» crées, qui fè noürriflènt de leurs fucs, & en com-
» pofènt le miel qu’elles tranfmçttent aux fiècles
» à venir ».
SiJlorîbus illis ,
Quos neque frtgoribus Boreas , nec Sirius urit
ÆJlïbus , ceîernû fed verts honore rubentes
Tons aganippeâ permejjîus educat undâ ,
JJnde pia pafcuntur Apes , & prata legentes'
ZTranfmittunt feclis heliconia mella futuris.
( A r t , de l'É d it e u r ).
(N . ) ABHORRER, DÉ TESTER. Syn.
Ces deux mots ne font guère d’ufàge qu’au prêtent
, & marquent également des fèntiments d’a-
verfîon, dont l’un eft l’effet du goût naturel ou du
penchant du coeur , & l’autre eft l ’ effet de la raifbn
ou du jugement.
On abhorre ce qu’on ne peut fouffrir, & tout
ce qui eft l’objet de l ’antipathie. On détefie ce
flu’on défàpprouve & ce que l’on condamne.
L e malade abhorre les remèdes. Le malheureux
détefie le jour de fà naifîànce.
Quelquefois en abhorre ce qu’il fêroit avantageux
d’aimer ; & l’on détefie ce qu’on eftimeroit fi on
le connoiffoit mieux.
Une ame bien placée abhorre tout ce qui eft
baffe fie & lâcheté. Une perfônne vertueufè détefie
tout ce qui eft crime & injuftice. IfiJabbé Gir a rd ).
A B JE C T IO N , BASSESSE. Sy n .
Ces mots ne font fynonymes que lorfqu’ils marquent
l’état oùT’on eft , & la première de leurs
différences fè rencontre dans leur conftrudion avec
le mot d’ÉTAT , auquel on les joint fôuvent. La dé-
licateffe de notre langue veut alors que l’un ne
vienne qu’après , & que l’autre marche toujours
devant : ainfî, l’on d i t , état d’abjection, & bajfejfe
d’état.
L ’abjection fè trouve dans l’obfcurité où nous
nous enveloppons de notre propre mouvement, dans
le peu d’eftime qu’on a pour nous, dans le rebut
qu’on en fait, & dans les fituations humiliantes où
Ton nous réduit; la bafiejje fe trouve dans le peu de
îiaifiànce , de mérite , de fortune , & de condition.
La nature a placé des êtres dans l ’élévation, & '
d’autres dans la bajfejfe : mais elle ne place per-
lônn,e dans Y abjection ; l’homme s’y jette de fôn
$hoixj ou y eft plongé par la durete d’autrui, . »
ABL
La piété diminue les amertumes de l’état d\j$-
jection. La ftupidité empêche de fèntir tous les défà-
gréments de la bajfejfe de l’état. L ’éfprit & la grandeur
a’ame font qu’on fe chagrine de l’un & qu’on rougit de
l ’autre.
Il faut tâcher de fè tirer de la bajfejfe ; l ’on n’en
vient pas à bout fans travail & fans bonheur. Il
faut prendre garde de ne pas tomber dans Yàb-
jection ; le fàge ufàge de fa fortune & de fon crédit
en eft le plus sûr moyen.
Les fècrets refîorts de l ’amour propre jouent
fôuvent dans une abjection volontaire , & y font
quelquefois trouver de la fàtisfaéHon ; mais il n’v
a que la vertu la plus pure, qui puifle faire goûter
à une ame noble la bajfejfe de l’état. ( L ’abbc
G ir a rd . )
A B L A T IF , f. m. terme de Grammaire ; c’eft le
fîxième cas des noms latins. Ce cas eft ainfî appelé
du latin ablatus , ôté , parce, qu’on donne la te.r-
minaifôn de ce cas aux noms latins qui fönt le
complément des prépofîtions d , abfque > d e , e x ,
fin e , qui marquent extraction ou tranfport d’une
chofè à une autre : ablatus à me , ôté de moi : ce
qui ne veut pas dire qu’on ne doive mettre un nom à Y ablatif que lorfqu’il y a extraction ou tranfport ,*
car on met auflî à Y ablatif un nom qui détermine
d’autres prépofîtions , comme clam , pro , proe , &c.
mais il faut obfèrver que ces fortes de dénominations
fè tirent de l’ufàge le plus fréquent, ou même de
quelqu’un des-ufàges. C ’eft-ainfi que Prifcien, frappé
de l’un des ufages de ce cas, l ’appelle cas compar
a t if ; parce qu’en effet on met à Y ablatif Y un des
corrélatifs de la comparaifön : Paulus eft doclior
Petro ,* Paul eft plus lavant que Pierre. Varron
l ’appelle cas latin, parce qu’il eft propre à la langue
latine. Les grecs n’ont point de terminaifôn particulière
pour marquer Y ablatif : c’eft le génitif qui
en fait la fonction ; & c’eft pour cela que l’on trouve
fôuvent en latin le génitif à la manière des grecs >
au lieu de Y ablatif latin (a).
