plus de troupes réglées, ni en affez grand nombre pour une
entreprife de cette eipèce, dans laquelle il était queftion de
fubjuguer pour ainfi dire toute une ville, & une ville qui
avoit à fa tête un nombre prodigieux de Moines : auffi ce
Gouverneur prit le parti de la douceur, pour fe maintenir en
place jufqu’en 172 9.
L ’Hiftoire des Francilcains fait l’éloge de fon adminif-
tration, en difant qu’il gouverna avec toute là fagacité & la
prudence requifes ; s’il le fut comporté autrement, il n’eût
certainement pas été en fûreté pour fa v ie , ou au moins il eût
été excommunié. J’ai rapporté cet événement tel qu’il ma
été raconté à Manille par plufieurs peribnnes ; car l’Hifioire
des Franciscains fe tait fur tous ces détails, & on m’a alluré
qu’il n’y a pas encore long-temps qu’un des delcendans du
principal AifalTm ,étoit vivant à Manille, mais dans une
grande misère.
Le Gouverneur qui fut en 172 9 à Manille, eut encore
quelques ordres relatifs à cette affaire; mais ce fut fans
effet.
A cette époque, à 1 7 2 9 , finit Y Hifloire des Francïfcains.
Le Marquis d’Ovando gouvernoit en 1750 ; on dit à Manille
qu’il fut ferme, & qu’il contint allez bien la ville dans fort
devoir ; il mit le Galion d’Acapulco fur un très-bon pied ,
car avant lui les Manillois embarquoient leur eau dans des
outres ou dans des jarres qu’ils fuipendoient dans les haubans ;
ils manquoient iouvent d’eau, & étaient obligés d’avoir
recours aux pluies. Le Marquis d’Ovando fit faire des pièces
à;l’eau, & ordonna qu’on en embarquerait fuffilàmment pour
tout le voyage; il forma des rôles d’Equipage & mit tout
Je monde à la ration.; enfin, la navigation d’Acapulco fut
rrfffe fin- le pied de celle d’Europe.
Cependant ce Gouverneur, homme inftruit & de très-
bon fens, vouloit & opinoit pour qu’on abolît le commerce
d’Acapulco , comme étant contraire à la formation d’une
bonne Colonie aux Philippines, & je crois qu’il avoit raifon ;
mais il aurait dû y joindre la réformation de l’Inquifition,
& d’un nombre prodigieux de Moines de différens Ordres,
qui m’ont paru les deux plus grands obftacles au fuccès d’un
établiffement folide dans les Philippines.
M. Arandia entra au Gouvernement de Manille en 1 7 5 4
ou 17 5 5 ; ce fut un des plus fermes Gouverneurs que
Manille ait eu, on en parloit encore ainfi <Je mon temps;
ç’étoit un homme très-zélé pour le fervice du Ro i, & fingu-
lièrement attaché à la perfonne de Sa Majeffé; ce fut lui
qui mit les Troupes fur un pied où elles n’avoient point
encore été : avant lui, il n’y avoit à Manille aucune forme
de régiment ; les Soldats étaient nus pieds, mal vêtus & mai
nourris, &c. M. Arandia propolà à la Cour d’entretenir
toujours deux mille hommes de Troupes à Manille, & mifes
fur le pied de celles d’Europe; la Cour y confentit. C e fin
& rulé Gouverneur voyant ce qui était arrivé à deux
de,fes prédéceffeurs, dont l’un avoit été mis à l’Inquifition
& l’autre avoit été affaffiné, fut doux, facile & diffimuié,
IW,1 qu’il vit qu’il netoit point en état de faire tête aux
Manillois : il fdrma fans bruit Ion régiment, donna beaucoup
de crédit aux Troupes, les paya & les entretint bien ; les
Officiers, il fe les attacha, il n’avoit guère d’autre compagnie
qu’eux, les invitant toujours à fa table, foit les uns, foît
íes autres; enfin, lorfqu’il fe crut en état de réfifler à leurs