II y avoit un boeuf attaché au pied du piquet ; on lui coupa
la gorge & puis Ja tête, qu’on alla planter au haut du piquet,
de façon quelle regardoit le Levant; elle devoit relier là jufqua
une nouvelle cérémonie. C ’eil ainfi que j’avois trouvé, l’année
précédente, un piquet à la baie d’Antongii avec une tête de
boeuf sèche. Après cette cérémonie, on coupe le boeuf par petits
morceaux & on le mange en réjouiiïànce, & en continuant
encore les folies une journée entière au moins.
II y a fans doute quelque myftère à cette tête de boeuf,
plantée au haut d’un long piquet; mais je n’ai pu en lavoir la
raifon. Je n’ai pas été plus fatisfait au fujet de ma curiofité à
rechercher l’origine & la caufe de la circoncifion chez les
Madecalîës : ces peuples n’ont aucune tradition.
Line petite fille de quinze ans environ , fort jolie, qui parloit
allez françois pour fe faire entendre, me dit au Fort-dauphin,
en préfence de la mère à qui je demandois la raifon de là circoncifion
, que lorfque les hommes étaient circoncis, ils en
étoient plus eflimés des femmes, & tpue ceux qui n étoient pas
circoncis, en étoient méprifés comme n’étant propres à rien.
Il me paroît, d’après d’autres queltions que j’ai faites à
d’autres femmes à Foulpointe & à la baie d’Antongil, que
cet ulàge, de quelque part qu’il leur vienne à Madagafcar,
étoit devenu nécelfaire parmi ces peuples, & qu’il étoit fou-
tenu par l’autorité du fexe; pnifqu’un Noir de Madagafcar,
du moins des contrées que j’ai- vues, qui ne feroit pas cir-
ioncis, ne trouverait point de femmes à qui fe marier ; elles
ne voudraient point de lui ; cependant, ces femmes ne font
pas fi difficiles vis-à-vis des Européens, quoiqu’incirconcisJ
elles fe marient très-volontiers avec eux, elles leur donnent
même la préférence.
A r t i c l e v i n g t - q u a t r i è m e .
De la Navigation des Madecaffes, ¿Y de la Monttoie en
ufage dans ce pays.
C e s peuples, on s’en doute bien, n’ont point de marine:
femblables à tous les peuples des îles de la mer de l’Inde, qui
11’ont que des pirogues ou des bateaux, ils ne s’écartent jamais
de la terre à perdre la côte de vue. Toute la navigation des
Madecaiiès le borne donc à aller le long des côtes & dans les
rivières ; ils mettent à terre tous les loirs, <5ç lorfque le mauvais
temps les furprend en mer, ils halent leur pirogue au plein:
dans ce cas-ci, ils fe réfugient quand ils peuvent dans une anie
ou derrière des roches, pour le mettre à l’abri.
Us n’ont aucune précaution dans leur navigation ; ils s’embarquent
très-bien dans une pirogue qui fait de l’eau, làns
porter avec eux de vafo pour la puifer : ils ont alors la confiance
de mettre à terre lorfque la pirogue elt trop pleine ; ils la
vident, après qu’ils l’ont déchargée, fi elle porte quelque choie;
puis ils la rechargent. L ’écoute de la voile, qui ell ordinairement
de pagne, eû amarrée au milieu d’un des bancs de la
pirogue; de cette façon, ils ne changent jamais les écoutes:
le vent foui manoeuvre ; loriqu’ii ell trop près fur un bord,
il fait tourner la voile à l’autre bord. Un grain, de grandes
raffales, ne font point capables de leur faire filer-1 écoute : il
faut de trois choies l’une ; que la pirogue fupporte fa voilure,
qu’elle fombre deflbus, ou que l’écoute fe caffe : auffi en
périt-il quelquefois. Il y a des Noirs qui font les voyages de
Foulpointe à la baie d’Antongil, & en reviennent ; p’eft un
très-long voyage que celui-là.
Si, une pirogue chavire en mer , ils ne font pas plus
C c c c ij