de précautions pour le faire revenir. Cette obfervation qui
eft: vraie, a toujours été le plan fur lequel s’eft conduit
M. de Laval dans fes Traites à Madagafcar, & M. de la
Fontaine au Fort-dauphin. Ces deux Officiers ont en effet
eu l’avantage de toujours bien fournir l’Ifle-c^-France de
vivres; & M. de Laval, en outre, approvifionna en 1759
M. d’Aché, qui avoit une elcadre de onze Vaiffeaux de
guerre.
Les habitans de Foulpointe & des environs font des Betfe-
mirac (qui jamais ne fe ieparent) ; en effet, quand quelqu’un
de cette Nation meurt hors de fon pays, il vont le chercher
pour l’enterrer dans fa Nation; ils le mettent dans une longue
boîte de bois ou efpèce de cercueil, & le portent en terre ;
& à l’endroit où ils l’enterrent, ils bâtiffent une cale qui
enferme le lieu de la fépulture du mort; à côté, ils plantent
un piquet plus ou moins long , avec une tête de boeuf
placée au bout d’en haut.
A Foulpointe ils fe contentent du piquet; ils ne bâtiflènt
point de cafe, parce qu’ils difent que nous avons l’inhumanité
de les détruire : c’eft un moyen de plus que nous
employons pour nous aliéner i’eiprit de ces Noirs.
11 eft à remarquer que tous ces villages que nous fréquentons,
& où nous allons commercer, le Fort -dauphin,
Foulpointe, &c. ne font point habités, à proprement parler,
hors le temps de nos Traites ; il n’y refte pour lors que
très-peu de monde.
Dans le temps de la Traite, les Noirs qui étoient retournés
dans les terres, viennent s’établir à Foulpointe , au Fort-
dauphin ; on ne manque pour lors de rien ; tout eft en
abondance comme dans nos foires & nos marchés en France:
mais fi vous avez le moindre démêlé avec eu x , qui en
©ffeniè u n , les offenfe tous : ils décampent dans une nuit;
vous ferez l’impoflible pour les retenir , il n’y aura pas
moyen ; alors Vous vous trouvez feuls, lôuvent fans vivres,
& fans reifources pour en avoir. Si les voies de fait font
en votre puiffance, & que Vous les employez pour vouloir
arrêter cette fuite, vous aggravez le m a l, Si vous aliénez
davantage les efprits.
■ Ayant à décrire les moeurs de ces peuples, & à tâcher
de faire revenir fur le compte de ces Infulaires, dont je
n’ai que des louanges à publier, je ne peux diffimuler la
manière dont nous en ufames avec eux au Fort-dauphin
en 1 7 6 1 . Il eft très-certain que fi les gens de cette contrée
en euflènt pu trouver le moyen , ils nous euffent tous
exterminés, fans doute moi-même avec tous les autres,
quoique, ni ces Nègres, ni moi, euflions à nous plaindre les
uns des autres, & quoique je n’eufle point lôufcrit aux aéles
de violence qu’ils nous reprochoient. Nous fumes forcés dé
nous tenir continuellement fur nos gardes ; & je fus moi-
même obligé, vu notre petit nombre, d’être Militaire pendant
la nuit, après avoir été Aftronome le jour.
On me demandera quel fut le lujet de notre guerre avec
ces gens ! lé voici.
On avoit tiré du Fort-dauphin des reflburces infinies
pendant la dernière guerre ; le pays regorgeoit de nos objets
de traite, iur-tout de piaftres. On s’attendoit à l’Ifle-de-France,
en 176 1 , que la Traité de cette année feroit auffi abondante
qu’elle i’avoit été les années précédentes ; nous y
arrivâmes, comptant fur une Cargaifon complète que nous
n’eumes point. Maimbou, c’étoit le nom du Roi de cette