dans leurs montagnes; ii leur fait manger du boeuf & des
moutons, qu’ils élèvent en quantité dans ces montagnes.
Par cette defcriptioti, il n’y a perfonne qui ne juge que
les habitations de ces peuples ne foient de la plus grande
fertilité, & que M, Commerfon ne les ait vues; cependant,
neuf à dix pages après, l’auteur dit que ces montagnes où
demeurent ces Quimos, ont treize à dix-huit cents toifes de
hauteur; que fur les cimes de ces montagnes, les végétaux
fpontane's, comme le pin & le bouleau & beaucoup dautres,
ne font plus que des avortons, & pafient de la claffe des arbres
à celle des plus humbles arbufles, pour être devenus alpicoles.
Comment donc ces montagnes peuvent - elles fournir d’im-
meniès troupeaux de boeufs, de moutons, &c. fic en ’eft vers
les bas , dans les gorges, les vallons ,1 mais où ces Quimos
n’oient le montrer, habitant le plus haut des montagnes
( Commerfon, page 2. y 2 ).
M. Commerfon n’a point vu ces montagnes, fi ce n’eft
comme moi, de fort loin, c’eft-à-dire de quinze à vingt
lieues en mer environ ; car il ne paroît pas que ce Natu-
ralifte ait beaucoup plus avancé que moi dans l’intérieur des
terres ; il s’eft contenté de ce que quelques Noirs ont pu
lui répondre fur quelques queftions qu’il leur faifoit, &
qu ils n entendoient vraifemblablement pas ; & il conclut
que cette tradition confiante dans ces cantons , ainfi qu’une
notion généralement répandue dans tout Madagafcar -, de
1 exiflence aâuelle des Quimos, ne permettent pas de douter
qu au moins une partie des faits qu’il en rapporte, ne foit
véritable ( page 2 74 ). Mais il eft faux qu’il y ait au Fort-
dauphin aucune tradition de Pygmées aéluellement exiftans
à Madagafcar ; il eft également faux qu’il y ait une notion
généralement répandue dans tout Madagafcar, de i’exiftence
aéluelle des prétendus Quimos. Je fuis allé , comme M.
Commerfon au Fort-dauphin, & je n’y ai jamais entendu
parler de ces Pygmées, non plus que dans les autres parties
de Madagafcar, que j’ai vifitées' avec foin & fans aucun
préjugé: il y a même plus, j’ai vécu pendant près de fix ans,
tant à l’Ifle-de-France qu’à Madagafcar, au milieu de Marins,
de Supercargues, qui connoiffoient parfaitement Madagafcar;
d’interprètes même, qui avoient pénétré bien avant dans
les terres ; je leur ai fait mille & mille queftions fur les
efoèces d’hommes qu’ils avoient vus, & jamais je ne leur
ai entendu parler de cette race de Pygmées. Si la tradition
en étoit fi confiante au Fort-dauphin & la notion fi généralement
répandue dans tout Madagafcar, comme le prétend
M. Commerfon, j’en aurois entendu parler ; & • ce que
j’en aurois entendu dire , eût bientôt piqué ma curiofité
au point de faire les recherches néceffaires à bien conftater
lê fait.
M. Commerfon dit, pour appuyer fon opinion, que M.
le comte de Modave, ancien gouverneur au Fort-dauphin,
lui fit voir parmi fes efclaves, une femme Quimoftê, âgée
d’environ trente ans, & haute dé trois pieds huit pouces;
mais on remarque dans la defoription que l’auteur fait de
cet individu , que c’étoit un être de l’efpèce ordinaire, &
feulement contrefait par quelque caulê étrangère à celle qui
produit au Fort-dauphin une fi belle race d’hommes; phénomène
fort rare à Madagafcar , mais très-commun en
France.
Je remarquerai encore ic i , que la lettre de M. Commerfon
eft du 18 Avril 1 7 7 1 ; e r , je fuis parti de l’Ifle-
S ÎT ij