embarralfés que fi elle chaviroit fur une rivière, lâchant tous
très-bien nager; iis ont,1’adrefie de fe foutenir dans l’eau &'
de redrelfer la pirogue, qui ne fe redrelfe qu’en embarquant
beaucoup d’eau : pour la vider, ils le renvoient leur bâtiment
bout pour bout; les balancemens que cette manoeuvre communique
à la pirogue, font que l’eau s’échappe alternativement
par chaque bout ; lorlqu’ils ont mis ainfi la plus grande partie
de l’eau dehors, ils fe rembarquent comme iis peuvent, &
pour vider le refte de l’eau, ils fe fervent de leurs deux mains
ou de leur pagaye.
A Foulpointe, on voit très-peu de pirogues, & encore la
plus grande partie vient de la baie d’Antongil; les Noirs en
Ont une grande quantité dans ce pays-là, auffi ces peuples
font une efpèce de petit commerce à Foulpointe &àTamatave;
cela vient de l’abondance des beaux bois qui font à la baie
d’Antongil, au lieu qu’à Foulpointe & à Tamatave, il n’y a
pas de bois allez beaux, à moins qu’on n’allât un' peu avant
dans les terres.
Ce commerce de la baie d’Antongii, & pareillement de
l’île Sainte - Marie, confifte, comme du temps de Flacourt,
en hourites ( elpèce de feches ) . On prend beaucoup de ces
hourites dans ces cantons ; les Noirs les font enfuite boucaner,
en chargent des pirogues, & les portent dans le Sud jufqu’à
Tamatave, ou les habitans en font très-friands.
Les pirogues de ces Noirs font de deux fortes; les unes
d un fèüi tronc, plus ou moins gros ; ils les creufênt par le
moyen du feu, & les façonnent enfuite par les deux bouts :
j en ai vu de fort grandes, dans lelquelies 011 auroit pu tenir
quinze à vingt perfonnes fort à l ’aile,- & qui étoient capables
de porter le poids d’un tonneau ( deux mille livres ) : ces
pirogues, lorsqu'elles font bien faites, fe comportent très-bien
fur l’eau , & elles vont avec la vîtefîe d’un trait : l’autre elpèce
de pirogue eft faite de planches ; elles font beaucoup plus
grandes que les autres, puifqu’eiles peuvent porter quatre à
cinq tonneaux ( huit à dix milliers ). Il entre fept planches
dans la conftruétion de ces pirogues ; celle du fond eft la
moins large, elle fort pour ainfi Aire de quille; les fix autres
font pofées au-delîus de celle-ci, trois de chaque côté I elles
tiennent toutes enfemble avec des chevilles de bois miles dans
i’épaiiîeur des planches & attachées avec des écorces d’arbres;
ils mettent dans les coutures une étoupe, faite pareillement
d'écorce d’arbre, & ils enfoncent comme ils peuvent cette
étoupe avec un couteau , le tout fans brai ni goudron. J’ai
vu de ces pirogues qui étoient très-bien faites; elles font
toutes très-relevées par les deux bouts : celui qui eft deftiné
à fervir de proue, a une forte d’éperon qui eft d’une feule
pièce; on applique en outre des morceaux d’autres planches
pour façonner un peu ces deux bouts. :
Toutes ces pirogues, tant celles d’une pièce que celles de
planches, vont en diminuant un peu de largeur dans la partie
de l’avant ; en forte qu’elles font précilement le contraire de
nos Vaifteaux & Bateaux, plus larges de l’arrière que de l’avant.
Au refte, qu’ils aient raifon ou tort de les faire ainfx, ils
eft certain que dans une belle mer, ces-pirogues bien armées,,
fuf-tout celles d’une pièce, gagneront toujours de vîteffe nos
meilleurs canots ; & elles ne font point faites pour aller en
pleine mer; voici les dimenfions d’une de ces pirogues.
Longueur de la planche du fond, fervant de quille.. ..... ; / / r«t
Largeur.......................................... . . . . . i l lr
Cette planche eft pour airiil dire réduite à rien par les deux bout;,
n’ayant au pi us que deux pouces de largeur.