pour gagner la grande mer ; du refte il trouve dans ce
retard un avantage confidérable ; c’eft de prendre des Aicaldes
& des Religieux beaucoup de choies pour la nouvelle
Elpagne ; mais l’article le plus effentiel, eft d’épargner fes
proviftons , car il trouve des rafraîchi(Temens de toute
eipèce , fur - tout en légumes, dont il vit en partie ; & en
entrant dans la grande mer, au bout de cinq femaines de
navigation, le galion eft en auffi bon état comme s’il fortoit
du port de Cavité : ians cela , ce vaifleau aurait une route
beaucoup plus courte à fuivre ; ce ferait, en ibrtant de la
Baie, de prendre la bordée du Nord au lieu de- celle du
Sud, & de doubler le capBayador; dans ce cas, ilpourroit
fe mettre en mer plus tard qu’il ne fait. Cette route a déjà
été tentée dans le dernier fiècle; mais les Elpagnols font
revenus à l’ancienne: cependant on m’a écrit de Manille,
ces dernières années, qu’un galion avoit eu ordre d’aller
par cette nouvelle route : je ne fais pas ce qu’il en eft réfulté.
Le galion rentre à Manille dans le courant de Juillet; il fuit
la même route pour rentrer dans la baie, c’eft-à-dire , qu’ij
prend conuoiflànce de terre vers le cap du Saint-Eiprit, &
pourfuit fa route, au travers des îles, & c.
Il ne pourrait pas revenir par le cap Bayador, parce quç
la mouflon de •l’Oueft eft alors dans toute la force.
Il me refte encore une remarque à faire fur le voyage de
George Anfon, au lùjet d’une eipèce d’herbe ou de plante
marine que les Elpagnols trouvent avant que d’arriver à
Acapulco.
« Après ayoir couru, d it - if, 9 6 degrés de longitude,
» à compter du cap Efpiritu S.anto , on trouve ordinairement
» la mer couverte .¿une herbe flottante, que je conjeclure,
D A N S LES M E ES DE l ’ I n d e . 21 J
■ continue notre Auteur, devoir être une eipèce de poireau marin, «
par le nom de porra que lui donnent les Elpagnols ( f ) . »
Or, je remarque que le mot CaftiHan porra, ne fignifie
pas poireau; il veut dire majjite, & porraço lignifie coup de
majfue. II y a bien de l’apparence que l’auteur du V oy ag e,
ou celui qui l’a traduit en notre langue, ne favoit point allez
le CaftiHan, & qu’il aura cru que porra, par une efpèce de
reffembiance avec le mot françois poireau, en étoit en effet une
eipèce. Quoi qu’ii en fo it, l’auteur du Voyage n’a point vu
cette plante ; quant à moi, je donne ici un deffin dont
m’a fait prélent ie Père Don Eftevan Roxas y Me fo , en
m’afliirant que ce deffin eft exaélement conforme à fa porra,
c’eft-à-dire, à fa plante marine que trouve fe gafion avant
que d’arriver aux côtes, de Californie. Dans ce deffin, 011
voit^que la plante a en effet plus la forme d’une maflue que -
d’un poireau ; elle àvoit, félon la mefure qui en fut faite,
quarante braffes environ de longueur.
Ne fachant dans quel genre & quelle ^claffe placer cette
plante, je n’ai pas cru pouvoir mieux faire que de confuJter
M.Guettard, de l’Académie royale des Sciences, & voici
la note qu il ma donnée, & que les Naturalifies verront
ici avec piaifir fans doute.
Il a fait une phrafe latine pour cette plante, dans le goût des
Botaniftes ; il 1 appelle donc Fucus ramis ex tuberculo rotundo
txientibus, foliis planis-, profundè crenatis, pediculatis, pedi-
culis uno verfu difpofitis.
« Cette plante, continue M. Guettard, eft une efpèce
de celles qu on appelle en France du nom de varech, go'ëmon, «
& par les Botaniftes de celui de fucus ; eette eipèce eft «
( f ) Voyagé de George Anfon, liv. I I , p . H