
JD*ici bas détermine chofe, ici bas , eft pris
(ûbftantivemem.
Selon jes caprices divers , eft une manière de décider
: JeLon eft la prépofition ; fe s caprices divers ,
eft le complément de la prépofition.
Tout l’efforc de notre prudence
Ne, peut nous dérober au moindre de fes coups.
Tout Veffort de notre prudence, voilà le fùjet
complexe; de notre prudence détermine Veffort, &
le rend lu jet complexe. L 'effort de eft un individu
métaphyfique & par imitation , comme un tel homme
ce peut , de meme tout Veffort ne peut.
Ne peut dérober nous y & félon la Conflruclion
uficelle , nous dérober.
A u moindre, à le moindre; à eft la prepofi-
tion ; le' moindre eft le complément de la prepo-
fition.
Au moindre de fe s coups, au moindre coup de
fe s coups ; de fe s coups eft dans le fèns partitif.
Paillez , Moutons, paillez fans règle & fans fcience ;
Malgré la trompeufe apparence,
Vous êtes plus heureux & plus fagesque nous.
L a trompeufe apparence, eft ici un individu
métaphysique perfbnnifié.
Malgré : ce mot eft compofé del’adjeâif mauvais,
& du fübftantif gré y qui fe prend pour volonté,
goût • Avec le mauvais gré de , en retranchant le
de y à la manière de nos pères qui fùpprimoient
Souvent cette prépofition $ comme nous l’avons ob-
jfèrvé en parlant du rapport de détermination. Les
anciens difoient maugréy puis oh a dit malgréy maigre
moi y avec le mauvais gré de moi, cum me a mal a
gratiây me invito. Aujourdhui on fait de malgré
une prépofition : malgré la trompeufe apparence ,
qui ne cherche qu’à en impofor & à nous en faire
accroire , vous êtes au fond & dans la réalité plus
heureux &. plus fàges que nous ne le fouîmes.
Te l eft le détail de la Conflruclion des mots de
cette idylle. Il n’y a point d’ouvrage, en quelque
langue que ce puifle être, qu’on ne pût réduire
aux principes que je viens d’expofèr, pourvu que
l ’on connut les lignes des rapports des mots en cette
langue, & ce qu’il y a d’arbitraire qui la diftm-
gue des autres.
Au refte, fi les obfèrvations que j’ai faites pa-
roiffent trop métaphyfîques à quelques perfonnes f
peu accoutumées peut-être à réfléchir fur ce qui
fè pafle en elles-mêmes ; je les prie de confidérer
qu’on ne fâuroit traiter raifon nablement de ce qui
concerne les mots, que ce ne foit relativement a
la forme que l’on donne à la penfée & à l’ana-
lyfê que l’on eft obligé d’en faire par la néceftite
de l’Élocution, c’eft à dire , pour la faire pafler
dans l’efprit des autres; & dès lors on fe trouve dans
le pays de la Métaphyfique. Je n’ai donc pas été
chercner de la Métaphyfique pour en amener dans
une pontré^ étrangère ; je n’ai fait que montrer ce
qui eft dans l’efprit relativement au difcours & à
la néceflïté de l’Élocütion. C ’eft ainfi que l’anato-
mifte montre les parties du corps humain , fans y
en ajouter de nouvelles. Tout ce qu’en dit des mots ,
qui n'a pas une relation’ direéle avec la penfée' ou
avec la forme de la penfée ; tout cela , dis-je %
n’éxeite aucune idée nette dans l’efprit. On doit
connoitre la raifon des règles de l’Élocution , c’eft à
dire, de l ’art de parler & décrire, afin d’éviter les
fautes de Conflruclion, & pour acquérir l’habitude
de s’énoncer avec une exactitude raifonnable , qui
ne contraigne point le génie.
Il eft vrai que l’imagination auroit été plus agréai
blement amufée par quelques réflexions fur la fim-
plicité & la vérité des images, aufïi bien que fut
les expreftions fines & naïves par lefquëlles cette
illuftre dame peint fi bien le fentiment.
