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excellent abri pour les Vaiffeaux, & on y mouille fort près
de terre par un très-bon fond.
La baie d’Antongil a douze à quatorze lieues de profondeur,
& huit à neuf d’ouverture & dè largeur.
Le cap Bélone en fait l’entrée à l’Oueit, & la pointe dê
Baldriclte avec l’île Bétrique , forme l’entrée à i ’Eft : les
terres font baffes de ce côté ; mais à mefure qu’on avance,
elles s’élèvent en formant plufietirs grandes chaînes de montagnes
; les plus élevées font dans le fond , & à l’Eft "d«
l ’île Marotte.
Les terrés à l’Oueft , & à l’entrée de la même Baie,
font plus élevées ; elles s’élèvent encore en avançant, &
forment plufieurs grandes chaînes de montagnes , qui vont
le joindre dans le fond de là Baie à celles de la partie de
i’E ft, en laiffant entr’elies & la mer un plat-pays magnifique
, d’une terre excellente, fans la moindre pierre , &
qu’une belle rivière arroie en allant mêler lès eaux avec
celles du fond de la Baie ; elle a à fon embouchure près de
cent cinquante toifes de largeur, c’eft-à-dire, qu’elle eft à
peu-près comme eft la Seine au Pont-neuf: je l’ai remontée
i’elpace de deux lieues; elle a dans cet efpace la même
largeur & même davantage dans quelques endroits, & renferme
quantité de petites îles fort agréables par leur verdure;
mais elle eft en même temps remplie de bancs de fable qui
la rendent incommode dans la làifon de la lecfierelîe ; la plus
grande partie de ces bancs , fur-tout encore iorfque là mer
eft baffe, eft à découvert ou à fleur-d’eau. Les pirogues
d’une pièce , qui tirent moins d’eau que les autres, ont de
la peine à s’en tirër, & les Noirs font. quelquefois obligés
de fe mettre dans l’eau pour traîner la pirogue; pour éviter
cet embarras, iis ont foin de ranger les bords, qui font
p r e f q u e par-tout très-profonds.
Dans le temps des pluies la rivière eft très-haute, & on
peut y naviguer en bateau.
M. de la Bourdonnaie, en 1 7 4 6 , remonta cette rivière
fix à fept lieues en avant, afin de chercher les mâts & les
vergues dont il avoit befoin pour, réparer. les dommages
que l’ouragan du 6 Avril avoit faits à fon Armée navale :
ce fut le long de cette rivière que defcendit tout cet attirail
de bois, avec lequel il fe mit en état d’aller dans l’Inde
chercher les Anglois, les battre & prendre Madras.
La mer, par fon flux , remonte fort avant dans cette
rivière ; mais je n’ai pu favoir jufqu’à quelle diftance de
fon embouchure : ce feroit une grande commodité fi on
s’établiffoit jamais dans un fi beau pays.
Les pointes des deux côtés de la rivière, à fon embouchure
, avancent en mer d’environ une encablure ( cent
toifes ou fix cents p ie d s ) , & ces. pointes couvrent &
découvrent dans les nouvelles & pleines Lunes: ces pointes
continuent encore de courir ' fous l’eau , en forme d arc de
cercle, pour fe joindre & former par ce moyen une barre
su-devant de la rivière; cette barre n’eft point dangereufe,
& on peut la paffer en tout temps; feulement, les bateaux
qui vont & qui viennent doivent faire attention à la marée,
s’ils font chargés, parce que de mer balle, il y a très-peu
d’eau fur la barre ; alors ils ne pourroient paffer.
Pendant la journée , Iorfque. le vent eft fo r t, la mer
brile & écume beaucoup fur la barre, mais .cela n’empêche
pas de la paffer dans de fimples pirogues; les 'Noirs ne fe
donnent pas même la peine de fe mettre à mi-canal, où il