» ordinairement cinq à fix fois, & même jufqu’à dix & douze
» fois tout de fuite, & quelques Siamois prennent cela pour
» une marque du nombre des années quont ces animaux, en
» quoi fans doute ils n’ont pas raifon ; car nous avons fouvent
» ouï les mêmes crier, tantôt un plus petit tantôt un plus grand
» nombre de fois dans un même jour: cet animal fe retire
» ordinairement fur' les arbres & dans les maifons, ayant une
» dilpofition merveilleufe pour courir fur les branches & fur
les murailles les plus unies, &c. »
Il eft évident, par cette defcription, que le toco de Manille
eft le même animal que le toc-kaie de Siam, & ils ne
diffèrent que par le cri qui n’eft pas tout-à-fait le même;
mais premièrement je n’ai point entendu celui de Siam, &
il eft certain que le chacone de Manille entonne très-diftinc-
tement toco & non toc-kaie, à peu-près comme le cou-cou
entonne fon nom; en fécond lieu, les Auteurs elpagnols,
tels que celui dont j’ai rapporté ci-delfus 1 extrait, écrivent
tous toco: d ailleurs ne pourroit-il pas y avoir une petite
différence dans le cri de l’elpèce qui fe trouve à Siam & de
celle qui ië trouve aux Philippines?
On ne connoît cet animal ni à la côte de Coromandel
ni à Madagalcar, où il y a cependant beaucoup de Lézards
curieux, entrautres , le caméléon, dont j’ai vu quantité , tant
au fort Dauphin qu’à la baie d’Antongil. :
Le toco peut, fi l’on veut, tenir fa place dans l’Hiftoire
Naturelle, Ibus le nom de chacone, nom qu’if a à Manille
& que les Infulaires lui ont certainement donné. J’aurois
voulu que les PP. Millionnaires nous euflènt également donné
le nom que les Naturels du royaume de Siam donnent à cet
animal, car le mot toc-kaie me paroît évidemment franeifë.
U y a dans ces Ifles des Couleuvres de beaucoup d’elpèces,
dont on afliire que quelques-unes font venimeulès ; on aflùre
aufli qu’il y en a de fi grandes qu’elles font capables d’étouffèr
les plus grands Caïmans, ces Caïmans de trente pieds de
longueur, dont je viens de parler, en s’entortillant autour
d’eux ; c’eft un fait que je ne puis garantir. Enfin, il y a
tant d’elpèces d’animaux, qu’il faudroit peut-être un volume
exprès pour les décrire & les repréfenter.
A r t i c l e h u i t i è m e .
Des différens Peuples des Philippines ; ir conjeâures
fu r leur or igine.
Le s hiftoriens Caftilians réduifent à trois dalles différentes
les Habitans que les premiers conquérans Elpagnols
rencontrèrent aux Philippines en y abordant.
La première claflë étoit compofee de ceux qui gouvernoient,
comme Seigneurs abfolus ; ceux-là étoient policés dans leur
façon. La fécondé clalfe, étoit de Noirs montagnards &
barbares, qui habitaient comme des brutes fiir le haut, des
montagnes. La troifième efpèce n’ëtoit ni fi barbare ni fi
policée ; ceux-ci vivoient féparés des autres ; ils paroiflbient
aimer le commerce, & ils avoient aifez de penchant à fe
iailîer policer : cette elpèce d’Infolaires iùbfifte encore aujourd’hui
: on les trouve fur-tout à l’origine des montagnes,
furies bords des rivières; là, ils vivent de poifion, de fruits,
de’ femencés, &c. de chafle, traitent & commercent en cire
avec les Peuplades voifines.
Tous les hiftoriens Caftilians que j’ai confultés, préfoment
que les différens peuples qui habitent ces Mes, tirent leur
G i j