Mais comme la Conflruclion fimple 6* néeeffaire
eft la bafè & le fondement de toute Conflruclion
ufuelle & élégante ; que les penfées Les plus fu-
blimes auffi bien que les plus fimples perdent leur
prix, quand elles font énoncées par des phrafès
irrégulières ; & que d’ailleurs le Public eft moins
riche en obfèrvations fur cette Conflruclion fondamentale
: j’ai cru qu’a près avoir taché d’en développer
les véritables principes, il ne fèroit pas inutile
d’en faire l’application fîir un ouvrage auffi connu
& auffi généralement eftimé, que l’eft l’idylle
des moutons de madame Déshouliéres, ( M- Du
M a r s a ï s . )
* C O N T E , £ m. Littérature, Poéfie. L e Cfonte
eft à la Comédie ce que l’Épopée eft à la Tragédie ,
mais en petit, & voici pourquoi : l’aétion comique
n’ayant ni la même importance ni la même chaleur
d’intérêt, que l’a&ion tragique, elle ne fâuroit
nous attacher auffi long temps lorfqu’elle eft en fimple
récit. Les grandes chofès nous fèmblent dignes
d’être amenées de loin , & d’étre attendues avec une
longue inquiétude ;les chofès familières fatigueroienc
bientôt l’attention du ledeur, fi , au lieu d’agacer
légèrement fà curiofité par de petites fufpenfions ,
elles la rebutoient par de longs épifodes. Il eft rare
d’ailleurs qu’une action comique foit allez, riche en
incidents & en détails y pour donnér lieu à des descriptions
étendues & à de longues fçènes.
Ou l’intérêt du Conte eft dans un trait qui doit le
terminer : alors il fautaller au but le plus vite qu’il eft
poffible. Ou l’intérêt du Conte eft dans le noeud & le
dénouement d’une adion comique : alors le plus ou
le moins d’étendue dont il eft füfceptible, dépend
des détails qu’il exige ; & les règles en font les mêmes
que celles de l’Épopée : le Conteur doit décrire
& peindre , rendre préfènts aux yeux de l’efprit
le lieu de la fcène, la pantomime, les* moeurs,
& le tableau de l’adion ; mais dans le choix de ces
détails , il ne doit s’attacher qu’à ce qui interefte ou
la vraifèmblance bu la curiofité. On reproche à la
Fontaine un peu de longueur dans fès Contes.
Le Conteur fait auffi , comme dans l’Épopée, le
perfonnage
petfonnage de fpedateur , & il mêle fes réflexions
&.fes fèntimepts au récit de la fcène ; mais ce *qu il
y met du fien doit être naturel & ingénieux : avec
cela même le récit ne laifïèroit pas de languir, fi les
réflexions étoient trop longues ou trop fréquentes.
Le caradère du Fabulifte eft la naïveté , parce
qu’il raconte des chofès dont le merveilleux exige
toute la crédulité d'un homme fimple ,• ou plus tôt
d’un enfant. Je le fois voir dans 1 * Article F a ble.
Le fujet du Conte ne fuppofe pas la même fîmplicite
de caractère ; le Conte eft donc plus füfceptible que
l’Apologue des apparences du badinage, de la finefie,
& de la malice. . . ‘
La partie la plus piquante du Conte , ce font les
fcènes dialoguées : mais dans le dialogue preffé , les
dit-il & dit-elle revenoient à chaque réplique ; c’ étoit
un obftacle'importun, qu’on a trouvé moyen de lever
par une ponctuation nouvelle.
L ’unité n’eft pas âuffi févèrement preforite au
Conte qu’à la Comédie ; il a fur elle à cet egard le
même avantage que L’Épopée furlaTragedie : je veux
dire que l’adion n’eft pas obligée d’etre.auffi fimple,
& qu’elle n’eft pas alterne aux unités de lieu & de
temps. Mais un récit qui ne fèroit qu’un, enchaînement
d’aventures, fans cette tendance commune qui
les réunit en un point.& les réduit a l’unité, ce récit
fèroit un Roman &ne fèroit pas un Conte, (5 Tels,
font Gil-Blas & Don Quichote. ) L ’adion du Conte
de Joconde, & de celui de la Fiancée du roi de Garbe,
reflèmble en petit à l’adion de l’Odyffee ; & quant à
la moralité, quoiqu’on n’en fafle pas au Conte une
loi rigoureufè , il doit pourtant, comme la Comédie,
avoir fbn but, s’y diriger comme elle, & comme elle
y atteindre-: rien ne le difpeofe d’être amufànt, rien
ne l’empêche d’être utile ; il n’eft parfait qu’autant
qu’il eft à la fois plaifant & moral ; il s’avilit s’il eft
obfçène.
Marot, pour la naïveté & la bonne plaifanterie ,
fut le modèle de la Fontaine,
j Je n’en citerai qu’un exemple.-
Un gros prieur fon petit-fils baifoit
Et mignarcloit, au .matin, dans fa couche,
Tandis rôtir fa perdrix l’on fiiifoit.
Se lève, crache, émeutit, Si fe mouche.