f (a)D’après ce détail, il ne réfultc qu’une notion vague-;
embaraffée, & même incomplecte de Y Ablatif. Car il ne
peut être vrai que l’ufage d’aucune langue ait deftiné une
même terminaifôn à des emplois differents & quelquefois
oppofés : ce feroit avoir introduit dans le langage l’incertitude
& l’équivoque, les deux vices les plus contraires aux
vues de l'inflicution de la parole, & les plus éloignés en
effet des fuggeftions fecrètes de la raifôn univerfélle, qui
dirige le langage dans tous les temps & dans tous les lieux.
Je dis donc que Y Ablatif eft un cas, qui , à l’idée principale
du mot décliné , ajoute l’idée accefloire de terme
conféquent d’un rapport indiqué par l’une dés prépofîtions
latines que l’ufage a deftinées à cette efpece de régime.
Quant à l’origine du nom Ablatif, telle que rafligne ici
M. du Marfais avec les autres Grammairiens, il eft clair
qu’on auroit pu, avec autant de fondement, donner à ce
cas un tout autre nom ; & M. du Marfais remarque lui-
même que Prifcien l’appelle cas comparatif. En effet, s’il
fe joint à abfque , fine ; il fe joint auflî à cum, qui a. un
Cens contraire : s'il détermine de, ex $ il détermine auflî pro.
Çft-îl croyable qu’on ait donné à ce cas un nom qui n$
ABL
ï t n’y a point d’ablatif en françois ni dans les
autres langues vulgaires, parce que dans ces langues
les noms n’ont point de cas. Les rapports ou vues de
l’efprit que les latins marquoient par les differentes
inflexions ou terminaifôns d'un même mot, nous les
marquons, ou par la place du mot, ou par le fècours
des prépofîtions. Ainfî, quand nos Grammairiens
difent qu’un nom eft à Y ablatif, ils ne le difènt que
par analogie à la langue latine ; je veux dire , par
l ’habitude qu’ils ont prifè dans leur jeuneffè à mettre
du françois en latin, & à chercher en quel cas
latin ils mettront un tel mot françois : par exemple
, fî l’on vouloit rendre en latin ces deux phrafès,
la grandeur de Paris, & j e viens de Paris ; de Paris,
fêroit exprimé par le génitif dans la première
phrafè, au lieu qu’il fêroit mis â Y ablatif dans la
féconde. Mais comme en françois l’effet que les
terminaifôns latines produifènt dans Tefpric y eft
excité d’une autre manière que par les terminaifôns,
il ne faut pas donner à la manière françoifè les noms
de la manière latine. Je dirai donc qu’en latin, dans
amplitudo ou vafiitas Lutetioe , Lutetioe eft au
génitif y Lutetia , Lutetioe, c’eft le même mot
avec une inflexion différente é Lutetioe eft dans un
cas oblique qu’on appelle génitifs dontl’ufàge eft de
déterminer le nom auquel il fè rapporte , d’en
reftreindre l’exteniîon , d’en faire une application
particulière. Lumen fo l is , le génitif jolis détermine
lumen : je ne parle , ni de la lumière en général, ni de
la lumière de la lune, ni de celle des étoiles, &c. je
parle de la lumière du fôleil. Dans la phrafè françoifè
la grandeur de Paris , Paris ne change point de terminaifôn
; mais Paris eft lié à grandeur par la précara&
érife quel’un de fes ufages , & qu’on n’ait pas eu l'intention
ou i’adreffe de le défîgner d’une manière qui lui
convînt par tout ? Je ne faurois le croire , & j’ofe oppo-
fer à l?opinion commune fut cette étymologie, une autre
conjecture , qui me paroît du moins vraifemblable.
Les grecs n’ont que cinq cas; 6c la langue latine , qui
n’eft primitivement qu’un dialeéte de la grèque, n’avoit
d’abord-que les cinq mêmes cas : infenfîblement il s’en
introduifit un fixième, qui eft abfolument propre aux
romains ; Ablativus proprius ejl romanorum , dit Prif-
cien (. lib. V. de Cafu.) Les latins divisèrent donc , en deux
cas de terminaifôns différentes, le feul cas qu’ils avoient
d’abord reçu, des grecs fous le nom de Datif. Celui des
deux cas auquel ils ont confervé ce nom , eft devenu un cas
adverbial, enfermant dans fa valeur celle de la prépoficion ,
dont le mot décliné eft alors complément : celui qu’ils ont
nommé Ablatif, eft devenu un cas complétif, c’eft à dire,
qui énonce Amplement le complément d’une prépofitiori
dont la valeur n’eft point comprife dans celle de ce cas.
