& d’appâts quon leur avoit préfentés. Un de ces habitans.pour
prouver que l'anguille de fon baiïïn étoit la plus grolTe de
toute f ille , dit un jour en ma préfence qu’il falloir la force
abfolue pour l’enlever.
Il n’y a guère que les Hollandois qui aillent aujourd’hui
a Jolo; ils l’appellent l'île des perles, & ils en ont tiré julqu’à
ce jour une prodigieufe quantité : ce qui loutient dans l’Inde
le prix de cette elpèce de marchandife, dont les femmes
font fi jaloufes qu elles en portent juiqu’aux narines, eft qu’en
peu d’années ces perles deviennent ternes 8c d’une couleur
jaunâtre fort fale ; il eft vrai que les Indiens favent les blanchir,
mais il faut convenir qu ils ne peuvent les rappeler à leur
premier luftre, à celui qu’elles tenoient de la Nature ; & à
la fin elles deviennent fi fales qu’on les abandonne pour
d’autres nouvellement pêchées ; c’eft ce qu’on m’a afluré à
Manille 6c à Pondichëry.
Les Elpagnols polîedoient encore autrefois plufiëurs des îles-
Moluques, 6c principalement l’île de Ternate, pour laquelle ils
ont eu beaucoup de démêlés avec les Hollandois : ils y avoient
un établjlfement 6c des- forces allez confidérables, mais enfin
Içs Hollandois la leur ont enlevée; ils avoient aulfi au nord
des Philippines, le long des côtes de Chine, l’île Fermole,
que les Hollandois leur enlevèrent aulfi, en forte que les
Elpagnols font réduits aux feules îles Philippines ; au refte, ces
îles mifes a profit feroient, comme je l’ai déjà dit, une feurce
inépuifable ,de riçheiTes : on en fera pleinement convaincu,
a .ce que je crois, fi 1 on veut fe donner la peine de lire
avec attention le Chapitre fuivant, principalement les articles
fur Je commerce.
C H A P I T R E
D A N A L E S E R S D E L’I N D E . 8 9
C H A P I T R E S E C O N D , De Manille.
A r t i c l e p r e m i e r .
Pofidon de M a n ille, ¿ r ' fa Defcription.
P a r 14 degrés environ cfe latitude boréale, en arrivant
aux Philippines par l’Oueft, on trouve une haute 6c grande
montagne appelée Marivelles ; 6c au Sud, une large 6c
vafte baie prelque ronde, de dix lieues environ de diamètre;
elle a trois lieues 6c demie d’ouverture. Une Ille, appelée
l ’île du Corre'gidor eft à l’entrée, à une lieue environ de
Marivelles, 6c forme deux palfes, que l’on nomme dans Voyt^ la Fîgi
le pays bocas ( bouches ) ; la palfe du Nord n’a pas moins
de trente bralfes de profondeur, l’autre n’en a pas plus
de vingt-trois,' 6c on y trouve un encrage entre le Cavallos
( cheval ) , 6c la Monja ( Religieufe ), deux petites Mes qui
font placées au milieu de cette paffe, 6c qui font éloignées
entr’eiles de cinq quarts de lieue au plus.
La pratique la plus ordinaire eft d’entrer 8c de lortir par
la paife du Nord, appelée bouche de Marivelles, à moins
que les vents 6c la pofition où eft le Vaiifeau, ne forcent
d’enfiler l’autre paife.
La baie de Manille eft laine par-tout, elle a dix-huit à
vingt braffes de profondeur, excepté à deux à trois lieues
des bords du rivage, où le fond n’eft pas fi confidérable:
en avançant dans i’E f t , on trouve une aifez belle rivière,
lafge 8c profonde, remplie d’îlots, appelée Pajjig; fon
embouchure eft à 14 degrés 34 minutes environ de latitude*
Tome S M