La perdrix vire. Au fe l, de broc.cn bouche,
La dévora. Bien fa voie la fcience.
Puis, quand il eut pris fur fa, confcience
Broc de vin blanc, du meilleur qu’on élife,
Mon Dieu, dit-il, donnez-moi patience.
Qu’on a de maux pour fervir fainte Églife ! )
Mais après la Fontaine , qui eft le premier de nos
Conteurs en vers , comme le premier de nosFabulif-
tes , il n’éh refte qù’uji à citer : tous en ont imité ce
qu’il y avoit de plus facile, la négligence & la licence
; mais aucun n’en a eu la grâce, la précieufè
facilité , le naturel ingénieux : un fèul homme eft
peut-être fupérieur à lui en ce genre, c’eft l’Ariofte ,
parce qu’il a plus de chaleur, ae coloris , & d’abon-
Ç ^ a m m . L î t t ï r a t , Tomel, Partie
dance, & qu’à l’invention des détails , qui eft celle
de la Fontaine, il joint l’invention des (Ujets.
L e TafTe, dans un genre moins piquant, mais
plein de délicateffe , nous a laiflé un modèle parfait
de l’art de conter y dans une fcène de l’Armnte : on
entend bien que je parle de 1* Aventure de V Abeille.
Boccace a été le modèle des italiens, dans les Contes
en profè, comme l’Ariofte dans, les Contes en
vers. Le caraâère de Boccace eft 1 élégance , la fim-
plicité, le naturel, & le comique. Rabelais eft aufli
plaifant & il eft plus joyeux que Boccace. Platon di-
foit qu’en voyant Diogène , il croyoit voir Socrate
devenu fou : en lifant Rabelais , on croit voir un Philo
fop h e dans rivreffe. Les Anglois ont auffi leur la
Fontaine dans Prior, & leur Rabelais dans Swift; mais
ni l’un ni l’autre n’eft comparable aux Conteurs fran-
qois pour le naturel, la gaieté, & la naïveté piquante.
En générai, ce qu’il y a de plus précieux & de plus
rare dans l’art de conter, ce n’eft pas la parure des
grâces , mais leur négligence ; ce n eft pas le mordant
de la plaifanterie, mais la fineftè & fùrtout 1»
! gaieté. ' ,
! ($[ On ne s’attend pas à trouver dans C.iceron les
éléments de l’art de conter plaifâmment. Perfbnne
cependant n’en a parlé plus fâvamment que lui : Hoc
in generejiarrationis multa ineffe debet feflivitas *
confecta e x rerum varietate, animorum diffitnili-
tudine, gravitate , lenitate , fpe , metU y fufpicic>-
ne, defiderio , difjimulatione , errore, mifericordiây
fortunée commutationey infperato incommodo, fubita.
Icetitiây jucundo exitu rerum. De Inv. rhet. I. x j x .
B§H . . M. de Voltaire a réuffi dans ce genre leger comme
dans tous les autres ; & quelques écrivains modernes
s’y font exercés après lui,mais avec des fùccès divers.
Un. vrai modèle encore dans ce genre décrire ,
c’eft Hamilton, je ne dis pas^fèulement dans fès Contes
\ mais fingulièrement dans les Mémoires de
, Gramont : c’eft là qu’il faut prendre le ton de la bonne
plaifanterie ; & il n’eft guère poffible de conter
avec plus d’enjouement, de grâce, & de legerete.
($ Dans la converfàtion , ce qu’on appelle Conte
eft le récit bref & rapide de quelque chofe de plaifant.
Le trait qui termine ce récit doit etre, comme un
grain de’ fèl, piquant & fin. Un Conte de cette efpece
qui n’a point de mot, eft ce qu’il y a de plus infipide.
J ’ai vu Fontenelle écouter avec patience les plus
mauvais conteurs jufques au bout ; mais au bout, su
ne trou voit pas le mot pour rire , toute fà politeiie
ne pouvoit empêcher qu’on n’apperçut en lui un mouvement
d’humeur. Le mot du Conte n’eft pourtant
pas toujours ce qu’on appelle un bon mot ; c efl un
trait de naturel, de moeurs , de caractère, d originalité
, de vanité , de naïveté , de betifè , de ridicule
.en général. ,
' D e naturel. Un enfant s’étoit obftine toute la matinée
à ne pas vouloir dire a y la première lettre de
fon alphabet ; & on l’avoit fouetté pour cette obfti-
nation. Mad, J. le trouve tout en pleurs, & on lui
ep dit la caufe ; elle appelle l’e n fa n t le prend fuç>