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en lavant îes fables des rivières &des ravines; s’ils rencontrent
des pierres qui renferment de f o r , iis les brifent, íes réduifent
en pouifière, puis ils lavent cette pouffière comme ils font les
fables; par ces moyens ils tirent l’or en poudre ou en grains
très-fins , les mettant eniùite dans une elpèce de creufet, fait
iàns beaucoup de façons de têt de p o t, iis viennent à bout de
les réunir enfemble par le moyen du feu ; fouvent ils vendent
les paillettes elles -thèmes pour s’épargner la peine de les
jeter en moule : il eft vrai que ce genre de vie abrège les
jours de ces malheureux ; comme ils iont perpétuellement
dans l’eau, ils enflent & perdent bientôt la vie; outre cela,
les Moines difent qu’ils ont l’expérience que les Indiens qui
mènent ce genre de vie n’ont aucune inclination à fùivre
la vie chrétienne, & qu’ils donnent beaucoup de peines aux
Miniftres de Dieu & de fa dôélrine ; malgré cela, c’eft à
eux & aux Alcades que ces Indiens vendent leur or ; à Min-
danao, les Naturels s’y prennent de deux façons; mais
toujours en employant le lavage. Dans les endroits ou l’expérience
leur a appris qu’ils pourraient trouver ce précieux
métal, ils creufent jufqu’à ce qu’ils aient rencontré l ’eau ; ils
la puifent eniùite très-promptement, puis ils enlèvent autant
qu’ils le peuvent le premier fable dont ils tirent l’or ; il eft
plus facile de le tirer des rivières : pour cet effet ils ouvrent
des bouches dans les bords des rivières comme des eipèces
de bras ou de golfes ; les àvalaifons d’eau qui font très-
communes en ce pays, venant une fois à faire gonfler
les rivières, le courant entraîne une plus grande quantité
de terre qui entrant dans toutes les différentes bouches dont
je viens de parler, s’y dépofe par fon propre poids, ce qui
arrive principalement à l’or qui eft bien plus pelant.
P u
On tire -beaucoup d’or de la province de Cardga, mais
c’eft toujours en employant les moyens dont je viens de
parler, & c’eft ce qui fait préfumer que cet or vient des
montagnes qui font dans cette province, & qu’il fe forme
dans leur foin.
Jufqu’à préfent, les Efpagnols qui n’ont pu foumettre les
Naturels des montagnes, n’ont pas fait de grands progrès
dans la découverte des mines des Philippines; c’eft ce qui
fait que je ne puis aflùrer qu’il y en ait dans ces Mes. Cet
or, que les Indiens tirent des lavages, pafle prefque tout en
fécondé main chez les Religieux qui defiervent les cures des
provinces & chez les Alcades qui en fontenfuite. commercé;
iis changent des piaftres contre, & 011 m’a aflùré à Manille
que ce commerce étoit très-lucratif, & que les Alcades des
provinces s’enrichiiFoient confidérablement par ce feul moyen;
car aux Philippines l’argent feul femble être le figne repré-
fentatif de toutes les marchandifes, parmi lefquëlles for ma
paru être placé : en effet, aux Philippines on 11e connoît point
de monnoie d’or, tout l’échange fe fait contre de la monnoie
d’argent, on y vend l’or comme on y vend le fer,; à Manille ,
ce beau métal ne fert qu’au luxe, les habitans eh chargent
leurs habits & leurs carrofles dans un goût tout-à-fait baroque
& comique; les Gouverneurs feuls m’ont paru affez
aveugles pour ne s’en pas fervir, ils en rempfiflênt des bouteilles
ordinaires de verre, de pinte ou de ehopine, dans
l’idée flatteufe de repalfer en Europe avec cette attrayante-
iBorchaftdife ; mais par une fatalité fingulière attachée à la
perfonne des Gouverneurs des Philippines, iis ne jouifiènt
point de da fortune qu’ifs amaflent à Manilfe. H ri’y a; qu’un
feuf exemple, depuis plus de -deux cents, ans que la Cour
Tome II. — E