étoient encore a fiez élevés, pour en faire, avec bien' peti
4e travail, de très-bons retranchemens.
Le temps étoit très-mauvais lorfque les Anglois firent leur
débarquement; & une place plus forte, mieux pourvue, auroit,
peut-être pu s’oppofer avec avantage au débarquement ce,
jour-là; mais quelles forces ne faudroit-il pas fuppofer, pour
que Manille eût pu empêcher les Anglois de débarquer
.dans une Baie qui a près de trente lieues de tour, & où il
n’y a pas une toile de rivage où l’on ne puifîe débarquer
tout à fon aife l Ainfr, quand même les Anglois eufiënt
trouvé des forces capables de les arrêter ce jour-là, parce
qu’elles auroient été favorifées par les circonflances du
mauvais temps qu’il faifoit alors, ils auroient effeélué leur
débarquement ailleurs & un autre jour ; car il eft impoffiblç
d’empêcher le débarquement dans la baie de Manille.
Il y avoit alors dans cette ville une Béate qui vivoit d’aumônes
qu’on lui envoyait de Mexico, ou qu’elle ramaffoit
à Manille : elle maintenoit & entretenoit un certain nombre
de filles ,, qui confentoient de fe retirer ayec elle & de
mener la même vie; c’eft-à-dire, une vie de retraite &.de>
pénitence : elles ne fuivoient aucun Ordre particulier. Cette
Communauté n’avoit point d’approbation de la Cour de
Rome; cela n’empêchoit pas qu’on ne la tolérât, & quelle
ne fût en très - bonne odeur : on la nommoit ( la madré
Paula) la mère Paul. Le Fifcal avoit beaucoup de confiance
en elle, & il fit tranlporter dans la maifon de cette fille la plus
grande partie de fes. effets ; cette Béate l’affura que Manille-
ne feroit pas prife; que les Anglois étoient tous allés pouf'
fe faire Catholiques, & qu’on ne tarderoit pas à voir l’effet
4e fa prédiélion. Le Fifcal la crut; il alla tout enthoufiafmé^
trouver
d a n s l e s M e r s d e l I n d e . 241
trouver l’Archevêque : Monfeigneur, lui dit-il en l’abordant,
nous n’avons rien à craindre ; je quitte la madré Paula; les
\'Anglois viennent tous fe convertir à la Foi : nous boirons
d’excellent vin à leurs de’pens.
Le' Journal pourfoit :
« A neuf heures du matin il entra dans la Baie une petite
galère qui venoit de l’embouchure de Saint-Bernard, appor- «
tant la nouvelle que le galion le Philippino étoit mouillé à«
Palapa, de retour de la houvelle Elpagne. L’efcadre ennemie «
détacha une frégate légère & quatre chaloupes armées qui «
donnèrent chaffe ,à la galère, & lui ayant envoyé quelques «
coups de fufils, elle fit côte à Tambobo : en même temps «
la plus grande partie du monde de cette galère, Soldats & «
Paffagers, fe jeta à l’eau. Les deux chaloupes la prirent. Le «
Capitaine, un fubaiterne qui manoeuvroit la galère, & quelques «
perfonnes qui étoient reliées à bord, furent faits prifonniers «
de guerre. Les chaloupes elîâyèrent de retirer la galère ; mais «
n’ayant pu y réuffir, ils en enlevèrent tout ce qu’ils purent, «
à l’exception de'deux canons de fix livres de balle qu’ils «
ne purent remuer; iis abandonnèrent alors la galère, & «
fe retirèrent vers leur efcadre. Le Capitaine général fit «
mettre le feu à cette galère, après qu’on en eut retiré les «
deux canons. »
La nouvelle que cette galère apporta, détermina les Anglois
à aller au-devant du Philippino ; ils détachèrent un Vaiffeau
de foixante - quatre & une Frégate de trente, q u i, au lieu
de rencontrer le Philippino, trouvèrent la Sainte-Trinité qui,
comme je l’ai dit, avoit manqué fon voyage, & qui après
avoir effuyé des tempêtes terribles , avoit été obligée d’arriver
& de gagner la terre : les Anglois prirent ce galion
Tome II. H h