Quelques jours avant la célébration du mariage, les gens
de la noce, parens & amis des deux parties, s’affemblent
pour faire une efpèce de grande ialle couverte de rameaux
afin que tout le monde puîfle tenir dedans ; ils y emploient
ordinairement trois jours. Les trois jours fuivans font employés
à célébrer la noce; ifs palfent ainfi fix jours en aifemblées,
au milieu de l’ivreife , des danfes & des chants. Enfin, rendus
de fatigues & de débauches, ils fe' couchent pêle-mêle, &
avec le plus grand défordre ? c’efl alors, difent les PP.
Religieux, que le diable moiiîbnne amplement & de toutes
façons. La plus grande vigilance dès Pères JVliniflres,
ajoutent-ils, n efl pas capable d arrêter ces défordres ; ils ne
peuvent y employer la force humaine, puifqu’elle n’eft point
en leur pouvoir; quoique, continuent - ils, on dût la leur
prêter pour extirper des abus fi pernicieux.
Les enfans légitimes ont part égale à la fucceffion ; à leur
défaut, les plus proches parens héritent; s’ils avoient quelque
enfant naturel d une femme libre , il avoit la troifième partie
de l’héritage du père ; les deux autres tiers étoient pour les
enfans légitimes, & au défaut de ceux-ci, l’enfant naturel
héritoit de tout. Cette Loi me paroît en effet dans la Nature,
& ces peuples, en cela, femblent être plus humains que la
Nation au centre de laquelle j’écris ees détails. Une autre
Loi très-fage que ces bifilaires fuivoient, & dont le contraire
ou l’oppofé fe voit chez nous , aux îles de France & de
Bourbon, étoit que les. enfans naturels de femmes efclaves
devenoient libres par la naiflânce ; la mère le devenoit aufïï.
A l ’île de France, l’un & l’autre refient efclaves, & j’y ai
vu , parmi les François (je ne le rapporte qu’avec une efpècç
d’horreur) des pères vendre leur propre enfant avec la mère.
Les
Les habitans des Philippines ont plus de naturel, leurs enfans
font tous libres : ceux-ci, iffus de femmes efclaves, n’avoient
à la vérité aucune part à la fucceffion du père ; mais on leur
donnoit quelques biens-meubles : il efl vrai que le tout étoit
à la dévotion ou libéralité des véritables héritiers.
Ils ont epcore l’ufage d’adopter, & voici comme la choie
fê pratique ; on donne pour cet effet une fomme en o r ,
& quoiqu’on ait fon père légitime, on relie adopté. Voici
Lavantage qu’ils y trouvent; fi l’enfant adopté furvivoit le
père adoptif, il retiroit de la fuccefTion la fomme qu’il avoit
donnée, plus une autre fomme égale à celle-là; mais fi le
père adoptif mouroit après l’enfant adopté, il héritoit de ladite
fomme d’or. Outre l’héritage provenant de l’adoption, fi le
père adoptif efl content de fon fils adopté & de fes bons
feryices, il a coutume d’améliorer fa part, en lui faifant
. préfent de quelques meubles ou d’efclaves , lorfquii en
avoit, en gratification de fon attachement & de fa fidélité:
fi le fils adopté devenoit au contraire ingrat, le père adoptif
l’émancipoit, & en lui remettant la fbmme dor quil avoit
donnée pour fon adoption, le contrat étoit annulle.
S ’ils avoient queiqu’enfant provenant d’adultère , il vivoit
avec la mère ; & en payant une fomme d’o r , félon la coutume
& l’ufage, à celui qui étoit lélë, l’enfant étoit légitime, & il
entroit dans fa fucceffion comme les autres enfans légitimes,
'mais il n’héritoit pas dans les biens de la mere; fi 1 adultère
n’avoît pas fatisfait à l’amende, l’enfant n etoit point
réputé légitime, & il n’entroit par conféquent dans aucun
partage d’héritages : au refle, ces bâtards ne fuccedoient point
au père dans les titres de famille, dans la nobleffe, ni aux
privilèges qui y étoient attachés : on les regardoit & on les
Tome IL K