» maifon & de leur famille ; les fuites en feroient donc nécef-
» fairement funefles à ces îles, pourfuit l’Arrêt, & peut-être
de'fagréabies à fia Majeflé » . . . . . L’Audience royale fe
réfervoit ici de rendre compte à Sa Majeflé de tout ce que
ces Vaiffeaux, pendant ces cinq ans, avoient apporté aux
îles Philippines ; elle finiffoit fon Arrêt ainfi : « Et afin que
» dans la fuite on évite un tel embarras , on notifiera aux
» Afiatiques qui font venus dans les deux Vaiffeaux, à la
» noble ville de Manille & au Commerce, que par la même
» raifon, s’ils reviennent à ces îles avec des Anglois, François
» ou Hollandois, ou toute autre Nation à qui le commerce
" eit défendu, quand même ces perfonnes ne feroient que
» paffagères., on procédera contre eux avec toute la rigueur
du droit, &c. » ;i
Je ne penfe pas qu’on n’ait jamais vu de pièce plus originale
que cet Arrêt; je le conferve, tel qu’il me fut donné
à Manille peu de temps avant mon départ, pour en faire
nfàge dans ma relation. On trouvera certainement fort étrange
qu’en 17 6 6 , dans un temps où il régnoit la plus grande
harmonie entre les Cours de France & d’Elpagne, 011 traitât
à Manille les François d’ennèmis,
L ’Audience royale foivoit en cela, à la lettre, l’Ordonnance
de 1 5 , quoique ce Tribunal n’ignore; pas que les
jehofes font bien différentes i aéluellement de ce qu’elles
. étoient en 1 dp 5.
Sans m’étendre davantage fur cet objet, je me contenterai
de faire, par rapport au commerce de Manille, lés réflexions
fuivantes. : Il efl évident, par la pièce dont je viens de rapporter
1 extrait , quà Manille* lés Elpagnols 11e veulent
point faire le commerçe de l’Inde, & ne veulent point que
d’autres
d ’autres le falfent. Les Oidoîs & le Gouverneur ne pouvoient
pas ignorer que le commerce de l’Inde efl fur un tel pied,
qu’il faut, pour le faire, avoir à la côté un Établiffement,
ou au moins une efpèce de comptoir, avec un ConfuI, des
Faéteurs, &c. pour payer, faire faire, & tenir les marchandifes
toutes prêtes pour le moment de l’arrivée des Vaiffeaux:
or, les Elpagnols n’ayant point, & ne pouvant même avoir
d’Êtabiiffement à la côte, il efl impoffible qu’ils tirent leurs
effets d’ailleurs que des Anglois, des HoUandois & des
François : les Arméniens leur en donneront bien à la Vérité;
mais pour cela, ils feront toujours obligés d’aller chez l’une
ou l’autre de ces, trois Nations ; car les Arméniens n’ont point
d’Établiffement à eux à la côte : iis font établis à Pondichéry,
mais fur-tout à Madras, où il y en a beaucoup ; or , fes
Elpagnols ne peuvent aller à Madras ni à Pondichéry. Les
Maures n’oferont jamais, fans le fecours d’Européens, paffer
les détroits de Malacca & du Gouverneur, pour aller chercher
Manille a 1 autre bout des mers de Chine ; ils ne s’expo-
feronî jamais feuls à traverfer ces mers qui font périlleufes
Si qu ils ne connoilfent point. Par quelle voie donc l’Audience
royale & fon Préfident veulent-ils avoir des marchandifes
de l’Inde 5
Manille ayant donc, par tous les moyens que je viens
d’indiquer, fes magafins pleins d’effets de l’Inde & de
Chine, elle en charge fes galions; & je vais dire comment fe
fait ce commerce; mais avant tout, je dois mettre devant
les yeux de mes ieéleurs, la manière dont George Anfon
dit qu il fe fait : « Ce commerce , dit-il , n’elt pas libre
pour tous les habitans de Manille ; il efl rellreint à certaines «
peifonnes, par plufieurs Ordonnances, à peu-près dans le «•
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