Ainfî, après avoir fixé le Batif à une valeur adverbiale, ils
lui enlevèrent, par un léger changement dans la terminai-
fon , la valeur de la prépofition qui y étoit d’abord comprife.
Rien n’empêche donc de croire que cet enlèvement a
donné lieu à la dénomination d’Ablatif : car Ablativus ,
fîgnifie qui fert à enlever ; de là cafus ablativus, cas ou
terminaifôn qui fert à enlever la valeur de la prépofition
comprife dans le Datif. J’avoue que cette origine du mot
me paroît d’autant plus vraifemblable, qu’en peignant la
chofe telle qu’elle eft en effet, elle ne donne l’excl'ufîon à
aucun des ufages de ce cas, comme le faiç l’étymologie or-
dûuirc. ( Pote de M . B eauzêe ),
A B L " i f
pofîtion de , & ces deux mots enfèmble déterminent
grandeur ; c’eft à dire, qu’ils font connoître de
quelle grandeur particulière on veut parler : c’eft d«
la grandeur de Paris.
Dans la féconde phrafè, j e viens de P a r is, de lie
Paris à j e viens , & fert à défigner le lieu d’où je
viens.
U ablatif a été introduit après le d a tif pour plus
grande netteté.
Sanéfius , Vofllus , la méthode de Port-Royal, 8c
les Grammairiens les plus habiles , fôutiennent que
l ’ablatif eft le cas de quelqu’une des prépofîtions
qui fè conftruifènt avec-1’ablatif '; enfôrte qu’il n’ y a
jamais Yablatif qui ne fiippofè quelqu’une de ces
prépofîtions exprimée ou fôufèntendue.
A b l a t if abfolu. Par ablatif abfolu les Grammairiens
entendent un incifè qui fè trouve en
latin dans une période, pour y marquer quelque
circonftance ou de temps ou de manière, &c. & qui
eft énoncée Simplement par Y ablatif : par exemple ,
imperarue Coejare Augufio, Chrifius natus ejl
Jefùs-Chrift eft venu au monde fous le règne d’A u-
gufte. Coefar deleto hojlium exercitu, &c. Céfàc
après avoir défait l’armee de les ennemis, &c. im-
perante Coefare Augufio , deleto exercitu, fönt des
ablatifs qu’on appelle communément, abfolus ,
parce qu’ils ne paroiflènt être le régime d’aucun
autre mot de la propofition. Mais on ne doit fè fèrvic
du terme d’Abfolu , que pour marquer ce qui eft
indépendant & fans „relation à un autre : pr dans
toiis les exemples que l’on donne de Y ablatif abfolu ,
il eft évident que cet ablatif a une relation de
raifôn avec les autres mots de la phrafè , & que fans
cette relation il y fêroit hors d’oeuvre & pourroit
être fupprimé.
D’ailleurs, il ne peut y avoir que la première
dénomination du nom qui puifle être prifè abfolument
& direéfement ; les autres cas reçoivent une
nouvelle modification , &- c’eft pour cela qu’ils font
appelés cas obliques. Or il faut qu’il y ait une
raifôn de cette nouvelle modification ou changement
de terminaifôn ; car tout ce qui change, change par
autrui ; c’eft un axiome inconteftable en bonne
Métaphyfique : un nom .ne change la terminaifôn
de fà première dénomination , que parce que Fefprit
y ajoute un nouveau rapport , une nouvelle vue.
Quelle eft cette vue ou rapport qu’un tel ablatif
' défigne ? eft-ce le temps, ou la manière, ou le prix ,
ou l ’infiniment,, ou la caufè, &c l Vous trouverez
; toujours que ce rapport fera quelqu’une de ces vues
de l’efprit qui font d’abord énoncées indéfiniment
par une prépofition , & qui font enfûite déterminées
par le nom qui fè rapporte à la prépofition : ce
nom en fait l ’application ; il en eft le complément.
Ainfî, Y ablatifs comme tous les autres cas , nous
donne par la nomenclature l’idée de la chofè que
le mot fîgnifie ; tempore , temps, f i f t e , bâton ,
manu , main, pâtre, père , &c. mais de plus nous
; connoiflôns par la terminaifôn de Yablatifs que ce