de Foulpointe fut rappelé à l’Iile-de-Franee en 1762 ; pour
fors Zanhare,' jufqu’alors errant & fugitif, penfa à fe rapprocher
de Foulpointe: cependant il n’ofoit trop le faire; &.
je penfe qu’il ne fe fioit point trop fur la parole qu’on lui
avoit donnée que fon ennemi ne retourneroit plus à Madagafcar
; il n’avoit outre cela qu’un très-foibie parti à Foulpointe;
mais enfin nous partîmes en 17 Ô3 , avec ordre de le rétablir :
la chofe pouvait être jufte ; mais elle étoit en même temps
très - difficile, & je fais qu’elle nous occafionna bien des
inquiétudes & quantité d’alertes.
M. de Laval, prudent & fage, fut trois mois à préparer
& à difpofer les efprits à Foulpointe, à Marouahomhé & dans
les autres villages des environs; Marouahomhé fur-tout,
qui étoit un village confidérable , indépendant , gouverne
par plufieurs Chefs, & qui formoit, par ce moyen,-une
efpèce de république, fut celui chez lequel M. de Laval
trouva plus d’oppofition ; cependant , à force de douceur,
de promeffes, de follicitations, de pourparler, il vint à bout
des Chefs , du moins il nous Je parut aiufi. Un autre Chef
très - puiffant, & qui balançoit le parti de Dian Zanhare,
vint auffi nous promettre qu’il prêteroit ferment de fidélité
entre les mains de Zanhare dès qu’il feroit arri vé ; mais nous
fumes que par fous-main il fomentoit toujours, & cherchoit
à retarder le retour de Z^anhare, que nous attendions pour
le 22 ou le 23. d’Qciobre : ce Chef cherchoit à gagner du
temps en traînant les. chofes en longueur, perluadé que la
faifon nous chaiforoit de Foulpointe, làns doute avant 1 arrivée
de Zanhare,. *
Lorfqu’on va à Madagafcar pour y paffer. cinq à fîx mois,
i ’ufage eft d’entourer ie quartier, où fon s’établit par unebonne
& forte paliffade de gros pieux, qui met hors d’infulte; nous
ne i’avions point fait en 1763 ; notre quartier étoit trop
étendu : nous dormions donc avec la plus grande tranquillité,
fur la bonne foi des habitans ; ii eft vrai que cette bonne foi
notis étoit connue. M. de LaVâi étoit très-aimé daiis ie pays ;
fon caraâère affable i’accompâgnoit par-tout, & il l’avoit au
milieu des Noirs de Madagáfcar : il avoit cru inutile d’occa-
lionner une dépenfe affez confidérable pour faire une paliffade ;
cependant s’il l’eût fait, que d’inquiétudes il fe fût épargnées
ainfi qu’à nous ? Il ne croyoit pas que les gens de Foulpointe
fuffent capables d’attenter à nos vies; ii favoit que ce peupie
étant devenu, depuis nos fréquens voyages chez lu i , en
quelque forte efclavé de plufieurs petits befoins, il s étoit
pour ainfi dire francilé, & qu’il avoit, par toutes ces raifons,
ie plus grand intérêt de nous ménager.
Cependant le 22 Oétobre au matin, la veille pïécifement
que nous attendions Zanhare, plufieurs femmes vinrent, en
grande confidence, nous avertir que ie C hef oppolë à Zanhare
étoit venu camper à trois quarts de lieue de nous, fous 1 apparence
trompeufe de fe ioumettré ; mais que dans la nuit il
devoit mettre ie feu à toutes nos cafes, & profiter du défbrdre
dans lequel l’incendie nous mettroit, pour nous égorger tous
s’il ie pouvoit : on nous avertit encore d’un autre côté, que
dans un grand palabie ( affemblée ) tenu à Marouahomhé,
quelques Chefs avoient propofé de- nous empoifonner, en
nous vendant de la volaille qu’ils empoifonneroient ; d’autres
proposèrent de prendre le parti le plus lûr, qui étoit de nous
égorger, ce remède leur ayant paru le feul ou unique qui put
empêcher le retour de Zanhare ; que par ce moyen ils gagne-
t'pient du temps; que deux des Chefs de ce village s étaient
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