cerfs; dans cette Ifle eft fort commun un petit oife.au qui
n’eft pas plus gros qu’une hirondelle, & qui fait fon nid
dans les rochers & récifs de la mer: ces nids, comme je
l’ai déjà dit, font d’un grand commerce en Chine. On les
apprête comme on feroit le fagou ; j’en ai mangé à Manille
en foupe à la place de pain ; ils avoient, étant apprêtés ainfi,
la confiftance d’une gomme détrempée, très-épaiffe : cette
efpèce de ragoût eft affez bon. La mer jette à Jolo beaucoup
dambre; on affure à Manille qu’avant que les Efpagnols
euiTent pris poffeffion de cette Ifle, les Naturels ne faifoient
pas de cas de 1 ambre, & que les pêcheurs s’en fervoient
pour faire des torches ou flambeaux, avec lefquels ils alloient
pêcher pendant la nuit ; mais qu’eux, Eipagnols, en relevèrent
bientôt le prix : ce fait n’a rien qui doive furprendre.
C e fut un Soldat qui reconnut le premier que cette elpèce
de poix étoit de l’ambre ; il en acheta un morceau qu’il eut
à fort bon compte; mais les Indiens ayant vu que ce Soldat
leur faifoit des inftances pour en avoir davantage, en haufl
ièrent le prix ; cette affaire étant venue aux oreilles du
Gouverneur, 1 autorité qu il avoit fur les autres, & l’avantage
dont il jouifloit en outre d’avoir plus d’argent, firent qu’il
augmenta confidérablement fa fortune en très-peu de temps.
La mer apporte l’ambre fur les côtes de Jolo, vers la fin
des vents d Oueft ou d’Aval ; on y en a quelquefois trouvé
de liquide ou comme en fufion, lequel ayant été ramaffé
& bénéficié, s’eft trouvé très-fin & de bonne qualité : je ne
rapporte point en détail ce que penfent les Naturels de Jolo
fur la nature de l’ambre, parce que toutes leurs opinions ne
m’ont nullement paru vraifemblables.
Selon les uns, 1 ambre n’eft autre choie que les excrément
d’un poiffon qu’ils appellent Gadiamina, plus grand & bien
différent de la Baleine ; qu’il croît au fond de la mer urf
arbre d’une grandeur démefurée, & qui eft fi aromatique
que la fange ou la vafe qui s’attache à fon pied, prend cette
vertu aromatique; que le poiffon Gadiamina fe nourrit de
cette fange, & que fes excrémens ne font que cette vafe
digérée; d’autres difent que l’ambre eft la réfine même de
cet arbre ; que ce poiffon la mange, mais que fon eftomac
ne peut la digérer, & qu’il la rejette.
On voit que toutes ces opinions ne font en effet que
fables ; mais ce qui eft très-fingulier , c’eft la quantité d’ambre
qui fe trouve for les côtes occidentales de cette Ifle, quoique
très-petite, puifqu’elle n’a que quatre à cinq lieues du Nord
au Sud, pendant qu’on n’en trouve point ou prefque point
à Mindanao, qui eft une Ifle très-confidérable en compa-
raifon de Jolo. On pourrait peut-être apporter de cette
différence la raifon foivante : Jolo fe trouve comme au milieu
de toutes les autres Ifles de ces mers, & dans le canal de
ces violens & furieux courans qu’on y reffent, & qui font
occafionnés par le refferrement des mers en ces parages ; & ce
qui fembleroit appuyer ces raifons, eft que l’ambre ne vient for
les côtes de Jolo que for la fin des vents d’Aval ou d’Oueft.
Un autre genre de richeife très-confidérable à Jolo, eft
la pêche des perles, elle fe fait à la fin des vents d’Aval ;
îorfoue ces vents tirent for leur fin , & avant que les autres
vents fe déclarent & prennent la place de ceux d’A v a l, il
fe fait un calme .parfait, & la mer eft alors fi tranquille dans
cette faifon, que l’on peut voir à une très-grande profondeur;
j’ai fort fôuvent vu très-diftinélement, en pareilles circonf-
tances, fur la côte de l’Eft de Madagafcar, les coraux &
madrépores à quarante & quarante-cinq pieds de profondeur.;