Ces repriiès des vents d’aval, s’appellent dans le pays
colla.
Chaque colla eft aflèz régulièrement précédée par des
tempêtes qui la détermine. Les Elpagnofs appellent tempêtes
( tempefladès ) , des orages qui durent une ou plufieurs
heures, pendant lefquelles il tonne & il ve.nte confidéra-
blement; & il pleut à féaux, pour me fervir de i’expreffion
Elpagnole : ces orages étant paffés, il fait fort beau temps.
En général, excepté pendant les collas ou vents d’aval,
les nuits foret tj'ès - belles à Manille , & prefque toujours
fins nuages. Au lever du Soleil, il fait encore le plus beau
temps du monde ; les montagnes paroiflènt très - nettes,.
feulement embrumées , comme fi elles étaient couvertes
d’un peu de fumée ; les matinées font auflî très - belles, à
quelques petits nuages près dont le Soleil eft rarement caché.
L ’atmolphère eft cependant quelquefois pénétrée de vapeurs,
qui, comme une gaze légère, enveloppent tout le ciel, fans
pour cela empêcher le Soleil de paroître & de chauffer
vivement.
Toute la partie de l’Êft où font les montagnes, à 1 j , 20
& même 25 degrés plus ou moins de hauteur, eft en même
temps & prefque’ toujours garnie de gros nuages, qui menacent
continuellement de venir couvrir Manille, & qui
relient cependant toujours fixés au même lieu, étant retenus
par les montagnes : le thermomètre ne marque que 22 à
23 degrés. En 1 7 6 8 , pendant les mois de Mai, Juin &
Juillet, qui forment quatre-vingt-onze jours,, je n’oblervai
que trois matinées de temps abfôlument couvert, ce qui
m’avoit fait concevoir les plus grandes elpérances pour l’ob-
fervatioh du paflàge de Vénus de l’année fuivante, parce que
la íortie devant arriver vers les p heures trois quarts, je n’avois
rien à appréhender des nuages qui couronnent l’horizon.
Les après-midi font bien plus inconftantes, & ne font pas fi
généralement belles ; il eft cependant rare que le Soleil iôit
toujours couvert, fi ce n’eft lorfqu’ii le trouve aux approches
de l’horizon, preique toujours garni de nuages.
Ainfi, c’eft à Manille comme à Pondichéry : on y voit
rarement coucher le Soleil dans la mouflon du Sud.
Pour donner une légère idée du temps qu’il fait dans
cette faifon, & des tempêtes qui précèdent ordinairement
les vents d’aval, je vais copier ici mon Journal mot pour
mot.
Le Juin.
Le temps a été des plus beaux & fins nuages jufqu’à environ
3 heures ; il fiifoit un petit frais de Sud-fud-eft : le thermomètre
a monté à 3 1 degrés ¿.A4 heures, orage dans le Nord-eft; il
challe dans le Nord-oueft, & pendant ce temps, nous avons eu à
Manille un beau Soleil.
Vers les 5 heures, le Sud a commencé à Ce garnir: au coucher
du Soleil, on voyoit dans cette partie un orage affreux, Lorfque le
Soleii fut couché, tous íes nuages prirent ia plus triile apparence;
ils ie chargèrent d’une couleur de cuivre fale & verdâtre ? & il
éclairoit en même temps à faire trembler ; enfin tout annonçoit le
temp^ le plus affreux : inienfiblement l’orage s’eil approché , &
depuis 7 heures ~ jufqu’à 8 heures, il a fait un temps épouvantable :
éclairs, tonnerres affreux, vents forcés & pluie des plus abondantes.
A 9 heures tout étoit diiiJpé; ie ciel étoit clair & net comme s’il
ne ie fut rien paffé.
Le I f Juin.
La journée a été très-belle ; pendant la matinée il fit un très-petit
vent d’Eft : l’après-midi, de Sud-elt & de Sud-fud-eft.
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